Conscience Nègre

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POLITIQUE


Les dinosaures africains s’accrochent au baobab


Un après le départ de Ben Ali le 14 janvier, les dinosaures africains, ces dirigeants au pouvoir depuis plus d’un quart de siècle, ont résisté à toutes les tempêtes de 2011 et sont toujours là. Mais que leur réserve l’année 2012?

En Afrique subsaharienne,  les révolutions du monde arabe ont secoué les cocotiers mais n’ont pas déraciné les baobabs. Mais rappelons que le nom de baobab vient de l’arabe « bu hlowdotibab » qui signifie « fruit aux nombreuses graines ». Et il n’est pas exclu qu’en 2012 les graines des révolutions arabes trouvent dans l’Afrique au sud du Sahara un terreau fertile…Deux dirigeants se disputent en Afrique le titre peu envié de chef d’Etat en exercice depuis le plus longtemps au pouvoir: Teodoro Obiang Nguema (Guinée équatoriale) et Eduardo Dos Santos (Angola). Depuis août 1979 pour le premier, septembre 1979 pour le second. Il faut quasiment ouvrir un livre d’histoire pour savoir ce qu’il s’est passé cette année… Le monde vivait alors en pleine guerre froide,  le président américain Jimmy Carter était au pouvoir à Washington et surveillait du coin de l’œil le Soviétique Leonid Brejnev  à Moscou.

En Iran, la république islamique est proclamée. Le deuxième choc pétrolier plonge l’Occident dans une longue crise économique. Le président français Valery Giscard d’Estaing se prend les pieds dans l’affaire des diamants de Bokassa, le fantasque dirigeant centrafricain renversé la même année. Mais en attendant que l’Histoire dise son dernier mot, faisons un petit tour chez les derniers « dinosaurus africanus »:

Teodoro Obiang Nguema  (Guinée-équatoriale)

Assis sur une montagne de pétrodollars, le dirigeant de la petite Guinée équatoriale n’a pas vu son pouvoir contesté à l’intérieur du pays en 2011. Il est même devenu président de l’Union africaine, au grand dam des organisations de défense des droits de l’Homme, très critiques de son bilan en la matière. Arrivé au pouvoir grâce à un coup d’Etat qui a renversé son oncle, il a été élu en 1989, puis réélu en 1996, 2002 et 2009 (avec plus de 95% des voix) lors de scrutins toujours contestés. A 69 ans, il dirige toujours d’une main de fer cette ancienne colonie espagnole de moins d’un million d’habitants. En novembre, un référendum constitutionnel a été approuvé avec un score soviétique (97,7%) qui constitue un bon indicateur de la vie démocratique dans le pays. L’opposition compte un seul député au Parlement, Placido Mico. Les autres opposants sont en exil. La liberté de la presse est des plus restreintes mais les compagnies pétrolières font les yeux doux au troisième producteur d’or noir en Afrique subsaharienne. Le régime s’est lancé dans une ambitieuse politique de grands travaux et les groupes étrangers de BTP se frottent les mains. Business as usual.

Jose Dos Santos (Angola)

Les choses commencent à bouger en Angola. Bien sûr, ce n’est pas encore le grand vent qui a déraciné Ben Ali, Moubarak et Kadhafi. Mais la brise angolaise a ébouriffé le tout puissant José Dos Santos qui, depuis le mort du chef rebelle Jonas Savimbi, est quasiment sans adversaire de taille. Mais la rue gronde. Toute l’année 2011, des jeunes activistes ont défilé à Lunda pour demander plus de liberté et aussi un partage équitable du « gâteau pétrolier ».  Le pays devrait bientôt dépasser le Nigeria comme premier producteur africain d’or noir, les multinationales découvrent régulièrement de nouveaux gisements off-shore. Mais l’immense partie de la population reste d’une pauvreté scandaleuse. La société civile s’organise en contre-pouvoir, notamment autour du journaliste William Tonet, éditeur de l’hebdomadaire Folha 8. Le président Dos Santos a senti qu’il fallait lâcher du lest. Plusieurs fois repoussées, des élections générales (présidentielle et législatives) doivent finalement se tenir fin 2012. L’homme fort de Luanda devrait, à 70 ans, être candidat à sa succession.

Robert Mugabe (Zimbabwe)

« Bob » a réussi à se faire oublier en 2011, à quasiment disparaître des radars de l’actualité internationale. Mais il est toujours là. Robert Mugabe est arrivé au pouvoir en 1980, la même année que son homologue américain Ronald Reagan, décédé en 2004. On le dit malade, atteint d’un cancer de la prostate. Mais « Bob » s’accroche et épuise chaque jour un peu plus son opposant, devenu Premier ministre, Morgan Tsvangirai, qui a pourtant relevé l’économie d’un pays ruiné par une redistribution anarchique des terres au profit de la majorité noire. La cohabitation entre les deux hommes dure depuis deux ans et se passe de plus en plus mal. Des élections devraient avoir lieu cette année. Mais « Bob » estime que prendre sa retraite serait un « acte de lâcheté ». Les élections de 2008 avaient dégénéré en violences meurtrières, le pays était au bord de la guerre civile. Mais le président Mugabe n’en a cure. Mugabe répète qu’il vivra jusqu’à 100 ans et sera président jusqu’à sa mort. Il peut déjà compter sur le soutien de la puissante ANC (Congrès national africain) du voisin sud-africain, qui lui a promis de travailler à des stratégies électorales pour remporter la victoire. L’ANC,  dont la longue lutte contre l’apartheid est tout à son honneur,  n’est pas pressé de voir partir son « frère » Mugabe.

Paul Biya (Cameroun)

Le président Paul Biya est un homme discret. Il ne fait pas parler de lui à l’extérieur des frontières de son pays, n’est pas un leader d’opinion au sein de l’Union africaine. Il ferait presque oublier qu’il est arrivé au pouvoir en novembre 1982, soit un an et demi après l’élection historique de François Mitterrand en France. Le chef de l’Etat camerounais peut se targuer d’avoir survécu à son homologue français et surtout à son fameux « discours de la Baule » sur la démocratisation en Afrique. Et à 78 ans, il vient de se faire réélire en octobre avec plus de 77% des voix pour un nouveau mandat de sept ans. L’opposition a crié à la fraude. Mais Biya  a conservé son humour. « L’heure est à l’action », a-t-il lancé sans sourciller lors de son discours d’ouverture. Les 20 millions de Camerounais n’ont besoin de personne pour tirer le bilan de son long règne: pauvreté endémique (une personne sur quatre survit avec un euro par jour, un sur trois n’a ni eau potable, ni électricité), corruption quasiment plus élevée que le Mont Kilimandjaro et croissance économique atone. Et pourtant le Cameroun , avec son cacao, son pétrole, ses diamants et une population dynamique aurait pu être le pays le plus riche d’Afrique centrale. Les opportunités gâchées laissent toujours un gout amer dans la bouche.

Yoweri Museveni  (Ouganda)

Le président ougandais ferme cette marche de dinosaures africains, qui sont au pouvoir depuis plus de 25 ans. Et il s’est démené pendant l’année 2011 pour ne pas rejoindre ses homologues de Tunisie, d’Egypte et de Libye. Le printemps arabe a bien failli trouver dans l’Ouganda sa première terre d’accueil au sud du Sahara. Dès le mois d’avril, les premières manifestations contre le président et ex-chef rebelle Museveni ont eu lieu, avant d’être violemment réprimées. Bilan lourd : une dizaine de morts. Au pouvoir depuis 1986, le chef de l’Etat peut se targuer d’une forte croissance économique même si beaucoup de choses restent à faire pour en faire profiter tous les Ougandais. Mais il a la main de plus en plus lourde face à toute contestation et Amnesty International dénonce un régime de plus en plus répressif. Pour ne pas gâcher un bilan économique quelque peu flatteur, Museveni  ne devrait pas rater sa sortie et préparer sa succession.

Et Blaise Compaoré ?

Enfin pour fermer la marche des cinq dinosaures africains, une mention spéciale à un dirigeant hors concours mais qui a senti le vent du boulet en 2011, le Burkinabè Blaise Compaoré, contesté dans la rue comme dans les casernes. Au pouvoir depuis un coup d’Etat au cours duquel le capitaine Sankara a été tué, il entrera le 15 octobre 2012 dans le club des dinosaures africains…

Adrien Hart

 

Youssou Ndour peut-il devenir président du Sénégal?


Le célèbre chanteur sénégalais a annoncé le 2 janvier sa candidature à la présidentielle de février 2012. Peut-il succéder à Abdoulaye Wade? Youssou Ndour au Forum mondial de l'Economie Responsable le 20 novembre 2009 à Lille, en France. AFP/Denis Charlet

Cette fois, Youssou Ndour ne s’en est pas sorti avec une nouvelle pirouette. De celles dont est coutumier le chanteur de mbalax. Il a vraiment plongé dans le bain de la politique. Après des mois de tergiversations, Youssou Ndour a enfin annoncé sa candidature à la présidentielle de février 2012 au Sénégal. «C’était devenu un secret de polichinelle. A Dakar, tout le monde savait qu’il allait se présenter», estime Hassan, un étudiant sénégalais. Pourtant, nombre de ses compatriotes ne voulaient pas y croire. «Youssou Ndour commet une grave erreur. Que va-t-il faire dans cette galère. Il a arrêté ses études à l’école primaire. Avec un pareil C.V. quelle image va-t-il donner du Sénégal? Les Libériens n’ont pas voulu du footballeur Weah comme président pourquoi vondrions-nous d’un chanteur à la tête de l’Etat», s’exclame Khadiatou, l’une de ses fans qui préfère de très loin le voir se consacrer à son premier métier: la musique.

Un handicap de poids

Combien de Dakarois se disaient, «Youssou en parle, mais il n’osera pas franchir le pas, il a trop à perdre»? Pourtant sa décision ne surprend pas vraiment. A chaque fois que j’ai eu l’opportunité de l’interviewer, il a toujours laissé entendre qu’il n’hésiterait pas à se présenter un jour «si le pays avait besoin de lui». Ces derniers mois, il a donné l’impression de préparer le terrain. L'enfant de la Médina (quartier populaire de Dakar) a d’abord créé un parti politique «Fekke ma ci bolé» (Je suis là, donc, j'en fais partie, en wolof). Et il s’est inquiété d’une possible dérive monarchique du régime. Youssou Ndour a fait savoir qu’il n’était pas favorable à une succession héréditaire: à un Karim Wade qui succéderait à son père. En outre, il a expliqué publiquement qu’à son avis la Constitution ne permettait pas au président Wade de se représenter à la présidentielle. Dès lors que celui-ci a déjà effectué deux mandats (il est arrivé au pouvoir en 2000). Reste que pour se présenter à cette élection, Youssou Ndour, 52 ans, a un handicap de poids, comme il l’a expliqué lui même dans sa déclaration de candidature le 2 janvier sur les médias qui lui appartiennent, à savoir la radio RFM et la chaine TFM. «Il est vrai que je n’ai pas fait d’études supérieures mais la présidence est une fonction et non un métier. A l’école du monde j’ai appris, j’ai beaucoup appris. J’ai appris de mes voyages. Je peux diriger ce pays. Je suis l’alternative à l’alternance. J’ai les moyens de mettre le Sénégal au travail.» Pourtant aux yeux de bien des compatriotes de Youssou ce handicap pourrait se révéler rédhibitoire. «Le Sénégal se considère comme la patrie des intellectuels africains. La capitale culture de l’Afrique francophone», explique Almami Ba, un enseignant de la capitale.

La magie du verbe

Le premier président du pays, Léopold Sedar Senghor qui a régné de 1960 à 1980 était agrégé de grammaire, condisciple de Georges Pompidou à l'Ecole Normale Supérieure. Et bien entendu l’un des poètes francophones les plus en vue. Le normalien était un adepte des discours en… latin. Langue peu usitée au Sénégal. Il a également fait interdire un film du grand cinéaste Ousmane Sembène: l’orthographe du titre en wolof n’étant pas à son goût. Abdoulaye Wade, au pouvoir depuis 2000, a accumulé de nombreux doctorats. Il aime à se présenter à tort ou à raison comme le plus diplômé des Africains. Quoi qu’il en soit personne ne lui conteste une certaine culture générale qui peut parfois irriter. Puisqu’il entreprend régulièrement d’asséner des cours à ses homologues chefs d’Etats. Ses cours d’économie notamment ne sont pas les plus appréciés. Le Sénégal est loin d’être l’économie la plus florissante du continent. Mais tous reconnaissent à Wade une parfaite maîtrise de l’art oratoire en français comme en wolof. Une qualité «mitterrandienne» appréciée dans un pays où la magie du verbe est considérée comme une qualité essentielle. «On n’acceptera jamais un président qui ne possède pas cette qualité. Cette magie du verbe», explique Abdou, un commerçant de la banlieue dakaroise.

La politique est un «sport violent»

La perplexité des Sénégalais vient aussi de leur connaissance de la politique dakaroise. Au Sénégal, la politique est un «sport violent» où il y a beaucoup de coups à prendre, au sens propre comme au figuré. Certes la politique est moins «agitée» du côté de Dakar qu’à Lagos ou Kinshasa. Mais il n’en reste pas moins que maître Babacar Seye, vice président du Conseil constitutionnel a été assassiné en 1993. Et que ses assassins présumés ont été amnistiés par le régime Wade. A Dakar, Talla Sylla, un opposant de Wade a pris en 2005 des coups de marteau sur la tête dans un célèbre restaurant de la place. Un maire socialiste, Barthélémy Dias, a répliqué à coups de revolver en décembre 2011 alors que des hommes de main du régime attaquaient sa permanence. L’un des nervis a été abattu lors de cet affrontement «politique». Après qu’il a critiqué le régime, Youssou Ndour a connu, selon ses médias, un avant goût des pressions qui seront exercées sur lui… un contrôle fiscal particulièrement salé. Youssou Ndour est un chanteur adulé par plusieurs générations de Sénégalais. Dans ses concerts au Thiossane, la boîte de nuit qu’il possède à Dakar, toutes les générations se cotoîent. A ses concerts, il n’est pas rare de croiser, une grand-mère, une mère et ses filles. Ses performances vocales font salle comble en Afrique, en Europe, au Japon et aux Etats-Unis.  Au Sénégal, il possède un studio d’enregistrement et un groupe de presse prospère. Son quotidien, L’Observateur est le plus lu du Sénégal. Sa radio, RFM est la plus écoutée. Et sa jeune télévision TFM connaît des débuts prometteurs.

Alors bien des Sénégalais se demandent que vient-t-il faire en politique?

 «En Afrique, la politique est souvent perçue comme un moyen facile de s’enrichir. Alors pourquoi un homme déjà riche irait se mettre dans une pareille galère», se demande Aïcha, une admiratrice de Youssou Ndour.

Un rêve américain

Dès lors son entrée en politique peut aussi susciter des sentiments ambivalents: admiration ou suspicion. «Vient-il en politique pour mieux négocier avec le régime. Obtenir une licence de téléphonie mobile ou de nouvelles autorisations pour son groupe médiatique» se demandent des Sénégalais qui n’ignorent rien des qualités d’hommes d’affaires de Youssou Ndour. D’autres le soupçonnent de vouloir régler ses comptes avec le régime. «Il a peu apprécié que Karim Wade, le fils du président, tente de prendre le contrôle de son quotidien. Il lui a dit que si Karim Wade voulait un titre, il n’avait qu’à en créer un» explique un Dakarois qui a travaillé pour le groupe médiatique du chanteur. Quoi qu’il en soit la candidature de Youssou Ndour va compliquer la tâche du président Wade. Celui-ci affirme qu’il peut être élu dès le premier tour de la présidentielle. Mais la multiplication des candidatures rend cette perspective de plus en plus improbable. Même les journalistes entrent dans la danse: Latif Coulibaly, le plus célèbre journaliste d’investigation, s’est lui aussi porté candidat. Comme le souligne vieux Savané, autre grande plume de Dakar, il semble qu’au Sénégal tout le monde veuille devenir président. Ce constat déroutant peut être considéré comme un signe de vitalité démocratique. Les Sénégalais aiment à se comparer aux Américains. Dakar n’est-elle pas la terre la plus à l’ouest de l’Afrique? En face de l’Amérique. Dakar est peut-être devenue la terre de tous les possibles? Le pays où Youssou Ndour, un enfant de la médina peut s’imaginer à la présidence. Mais attention, il y a Amérique et Amérique. Pour justifier sa volonté de succéder un jour à son père, le fils du président Karim Wade avait invoqué la «jurisprudence américaine». George Bush junior après George Bush senior. Une comparaison qui ne lui a guère porté chance. Quelques jours plus tard, il perdait les élections de la mairie de Dakar. Et ses ambitions présidentielles se voyaient renvoyées aux calendes grecques. Youssou Ndour c’est un autre goût d’Amérique, celui-ci des self made men. Mais sera-t-il au goût des Sénégalais? Trop tôt pour le dire. A Dakar, Youssou a encore tout à prouver au monde politique. Savoir chanter c’est une chose. Danser dans le marigot politique, c’est un art qu’il va devoir maîtriser au plus vite. Au rythme endiablé du mbalax. Meilleur moyen d’éviter les croches pattes en tous genres.

Pierre Cherruau

 

Les chanteurs au pouvoir!


Youssou Ndour est candidat à la présidentielle sénégalaise. Et si l’on confiait le continent à des chanteurs?

Mise à jour du 3 janvier 2012: le chanteur-vedette sénégalais Youssou Ndour, 52 ans, a annoncé le 2 janvier qu'il sera candidat à l'élection présidentielle de février, dans une déclaration diffusée par la radio et la télévision de son groupe, Futurs Médias (TFM) à Dakar.

"Depuis très longtemps", de nombreux Sénégalais "ont, par divers moyens, appelé ma candidature à la présidentielle de février prochain. J'ai écouté, j'ai entendu, je réponds favorablement à votre requête. (...) Je suis candidat", a déclaré M. Ndour, également président d'un mouvement citoyen créé en 2010 et baptisé "Fekke ma ci bollé" ("Je suis là, donc j'en fais partie" en langue nationale wolof).

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Un pas de plus pour Youssou Ndour sur la route de la présidence du Sénégal: son avocat Mbaye Jacques Ndiaye a retiré, lundi 12 décembre, un dossier de candidature pour son client. L’interprète de Birima,  leader du mouvement Fekkee ma ci boole et patron du groupe de presse Futurs-Médias a prévenu qu’il se rendrait disponible pour la campagne présidentielle à partir du premier janvier prochain. Le magazine américain Forbes considère d’ailleurs que Youssou Ndour est la deuxième personnalité africaine la plus influente, tous pays et toutes générations confondus. Se muera-t-il en lutteur dans l’arène sénégalaise?… L’opinion africaine juge encore incongrue l’idée de voir un chanteur accéder à une aussi haute fonction politique. Si l’on fait traditionnellement vibrer la corde vocale dans les concessions des chefs africains, c’est pour les louer, pas pour sous-louer leur fauteuil. Entre chantre et chanteur politisé, il y a un pas que le griotisme ne semble pas prêt à franchir.

Hors du continent, pourtant, les musiciens ont tenté le pari du pouvoir depuis bien des années.  L’artiste de bossa nova Gilberto Gil chantait des titres engagés bien avant de devenir ministre de la Culture du président brésilien Lula da Silva de 2003 à 2008. En Australie, le leader du groupe de rock Midnight Oil, Peter Garrett, fut élu député du Parti travailliste, avant d’obtenir, en 2007, le poste de ministre de l’Environnement. En Grèce, les chanteuses Melina Mercouri et Nana Mouskouri ont été respectivement ministre de la Culture et députée au Parlement européen. Quoi de plus normal? Nombre d’artistes engagés transmettent des messages politiques. Au Sénégal, les rappeurs ne sont-ils pas en première ligne du mouvement Y en a marre? Youssou Ndour, avant d’être candidat, n’hésite pas à évoquer des sujets plutôt prosaïques comme les délestages électriques dans Leundeum gui, adaptation de Ob-La-Di Ob-La-Da des Beatles. Il serait délectable d’avoir un chef de l’Etat africain qui chante enfin correctement l’hymne national. D’ailleurs, les présidents ne nous servent-ils pas des “rengaines” avec de sempiternels “couplets” qui annoncent toujours les mêmes “refrains”? Ne sont-il pas un peu maîtres… chanteurs lorsqu’ils conditionnent certaines de leurs promesses à des petits arrangements?

Son Excellence Monsieur le Président de la République démocratique du Congo Koffi Olomide

Imaginons alors que les plus belles voix du continent briguent leur présidence respective. On pourrait imaginer une belle chorale de mbalax, rumba, bicoutsi et coupé décalé au prochain sommet de chefs d’Etat de l’Union africaine. Répétition protocolaire… - Son Excellence Monsieur le Président de la République démocratique du Congo Koffi Olomide… En se faisant surnommer “Sarkozy”, Mopao a déjà libéré ses fantasmes présidentiels. Et le “Quartier latin” a, de tout temps, été un laboratoire politique. Les groupes de musique congolaise sont à ce point pléthoriques qu’il en suffirait d’un pour composer tout un gouvernement. Un conseil des ministres d’Extra Musica remplacerait avantageusement les clashs entre Kabila et Tshisekedi. Nul doute que les interprètes du titre Etat-Major seraient habilités à gérer la situation sécuritaire. Pour les questions d’immigration intempestives à l’est du pays, on pourrait confier la délivrance des visas à Papa Wemba. En 2003, il a eu l’occasion de méditer sur «l’aide au séjour irrégulier de clandestins sous couvert d’activités musicales»…

- Son Excellence Madame la Présidente de la République du Gabon Patience Dabany: qui mieux que cette ancienne première dame et actuelle “reine mère” connaît mieux les rouages du palais présidentiel? Elle qui chantait «Chéri ton disque est rayé» pourrait bien incarner une démocratie qui semble bégayer…

- Son Excellence Monsieur le Président du Burkina Faso Smockey. Le rappeur a déjà fait partie du collectif «Le gouvernement» et a interprété «Votez pour moi». Pour le reste, il y a, dans le showbiz burkinabè, tout ce qu’il faut, en matière de vrai-faux personnel politique: la Cour Suprême, Le Pouvoir, les Premières Dames et même la Censure …

- Son Excellence Monsieur le Président de la République algérienne démocratique et populaire Khaled : il pourrait fredonner « Aïcha, Aîcha, regarde-moi… » à Aïcha Kadhafi avant qu’elle ne quitte l’Algérie pour l’Afrique du sud…

- Son Excellence Monsieur le Président de la République camerounaise Manu Dibango. Ni vu, ni connu, on pourrait intervertir les deux “jumeaux” de 1933. Un septuagénaire pour un septuagénaire, mais avec le swing en plus…

- Au Togo, Mensha est déjà King…

- En Côte d’Ivoire, attention à la tentation sécessionniste. En élisant à la présidence le vieux père Alpha Blondy, on réveillerait la bagarre entre “blondistes” et “tikenistes”. Pour éviter une nouvelle partition du pays, autant confier le pouvoir à l’autoproclamé Président Omar Cavalli…

- Au Nigeria, les descendants toujours très politisés de Fela Anikulapo Kuti pourraient reprendre le flambeau du “black president”. Entre Femi Kuti et Seun Kuti, il y a l’embarras du choix.

- En Afrique du Sud, pour réduire la fracture entre les communautés, l’élection de Johnny Clegg offrirait à la population tout à la fois un dirigeant zoulou et un président blanc.

- Au Mali, le peuple pourrait choisir entre Amadou président et Mariam première dame ou l’inverse. Juste le temps de traduire la constitution en braille.

- En Guinée, Mory Kanté n’aurait qu’à transformer son «Yéké yéké» en slogan de campagne «Y a qu’à, y a qu’à»…

Ça promet un peu plus d’harmonie et quelques rappels à la fin des sommets de chefs d’Etat.

 

Les 10 animaux de la brousse politique française


Et si l’on voyait la campagne électorale française sous le prisme des contes africains? La faune des candidats est déjà en action. Bestiaire inédit de Damien Glez

C’est bien connu: pour devenir président, il faut être une “bête politique”. Pour comprendre la psychologie des bestioles avides de pouvoir, rien de tel qu’un conte africain. En attendant le scénario de la campagne officielle, voici déjà le casting animalier de dix personnalités qui pourraient faire ou défaire la campagne présidentielle française.

1 – Le lycaon (Nicolas Sarkozy): si l’on en croit les sondages qui le disent déjà battu, ce canidé serait en voie de disparition. Mais il ne faudrait pas sous-estimer ce mammifère carnivore que l’on surnomme le “loup peint”; “loup” en référence à son passé de jeune loup de la droite française; “peint” par allusion à son talent pour les déguisements idéologiques. Insaisissable, en effet, il sait prendre des allures de pachyderme socialiste quand il faut citer Jean Jaurès, de hyène quand il faut ratisser à l’extrême droite, de chien sauvage quand il faut mâter la racaille d'Argenteuil ou de Syrte. Il connaît les moindres recoins de la steppe politique gauloise et les moindres dédales des financements de campagne. Taris Neuilly-sur-Seine et Karachi, faudra-t-il rappeler Bourgi à la rescousse? La savane africaine n’est jamais totalement absente des campagnes électorales françaises…

2 – L’éléphant (François Hollande): Bien qu’il fut le cornac des pachydermes socialistes (P.S.) pendant plus de dix, on moquait sa silhouette d’hippopotame. Alors que les postes exécutifs nationaux lui semblaient défendus, le voilà, affûté, qui a doublé, dans la course à la présidence, le cousin de Washington que sa trompe folle a relayé au cirque médiatique. Ce nouvel éléphant candide et candidat fera-t-il mieux que l’antilope Royal dont il doit bien connaître les failles? L’Afrique, dont il n’a foulé, récemment, que la poussière tunisienne, attend de le découvrir. Dans sa politique africaine, que retiendrait le pachyderme de ses mentors? Le paternalisme donneur de leçons de Mitterrand ou la distance craintive de Jospin?

3 – Le zèbre (François Bayrou): cet équidé ne semble pas avoir choisi. Ni tout fait blanc ni tout à fait noir; tantôt blanc rayé de noir, tantôt noir rayé de blanc; ni cheval, ni mulet; ni de gauche, ni de droite. S’il ne connaît guère les contrées arides de l’Afrique, le zèbre centriste sait le goût des traversées du désert. S’il a failli créer la surprise en 2007, il lui faudra d’abord, en 2012, atomiser le pique-bœuf Hervé Morin et rassembler des semblants de troupes centristes. Qui bénéficiera de l’enivrant parfum africain de la gazelle sénégalaise (Rama Yade) en mal du zébu (Jean-Louis Borloo)?

4 – La hyène (Marine Le Pen): qui, en Afrique subsaharienne, ne connaît pas le rire glaçant de cet animal trapu à l’arrière-train plus bas que l'avant? Les candidats à l’immigration savent que sa puissance de morsure est la plus élevée chez les mammifères; et que, dans cette espèce, la femelle est encore plus grande et plus forte que le mâle. La hyène aime se nourrir, politiquement, de ce qui est déjà mort: elle se délecte des promesses périmés de ses adversaires, des idéologies du XXe siècle et des charognes des politiciens “tous pourris”. Elle se pourlèche déjà les babines, en appelant de ses vœux le décès clinique de l’euro. Mais attention, le proverbe africain dit que «quand tu te penches pour regarder les fesses de quelqu’un, sache que quelqu’un regarde les tiennes». Quand tu regardes une proie moribonde, sache que d’autres charognards tournoient au-dessus de ta tête. La hyène ne fera-t-elle qu’une bouchée du vautour (Carl Lang) que la présidentielle à également mis en appétit?

5 – Le rhinocéros (Jean-Luc Mélenchon): ce périssodactyle né en Afrique (au Maroc) est un rhino…féroce qui ne tarde jamais à charger, le front (de gauche) en avant. Il est muni d’une énorme corne destinée à ses adversaires politiques dont il ne serait pas fâché «qu'ils s'en aillent tous!»; et d’une cornette pour les sornettes des hommes de médias qui le chahutent quand il bahute. Une ruade pourrait suffire pour ses plus proches concurrents, les “Timon et Pumbaa” de ce conte cruel: le phacochère gauche du NPA (Philippe Poutou), et la frêle mangouste de Lutte ouvrière (Nathalie Arthaud).

6 – La chouette (Eva Joly) : les grands yeux cerclés de rouge de la chouette effraie le continent. Tout autant que son passé de juge d’instruction intimide une Afrique qui n’a pas encore réglé ses crises aiguës de corruption politique. Mais la parente du hibou, à qui certains dénient toute “francité”, a peu d’énergie (pas si renouvelable en campagne électorales) à consacrer aux pays étrangers, fussent-ils en voie de développement. Dans cette jungle politique impitoyable, la chouette se nourrira-t-elle de sa rivale centriste, la “chouette à joues blanches” (Corinne Lepage), candidate de CAP21? Elle avait bien terrassé le mâle de la chouette hulotte (Nicolas Hulot).

7 – Le lion de Belfort (Jean-Pierre Chevènement): même vieillissant, le vieux fauve garde sa majestueuse crinière blanche. Et son pouvoir de nuisance. Le lion n’est-il pas, traditionnellement, le roi des contes africains? La ville de ce lion a accueilli le mariage de Viviane et Abdoulaye Wade, mais le continent se souvient surtout que cet ancien ministre de l’Intérieur n’avait guère appliqué les promesses de régularisation massive des sans-papiers. Et la faune hexagonale verra moins en lui un faiseur de roi qu’un “gâteur de sauce” socialiste. Surtout cette année où les radicaux de la panthère noire (Christiane Taubira) se sont fondus dans les primaires des éléphants. Le lion devrait subir toutes sortes de pression de gauche et la concurrence souverainiste du varan eurosceptique (Nicolas Dupont-Aignan) du mouvement «Debout la République». Mais même debout, un reptile ne peut pas aller bien haut…

8 – Le guépard (Dominique de Villepin): s’il est le plus rapide au footing, ce majestueux animal ne devrait pas être le premier sur la ligne d’arrivée, en mai prochain. Classieux, semblant tout droit sorti d’un film de Visconti, il est un peu désuet. Si l’éléphant a connu des campagnes électorales sans poste exécutif national, le guépard a connu des fonctions gouvernementales sans être passé par la case élective. Les Africains gardent en mémoire le courage en bras de chemise dont il avait fait preuve à Abidjan et sa bravoure onusienne lors des préparatifs de la guerre d’Irak. Mais s’il eut du panache à l’étranger, le panache blanc qui décore son crâne ne fera pas de lui une grue couronnée sur les terres hexagonales.

9 – Le youyou (Christine Boutin): rien à voir avec les cris de joie poussés par les femmes de contrées musulmane. Ce perroquet youyou radote au nom du Parti chrétien démocrate. Mais pourra-t-il voler dans les plumes de ses adversaires? Il peine à rassembler les 500 signatures d’élus…

10 – Le bubale béninois (Patrick Lozès): un peu de franche africanité avec celui qui a le C.R.A.N. d’inviter à «ne pas voter blanc». Né en Afrique de l’Ouest, il doit composer avec les velléités exprimées par une aigrette garzette –aigre mais chouchoute des gazettes– d’Afrique centrale (Calixthe Beyala)…bien de ces bêtes politiques pourront-elles participer à la phase finale de ce safari? Les chasseurs, eux-mêmes (Frédéric Nihous), ne sont pas sûrs d’être de la partie. Mais si le casting reste à confirmer, le décor est déjà planté. Place aux rebondissements. La morale du conte sera pour le 6 mai 2012.

 

Damien Glez


SOCIETE


Pourquoi l’Afrique ne se développe pas


Le continent n'exploite pas ses nombreuses richesses et n'a pas su tirer les leçons des modèles sociopolitiques expérimentés à travers le monde. C’est une lapalissade de dire que l’Afrique est un continent riche, tant elle regorge de ressources naturelles. Même ci celles-ci ne sont pas inépuisables, l’Afrique est encore riche de ses terres en grande partie cultivables et de ses ressources humaines. Et pourtant, elle peine à se développer —c’est le moins que l’on puisse dire. Au lieu de tirer leçon des succès et des échecs des modèles de développement qui ont été expérimentés de par le monde, elle continue à s’engluer dans ses politiques stériles. Plusieurs facteurs essentiels sont la cause de cette situation.

La faillite des politiques

Depuis la fin de la colonisation, presque tous les pays africains ont été dirigés par une élite sans vision politique à moyen ou long terme. Cette élite, qui s’est substituée aux anciens colonisateurs, a été incapable d’ambition et s’est davantage préoccupée d’elle-même que des peuples dont elle prétend défendre les intérêts. Résultat: le système colonial a été purement et simplement perpétué sous une autre forme dans les domaines politique, économique et culturel au fil des années. A cela, il faut ajouter l’insécurité de l’environnement économique qui ne favorise pas les investissements, et le règne de l’informel. L’indépendance est donc devenue une véritable dépendance vis-à-vis des puissances étrangères, en particulier des anciennes puissances coloniales. Faute de réflexions endogènes ou prospectives et de volonté politique en vue d’amorcer un changement par une synergie d’actions, les politiques actuelles sont une navigation à vue. Les Etats sont gérés à la petite semaine par les dirigeants, juste le temps d’accomplir les hautes charges qui sont les leurs.

Le marché de consommateurs

Il n’y a pas meilleur marché de consommation que l’Afrique. C’est ce que nous appelons, avec un certain humour, dans nombre de pays africains les «receveurs universels». Comment peut-on se développer quand on consomme tout ce qui vient de l’extérieur sans distinction et qu’on ne produit rien, ou pas grand-chose? Le comble, c’est que beaucoup d’Africains ont le complexe suranné de la préférence étrangère. Même quand ce qui est produit localement est de bien meilleure qualité que ce qui est importé. L’extraversion est non seulement un phénomène économique, mais aussi culturel. Et cette tendance doit être inversée par la création et la recherche de qualité, afin que les produits africains puissent être concurrentiels à l’échelle internationale. L’Afrique ne doit pas être uniquement un marché de consommateurs —bien au contraire, elle a tout intérêt à se lancer dans la production tous azimuts. En effet, les Africains doivent encore prouver, comme qui dirait, qu’ils ne savent pas jouer que du banjo.

La négligence de l’agriculture

L’agriculture a toujours été reléguée au dernier rang des activités humaines en Afrique. Le paysan est considéré comme un citoyen de seconde zone. C’est le moins que rien. La plupart des Africains veulent être des commis de l’Etat. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, tous les pays africains font de l’agriculture la base de leur développement. Mais ils ne font rien pourtant pour développer cette agriculture. Et ce n’est qu’un euphémisme. Il faut bien le dire, depuis l’époque de la pierre, l’Afrique n’a remplacé l’outil agricole que par le fer. Rien de plus. Ce n’est pas avec la houe et la daba que l’Afrique peut se rendre autosuffisante alimentairement avant de parler de développer son agriculture à des fins de commercialisation ou de transformation. Comme les résultats d’investissements dans ce secteur ne s’obtiennent qu’à moyen ou long terme, cela intéresse peu les investisseurs étrangers et les Etats eux-mêmes. Pourtant, cela concerne la presque totalité de la population du continent. Avec une démographie galopante et un dérèglement climatique qui s’accentue d’année en année, les moyens agricoles traditionnels ne peuvent plus nourrir les nombreuses bouches du continent tant qu’ils n’évolueront pas. Et un homme qui a faim est un homme qui ne pense pas, et par conséquent ne se donne pas les moyens de son développement.

L’inadéquation du système éducatif

Plus de cinquante après les indépendances de la plupart des pays d’Afrique, le système éducatif ne s’est toujours pas adapté aux réalités du monde actuel et à l’évolution des sociétés africaines. L’enseignement élémentaire reste encore un luxe pour la majorité. Et l’enseignement supérieur ne forme en grande partie que des diplômés sans emploi, incapables d’entreprendre ou de s’insérer dans la vie active dès qu’ils quittent leur formation. Malheureusement, dans un tel contexte, l’enseignement technique et professionnel qui devrait être privilégié demeure le parent pauvre du système éducatif africain. C’est une des questions essentielles du développement de l’Afrique à laquelle il convient absolument d’apporter une solution adéquate.

L’instabilité sociopolitique

On peut compter sur les doigts d’une seule main les pays africains qui peuvent se targuer d’avoir connu une longue stabilité sociopolitique. Or celle-ci est une condition sine qua non du développement. L’Afrique souffre de la faiblesse de son organisation sociale et politique. Tant et si bien que la conjugaison des conflits internes et des appétits voraces externes que suscitent ses richesses ne sont pas pour la prémunir de crises plus ou moins graves. L’une des raisons à cette instabilité chronique et récurrente est la difficulté à s’approprier les principes de la démocratie. Qu’ils accèdent au pouvoir, au pire par un coup d’Etat, succession dynastique ou au mieux par des élections passablement démocratiques, les chefs d’Etat africains finissent la plupart du temps par succomber à la tentation de la dictature. Grâce à l’absence d’armées républicaines, à la corruption, à l’analphabétisme d’une grande partie des peuples, au clientélisme, au culte de la personnalité et tutti quanti. Toutes choses qui engendrent des conflits sociopolitiques. De manière inconsciente ou non, les peuples africains sont eux-mêmes des usines à dictateurs.

La corruption

La corruption est un véritable fléau en Afrique, qui touche particulièrement les élites. En l’absence d’initiatives individuelles ou collectives de production de richesses, l’Etat reste la seule vache à lait. La politique est ainsi le plus grand pourvoyeur d’emplois et le seul moyen de s’enrichir de façon licite ou illicite sans travailler. Cet état de fait inhibe toute initiative et transforme certains agents de l’Etat, mais surtout ceux qui sont au pouvoir ou proches, en de véritables sangsues. Les économies en sont du coup gangrénées. Si l’argent qui part en fumée au moyen de la corruption était effectivement investi en faveur des populations, l’Afrique aurait fait un grand bond en avant sur la voie du développement. Mais qui refuse de gagner de l’argent sans travailler? Ils ne sont pas légion, ces agents de l’Etat ou hommes politiques en Afrique. De nos jours, ils sont malheureusement comme des espèces humaines en voie de disparition. La bonne gouvernance n’est pas le fort des dirigeants africains. Bien au contraire, c’est ce qui leur permet de rester au pouvoir en organisant des élections truquées d’avance par l’achat de conscience non seulement des électeurs en majorité analphabètes, mais aussi de ceux qui organisent les élections. Quand ils ne sont pas purement et simplement des dignes représentants de groupements économiques et politiques étrangers qui font feu de tout bois à cet effet.

Marcus Boni Teiga


Profession: intellectuel africain


Tant qu’ils n’ont pas donné leur point de vue, vous ne savez rien de ce qu’il y a à savoir de l’Afrique et une fois qu’ils se sont exprimés, vous êtes encore plus ignorant qu’au lever du jour. Voici, ramassée en quelques lignes, une revue kaléidoscopique des caractères et des personnages qui parlent avec autorité au nom de l’Afrique ou à son sujet.

Descendants de griots, ils ont appris à écrire mais privilégient plus souvent la parole… Tout engagement vrai commence par l’écriture, eux ils ont en horreur «la page écrite»! De nos jours la parole n’alimente que le sensationnalisme, l’instant, la presse, Internet… Les intellectuels africains, lorsqu’ils parlent de l’Afrique sont des électrons libres sans contrepoids, ils se craignent au point de s’éviter soigneusement, mais ne se respectent pas assez pour se nourrir mutuellement de leurs lumières. Chacun d’eux est détenteur d’une somme «infalsifiable», c’est-à-dire insusceptible de négation, de rejet : l’Olympe même ne saurait héberger tous ces dieux africains.

Au Cameroun (charité bien ordonnée…), il n’y a pas une grande tradition d’intellectuels. Le Président de la république, par exemple, n’a fait qu’une école coloniale, où il a obtenu un diplôme de premier cycle. Ce qui est bien fruste quand on lit le curriculum studiorum d’Abdoulaye Wade du Sénégal, qui est sans doute l’un des présidents les plus diplômés de la planète. Fruste, mais déjà mieux que son prédécesseur, Ahmadou Ahidjo, télégraphiste breveté qui n’a pas fait d’études supérieures. Si l’on veut filer la comparaison et l’étendre par exemple à la deuxième personnalité de l’Etat du Cameroun, le président de l’Assemblée Nationale, on se heurte au certificat d’études primaires de celui qui en son temps ne fut qu’un modeste instituteur : le très honorable Cavayé Yeguié Djibril (lire le tèrè zonorable…). L’un de ses homologues sénégalais a le bonheur d’être le professeur Iba der Thiam, historien de haut vol, membre du comité scientifique de l’UNESCO chargé de rédiger l’Histoire générale de l’Afrique.

Qui sont-ils? Que font-ils? Que valent-ils?

Non. L’intellectuel n’est pas forcément l’universitaire ou le diplômé de troisième cycle. Mais il est évident que pour éclairer, il faut être éclairé, et de nos jours il est rarissime de trouver des autodidactes magnifiques. Quand on pense aux intellectuels africains, il faut donc d’abord regarder parmi la masse des écrivains, éditorialistes, et autres «hyperdiplômés». En dehors d’eux, il y a des sages, mais pas d’intellectuels. Le Cameroun dispose aussi d’intellectuels de grande envergue, d’historiens émérites… Achille Mbembe par exemple! Voilà un historien qui fait en permanence l’actualité, du moins la commente-t-il. Dans les antennes de RFI, il a affirmé récemment qu’il y a au Cameroun «une opposition imbécile». Il lui a manqué assez de lucidité pour reconnaître que c’est parce que cette opposition s’appuie sur des intellectuels limités qu’elle est si imbécile. Son attitude est symptomatique de la malédiction africaine. Il a été donné à l’Afrique le don de produire des génies culminants, mais la fée carabosse (la garce!) a fait en sorte que ceux-ci lui soient parfaitement improductifs. Comment peut-on être si intelligent mais aussi totalement inutile dans un continent qui a tant de besoin de ses intelligences? Les intellectuels ont-ils choisi de se cantonner dans des rôles de pirates de la politique à la recherche de trésors improbables, semant l’angoisse dans les esprits et s’étonnant, étonnamment, de récolter l’apathie?

Ils se spécialisent dans le «vocabulaire de l’insulte politique», la formule hautaine et sentencieuse, et transforment l’Afrique en mur des lamentations. Ils font toute leur carrière intellectuelle dans des postures d’observateurs engagés dans la critique courte et savante. Le fringant Mathias Eric Owona Nguini partage avec A. Mbembé de nombreuses vues. Notamment quand il faut jouer les Cassandre et promettre aux Camerounais une alternance par les armes. Ils ne disent pas précisément si c’est ce même peuple qu’ils déconsidèrent dans leurs analyses qui prendra ces armes. Quel peut être l’effet sur les jeunes qui les écoutent de ces noires prédictions? Je vous le donne en mille : fuir au plus loin, voyager comme eux ou mourir d’avoir essayé. Un peuple qui n’a pour seule expérience que la misère ne va raisonnablement pas se hâter d’emprunter le chemin le plus long pour arriver à Rome, la voie de la guerre, qui n’est pas la voix de Dieu.

Diagnostic sans nuances

Ils vont et viennent entre discours pessimistes qui sonnent creux et formules brillantes qui sont vaines. Parce que rares sont de toute manière ceux qui trouvent grâce à leurs yeux. Des éloges médiocres pour leur peuple qui manque de l’imagination et de la maturité nécessaires pour réussir une alternance pacifique, des critiques sévères pour les leaders politiques qui n’y comprennent rien et n’arrivent à rien, le mépris facile pour les dirigeants en place, solidairement et pleinement responsables du marasme. Ils ont posé un diagnostic sans nuances alors qu’ils sont eux-mêmes inaptes à organiser la communauté la plus urgente à constituer : la communauté intellectuelle. Ces penseurs abstraits, ces byzantins intellectuels ont fait vœu d’inactivité politique, au sens de politique politicienne, au sens de tremper ses mains dans le cambouis et dans le sang, ils font, si cela est possible, du dilettantisme intellectuel, se posent, par rapport à leur peuple devenu la risée de l’univers, en génies impuissants qui fonctionnent dans un mode satellitaire, «contre une partie de leur gré», s’il est permis d’ainsi torturer l’expression. Les Africains restés au champ d’honneur n’ont plus besoin qu’on leur fasse des leçons, ils veulent qu’on se joigne à eux, pour tenir des rôles restés vacants, délaissés par ceux qui croient que les leviers du développement et de l’alternance, c’est en France qu’il faut les trouver. Tous les grands génies de l’histoire ont souffert en leur temps. Eux, ils ne veulent pas souffrir, n’acceptent pas qu’il puisse exister de souffrance puisqu’ils ont immigré dans des pays où tous les grands combats ont été menés et toutes les révolutions ont eu lieu. Beaucoup de ces savants éphémères n’appartiennent à aucune société savante, ils ont écrit une fois pour toutes le chef d’œuvre de leur vie, une thèse de doctorat de 2000 pages et, 20 ans après, pas un seul livre! Leur distinction suprême a été leur parchemin, leurs fonctions officielles sont des médailles en chocolat... Ils se font appeler docteur dans des écoles maternelles et parfois acceptent même du professeur, alors qu’ils n’ont jamais obtenu d’agrégation. Et s’ils l’ont eue, c’est sans gloire qu’ils en sont venus à bout.

L’éternelle négritude

Les grands hommes rencontrent de grands événements, ils en prévoient les prolongements, en analysent les suites dans une imposante et cohérente unité, un «système» qui confine toujours à l’universel… Arjun Appadurai est un auteur classique de son vivant, Edgar Morin est cité comme s’il était mort, imaginez l’un d’eux, publiant une tribune dans Le Figaro, et signant au bas Pr Edgar Morin, Dr Arjun Appadurai… Tour à tour absolument comique et infiniment pathétique! Dans une certaine Afrique, les politiques font les événements et les intellectuels les commentent, incapables qu’ils sont d’ouvrir des débats sociaux; quand ils publient c’est souvent à compte d’auteur et sans daigner obtenir de code ISBN ou, dans le meilleur des cas, c’est de la littérature grise. Quand bien même ce sont des maisons d’édition respectables qui le font, elles ne daignent jamais reproduire l’expérience: soit que les œuvres produites se soient mal vendues, soit que les auteurs en question aient asséché leur source d’inspiration… Ils ignorent ce que leurs devanciers ont fait et raillent ce que leurs confrères produisent. Enfin, les intellectuels dont il est question veulent diviser la classe politique en socialistes et libéraux, dans des contextes préindustriels et des superstructures qui n’évoquent en rien les pays de naissance de ces idéologies!

Nos futurs Cheikh Anta Diop

Que leur devra la prochaine génération d’intellectuels? A qui devront nos futurs Cheikh Anta Diop d’exposer avec éclat et grâce? La mort même ne saurait être pour ces «pères absents» une promotion, attendu qu’il n’y aura plus rien pour témoigner de leurs sacrifices ni personne pour rendre justice à leur œuvre. Ceux qui les survivront ne les pleureront pas parce que la démocratie leur tombera du ciel, comme en Côte d’Ivoire. Et tous, à l’instar de la génération qui les aura précédés, professeront Senghor, Sankara, Mongo Béti, etc. Un vrai et grand intellectuel africain ne sera pas invité par un média uniquement pour des faits circonscrits à son continent comme un simple correspondant de presse. C’est une lumière qu’on verra s’irradier sur tous les sujets d’importance et dont on pourra présenter une publication majeure toutes les fois qu’une caméra de télévision se mettra en travers de son chemin. Car l’éclairage des projecteurs, ils ne le cherchent pas, ils l’attirent. Sans demander que leurs travaux soient admirés, ils savent qu’ils seront distingués… Un intellectuel c’est surtout un homme dont la parole est souvent redoutée, constamment attendue, partout présente, toujours précieuse. Le président français dit une énormité à Dakar? A quoi cela sert-il de lui répondre puisque Frantz Fanon avait déjà élevé le débat dans d’autres altitudes. Va-t-on réchauffer les combats de la négritude, continuer de s’adresser aux anciens maîtres quand c’est notre peuple qui écoute? Va-t-on prouver qu’on a une histoire, en écrivant comme l’avait voulu l’historienne Adama Ba Konaré, épouse du président Alpha Oumar Konaré, un livre d’histoire toutes les fois qu’un insensé se trompera? Ce serait comme vouloir démontrer qu’on est en essayant de prouver qu’on a été. En Côte d’Ivoire, Célestin Monga, Olympe Bhêly-Quenum, Tierno Monénembo, le sud-africain Aziz Pahad, Gaston Kelman, Fweley Diangitukwa, tous des intellectuels authentiques, ont voulu parler d’une seule voix pour crier au loup, le problème c’est qu’ils réagissaient en militants de base d’une cause passagère. Où étaient-ils avant que cela ne vire au pire? Pourquoi ont-ils aujourd’hui donné leur langue aux chars? La Force Licorne en maîtrisant Gbagbo et Simone les a carrément rendus atones, alors que les aberrations continuent en s’exacerbant. La terreur a été rééquilibrée, la vengeance a eu lieu, l’humiliation s’est passée, la danse funèbre des vainqueurs continue sur les ruines d’une CPI (Cour pénale internationale) illégitime et une CVR (Commission dialogue, vérité et réconciliation) illégale.

Et pourtant ils existent…

S’il fallait établir une cartographie de l’intelligentsia africaine, elle serait par trop clairsemée en Afrique centrale. Si l’on se fie pour cela à des indicateurs aussi simples que les publications régulières qui ne soient pas exclusivement des œuvres scientifiques, l’impact de leurs contributions au-delà du cercle de leur émission, leur diffusion, leur présence dans des répertoires comme JSTOR, Science Direct, etc. Un intellectuel, ça n’est pas un épicier, qui n’est connu que de la ménagère du quartier : il doit avoir des références constantes urbi et orbi, il doit être connu et reconnu. Il n’existe plus de génie méconnu, les artistes les plus mal aimés finissent toujours par trouver leur public. Wole Soyinka, le premier auteur noir lauréat prix Nobel de littérature, qui a des positions parfois déconcertantes, mais allant toujours dans le sens du progrès des peuples africains, l’égyptien Amr Khaled, l’universitaire ougandais Mahmood Mamdani, le philosophe ghanéen Kwamé Anthony Appiah, Dambisa Moyo qui, dans Dead Aid, affirmait, contrairement à Barack Obama, que l’Afrique avait besoin d’hommes et de femmes forts, sauf qu’elle exigeait d’eux qu’ils soient en plus bienveillants pour que le continent prospère… Tout n’est donc pas noir dans ce continent, puisqu’il y a d’incontestables lumières!

 

Eric Essono Tsimi

 

POURQUOI LES AFRICAINS ONT-IL HONTE DU CULTE DE LEURS ANCETRES ?

Jean-Paul Pougala


L’Afrique est le berceau de l’humanité. C’est-à-dire que les Africains sont les géniteurs de tous les 7 milliards d’hommes et de femmes qui peuplent la planète terre. Sur le plan scientifique, ceci est prouvé notamment par l’ADN. La conséquence de ce lien entre l’Afrique et ses enfants éparpillés partout dans le monde est l’exportation de la pratique religieuse africaine sur toute la planète. C’est en effet la seule véritable religion universelle du monde qui n’a eu besoin d’aucun pasteur, d’aucun missionnaire, d’aucun imam pour être présente ici ou là. C’est la seule religion qui s’est rependue sur tous les continents sans un seul mot, sans une phrase de prosélytisme ou de propagande à la recherche de convertis, sans un mort, sans la moindre violence ? La religion africaine est dès lors la mère de toutes les religions, non seulement parce qu’elle est la plus ancienne, mais aussi et surtout parce que c’est celle qui résiste le mieux au temps, à l’espace et à la virulence des nouvelles religions qui ont tout fait pour l’effacer. Mais pourquoi les Africains eux-mêmes donnent-ils la fâcheuse impression d’avoir honte des croyances de leurs ancêtres ?

A- LA FAUTE DES INTELLECTUELS AFRICAINS

Dans sa pièce de théâtre publiée en 1946 intitulée : Malatesta, Henry de Montherlant (1895-1972) a écrit : "Vivent mes ennemis ! Eux du moins, ne peuvent pas me trahir". Et Bernard Werber de renchérir disant : "Seuls vos vrais amis savent où vous frapper pour que ça fasse mal". Le peuple africain a été trahi par ses propres intellectuels. La religion africaine a été bradée pour un bout de pain mal garni par ses propres fils présumés éclairés, supposés la protéger. Alors que l’Afrique était encore sous occupation européenne, la plupart des intellectuels africains ont mis tous leur talent à aider à pérenniser sa mise sous tutelle. Le plus illustre d’entre eux s’appelait Léopold Sédar Senghor. Voici ce qu’il conseille en 1945 aux missionnaires catholiques pour dompter son peuple ; il cite son mythe, il cite la phrase d’une circulaire écrite un siècle plutôt (1847) par le prêtre Libermann à ses missionnaires envoyés en Afrique : "soyez nègres avec les nègres afin de les gagner à Jésus-Christ". Cette phrase des plus humiliantes et grotesques se passe de commentaire. Mais Senghor ne va pas s’arrêter en si bon chemin. Il va ajouter : " Le rôle du catholicisme est de dégager plus nettement la personne de la famille, Dieu des ancêtres ; (...) Par le Christ, Dieu fait chair, qui empêche ainsi le Catholicisme de tomber dans l’abstraction formaliste. M. Griaule me dira que je parle en croyant et il n’aura pas tort." Alléluia. En d’autres termes, pour Senghor, l’individualisme et l’égoïsme européens doivent remplacer la solidarité et la générosité africaine, doivent se substituer à la "famille africaine" qu’il juge comme une abstraction formaliste, c’est-à-dire une illusion, une utopie entretenue par la tradition, par le conformisme. Pour lui, un frère doit être un vrai frère biologique, un cousin doit être un vrai fils biologique de l’oncle direct ou de la tante et non cette "abstraction formaliste" africaine qu’il déteste.

Mais le plus grave c’est ce qui suit "dégager Dieu des Ancêtres" surtout lorsqu’on le met en relation avec la citation précédente de Libermann "être nègre avec les nègres". Senghor est un homme très intelligent. Il réussit là où les missionnaires avaient toujours échoué : en prônant de dégager le Dieu chrétien des ancêtres, son idée est de faire émerger cette figure monothéiste pour remplacer en tout et pour tout, la religion des africains par celle des Européens. Il sait très bien que pour les Africains, il n’y a pas de Dieu. Les ancêtres sont leurs divinités, sont leurs Dieux. et c’est à eux qu’ils vouent leur culte. Offrir un Dieu aux Africains c’est déchoir leurs ancêtres de leur position de divinité. C’est couper la relation fusionnelle qui lie un africain avec son mort ; C’est le tuer, puisqu’il cesse désormais d’être lui-même. Les Africains cessent d’être eux-mêmes sans savoir exactement ce qu’ils sont devenus. La seule chose certaine est qu’ils sont devenus dès lors très vulnérables parce qu’ils doivent attendre que le nouveau maître leur explique ce qu’ils sont, ce qu’ils seront. C’est ce rôle que d’aucuns qualifient de "traitre", d’autres de "bon nègre", d’autres encore de "suppôt colonial", ou même de "sous-préfet de la France", que la très grande majorité d’intellectuels africains a décidé d’adopter, vue la très forte récompense que Senghor a obtenu en son temps : Président de la République. L’épilogue de la crise ivoirienne en 2011 n’est pas là pour les démentir. Ce qui fait froid dans le dos c’est d’imaginer qu’à la même époque plusieurs intellectuels africains s’étaient retrouvés à Dakar au Sénégal pour étudier comme le Docteur Félix Moumié du Cameroun de 1945 à 1947 et très probablement communiquaient avec leur frère aîné Senghor (député du Sénégal à l’Assemblée Nationale Française) sur les voies et moyens pour obliger la France à reconnaître l’indépendance des pays africains. On connait la fin de l’histoire : assassinat de ces africains trop idéalistes peut-être trop naïfs de simplement rêver d’une Afrique libre. (Dr. Moumié meurt, empoisonné par la France à l’âge de 35 ans).

Les intellectuels qui sont ceux qui partout dessinent l’architecture et l’agencement des croyances religieuses en écrivant par exemple des livres saints devant servir de référence aux croyants, en Afrique, ont démissionné de leurs responsabilités. Ce sont eux les premiers qui se sont engouffrés dans les offres religieuses élaborées par leurs collègues des autres continents. Ces déserteurs d’un nouveau genre, souvent très instruits ont laissé derrière eux un champ de ruine à la merci des idées venues d’ailleurs, des croyances importées et qui se battent férocement pour avoir ce territoire abandonné, d’où les violences islamistes et chrétiennes de noël 2011 et les jours suivants au Nigeria.

B- RELIGION ET SOUVERAINETÉ : LE CAS DU JAPON

Peut-on être réellement indépendant en adoptant des religions imposées avec de la violence et accompagnée par de la soumission et l’esclavage ? Le Japon, a érigé la religion d’origine africaine du culte des morts, au rang de religion d’état en 1868, les prêtres shintoïstes payés par l’état, chaque habitant devant s’inscrire comme membre d’un sanctuaire non loin de son domicile. Tout ceci a limité fortement l’installation du christianisme au Japon. Au 5ème siècle de notre ère, les Japonais sont culturellement très complexés par rapport à leurs voisins Chinois qui ont une religion très forte et structurée : le Confucianisme depuis déjà plus de 8 siècles alors que les Japonais pratiquent encore la religion d’origine africaine non structurée. Chaque village japonais pratique le culte des morts, sans qu’il y ait une synergie entre eux, avec des rites très différents. Pour éviter que le peuple japonais se convertisse en masse dans cette nouvelle religion venue d’ailleurs, les intellectuels japonais se réunissent et posent très clairement la question : "peut-on se développer et devenir un pays fort et puissant en cédant sur l’essentiel, sur la spiritualité venue d’ailleurs ? peut-on se dire patriote et avoir honte des pratiques religieuses de ses propres ancêtres ? La réponse à ces deux questions est NON. Mais comment faire ? Le peuple a besoin de croire et est toujours plus naïvement séduit par l’offre toujours alléchante venue d’ailleurs. La réponse est toute trouvée : regrouper et harmoniser le culte des ancêtres des différents villages, pour ne plus laisser à chaque communauté de continuer seul et sans orientation dans une jungle religieuse où elles sont une proie trop facile pour les lucioles des croyances importées. C’est cette harmonisation qui prend le nom de Shintoïsme. Le mont Fuji est désigné et devient sur le plan national, le mont sacré de référence pour la nouvelle religion. Au 21ème siècle, les Japonais de Tokyo sont même allés plus loin dans leur pratique religieuse, en dédiant une chambre entière dans leurs maisons pour ceux qui en ont les moyens, au culte des ancêtres à qui on fait des offrandes, de la viande, de l’eau, du pain. Le Japonais dialogue au quotidien avec son mort, avec ses ancêtres. La conséquence est qu’il est en paix avec lui-même et avec les autres. Le pays est la troisième puissance du monde sans la grande violence, qu’on retrouve dans les pays occidentaux.

C- ET L’AFRIQUE ?

Le christianisme et l’Islam sont des religions introduites en Afrique avec la violence. La religion africaine a démontré d’être une religion de la paix, son fondement est l’harmonie entre les membres de la société. C’est une religion de dialogue et de pardon. C’est ce qui explique que malgré les torts causé par les Européens aux autochtones d’Amérique, aux Africains, aux autochtones d’Australie ou de Papouasie, aucun de ces peuples n’a jamais développé le moindre sentiment de vengeance et même pas de haine à long terme. La religion africaine ne professe pas l’éthique, elle est éthique et morale. Ses adeptes, convaincus qu’ils deviennent des divinités après la mort, prennent de la hauteur dans leurs comportements au quotidien. La jeunesse africaine doit se préparer à reprendre son destin en main, parce que leurs aînés ont lamentablement failli même là où on n’avait pas besoin de cerveau pour avancer : la religion.

Pour éviter les scénarios de terrorisme chrétien et musulman sur le sol africain, il existe une seule solution durable, à mon humble avis, l’Afrique doit débuter sa déconstruction des vérités venues d’ailleurs sans aucune prise sur son environnement, et cesser d’avoir honte de ses croyances ancestrales, se livrant de temps en temps en cachette à des pratiques grotesques qu’il croit être la religion africaine, mais qui au font, ne sont plus que la caricature de l’original. Les gouvernements doivent avoir le courage de mettre les spécialistes au travail pour reformuler en l’adaptant au contexte moderne notre propre religion.

D- LA RELIGION AFRICAIN EST-ELLE RÉTROGRADE ?

La religion est plutôt en avance par rapport aux religions monothéistes, telle l’islam et le christianisme parce qu’elle a réussi à exorciser complètement la peur de la mort. Le fait que les morts deviennent une divinité permet une sorte de régulation des débordements possibles, garantissant ainsi la sécurité et la sérénité de la communauté. Car chacun est porté à s’auto réguler et éviter la radicalisation dès lors qu’il sait que son père, sa mère, son grand-père etc. doit devenir très bientôt une divinité. Les bombes des chrétiens et des musulmans deviennent une inutilité et une probabilité nulle dès lors qu’on sait que celui qu’on fera passer de la vie à la mort deviendra une divinité capable de nous punir sur nos actions mauvaises, ou alors de nous protéger de tous les maux, que nous récitons et promettons dans nos recueillements de ne jamais les commettre. En d’autres termes, dans la religion africaine, le croyant ne peut pas demander la protection d’un mal qu’il a pu commettre, ce qui le décourage d’emblée d’y recourir comme raccourci pour résoudre ses problèmes. Ceci contraste avec l’Islam et le christianisme qui au contraire promettent à ceux qui commettent du mal aux autres une impunité totale, basée sur le pardon inconditionnel, il suffit de quelques prières et le mal est lavé. On peut donc recommencer son forfait.

La religion qui à priori est une question anodine et intime, est pourtant décisive pour l’affirmation des peuples. La Pape Jean-Paul II s’était battu afin que le christianisme soit inscrit dans le traité européen comme le fondement de l’identité culturel européenne. On ne peut que lui donner raison, puisqu’il rendait ainsi hommage aux croyances de ses ancêtres et le revendiquait. La vraie question était plutôt de savoir quelle place dans cette identité culturelle de l’Europe les Africains chrétiens y trouvaient-ils ? La honte qu’ont certains africains de leurs ancêtres a transformé ce qui reste de leurs croyances en folklore pour charlatans à la recherche de quelques âmes naïves à arnaquer avec des prétendues révélations tout aussi bidon sur l’avenir. Les Etats doivent reprendre la main en Afrique pour fixer la ligne rouge marquant la différence entre les effets bénéfiques de la mythologie religieuse de nos ancêtres et la course au fric qui envahit toutes les couches de la société africaine dite traditionnelle avec la prétendue sorcellerie dans toutes les sauces et les injustes accusations des ennemis choisis pour porter le chapeau sur tout malheur qui peut subvenir.

E- EN AFRIQUE COMME AU JAPON

Comme exprimé plus haut, le Shintoïsme Japonais est une des variantes de la religion africaine La différence entre le Japon et l’Afrique est que la bas, les intellectuels n’ont pas eu honte de leurs croyances. C’est un rapport, un dialogue direct avec son mort que rien ne peut remplacer. Le japonais prend sa sérénité de son mort à qui il voue un culte quotidien, avec qui il dialogue et se sent en paix d’abord avec lui-même et ensuite avec la société entière. c’est le même scénario que nous retrouvons dans la plupart des villages africains où la chambre des morts est remplacée par la foret sacrée, par l’arbre sacré en dessous duquel les sacrifices sont déposés, de l’huile de palme versée à même le sol ou de morceau de viande de chèvre que les fourmis en feront un vrai festin.

F- QUELLE RELIGION AFRICAINE AU 21ème SIÈCLE ?

Au moment où on assiste à la plus forte urbanisation de l’Afrique, avec des villages qui sont en passe de devenir des villes, les états africains devraient se concerter pour harmoniser l’offre religieuse africaine, avec la création dans toutes les villes africaines, d’une sorte de jardin botanique d’un genre nouveau, devant servir au recueillement et aux sacrifices que les croyants africains et les convertis d’autres continents pourront venir trouver un moment de paix en écoutant bruit des oiseaux ou tout simplement le ruissèlement de la rivière artificielle si importante dans les croyances africaines comme instrument de purification. Si au contraire rien n’est fait, le désarrois religieux des populations africaines continuera à créer cette espèce de no man’s land, la terre de personne, une sorte de supermarché des âmes où tous les chacals du monde viendront à la chasse de leurs proies pour alimenter d’abord leurs caisses et leurs gloires avec des conséquences souvent fâcheuses entre les prédateurs comme les événements tristes de Abuja au Nigeria le jour de noël et les jours suivants pour la vengeance. L’Afrique n’a rien à voir dans des batailles de conquête et de positionnement des religions importées. Sans la religion de nos ancêtres, le nomadisme spirituel dans lequel vivent les Africains depuis trop longtemps sera toujours un élément de déséquilibre sociétal et de déchéance culturelle. Plus l’état cède sa place aux religions importées qu’elle ne peut pas maîtriser et plus il descend en enfer pour la gestion courante de la vie de ses citoyens.

G- QUEL MODÈLE DE SOCIÉTÉ POUR UNE AFRIQUE BIENTÔT PROSPÈRE

L’Afrique deviendra dans les prochaines années une des principales puissances économiques du monde. La religion que nous adopterons formatera la société dans laquelle nous voulons vivre. Les deux principales religions importées ont des choses en commun, contraires à nos intérêts :

- le fatalisme : les africains qui ont subit le travail forcé ont tendance à associer au travail l’explication de punition, de soumission. Si une religion peut le consoler en attribuant toutes les causes à un dieu. Il n’en reste pas moins que notre priorité est de mettre les personnes au travail, c’est d’amener les jeunes à aimer le travail. C’est d’encourager les jeunes à créer le travail afin d’être maîtres de leurs destins. Pour l’Afrique, le fatalisme de ces deux religion est plutôt nocif.

- triomphe de l’individu sur la société, sur la communauté. La richesse la plus insolente du monde peut côtoyer la misère la plus criante sans gêner personne à New-York ou à Dubai. La pauvreté est même vantée comme une vertu. Ainsi, Dieu ne préfère-t-il pas les pauvres aux riches ? Dans tous les cas, ces deux religions ont besoin qu’il y ait des pauvres afin que le riche puisse avoir l’opportunité de laver sa conscience en donnant quelques miettes. Notre objectif en Afrique est de fuir la pauvreté à vitesse grand V.

- Manque de patriotisme : Les dettes de l’état japonais sont totalement absorbées par les entreprises japonaises qui dans le Shintoïsme, évite que ce soit quelqu’un en dehors du groupe à venir résoudre les problèmes financiers de leur état, au moment où en Occident, ce sont des individus qui spéculent sur le chute de leur gouvernement, qui parient sur leur déclin à eux tous. Le jour où ils ont compris qu’ils pouvaient gagner quelques dollars en plus en déplaçant les usines vers la Chine, ils se sont tous précipités à fermer les entreprises en Occident sans se préoccuper des dommages que cela pouvait créer à la société qui leur avait donné tant de chance et de fortune. Le plus ridicule est que mêmes les États s’y sont mis. On a ainsi vu l’État Français actionnaire dans une grande compagnie, délocaliser les parties administratives et comptables vers l’Inde en mettant au chômage des centaines de ménages de Français.

Est-ce le genre de modèle de développement que nous voulons pour l’Afrique ? Je ne pense pas. Nous devons revenir au culte de nos ancêtres afin de retrouver cette solidarité ancestrale qui a fait notre force et garanti l’équilibre de notre société même durant les dures périodes de l’oppression et de l’humiliation de l’occupation européenne. La prospérité du continent africain ne sera effective et stable que si elle impliquera tout le monde, comme tout un village. Arrêtons de singer des modèles de développement que nous ne maitrisons pas et surtout, des modèles que même celui qui nous l’a apporté ne le maitrise pas lui-même, vue la crise profonde dans laquelle lui-même se trouve, afin de réinventer notre propre modèle de développement humain en partant de nos villages, en commençant par faire de nos campagnes le premier cercle de production et de distribution de la richesse. Nos villes ne pourront que suivre la vague ainsi créée et maîtrisée. Si nous ne revenons pas à nos fondamentaux, le déséquilibre entre l’économie florissante et une poche de miséreux sera inévitable. L’individualisme et l’égoïsme des religions monothéistes dans lesquelles personne n’a de compte à rendre à personne d’autre qu’à Dieu ont fabriqué le Dieu Argent.

H- CONCLUSION

Les Africains qui vivent en Europe ont entendu au moins une fois cette phrase "tu n’es pas comme les autres, tu es plus intelligent" La plupart de ceux qui sont chrétiens ou musulmans réagissent comment ? Ils se sentent flattés. Ils se sentent élus et très souvent, ils en rajoutent. Par contre ceux qui pratiquent le culte des morts réagissent par l’indignation. Parce que ces autres jugés peu-intelligents c’est une partie de nous-mêmes, c’est nous mêmes qu’on insulte. Car selon nos croyances, nous ne sommes rien dans notre groupe, nous avons beau exceller dans le monde entier, mais tant que notre peuple est piétiné, c’est nous-mêmes qui sommes piétinés. Les prisons européennes sont pleines à craquer d’Africains qui ont commis un seul tort, celui dit de "l’immigration clandestine" et les autres africains qui sont en règle ou qui ont la nationalité dans ces pays sont convaincus que cela ne les regarde pas. Erreur. Nous devons à chaque fois faire un retour aux sources dans nos propres racines, dans nos propres traditions et croyances pour chercher à interpréter tout ce qui nous arrive. On comprendrait alors très vite que ces sans-papiers incarcérés sont une partie de nous-mêmes. Qui sommes-nous  ? Nous sommes ce qu’est notre famille. Nous sommes ce qu’est notre pays. Nous sommes ce qu’est notre continent. S’il est pauvre, c’est nous qui sommes pauvres. S’il est humilié, c’est nous tous qui le sommes. Lorsqu’on trahit la mémoire de ses ancêtres on peut tout trahir. Lorsqu’on trahit ses propres morts on ne peut reculer devant rien pour ses intérêts personnels. Ceux qui ont honte de nos ancêtres sont une indication de ceux sur qui nous ne pouvons baser l’espoir de la renaissance africaine. L’Afrique fera bientôt partie de ceux qui comptent dans le monde. Se présentera-t-il à ce rendez-vous en revendiquant fièrement son authenticité ou en singeant les autres ? Les langues africaines feront-elles partie de cette fierté ? Mais existera-t-il une Afrique digne sans sa religion ?

 

SPORT


Nouvelles du groupe : Deux joueurs pourront ne pas participer à la CAN

 

Selon une source concordante, 2 joueurs de l’équipe nationale du Burkina dont les noms n’ont pas été dévoilés pourront ne pas prendre part à la CAN. La raison proviendrait d’un problème administratif. Si cela s’avérait fondé, ces éléments pourront être remplacés par Robert Sankara et Adama Ni Plange, non retenus parmi les 23 de la liste définitive mais qui s’entraînent toujours avec l’équipe. A la seule condition de s’acquitter de la somme de 2 millions de F CFA par joueur. Affaire à suivre.


Pas d’inquiétude pour Alain Traoré

Blessé lors du dernier match amical contre les lions A’ du Cameroun, Alain Traoré souffre d’un mal à l’isco jambier (un muscle derrière la cuisse). Selon le kinésithérapeute, ce n’est qu’une petite lésion qui ne va pas empêcher le sociétaire de l’AJ Auxerre d’être en pleine possession de ses capacités avant le premier match des Etalons. Lors de la séance de dimanche, il a subi seul un entraînement spécifique.

Rassemblées par Y. OUEDRAOGO à Yaound

Sidwaya


4 Messages de forum

Comment une source peut-être concordante à elle seule ????????? Arrêtez s’il vous plaît ce journalisme du flou.

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Je ne crois pas que cela soit un problème ! le montant à s’acquitter pour les deux (2) joueurs ne vaut même pas un (1) Guiro !!

Répondre à ce message

ces deux joueurs sont Djarkardia KONE et Abdoul Razak TRAORE qui seraient de nationalité ivoirienne. S’il vous plait le Burkina va devenir ridicule sur le continent avec ces histoires de papiers. Pour ce qui est du joueur NII Plange Adama, il est d’origine ghanéenne. Vérifions qu’il remplit les exigences du Règlement d’application des Statuts de la FIFA.

Footfoot, le Burkina Faso ne se résume pas au football.Ya bien des événements plus importants que le foot qui rendent le Burkina sur la voix du ridicule.(Guiro, alternance démo, etc...).donc ce que vous dites est ridicule !
Penses-tu que même Robert Sankara n’a pas une nationalité Ivoirienne ? Ce sont les joueurs concernés eux même qui sont ridicules car ils sont allés tellement haut, qu’ils aspirent à descendre ! (tu comprends ce que je veux dire car Habib Bamogo...). Que dit tu de Ouedraogo qui a jouer pour les éléphanteaux il ya 2 ans ? C’est aussi les lois que les occidentaux nous imposent qui en sont responsables : binationalité, double nationalité, etc....

 

Bénin - Les Français ont toujours la cote dans le football africain


Déjà très représentée dans la football africain, la France est sur le point de voir un autre de ses entraîneurs débarquer sur le continent noir. En effet, Foot365 rapporte que Manuel Amoros a été choisi pour entraîner les Ecureuils, l’équipe nationale du Bénin. L’ancien international français, latéral droit de l’Olympique de Marseille, remplace Edmé Codjo qui avait pris ses fonctions en août dernier et qui n’est pas parvenu à qualifier la sélection pour la Coupe d’Afrique des Nations 2012 organisée par le Gabon et la Guinée équatoriale. «C'est le Français Manuel Amoros qui a été nommé comme sélectionneur des Ecureuils. Il est attendu vendredi à Cotonou pour la signature de son contrat», déclare un responsable du ministère des sports à l’AFP. «Il sera assisté de son compatriote Nicolas Philibert. Le contrat sera signé pour une durée de deux ans».

L’ancien Monégasque a déjà entraîné une équipe africaine. Entre juin 2010 et janvier 2011, il a supervisé la sélection comorienne. Et avant de devenir entraîneur, Manuel Amoros a mené une brillante carrière de footballeur. Le natif de Nîmes (dans le sud de la France) débute sa carrière en 1980 avec l’AS Monaco. Il y passe neuf années durant lesquelles il remporte deux championnats de France (1982, 1988) et une coupe de France (1985). Mais à c'est à Marseille qu’il connaît la consécration. Avec la formation olympienne il décroche trois titres consécutifs de champion de France (1990, 1991, 1992), et surtout une Ligue des champions en 1993, une première (et la dernière) pour un club français. En 2010, il est élu meilleur latéral droit de l’histoire du club.

Amoros était également un joueur-clé de l’équipe de France avec laquelle il compte 82 sélections pour 1 but inscrit. Le défenseur participe aux campagnes des années 80 menées par la légende Platini. En 1982, il est élu meilleur jeune joueur de la Coupe du monde, deux ans plus tard, il remporte l’Euro 84. En 1985, la France gagne également la coupe intercontinentale des nations, un match opposant le vainqueur de l’Euro au gagnant de la Copa America (la compétition ne s'est tenue qu'à deux reprises en 1985 et 1993). Le latéral droit participe aussi à la Coupe du monde 1986 et à l’Euro 1992. En Afrique, Manuel Amoros rejoint notamment Alain Giresse et Claude Leroy, respectivement sélectionneur du Mali et de la République démocratique du Congo (RDC). D'ici un mois, une Française devrait également arriver sur le sol africain, Elisabeth Loisel étant fortement pressentie pour reprendre l'équipe féminine du Nigeria.

Le clan Ayew, une dynastie de footballeurs

Chez les Ayew, on est footballeur professionnel de père en fils. L'ancien international ghanéen Abedi Pelé doit apprécier la réussite familiale. Ses deux derniers enfants, André et Jordan, font notamment beaucoup parler à Marseille.

Mise du 16 décembre: le joueur ghanéen de l’Olympique de Marseille André Ayew a été nommé joueur de football africain de l’année 2011 de la BBC. Il devance Yaya Touré, Gervinho, Samuel Eto’o et Seydou Keita.

Mise à jour du 7 novembre: La famille Ayew a joué a un rôle clé dans la victoire de l'OM sur Nice, le 6 novembre (2-0). Jordan a marqué le premier but (72e) et André a provoqué le penalty transformé par Loïc Rémy dans les arrêts de jeu.

D’ordinaire, se faire un nom est le premier objectif des jeunes talents du football. Mais parfois, certains grillent cette étape. Parce qu’ils sont «fils de», «frère de», ou «cousin de», la lumière est déjà sur eux. Et on les attend au tournant. Dès lors, le but est de se faire un prénom, de dépasser la célébrité de son aîné. Ce défi, relevé avec succès par quelques-uns, sclérose les carrières de beaucoup d’autres.

Chez les Ayew, on se range plutôt dans la première catégorie. Au jeu des 7 familles, les Ghanéens Kwame, Jordan et compagnie sont presque imbattables. Dans la lignée du patriarche Abedi, ils sont cinq à avoir chaussé les crampons du haut niveau, avec des fortunes diverses.

Abedi Pelé, l’illustre guide

Paradoxalement, l’initiateur de la dynastie Ayew est connu sous un autre patronyme. Abedi Pelé, de son vrai nom Abedi Ayew, est une figure du football africain. De Domé, son village natal dans le nord d’Accra (la capitale ghanéenne), à Marseille, le virevoltant milieu de terrain offensif a charmé les amateurs de beau jeu.

Né en 1962, le petit Abedi s’éveille au ballon rond dans la rue. Rapidement reconnu comme l’un des meilleurs potentiels nationaux, ce joueur de poche (1 m 73) au toucher de balle soyeux est âgé d’à peine 19 ans quand il est convoqué avec le Ghana pour la Coupe d’Afrique des nations (CAN) 1982, disputée en Côte d’Ivoire. Les Black Stars, surnom des joueurs ghanéens, remportent le trophée face à la Libye aux tirs au but. Le jeune homme, entré en cours de finale, écrit la première ligne d’un palmarès amené à en compter d’autres.

Abedi Ayew prend alors le nom d’Abedi Pelé en hommage au célèbre Brésilien et parce que son jeu rappelle celui du «joueur du XXe siècle». Sous ce nom, il s’inscrit dans la liste des premiers footballeurs africains connus en Europe, tels que le Camerounais Roger Milla ou les Algériens Mustapha Dahleb et Rabah Madjer.

Après le Qatar, la Suisse et le Bénin, Abedi Pelé rejoint la France en 1986. Une terre où il va connaître ses plus grands succès avec la machine Olympique de Marseille de Bernard Tapie. Sous le maillot des Ciel et Blanc, le Ghanéen glane trois fois le Ballon d’Or africain entre 1990 et 1992, ainsi que trois championnats de France. Mais surtout, en plus de ravir le Stade Vélodrome de ses dribbles chaloupés, il accède à la postérité en donnant à Basile Boli le but du sacre marseillais en finale de Ligue des champions 1993 contre l’AC Milan (1-0) à Munich.

Retraité depuis 2000, le meilleur buteur de l’histoire du Ghana (33 buts) a été cité, en 2004, dans la FIFA 100, une liste des 125 joueurs les plus exceptionnels et les plus talentueux de leur génération. Une liste composée à l’occasion du centenaire de la Fifa par un certain… Pelé. En 2007, Abedi Pelé a connu des heures difficiles: il fut accusé de corruption après que le club dont il est le président-fondateur, le FC Nania, a remporté un match sur le score de… 31-0!

Et depuis peu, Abedi Pelé observe avec attention l’émergence de ses fils Rahim, André et Jordan.

Kwame Ayew, le frère de l’ombre

Moins connu que son grand frère Abedi, Kwame Ayew n’en a pas moins eu une carrière plutôt honorable. Né en 1973, Kwame s’est illustré au poste d’attaquant. Après s’être essayé au championnat de France du côté de Metz, puis en Arabie saoudite et en Italie, il prend la direction du Portugal en 1995. Au sein de l’élite lusitanienne, ses talents de buteur se révèlent avec plus d’évidence, surtout lors de son passage à Boavista, club pour lequel il score 31 buts en deux saisons. Parallèlement, Kwame porte aussi le maillot de la sélection ghanéenne, avec parcimonie.

Son principal fait d’armes remonte à l’été 1992: il fait partie de l’équipe médaillée de bronze aux Jeux olympiques de Barcelone. Un titre dont lui peut se targuer, au contraire d’Abedi Pelé, trop âgé pour disputer ces olympiades! Jusqu’en 2000, Kwame marque 9 buts en 25 sélections pour son pays, dont certaines sous la coupe de son frangin devenu capitaine.

Par la suite, Kwame Ayew connaît une fin de carrière plus modeste, avec des escapades en Chine et en Turquie. Retiré des terrains depuis 2007, l’ancien attaquant s’est reconverti dans la religion. Il a fondé, en 2010, une église évangéliste au Ghana. Il est aussi un fervent militant des causes luttant contre la pauvreté. Abedi et Kwame ont un autre frère, Sola Ayew, également footballeur. Quasi inconnu du grand public, ce dernier a vu sa carrière se limiter aux frontières ghanéennes.

Rashim Ayew, l’aîné d’Abedi

Fils aîné d’Abedi Pelé, Ibrahim Ayew, plus connu sous le nom de Rashim Ayew, est le premier à perpétuer la tradition familiale. Après son père et ses oncles, il amorce la nouvelle génération des Ayew. Rashim est né en 1988 à Tamale, au nord du Ghana. Contrairement à ses frères André et Jordan, il est le seul natif du pays.

Milieu de terrain défensif, Rashim Ayew a été formé au sein du club de papa, le FC Nania, avec lequel il a aussi effectué ses débuts professionnels. Après une brève expérience du côté du club égyptien du Zamalek SC, il rallie l’Europe et la formation belge de Lierse SK en janvier 2011. Appelé en sélection dès 2009, il a pris part à la campagne des Black Stars durant la CAN 2010, qui a vu le Ghana échouer en finale devant l’Egypte. Présent en Afrique du Sud pour le Mondial 2010, Rashim Ayew n’en a cependant pas disputé une seconde. C’est des tribunes qu’il a assisté aux exploits de son frère André, étincelant avec le Ghana. Rashim, motivé par la réussite de ses frères en France, espère lui aussi se faire un prénom. Conscient que ses cadets ont accédé à un niveau supérieur au sien, le plus grand des trois entend bien lui aussi faire honneur au nom qu’il porte :  «Moi aussi, je me bats ici [en Belgique] pour porter haut notre nom de famille et pour que le Ghana reste au top. Notre père a mis la barre très haut, et il sera difficile pour nous de l’égaler. Mais il sera fier si nous en sommes capables. C’est un challenge pour chacun de nous», a-t-il déclaré récemment.

André Ayew, la pépite de l’OM

Il est la nouvelle coqueluche du Stade Vélodrome. André Ayew a, il est vrai, tout pour séduire l’exigeant public olympien: il est le fils d’une légende locale, il en a hérité le talent, et il a été formé à l’OM! Le deuxième des trois fils Ayew a vu le jour en 1989 à Seclin, dans le Nord, alors que son père évoluait à Lille.

Comme son paternel, André se tourne vers le football dès son plus jeune âge, au Ghana. L’histoire s’accélère quand il rejoint l’Hexagone pour intégrer, en 2004, le centre de formation de l’Olympique de Marseille, alors présidé par Pape Diouf, le dirigeant sénégalais. En août 2007, «Dédé» franchit un cap en faisant ses premiers pas avec l’équipe de l’OM et la sélection du Ghana, en dépit de son âge et de son inexpérience. Installé dans le groupe ghanéen de Claude Le Roy pour la CAN 2008, le milieu de terrain offensif, en quête de plus de temps de jeu, est prêté par l’OM en 2008. Une première année à Lorient, puis une seconde à Arles-Avignon en Ligue 2, jusqu’en mai  2010. Juste avant de chavirer dans un autre monde. Titulaire avec le Ghana lors de la Coupe du monde 2010, il brille sur les terres sud-africaines. Ses performances sont telles qu’il compte parmi les trois postulants au titre de Meilleur espoir de la compétition. Une récompense qui revient finalement à l’Allemand Thomas Muller, plébiscité devant Ayew et le Mexicain Giovani Dos Santos. Mais qu’importe, la machine est lancée. Ses récents progrès incitent Didier Deschamps, le coach marseillais, à l’incorporer dans son groupe. Et André Ayew se montre plus que digne de cette confiance, en réalisant une saison 2010-2011 époustouflante. D’entrée incontournable, il trouve le chemin des filets à onze reprises, martyrise les défenses adverses, et les supporters marseillais l’élisent Olympien de la saison. Et papa applaudit, bien sûr. Inévitablement, le nouveau joyau de la Canebière commence à attirer les regards des grands clubs. Le Bayern Munich et les Anglais d’Arsenal notamment suivent avec beaucoup d’intérêt André Ayew, lié contractuellement à l’OM jusqu’en 2014 avec une clause de départ de 13 millions d’euros. En attendant un éventuel transfert, Marseille toute entière chérit l’enfant prodige de son ancienne idole.

Jordan Ayew, le jeune qui pousse

Et dans cette famille en or, voici le petit dernier, Jordan. Pour quel autre club que l’Olympique de Marseille le troisième fils d’Abedi Pelé pouvait-il jouer? Né en 1991 dans la cité phocéenne, Jordan Ayew a suivi l’exemple de son frère André. D’abord plutôt attiré par la mécanique et l’automobile, l’adolescent attrape malgré tout le virus du football et garnit à son tour les rangs des équipes de jeunes de l’OM en 2005, alors qu’il n’a que 13 ans. Vivant mal le déracinement avec ses proches restés au Ghana, Jordan a la chance de pouvoir compter sur les conseils de son frère, dont il est très proche. C’est pourtant sans lui qu’il débute en Ligue 1 fin 2009 (André est alors prêté à Lorient). L’attaquant en devenir est même sacré champion de France 2010 avec Marseille. Un titre qu’il espère bien glaner désormais en compagnie de son aîné, avec lequel il vit. Depuis l’éclosion marseillaise d’André, Jordan est quelque peu passé au second plan dans les esprits. Moins décisif que son frère, l’international ghanéen (encore un!) conserve cependant une marge de progression évidente. Lui qu’on présentait, il y a quelques années, comme le plus doué des deux, a tout pour suivre les traces de son père et de son frère. Et perpétuer encore et encore la dynastie Ayew.


Nicolas Bamba

 

Amantle Montsho, la Botswanaise qui court plus vite que son ombre


En s’adjugeant la couronne mondiale du 400 mètres, Amantle Montsho a rapporté au Botswana la première médaille d’or de son histoire en athlétisme.

Les fans de suspense et de spectacle en ont eu pour leur argent lundi 29 août 2011 à Daegu (Corée du Sud), où se déroulent actuellement les 13e championnats du monde d’athlétisme. Il est un peu plus de 21h, et la finale du 400 mètres dames, intense à souhait, a livré son verdict. A l’arrachée, la championne du Botswana Amantle Montsho vient de s’offrir la médaille d’or devant l’Américaine Allyson Felix, tandis que la Russe Anastasiya Kapachinskaya se pare de bronze. Sans surprise, la course s’est réduite à un affrontement entre les deux favorites, Montsho et Felix. Sous la clameur du stade de Daegu, les deux athlètes se sont livré un duel titanesque, quasi insoutenable dans les derniers mètres. Et au moment de couper la ligne, Allyson Felix, triple championne du monde en individuel, doit rendre les armes, devancée d’un cheveu par Amantle Montsho (49’’56 contre 49’’59).

L’ascension progressive jusqu’au sacre

L’Américaine a certes battu son record personnel, mais sa déception est grande. Impériale sur 200 mètres à tous les Mondiaux depuis 2005, elle était à Daegu pour réaliser un doublé 200/400 inédit. C’était sans compter sur Amantle Montsho, l’étoile du Botswana, pays surtout réputé pour ses diamants. En «explosant» le record national, la nouvelle championne du monde entre dans l'histoire de l'athlétisme. Et c'est avec peine qu'elle retient des larmes de joie :  «Je suis tellement heureuse aujourd’hui. Je n’arrive toujours pas à y croire. Je voudrais remercier tous ceux qui m’ont soutenu et m’ont rendue plus forte. Je voudrais aussi remercier les concurrentes. Elles m’ont poussé à courir plus vite, en particulier Allyson Felix», a-t-elle déclaré à l'issue de la course.  Peu après que l’hymne botswanais a retenti dans le stade sud-coréen, la sprinteuse s’est présentée à la presse, rayonnante de bonheur. Quel chemin parcouru depuis son enfance à Mabudutsa, un village du nord du Botswana! La jeune fille, bien que plus rapide que tous ses camarades d’école, n’avait pas de destin tracé vers le toit du monde. Alors elle s’est battue pour l’atteindre. «Je ne suis pas née dans une famille de sportifs, mais grâce à mon courage et à mon travail, je suis arrivée où je suis aujourd’hui», a-t-elle confié. Pour atteindre ce niveau, Amantle Montsho a dû s'employer et faire des sacrifices. Comme le choix de quitter son pays natal en 2005, où elle ne pouvait bénéficier de conditions d’entraînement optimales. Direction le Sénégal et le Centre international d’athlétisme de Dakar (Ciad), structure d’élite pour les athlètes (africains notamment), loin des siens. Bien que rude, la séparation a porté ses fruits: la Botswanaise s’y est perfectionnée, sous l’œil de son coach ivoirien Anthony Koffi. En 2006, Amantle Montsho prenait la 2e place des championnats d’Afrique de 2006, derrière sa partenaire d’entraînement au Ciad Amy Mbacké Thiam, l’ancienne championne du monde adulée en Afrique. Un premier pas symbolique pour Montsho, appelée à reprendre le flambeau de son aînée.  Son potentiel se révèle: entre 2007 et 2010, la Botswanaise truste la première place de toutes les compétitions d’Afrique et signe des chronos de plus en plus encourageants. L'année 2010 confirme sa montée en puissance à plus grande échelle, quand elle se classe quatrième des championnats du monde en salle de Doha (Qatar). Finalement, la récompense à tous ses efforts est là. A Daegu, Amantle Montsho a su résister au retour acharné d’Allyson Felix pour offrir à son pays sa première médaille d’or en athlétisme. L'Afrique savoure aussi, elle qui attendait une nouvelle sprinteuse championne du monde depuis 2001 et la victoire à Edmonton (Canada) sur 400 mètres d’une certaine… Amy Mbacké Thiam.

La nouvelle star du Botswana

Quelle métamorphose pour Amantle Montsho depuis les olympiades d'Athènes en août 2004. A l’époque, elle était cette jeune femme de 21 ans, première représentante du Botswana en athlétisme aux JO. Elle avait quitté la compétition dans l’anonymat, sortie dès la première série. Quatre ans plus tard, elle se hissait en finale et terminait dernière des Jeux de Beijing. Autant dire que le rendez-vous est pris pour les JO de Londres, en 2012. Sa couronne mondiale lui confère d’office l’étiquette de prétendante à la plus haute marche du podium. A 28 ans, Amantle Montsho ne cache pas son ambition. «Je dois me préparer très sérieusement pour les JO, car chaque année, de nouvelles concurrentes émergent. Je dois bien me mettre ça en tête et repartir m’entraîner dur», assure-t-elle. Offrir au Botswana sa première médaille olympique lui assurerait un peu plus l’admiration de ses 1,8 million de compatriotes. Consciente de l’influence et de l’importance que peut avoir le sport dans les sociétés, Amantle Montsho veut être un modèle au sein de son pays : «Dorénavant, je vais être un exemple pour les jeunes athlètes du Botswana. Ils travailleront durs, maintenant qu’ils m’ont vu gagner une médaille d’or.» Le secrétaire général de l’Association botswanaise d’athlétisme, Legojane Kebaitse, loue le succès de la championne nationale et la lumière qu’elle jette sur la nation :  «Nous avons des diamants. Nous avons du bétail. Nous avions dit que nous voulions de l'or. Nous voulions trois médailles d'or et nous en avons une. Tous ceux qui souhaitent visiter l’Afrique peuvent maintenant voir qu’il y a de grands talents au Botswana.» Amantle Montsho en est assurément un. Un joyau africain qui n’a sûrement pas fini de briller sur les pistes d’athlétisme.

Nicolas Bamba


ECONOMIE


Crise économique: le AAA se raréfie sur la planète


Neuf pays de la zone euro sur dix-sept ont vu leur note dégradée par Standard and Poor's, vendredi 13 janvier 2012.

REUTERS/Francois Lenoir/Files

L’agence de notation Standard et Poor's a procédé à une dégradation en série de la dette souveraine des pays européens. La note d'excellence, le AAA, devient une rareté au niveau mondial : l’excellence en matière de finances publiques ne concerne plus que 14 Etats. La France et l'Autriche ont perdu leur note AAA, comme les Etats-Unis en août dernier et désormais le petit groupe des bons élèves - ceux qui obtiennent la note maximum - ne compte plus que 14 pays dans le monde.

Il s’agit de dix Etats européens, plus l'Australie, le Canada, Hong Kong et Singapour. En Europe, l'Allemagne, la Finlande, les Pays-Bas et le Royaume-Uni font partie de cette short-list. Après l'hécatombe que viennent de subir neuf pays membres de la zone euro sur dix-sept, seules la France et l'Autriche peuvent afficher la note immédiatement inférieure, AA+.

L'Espagne, la Slovénie et la Slovaquie n'ont plus qu'un seul A. L'Italie chute en catégorie B, à BBB+. Le Portugal devient une valeur spéculative avec BB seulement et Lisbonne est aussi la lanterne rouge des pays de la zone euro. A cela, il convient d'ajouter que, à l'exception de l'Allemagne et de la Slovaquie placées par Standard et Poor's sous perspective stable, tous les autres pays de la zone euro sont placés sous perspective négative par l'agence de notation qui se réserve ainsi la possibilité de les dégrader encore. reçu l’Oscar du meilleur film et de la meilleure réalisatrice en 2010 pour Les Démineurs («The Hurt Locker»), dispose de ses entrées au Pentagone. Elle avait déjà bénéficié à l’époque de son assistance pour le scénario des Démineurs. Aujourd’hui, le projet de son nouvel opus est en bonne voie. Des acteurs sont souvent cités pour faire partie de la distribution comme Idris Elba ou Guy Pearce. Dernier en date à révéler qu’il est bien en pourparlers avec les producteurs, Joel Edgerton. Le comédien australien âgé de 37 ans a partagé la vedette avec Tom Hardy dans Warrior, film d’arts martiaux à succès. Edgerton n’a encore rien dit du rôle qu’il pourrait jouer dans le film mais, détenteur d’une ceinture noire de karaté, celui du chef du commando des Navy Seal collerait plutôt bien à ses talents de sportif.   

A la Une de la presse française: le triple A perdu de la France

Par Norbert Navarro

L’actualité tient en une lettre ce samedi matin, 14 janvier, la première de l’alphabet, prononcée en trois exemplaires jusqu’à hier, en deux seulement depuis. Si je vous la chantais, cette revue de presse, vous diriez des vocalises. « A A A », puis « A A + ». Et ce ne serait plus du tout la même chanson. Car la dégradation d’un cran de la qualité de la « signature » de la France par l’agence de notation américaine Standard & Poor’s sonne comme une déflagration pour la presse française. « La France perd son AAA : la crise de l’euro s’aggrave », s’exclame Le Figaro en gros caractères noirs. « La France perd son triple A », écrit, cette fois-ci, en rouge, Le Parisien-Aujourd’hui en France.

Changement de ton, et de style, à la Une de Libération, avec ce surtitre imprimé en rouge : « La France dégradée », placé juste au dessus d’un patronyme qui barre, en noir et en gros caractères, toute la Une de Libé, celui du Président de la République, « S_RKOZY », patronyme auquel il manque, justement une lettre, la lettre A, tombée au plus bas de la Une et couchée sur le flanc, une patte en l’air, comme un animal foudroyé. La presse prend donc acte, non seulement de la dégradation de la note française, mais aussi de la notion de « perspective négative » qui lui est accolée comme du maintien par Standard & Poor’s du triple A de l’Allemagne. Libération n’hésite pas à y voir un « tremblement de terre », estimant qu’il s’agit d’un « camouflet pour le président de la République » (président écrit cette fois-ci avec un « p » minuscule, tandis que la République conserve, elle, son « R » majuscule à la Une du journal). L’Allemagne préservée par l’inflexible agence de notation et, dans le même temps, la France ainsi « sanctionnée », c’est « une double peine pour Sarkozy », martèle Libération. A 100 jours du premier tour de la présidentielle, il s’agit du « pire des scenarios » pour Nicolas Sarkozy enchérit le quotidien. Car en perdant son triple A, la France « s’éloigne du modèle allemand, tant vanté, et se rapproche un peu plus de ce Club Med, moqué, des pays mal notés », étant rappelé qu’en l’occurrence, le « Club Med » est cette expression méprisante qui désigne les pays du sud de l’Europe communautaire en proie au marasme économique comme à la crise sociale).

 

Triple A : A.. A.. A.. hallali politique


C’était inévitable, à l’approche de la présidentielle, les commentaires politiques fusent déjà dans la presse française. Et La Voix du Nord le résume. « Dans la mare politique, ce pavé, lancé par Standard and Poor's, ne cessera pas de provoquer des remous jusqu'à la présidentielle ». C’est « un coup dur pour l’Elysée », reconnaît Le Parisien-Aujourd’hui en France. « Les conséquences immédiates de la dégradation de notre note vont être beaucoup plus politiques qu'économiques, confirme La République du Centre. Nicolas Sarkozy, le Président du triple A devient inévitablement le Président de la dégradation de la France », estime le quotidien. « Dans la course présidentielle, cela revient à concourir avec du plomb dans les poches », formule Le Journal de la Haute-Marne. « Une catastrophe, rehausse Le Midi libre. A 100 jours de la présidentielle, l'annonce de la dégradation de la note de la France est un véritable coup de massue pour le chef de l'État ». Le Figaro en convient, mais il complète l’analyse. Cette « dégradation change (…) la nature de la campagne présidentielle en France, souligne-t-il. Les socialistes ont beau jubiler, ils sont concernés au premier chef. Contrairement à ce qu'ils affirment, il n'existe pas d'alternative à la politique suivie par le gouvernement (…) Cela exclut de vendre du rêve aux électeurs et exige, au contraire, d’engager des réformes structurelles trop longtemps repoussées (…) Si tous les candidats s’en persuadaient, Standard & Poor’s aurait au moins servi à quelque chose », soupire Le Figaro.

Triple A : avis de tempête

Reste les effets concrets de cet événement sur l’Etat, les entreprises et les particuliers. Et la presse française semble tâtonner sur ce point ce matin. Il faut dire que ces conséquences sont encore difficilement prévisibles. Et même si la manchette du journal Le Parisien-Aujourd’hui en France promet à ses lecteurs de leur expliquer « ce que va changer cette dégradation », le contenu du journal est surtout marqué par l’emploi du verbe « risquer ». Ainsi, écrit Le Parisien, « Paris risque – en théorie – de devoir emprunter plus cher (…) la perte du triple A risque d’entrainer l’attentisme sur les embauches et l’investissement (…) les prêts accordés par les banques, qui pourraient elles-mêmes être dégradées risquent de connaître un nouveau ralentissement (…) la décision de Standard & Poor’s risque de compliquer les efforts de la zone euro ». Comme le prédit Le Figaro, « sur les marchés, la semaine prochaine risque d’être agitée ». Et cette prévision-là, elle, est tout sauf..risquée.

 

HISTOIRE


Ki-Zerbo, pilier de l'histoire africaine


Cinq ans après la mort du célèbre historien burkinabè, l'écrivain Emmanuel Dongala lui rend hommage.

Je me souviens encore de cette émission «Apostrophes» où pour la première fois Bernard Pivot invitait un parterre d'écrivains africains et pas des moindres. Le programme touchant à sa fin, le présentateur, de façon un peu facétieuse, a demandé à Joseph Ki-Zerbo qui évidemment était du nombre, si sans la colonisation, ce dernier serait aujourd'hui historien. «Historien?», a repris Ki-Zerbo, «Non, petit-fils d'historien probablement!». Voilà tout Ki-Zerbo, l'un des intellectuels africains le plus mésestimé sinon sous-estimé du XXe siècle. Et pourtant, sa contribution à l'élaboration d'un discours africain autonome, «endogène», pour reprendre le mot de ce premier agrégé africain d'histoire à la Sorbonne, a été aussi importante que celle de ses pairs sénégalais plus célèbres comme Léopold Sédar Senghor ou Cheick Anta Diop.

Se réapproprier l'histoire africaine

Pour lui, tout commence et finit par l'Histoire, car ce n’est que par une révision déchirante sur le plan historique que l'Afrique pourra développer une vision nouvelle du monde, «une nouvelle cosmogonie qui soit porteuse de bien de services et de valeurs». Pourquoi une telle révision, une telle rupture? Parce que trop longtemps l’idéologie dominante, européenne essentiellement, a fait croire que l’itinéraire historique de l’Afrique ne commençait qu’avec son contact avec l’Occident  (voir Hegel) et que l’essentiel de cette histoire se résumait à «l’épopée» coloniale du XIXe siècle et aux dernières décennies du XXe siècle où le continent fut décolonisé et mal décolonisé. Pour rompre avec cette vision réductrice de l’histoire africaine et permettre aux Africains «d’avoir un petit contrôle sur leur passé», Ki-Zerbo a commencé son gigantesque travail de pionnier en puisant aussi bien dans l’archéologie que dans les traditions orales. La première somme de ce travail est son ouvrage aujourd’hui devenu un classique, Histoire de l'Afrique Noire: D'hier à demain (1978). Plus tard, il co-dirigera deux ouvrages de la monumentale Histoire de l'Afrique, parrainée par l'UNESCO. Dans ces nombreux articles et ouvrages, Ki-Zerbo n'a cessé d'affiner sa réflexion. Il n'a cessé de clamer haut et fort que pour l'Afrique, développer une pensée endogène était une question de survie; sans cette pensée qui permettrait aux Africains de répondre aux questions «qui sommes-nous, d’où venons-nous?», l’Afrique deviendra sous peu victime d’un «clonage culturel» et qui dit clonage culturel, dit fin de la civilisation. Cette pensée endogène (et son corollaire de développement endogène) ne voulait pas dire s'emmurer et se camper dans le passé; l’on pense notamment au brumeux concept d' «authenticité» élaboré au Zaïre par Mobutu. Mais elle signifiait une pensée «poreuse à tous les souffles du monde» comme dirait le poète Aimé Césaire, et cependant puisant dans ses propres profondeurs tel un arbre qui se nourrit des vents extérieurs mais reste solidement enraciné dans sa terre. Ce n'est qu'alors, qu'une réflexion originale sur l’avenir de l'Afrique pourrait se faire, hors des grilles de lecture dominantes. Ainsi pourraient être repensés l'Etat, le développement, le système éducatif, l’importance des langues africaines dans l'éducation, la place essentielle des femmes et d'autres problèmes fondamentaux. Car il ne faut pas oublier que l'Afrique a été vidée de sa substance et que ce qu'on lui a apporté jusque-là contient beaucoup de vide.

Une pensée à mettre en action

Se réapproprier la totalité de son histoire, considérer les traditions orales comme sources valables d’éléments historiques, élaborer une pensée endogène et j’en passe, toutes ces idées originales à l’époque de leur conception sont aujourd’hui si bien intégrées dans la problématique et le paradigme des recherches et travaux actuels sur l'Afrique qu'elles ressemblent à des lieux communs tant elles semblent aller de soi. On oublie qu’à leur origine se trouve un certain Ki-Zerbo. Mais pour cet historien qui connaissait si bien l’Afrique pré-coloniale, perdre la paternité de ses idées et les voir tomber dans le domaine public ne pouvait être qu’être un objet de satisfaction, tout comme dans l’ancienne Afrique, il n’y avait pas de copyright sur les créations intellectuelles. En 1997, il reçut le Prix Nobel Alternatif pour ses recherches sur les modèles originaux de développement. Ki Zerbo n'a pas été qu'un intellectuel enfermé dans sa tour d'ivoire, il a été un homme d'action jusqu'au bout. Pour lui, la pensée ne pouvait être séparée de l'action et réciproquement. En 1958, jeune homme, il fit campagne pour le «non» au referendum organisé par De Gaulle, c'est-à-dire pour une indépendance immédiate des colonies africaines de la France. En 2003, octogénaire, il battait encore le pavé pour réclamer la lumière sur la mort de son compatriote journaliste Norbert Zongo.

Bien sûr, je ne veux en rien faire l’impasse sur le politicien burkinabè, celui qui avait été éliminé dès le premier tour de l'élection présidentielle en 1978. Mais franchement, entre un Ki-Zerbo président de la République du Burkina Faso et un Ki-Zerbo qui nous laisse en héritage ses travaux et son Histoire de l’Afrique Noire, je préfère de loin le dernier. À l'exception de Senghor peut-être, les intellectuels africains authentiques n'ont jamais réussi dans la politique politicienne et c'est tant mieux pour nous. Leur farouche indépendance, leur rigueur, font qu'ils ne se soumettent pas facilement . Il était donc prévisible que même un homme comme le Burkinabè Thomas Sankara, que par ailleurs Ki-Zerbo qualifie de «patriote sincère et désintéressé, un idéaliste volontariste», se défiât de lui et tout comme César, le fit juger et condamner par un tribunal dit «populaire». Le résultat fut l'incendie de sa bibliothèque de plus de 11.000 ouvrages, une sentence cruelle pour un intellectuel, historien de surcroît. C’est cela, le prix de la liberté intellectuelle. Il disait souvent, «nan lara, an sara»: «si nous nous couchons, nous sommes morts». Le lundi 4 décembre 2006, il ne s'est pas couché, il n'est pas mort, il a tout simplement rejoint l'Histoire. Mon plus grand regret c'est de ne pas avoir eu la chance de rencontrer, avant son départ, cet homme qui se situe d’emblée parmi les plus grands historiens et théoriciens que l’Afrique noire ait donné au monde.

Emmanuel Dongala est écrivain et professeur. Son dernier roman, Photo de groupe au bord du fleuve (Actes Sud, 2010) vient d’obtenir le Prix Kourouma 2011.

Peut-on qualifier l’esclavage de génocide ?

Généralités...

Les arguments invoqués pour prétendre que l’esclavage n’était pas un génocide, lorsque nous prenons le temps de les analyser, nous découvrons qu’ils sont en réalité largement évasifs, tandis que les chiffres démontrant le contraire sont eux, cinglant.

1- Les plantations n’étaient pas des camps de concentration : est-ce une affirmation fondée ?

Dans leurs ouvrages, nombreux sont les idéologues occidentaux qui affirment que les plantations de cannes à sucre de l’époque esclavagiste, ne peuvent être comparées à des "camps de concentration", tout simplement parce que la politique de natalité y était encouragée contrairement aux camps allemands où la mort était la seule issue. On reconnait là, la patte des membres du fan Club d’Eric Zemmour ! D’autre part, vu que les propriétaires avaient besoin de leur main d’œuvre servile pour assurer leur cadence de production, ils avaient l’habitude de prendre soin de leur esclaves, tant sur le plan de la nourriture que des soins. Cependant, que constatons-nous ? En y regardant de près, chiffres à l’appui, certains prennent leurs rêves pour la réalité.

2- Les plantations étaient bel et bien des camps de concentration !

Les données relatives aux plantations de la Guadeloupe révélées par l’enquêteur Lasserre, montrent qu’en 1671, il y avait sur 1513 couples possibles, 0, 71 enfants et plus d’un siècle après en 1790, on en était encore à 0,80 enfant par couple possible.

Pour la Martinique, Gabriel Debien montre qu’en 1763, il y avait 0,57 % de femme âgées de plus de 17 ans ayant un enfant de moins de 6 ans.

Pour Saint Domingue, le même auteur révèle que de 1741 à 1772, sur une plantation de 120 esclaves, il n’y a eu que 2 enfants par an. Après, même avec 50 esclaves de plus, le nombre était resté le même.

Sur une autre plantation de 150 esclaves, on a noté 6 naissances en 1787, 5 en 1789 et un seul en 1790. Ainsi, on le voit bien, les colons français n’ont jamais encouragé la natalité pour éviter de réduire leur profit et les seules plantations où la natalité a été quelque peu prise en considération sont celles des.... pères Jésuites, dominicains ou autres venus soit-disant évangéliser les Nègres. Ces données sur la natalité ont été encore soulignées le Marquis de Fénelon en Guadeloupe et en Martinique. Il constata aussi que c’était le seul avantage que ces plantations "religieuses" accordaient à leurs esclaves. On est très loin du catéchiste !

Ainsi, le taux de fécondité des femmes a été particulièrement mis à mal, en raison des conditions de vie inhumaine, sur les plantations. Selon l’étude de G. Debien, peu de femmes parvenaient à être fécondes et les colons préféraient acheter en permanence de nouveau captifs plutôt que d’encourager la création de familles. Enfin, la dure réalité est que les quelques femmes enceintes l’étaient souvent des colons eux-mêmes, car le viol des femmes esclaves était l’un des traits marquant de la plantation.

3- L’esclavage des Noirs est donc aussi un Génocide !

C’est le point le plus discuté du débat car par «  Génocide » on sous-entend une "extinction raciale" immédiate et massive. Or, la véritable question est la suivante : Quelle est légitimement la durée d’extinction en dessous de laquelle on ne reconnaît pas l’aspect génocidaire d’un Crime contre l’humanité ayant fait plus de 200 millions de victimes [1] ? 5 minutes ? 50 minutes ? 5 ans ? 50 ans ? En réalité, il n’y a aucune durée, seule compte l’issue finale.

Par exemple, si on tient compte des données chiffrées relatives à l’espérance de vie que l’enquêteur Gabriel Debien nous a dévoilé à propos des plantations françaises de St Domingue (Haïti), on découvre ceci :

o Sur la plantation Cottineau, 58 % des esclaves achetés en 1773 étaient décédés en 1774,

o Sur la plantation Constand, 51 % des esclaves achetés en 1764 étaient mort en 1767,

o Sur la plantation Grandhomme, 5O % des esclaves achetés en 1764 étaient décédés en 1768.

o Sur la caféière Guiton, on a 32 % de morts entre 1767 et 1768.

On constate alors que pour les plantations de :

o Cannes à sucre, en l’espace de 2 à 8 ans, 100 % des esclaves achetés à un moment x, avaient déjà rendu l’âme,

o Café, en l’espace de 3 à 4 ans, 100 % des esclaves achetés à un moment x, avaient rendu l’âme.

N’a-t-on pas ici, la preuve formelle qu’il s’agit bien d’un génocide calculé combinant les aspects suivants : o Kidnapping d’enfants appartenant à un groupe ethnique, o Altérations physiques et mentales portés à un groupe ethnique précis, o Atteinte à la personne humaine, o Altération de la fécondité féminine naturelle et des naissances, o Meurtre programmé d’individus utilisés comme « bêtes de somme ».

5- En conclusion...

En Mai 2006, le prof. Steven Han proclamait dans le Monde Diplomatique, pour masquer l’aspect génocidaire des plantations sucrières, que : « Les plantations de cannes à sucre n’étaient pas des abattoirs : elles fonctionnaient selon un système de travail fondé sur l’exploitation et l’oppression, auquel les esclaves s’adaptaient et contre lequel ils luttaient tout à la fois ». Mais en disant cela il se contredisait lui-même, car préalablement il avait consigné sur la même page, dans un passage relatif à l’économie sucrière, que : «  L’économie sucrière réalisait alors des bénéfices considérables et les planteurs estimaient moins coûteux de faire travailler leurs esclaves jusqu’à l’épuisement et d’en racheter pour remplacer ceux qui succombaient que d’encourager leur reproduction naturelle ».

Donc Echec et mat aux idéologues !

Vie, Santé, Force & Unité !!!


ACTUALITES


MAITRE GUY HERVE KAM A PROPOS DE L’AFFAIRE GUIRO : "Le président du Faso est engagé dans tout sauf dans la lutte contre la corruption"Faso est engagé dans tout sauf dans la lutte contre la corruption"

 

Guy Hervé Kam est avocat à la cour. Se prononçant sur l’affaire Ousmane Guiro, il explicite les chefs d’accusations qui pèsent sur ce dernier, évoque quelques directions dans lesquelles le dossier pourrait évoluer et fait une appréciation de la volonté politique de lutter contre la corruption au Burkina.

"Le Pays" : Maître Kam, en tant qu’avocat, quelle a été votre première réaction à l’arrestation de Ousmane Guiro ?

Maître Guy Hervé Kam : J’ai eu une réaction à deux niveaux. En tant que citoyen du pays des Hommes intègres, c’est une grande honte que j’ai ressentie de voir que des compatriotes avaient deux milliards de F CFA dont ils n’avaient pas besoin. Ma réaction en tant que juriste, c’est de penser à la suite judiciaire que cette affaire peut avoir, compte tenu de la complexité du domaine dans lequel l’on se trouve et de l’état de notre justice. Au début de l’affaire, on parlait de concussion et de détournement de deniers publics. Aujourd’hui, on parle de présomptions graves de corruption, de blanchiment de capitaux, d’enrichissement illicite. Que désignent ces termes et pourquoi ces chefs d’accusation ont évolué ?

Le détournement de deniers publics est une infraction qui vise une catégorie de fonctionnaires à savoir ceux qui sont dépositaires de deniers ou de biens publics. Si ces fonctionnaires détournent ou dissipent ces deniers ou biens publics, ils sont passibles de détournement de deniers publics. Comme elle, la concussion est une infraction particulière qui ne s’applique pas à tous les fonctionnaires mais à ceux qui peuvent par leurs fonctions, être amenés à percevoir des droits ou des taxes pour le compte de l’Etat, notamment les douaniers ou les fonctionnaires des impôts. Si un agent de cette catégorie perçoit du contribuable une somme indue, il est alors passible de concussion. On ne peut poursuivre quelqu’un pour concussion qu’en faisant la preuve que l’agent a perçu plus sur des droits qu’il ne devait percevoir ou des droits qu’il ne devait pas percevoir. Cette preuve est difficile à établir au tout début de la procédure. Pour ce qui concerne le détournement de deniers publics, il faut que les enquêtes permettent de savoir si l’intéressé avait des deniers publics à sa disposition, qu’il les a affectés à une autre destination ou qu’il les a tout simplement dissipés, pour pouvoir l’établir. A voir la manière par laquelle la procédure a commencé, en tout cas d’après les informations dont nous disposons, ce n’est pas une enquête administrative qui a permis de savoir que l’intéressé, en tant que directeur général des douanes, a fait des malversations. Il s’est agi plutôt de dépenses somptuaires de la part de jeunes qui ont conduit à découvrir de l’argent et de remonter à l’intéressé. A partir de ce moment, il est, à ce stade, prématuré de dire que cet argent provient d’une perception irrégulière des droits de douanes ou détournement des deniers publics que monsieur Guiro avait à sa disposition et dont il aurait abusé.

C’est donc tout à fait compréhensible qu’à ce stade de la procédure, les inculpations aient changé vers des inculpations plus simples à établir. Quand on parle de corruption par exemple, c’est une infraction qui consiste pour un fonctionnaire à demander ou à accepter des dons ou présents ou l’argent pour accomplir ou refuser d’accomplir un acte de sa fonction. Dans le cas présent, on peut se dire que les revenus normaux d’aucun agent de la fonction publique burkinabè ne peuvent lui permettre d’avoir deux milliards de F CFA. Et donc, si vous avez deux milliards, vous avez probablement sollicité ou accepté des dons pour accomplir ou refuser d’accomplir les actes de votre fonction. C’est plus facile, à ce stade, de présumer que les sommes proviennent de faits de corruption et l’information judiciaire visera à les établir ou à infirmer cette présomption. S’agissant de l’enrichissement illicite, c’est encore plus difficile car cela suppose qu’un agent s’est enrichi en se servant des biens de l’Etat. Cela voudrait dire que les deux milliards de F CFA proviendraient des caisses de l’Etat ou de l’utilisation d’autres biens de l’Etat pour se les procurer. Cela me paraît déjà plus compliqué que la corruption, mais ces deux infractions sont bien envisageables au stade actuel de la procédure. Le blanchiment de capitaux lui, est une infraction qui, bien qu’envisageable, suppose beaucoup d’autres recherches à mener car il suppose que l’argent trouvé a une origine délictuelle ou criminelle. Si l’on établit l’origine frauduleuse de ces deux milliards de F CFA, il sera alors aisé d’établir le blanchiment. Sauf que s’agissant probablement de la même personne, il y a de fortes chances que les éléments du blanchiment soient eux-mêmes des éléments constitutifs de la première infraction. Dans ce cas, le juge utilisera une seule qualification et alors on ne pourra pas retenir en même temps le blanchiment et l’enrichissement illicite, mais une seule de ces infractions.

Le bruit court que les deux milliards de F CFA pourraient être le fruit de certains cadeaux ou avantages liés au poste de directeur général qu’occupait Ousmane Guiro. Est-ce que cela pourrait être un moyen de défense ?

Avec tout le respect que je dois à mes confrères qui auront la charge de la défense de Ousmane Guiro, j’espère que cela ne sera pas utilisé pour la défense parce qu’il y a des avantages liés à une profession. Il semble que les douaniers ont ce que l’on appelle les fonds communs qui sont en réalité des ristournes que l’Etat leur donne sur la base de leur activité. Mais ce sont des avantages légaux dont l’origine peut être prouvée. Par contre, tout autre avantage serait indu. En tant que directeur général des douanes, si l’on reçoit des cadeaux pour accomplir ou refuser d’accomplir un acte de sa profession, comme accélérer une procédure, lever une pénalité, etc., c’est de la corruption. Car ce n’est pas en changeant le terme de cadeau en don ou vice-versa, que l’on passera d’infraction à acte légal. Dans ce genre de cas, l’infraction pourrait être retenue sauf s’il n’y a pas de volonté de le faire. Il y a des éléments pour distinguer un cadeau d’un acte de corruption. Le premier élément, c’est qu’un cadeau n’est jamais discret. On ne se cache pas pour faire un cadeau. A partir de ce moment, l’argent reçu en cadeau ne doit pas être caché non plus. Le second élément, c’est que le cadeau n’est pas interessé. Pourquoi deux milliards de F CFA en cadeau à Ousmane Guiro et non à vous et moi ? Si l’on fait un cadeau au DG des douanes, c’est qu’en raison de ses fonctions, il a le pouvoir d’accorder ou de réfuser des facilités dont on veut profiter. Cela signifie que les dons qu’il reçoit sont intéressés, contrairement aux cadeaux qui sont désintéressés.

Quels pourraient être les moyens de défense de Ousmane Guiro et dans quel sens la procédure pourrait évoluer ?

Ousmane Guiro et ses conseils seront maîtres de leur défense. Ce que je peux dire par contre, c’est que le juge d’instruction qui est actuellement en charge du dossier, a les outils nécessaires pour édifier le peuple burkinabè sur les tenants et les aboutissants de cette affaire. La tâche ne sera pas facile d’établir les faits compte tenu de la faiblesse de notre législation. Cela ne signifie pas que celle-ci ne permet pas de punir. Mais si l’on applique la loi actuelle dans une interprétation favorable à la lutte contre la corruption, cela peut constituer un précédent intéressant. Ce que nous pouvons craindre, c’est que le droit ne soit pas interprété comme il se doit, tout simplement par manque de volonté politique pour réprimer vraiment la corruption.

Justement, à votre avis, cette volonté de combattre la corruption existe-t-elle au Burkina ?

De manière catégorique, je dis non pour la simple raison qu’on est en train de se tromper gravement sur ce qui se passe. Le Premier ministre a affirmé que le gouvernement serait désormais impitoyable avec les agents corrompus, si des preuves existent contre eux. A analyser ces propos, on a l’impression que pour qu’il y ait des preuves, un agent de la fonction publique devrait avoir des cantines d’argent chez lui. On peut aller plus loin en pensant qu’au lieu d’avoir deux milliards de F CFA dans des cantines, si Ousmane Guiro avait 10 villas de 200 millions de F CFA à Ouagadougou, on aurait considéré qu’il n’y a pas de preuves. Car, aujourd’hui, il y a des fonctionnaires d’un niveau plus bas que celui de Ousmane Guiro qui ont de tels biens à Ouagadougou. Cela n’est pas considéré comme une preuve et pour moi, c’est un manque de volonté politique. Lorsqu’on observe la scène burkinabè, on se rend compte que le président du Faso est le premier supporter des Etalons, le premier engagé dans tout sauf dans la lutte contre la corruption. Cela aussi traduit un manque de volonté politique. Je voudrais qu’à partir de cet élément, le président du Faso dise clairement que la récréation est terminée et qu’il fera de la lutte contre la corruption une priorité de ce mandat. Il pourrait, par exemple, instruire, par son ministre de la Justice, tous les procureurs généraux, prês les deux cours d’appel du Burkina de faire de 2012 une année mains propres. A partir de ce moment, la volonté politique sera clairement affichée et je vous assure qu’on découvrira beaucoup de choses.

A vous écouter, vous semblez pessimiste. Pensez-vous que l’affaire Guiro ne sera qu’un feu de paille ?

Il ne s’agit pas de dire que le cas Guiro sera un feu de paille. Toutes les études en matière de lutte contre la corruption le prouvent : lorsque celle-ci atteint le stade systémique, c’est-à-dire qu’elle n’est plus un fait individuel d’un agent isolé mais un comportement généralisé, la sanction d’un seul agent, même convaincu de corruption, ne suffit plus, parce que ce dernier n’est qu’un maillon d’une chaîne. Si on l’enlève de la chaîne, le système le remplace immédiatement et la corruption continue. Au Burkina, il y a bien longtemps que la corruption a atteint le stade systémique. Il faudrait alors pour la combattre une politique globale de lutte.

Quelles mesures le gouvernement pourrait-il prendre pour limiter les possibilités de corruption au niveau de certains fonctionnaires ?

Une mesure importante dans la lutte contre la corruption serait de réduire le pouvoir discrétionnaire que certains agents ont dans les prises de décisions en matière de deniers publics. Par exemple, les douaniers et les agents des impôts ont le droit de transiger sur les amendes infligées sur les droits à percevoir. Il faudrait faire en sorte qu’une telle décision soit prise à un niveau où un seul agent ne peut pas marchander son pouvoir de transaction. Ensuite, il faut donner un sens à l’obligation de déclaration des biens qui pèse sur certains agents en rendant publiques leurs déclarations, à commencer bien sûr par le chef de l’Etat en personne. Enfin, il faut que la justice se réveille et qu’elle arrête de faire croire au peuple qu’elle n’a pas les moyens légaux pour lutter contre la corruption. Avec les textes que nous avons, je vous assure qu’une justice indépendante et courageuse peut faire beaucoup de choses dans le sens de la lutte contre la corruption.

Le Pays


A la Une : l’affaire Kieffer

 

Par Norbert Navarro

Annoncés initialement pour mardi ou mercredi de cette semaine qui s’achève, c’est finalement hier qu’ont été connus les résultats du test ADN pratiqué sur le squelette exhumé dans l’ouest de la Côte d’Ivoire. Ce n’est pas celui de Guy-André Kieffer, journaliste franco-canadien disparu à Abidjan en 2004. « L’expertise ADN est négative », titre sobrement le quotidien gouvernemental Fraternité Matin. Même concision du journal Le Patriote. « Le squelette exhumé en Côte d’Ivoire n’est pas celui de Kieffer », énonce le quotidien proche du président Alassane Ouattara, qui se contente, ce matin, comme plusieurs de ses confrères, de reproduire une dépêche d’agence, ce qui explique la référence superfétatoire à la « Côte d’ivoire » dans son titre. La presse ivoirienne indépendante est un peu plus diserte. Ainsi, pour Soir Info, « cette annonce déçoit l’entourage de Guy-André Kieffer qui avait pensé que cette dépouille (…) était bien celle du journaliste ». Le journal L’Inter, lui, s’enhardit à formuler qu’avec ce squelette exhumé, le juge d’instruction français Ramaël a « ramassé de faux os ». « Ramaël a encore échoué », enchérit, en Une, L’Intelligent d’Abidjan. Affaire Kieffer : le mystère « Gorge profonde ». Mais les commentaires les plus virulents, c’est dans Le Nouveau Courrier qu’on peut les lire ce matin. A la veille de la découverte de ce squelette, le journal, en effet, avait publié les dires d’un mystérieux témoin anonyme se prétendant issu des ex-rebelles ivoiriens et s’accusant d’avoir participé à l’enlèvement et au meurtre de Guy-André Kieffer. Baptisé « Gorge profonde » par le journal, cet homme refait surface ce matin dans Le Nouveau Courrier pour accuser le juge français qu’il prétend avoir rencontré à Abidjan. « Ramaël ne joue pas franc-jeu », accuse-t-il dans les colonnes du quotidien. Pour Le Nouveau Courrier, en tout cas, cette affaire de squelette était un « pur montage médiatique (…) un contrefeu devant les révélations faites par "Gorge profonde" (…) dans le but d’accuser le pouvoir Gbagbo. (…) Il fallait donc détourner l’attention de l’opinion ivoirienne et française sur les investigations de notre journal », fustige Le Nouveau Courrier, qui dénonce les « méthodes étranges du juge Ramaël (…) ainsi que des confidences farfelues (…) des témoignages, contradictoires (…) dont le seul point commun est qu’ils accablaient des proches de Gbagbo et qui ont été présentés comme des avancées dans l’affaire. Avant d’être abandonnés ». Proche, comme Le Nouveau Courrier, de l’ex-président Laurent Gbagbo, le quotidien Notre Voie lance, lui, la polémique. « Que vont devenir nos confrères proches de Ouattara, martèle-t-il ? Où vont-ils cacher leurs visages, eux qui, sans avoir attendu les résultats du test d’ADN, comme nous l’enseigne notre métier, se sont engouffrés dans des commentaires puérils et désobligeants en soutenant que le squelette (…) était celui de Guy-André Kieffer ? »

Affaire Kieffer : non-dits

Justement, dans la presse proche de la nouvelle majorité ivoirienne, un journal, crânement, n’entend pas s’en laisser compter. Il s’agit de Nord Sud. « Tout est relancé, contrattaque, en effet, le quotidien proche du Premier ministre et ministre de la défense Guillaume Soro, (…) Ce qui venait conforter l’idée qu’il pourrait bien s’agir du journaliste, c’est le fait que l’endroit d’où les restes ont été exhumés est un fief de l’ancien régime de Laurent Gbagbo. Or, toutes les personnes suspectées d’être à la base de la séquestration de Guy-André Kieffer, sont liées au clan de M. Gbagbo. Les plus dithyrambiques parmi les analystes sont allés jusqu’à faire un lien entre le lieu où a été découvert le squelette et l’ancien ministre et cadre du Front populaire ivoirien (FPI), Paul Antoine Bohoun-Bouabré qui est curieusement décédé, mercredi dernier ». Et, sans le nommer, Nord Sud s’en prend ce matin à un de ses confrères. « Alors que tous attendaient avec impatience, les résultats du test d’Adn, un journal proche de l’ancien régime au pouvoir avait révélé que le squelette (…) ne pouvait pas être celui de Guy-André Kieffer (…) En tentant de démonter, avec promptitude, avant les résultats, la thèse de ceux qui soutenaient que ce sont bien les restes d’un Blanc qui ont été exhumés, les partisans de Laurent Gbagbo donnent les preuves qu’ils en savent plus qu’ils n’ont craché. Ils savent donc où se trouve le journaliste franco-canadien ». Enfin, dans la sous-région, il n’y a guère ce matin que Guinée Conakry Info qui commente cette affaire de squelette exhumé. « Un flop médiatico-juridique. Une montagne qui accouche d’une souris », lance le site internet guinéen, avant de conclure : « on peut imaginer que les Ivoiriens ne sont pas prêts d’accepter qu’une telle bévue puisse se répéter ».

Le franc CFA sera-t-il dévalué?

Partout en Afrique, la rumeur prend de l'ampleur. Le franc CFA serait dévalué au 1er janvier. Info ou intox?

Et voilà que l’on reparle encore de la dévaluation du franc CFA! Comme c’est souvent le cas ces derniers temps, ce sont les difficultés financières et économiques que rencontrent de nombreux pays de l’Union européenne (UE) qui relancent les rumeurs et enflamment le cyberespace africain à propos d’une dévaluation qui serait d’ores et déjà programmée pour le 1er janvier 2012. La question posée est de savoir si la parité fixe qui lie l’euro à la monnaie africaine (1 pour 655,957) se justifie dans une conjoncture économique marquée par un net ralentissement de l’activité en Europe et par de sérieux doutes sur l’avenir de la monnaie unique de ce continent.

La problématique est connue. Les partisans d’une dévaluation estiment qu’elle permettrait d’augmenter les exportations africaines à destination de l’Europe mais aussi de la zone dollar (en dévaluant le franc CFA, on lui permet d’être moins pénalisé par la vigueur, certes relative, de l’euro par rapport au billet vert étasunien). A l’inverse, ses adversaires estiment qu’une telle opération ne se justifie pas. Pour eux, la situation économique et financière des six pays de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) et des huit pays de l’Union économique et monétaire de l’Afrique de l’Ouest (UEMOA) - ces deux zones monétaires utilisant le franc CFA – n’ayant rien à voir avec celle de 1994, date de la dernière dévaluation de cette monnaie.

Propos contradictoires

C’est l’avis de l’économiste Abdourahmane Sarr, président du Centre d'Etudes pour le Financement du Développement Local (Cefdel) à Dakar. «Je ne pense pas qu’il soit nécessaire de dévaluer le franc CFA à ce stade surtout avec des réserves de change équivalentes à sept mois d'importations de biens et services pour l'UEMOA et presque 40 pour cent de la masse monétaire au sens large», explique-t-il à SlateAfrique. Pour autant, cet ancien représentant du Fonds monétaire international (FMI) au Togo et au Bénin précise tout de même que «cela ne veut pas dire que le franc CFA est à son niveau d’équilibre et qu’il n'est pas surévalué».

Lucas Abaga Nchama, gouverneur de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (BEAC) doute lui aussi de la pertinence d’une dévaluation. D’ailleurs, pour lui, il «n’y a pas lieu de penser qu’une dévaluation du franc CFA va avoir lieu». Tenus le 24 novembre à l’issue de la session extraordinaire du comité de politique monétaire (CPM) de la BEAC à son siège de Yaoundé au Cameroun, ces propos n’ont pas pour autant fait disparaître les rumeurs. Et ces dernières ont même été renforcées par Mabri Albert Toikeusse, ministre d’Etat ivoirien du Plan et du Développement, qui a affirmé, le 24 novembre dernier que «la dévaluation n’est pas une catastrophe» et qu’elle pourrait même «générer des milliards (de francs CFA) si elle est anticipée» tout en donnant «plus de valeur aux produits d’exportation entre les pays membres» de la zone CFA.

Modification du statut du franc CFA

De façon générale, Abdourahmane Sarr, est partisan d’une modification du statut actuel du franc CFA. «Je pense qu'il est temps de penser à faire évoluer le régime de change vers quelque chose de plus flexible ce qui pourrait se traduire en une perte de valeur par rapport à l’euro et ou le dollar» explique-t-il en précisant qu'il serait «possible d'obtenir les effets d'une dévaluation sans dévaluer le franc CFA lui-même». Une approche qui passerait par l’introduction de monnaies complémentaires au franc CFA et que, d’ailleurs, l’économiste préconise aussi dans le cas de la Grèce.

«Le Cefdel veut faire la promotion de monnaies complémentaires régionales au Sénégal et en Afrique de l'Ouest comme solutions à la problématique du financement du développement local et permettre aux communautés de base africaines de renaître», explique-t-il. Pour résumer, cette approche propose l’existence de monnaies complémentaires qui pourraient être utilisées, via une institution financière, par les populations «qui ne sont pas suffisamment bancarisées» et qui n’ont donc pas accès au crédit. Ce mécanisme «équivaudrait à une bancarisation sous une forme physique et pourrait stimuler les économies locales» tout en évitant de dévaluer la monnaie nationale.  

La fin d’un lien colonial entre l’Afrique et la France?

En attendant que les propositions d’Abdourahmane Sarr se généralisent, il est difficile de savoir si la dévaluation tant redoutée aura lieu ou non. Mais, comme c’est toujours le cas avec cette question qui revêt un caractère hautement émotionnel en Afrique, le débat sur le niveau de la parité fixe entre l’euro et la devise africaine a plutôt tendance à faire oublier l’essentiel. En effet, ce n’est pas un hasard si les rumeurs à propos d’une modification de cette parité se propagent au moment où l’on doute de plus en plus de la cohésion de la zone euro. A ce sujet, il faut savoir que le franc CFA bénéficie de la garantie de convertibilité du Trésor français. La question est donc simple : quel est l’avenir de cette garantie à l’heure où Paris et Berlin envisagent de nouvelles solutions institutionnelles pour faire face à la défiance des marchés vis-à-vis des besoins financiers (et donc d’endettement) de la presque totalité des pays européens? Quel que soit le mécanisme trouvé, la France réussira-t-elle (le voudra-t-elle) à maintenir cette garantie? L’Allemagne l’acceptera-t-elle? Si, d’aventure, ces deux pays européens arrivent à s’entendre sur une union budgétaire d’ici la fin janvier 2012, qui peut jurer que cela n’affectera pas le statut du CFA ou, du moins, sa valeur par rapport à l’euro?

Perpétuation d’un lien colonial

Du coup, la balle est dans le camp des dirigeants africains. Au lieu de les angoisser, cette incertitude pourrait s’avérer salvatrice. En effet, les pays d’Afrique centrale et de l’ouest pourraient enfin décider d’en finir avec cette garantie de convertibilité du Trésor français qui n’est rien d’autre que la perpétuation d’un lien colonial qui ne dit pas son nom. C’est bien de cela qu’ont conscience tous les Africains qui débattent actuellement de la valeur du franc CFA. Ainsi, la parité avec l’euro n’est rien d’autre que l’arbre qui cache le sujet crucial de l’indépendance monétaire d’une grande partie de l’Afrique subsaharienne.

Akram Belkaïd

 

Faut-il avoir peur d’une dévaluation du franc CFA?

Alors que l'Afrique bruisse de rumeurs sur une future «probable dévaluation», il est important de s’interroger, au-delà des doutes sur la véracité de l’information, sur les effets globaux, positifs et négatifs, que pourrait provoquer une telle mesure.

La rumeur d’une dévaluation du franc CFA, visiblement en provenance de Côte d’Ivoire, s’est propagée sur la toile africaine depuis quelques jours, suscitant de nombreuses inquiétudes et des atermoiements d’Africains de tous bords quant au devenir économique de la zone franc. Si de nombreuses raisons incitent à remettre en doute la véracité d'une telle information (une dévaluation ne s’annonce pas un mois et demi à l’avance même par les biais de fuites), il ne faut pas non plus en surestimer les conséquences. Depuis l'épisode de 1994 et la dévaluation du franc CFA, le spectre d'une nouvelle «dépréciation» de notre monnaie a souvent plané sur les citoyens de la zone franc comme une menace insurmontable. Tantôt vécue comme une forme d’humiliation, tantôt ressentie comme la consécration de notre vassalité vis-à-vis de la France et de l’Europe, la dévaluation constitue pour beaucoup le premier signal d’une récession économique à venir. Il est pourtant bon de nuancer cette position. Si la dévaluation d’une monnaie (on parle en réalité de «dépréciation» dans les systèmes de change flottants) était une maladie dont il faudrait se défaire comme la peste, il y a de fortes chances que le système monétaire international dans sa forme actuelle n'eut jamais existé. Il est d'ailleurs surprenant de voir certains intellectuels réclamer un système de changes flottants et s'inquiéter de manière quasi-épidermique d’une dévaluation pourtant inhérente à ce même système. La variabilité des taux de change monétaires est justement l'instrument qui permet soit de dévaluer soit de réévaluer sa monnaie en fonction de ses aspirations économiques pour conserver ou accroitre sa compétitivité. Et l'actualité économique nous le rappelle: cela fait quelques années que les Chinois font tout ce qu’ils peuvent pour que leur monnaie reste totalement sous-évaluée par rapport au dollar et ce pour doper leur commerce extérieur en dépit des incantations de Washington. Il n’y a donc aucune raison autre que purement idéologique qui justifierait qu'une parité fixe avec l'euro, élevée, figée et constante dans le temps soit le signe d’économies de la zone franc qui se portent bien. L'économiste togolais Kako Nubukpo ne s'y trompe d'ailleurs pas quand il affirme: «Les autorités monétaires de l'UEMOA (Union économique et monétaire ouest-africaine) semblent avoir largement opté pour une logique d'extraversion en développant un attachement viscéral a l'idée d'un franc CFA fort qui signifierait la bonne santé des économies ouest africaines et leur conformité a l'impératif de rigueur macroéconomique.» (L'improvisation économique en Afrique de l'ouest, Karthala, 2011). Maintenant, comme souvent en sciences économiques, il faut savoir apprécier si le remède de la «dépréciation» que l'on veut prescrire à un patient à un instant donné est moins dangereux dans ses effets que la maladie que l’on estime devoir soigner.

Vertus positives d’une «dépréciation» de la monnaie

D'un point de vue strictement théorique, la dévaluation du franc CFA peut être fondamentalement positive pour toute économie. Et elle a deux vertus fondamentales allant dans ce sens: elle rend les produits à l’exportation moins chers (en monnaie étrangère) et les produits à l’importation plus chers (en monnaie locale). Elle a donc vocation à renchérir nos exportations. De manière plus prosaïque, si un industriel français ne souhaitait investir chaque année que 10 euros de bananes sur la récolte du cultivateur de Penja, soit 6 559,57 francs CFA, alors en dévaluant le CFA de 50% et en supposant que le même industriel continue d’acheter pour le même montant d’euros de bananes, notre cultivateur camerounais doublerait son chiffre d’affaires à 13 119,14 francs CFA (20 euros). Cela supposant évidemment que le cultivateur en question ait la possibilité de produire le double de son stock. Le second effet positif d’une dévaluation est qu’elle rendrait les importations globalement plus chères. Par exemple, si l'on achetait des céréales telles que du riz par sac à 10 euros sur les marchés étrangers et que notre monnaie était dévaluée de 50%, il faudrait débourser non plus 6 559,57 francs CFA mais 13 119,14 FCFA pour acheter le même sac de riz. Cette augmentation des prix en monnaie locale aurait tendance à ralentir les importations et jouerait exactement le même rôle que pourrait jouer une mesure protectionniste comme une taxe à l’importation. Les produits importés devenant plus chers, les agents seraient incités à se tourner vers des ressources alternatives produites localement et/ou à développer eux mêmes une industrie permettant de produire les ressources devenues trop chères à importer. La vertu finale étant le développement d’une industrie locale et à terme, un renchérissement de l’emploi. Le troisième élément qui nous parait important, mais dont on ne parle pas souvent car il est actuel et lié à la crise de l’euro, c’est l’effet de stabilisation relatif des recettes d'exportations si l’Europe venait à moins échanger avec le Cameroun à cause de la crise économique qu'elle subit. Si les pays européens entrent en récession, il est possible que les termes de l’échange se dégradent, l'Union Européenne consentant à importer beaucoup moins de produits que les années précédentes. Une vertu de la dévaluation dans ce cas de figure serait alors de permettre aux industriels européens d’acheter les mêmes quantités de produits, pour un CFA dévalué de 50% disons, à moitié prix en monnaie étrangère (euros) tout en permettant aux exportateurs africains de conserver le même niveau de revenus en monnaie locale (CFA). Schématiquement, une baisse des importations en volumes de 50% de produits de la zone franc dans l’Union européenne n'entrainerait pas avec une dévaluation d'un même niveau (ou éventuellement une diversification de nos acheteurs) une perte nette sur les recettes de 50% pour nos exportateurs.

Effets négatifs pratiques d’une diminution de la parité

Concernant ensuite les inconvénients d'une dévaluation, ils sont de deux ordres: l'augmentation de la dette publique et l’inflation potentielle. La dévaluation ferait augmenter l’endettement extérieur (donc en monnaie étrangère) de notre pays. Les encours de notre dette extérieure s'élevant à près de 1131 milliards de francs CFA (1,7 milliard d'euros), cette partie de nos engagements financiers, représentant 65.3% de notre dette publique globale (Caisse Autonome d’amortissement, note de conjoncture de Juin 2011), passerait après une dévaluation de 50% du franc CFA à près du double, soit plus de 2262 milliards de francs CFA (3,4 milliards d'euros). A dynamique économique figée, schématiquement, il faudrait donc que les recettes d’exportations aient gonflé et les importations diminué de manière à générer un montant au moins égal à la dette extérieure actuelle pour parvenir à combler ce différentiel. D’un point de vue pratique, dévaluer notre monnaie (qui revient à «taxer» les importations) n’impliquerait pas non plus une diminution directe et systématique des importations en question: les agents ne réagissent pas mécaniquement à cette «désincitation» à importer. L’effet sur les prix des importations étant quasi immédiat quand l’effet sur les volumes exportés serait progressif, la balance commerciale devrait commencer par se dégrader. Et même à moyen terme, l’efficacité d’une telle incitation à ne pas importer dépendrait du caractère stratégique des produits qui rentrent dans notre pays en provenance de l’extérieur, s'ils sont de première nécessité ou pas, et de notre structure industrielle, si elle permet de procéder ou pas à la substitution à moyen terme des importations par une production locale. Pour le cas du Cameroun, il ne semble pas que ce soit le cas. Notre pays importe des denrées alimentaires qui comptaient pour 15% des dépenses d’importations en 2010. Aurait-il les moyens de se passer, par exemple, des importations de céréales telles que le riz ou le blé ou encore le poisson ? Il est fort probable que non. On aurait donc à faire face à une flambée des prix, donc à une baisse du pouvoir d’achat considérable, précisément au niveau des grands centres urbains qui sont les premiers consommateurs de ces denrées.

Dévaluation de 1994 et retour à la souveraineté monétaire

D’un point de vue purement conceptuel donc, la dévaluation a des effets négatifs et des vertus positives. Comme d’ailleurs souvent en économie: on ne peut avoir la rose sans les épines. Précisons néanmoins que pour la dévaluation de Janvier 1994, il n’est pas totalement établi qu’elle n’ait pas été positive contrairement à ce qu'on entend souvent ça et là. Les articles des économistes sur la question ont souvent apporté des réponses divergentes. Si on ne se fie, par exemple, qu'au document de travail Les effets à moyen terme de la dévaluation des francs CFA des économistes Denis Cogneau et Gérard Collange, la dévaluation de 1994 aura été plus ou moins une réussite en Côte d'ivoire et au Cameroun: «En matière budgétaire et financière, la réussite de la dévaluation du FCFA émerge très clairement, en comparaison d’une alternative d’ajustement réel, surtout les deux dernières années (1995 et 1996). Toujours en comparaison de l’ajustement réel, la dévaluation se révèle dans les deux pays [Cameroun et Côte d’ivoire, ndlr] une mesure sans ambiguïté expansionniste, comme l’avaient déjà constaté Collange et Plane (1994), Bourguignon, de Melo et Suwa-Eisenmann (1995) pour la Côte d’Ivoire, Cogneau, Herrera et Roubaud (1996) pour le Cameroun.» Cela étant, les causes fondatrices (chute drastique des recettes d'exportations et perte de compétitivité, déficit budgétaire important, incapacité de l'État à tenir ses engagements financiers à cause d'un endettement excessif) qui avaient conduit à la dévaluation de notre monnaie 1994, avec des effets diversement appréciés, ont totalement disparu: l’économie camerounaise est dans une dynamique de croissance durable et les problèmes qu’elle rencontre sont foncièrement liés à un déficit de bonne gouvernance qu’il faut rapidement combler. Et en dépit d'une balance commerciale légèrement déficitaire depuis quelques années, malgré les vertus théoriques que pourrait avoir à première vue une diminution de la parité du CFA vis-à-vis de l’euro, rien ne permet actuellement de justifier l'utilisation d'un remède aux effets secondaires aussi peu contrôlables sur la durée qu'une dévaluation dans une économie comme celle du Cameroun, relativement stable face aux chocs conjoncturels. Au final, la question de fond n'est pas tant celle de la dévaluation du franc CFA que celle des circuits de décision qui y conduisent et son pendant, l'arrimage du franc CFA à l'euro (donc sa non convertibilité). Plus fondamentalement encore, il serait légitime de se demander si nos banquiers centraux (la BCEAO,Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’ouest, et la BEAC, Banque des Etats de l’Afrique centrale) doivent continuer de laisser un outil de politique économique aussi important que la monnaie entre les mains de la BCE (Banque centrale Européenne) à Francfort en s'alignant religieusement sur l’unique objectif d'inflation à 2% de cette dernière. Ne devraient-ils pas, en toute logique, retrouver leur souveraineté en s’extrayant du carcan colonial que représente le CFA et en appliquant une politique monétaire en lien avec nos aspirations propres faisant de la stabilité des prix, de la lutte contre le chômage et de la quête de croissance leur principal crédo? La réponse à une telle question est entre les mains de nos politiques.

Yann Yange /Valérie Marin La Meslée


LITTERATURE, CULTURE TIC ET MEDIAS


Où sont passés les philosophes africains?


Rencontre avec le philosophe Souleymane Bachir Diagne qui, entre Dakar, Paris et New York, éclaire de son parcours les enjeux de sa discipline sur le continent.

Présence africaine, tel est le titre de la leçon inaugurale que le philosophe sénégalais Souleymane Bachir Diagne a donnée en cette rentrée aux étudiants parisiens de l’Institut de sciences politiques (Sciences-Po). Le professeur, qui enseigne à la prestigieuse Columbia University de New York, fut lui aussi étudiant à Paris dans les années 70.

Comment devient-on philosophe sur le continent africain?

A l’occasion de la parution du numéro de la revue Critique intitulé «Philosopher en Afrique», Souleymane Bachir Diagne revisite son parcours. Celui d’un élève brillant en sciences autant qu’en lettres, né à Dakar cinq ans avant les indépendances et que la philosophie viendra presque surprendre alors qu’il se destinait plutôt à une carrière d’ingénieur.

Philosophie des mathématiques

Le bachelier arrive en France avec deux lettres d’acceptation dans ses bagages: l’une de l’Institut des sciences appliquées de Lyon; l’autre du lycée Louis le Grand, l’accueillant en hypokhâgne. Souleymane Bachir Diagne hésite… et le hasard s’invite. Il faut dire que les Humanités l’attirent, à l’époque pour des raisons essentiellement politiques : «J’étais à gauche et je ne lisais que du Sartre. En gros… je voulais être un Sartre!» Dans ces années 70, à Dakar, les étudiants n’ont guère de référence en matière de philosophie africaine. D’ailleurs, tous ceux qui sont de gauche refusent jusqu’à cette notion spécifique, au nom d’un universalisme marxiste de rigueur. On ne s’étonnera pas de retrouver le jeune sénégalais à l’École normale supérieure, disciple autant qu’élève de Louis Althusser, qui disait que la philosophie était «la continuation de la lutte des classes dans la théorie». Mais l’agrégé de philosophie n’en a pas fini avec les mathématiques. Il reprend des études en la matière et consacre sa thèse à l’algèbre de la logique autour de l’œuvre du philosophe et mathématicien Georges Boole. (Ses deux premiers livres en sont d’ailleurs issus, dont Boole, l’oiseau de nuit en plein jour, Belin, 1989).

En 1982, il prend le chemin du retour au pays natal, non sans en avoir mûrement pesé l’enjeu. A Dakar, un désert l’attend dans le domaine qui est le sien. Qu’à cela ne tienne, Souleymane Bachir Diagne va créer son département à l’université Cheikh Anta Diop. «Je voulais profiter de mon expérience pour que l’enseignement de logique mathématique, qui est exigeant, soit enseigné à Dakar.» Dès 1986, il forme ses étudiants —qui jusqu’à ce jour le poursuivent. L’un d’entre eux, Yaovi Akapo, signe d’ailleurs l’un des articles de la revue Critique. Abdoulaye Elimane Kane, auteur d’une thèse sur les systèmes de numération, leur consacre le sien. Ce texte peut symboliser la relation que le philosophe entretient à la réalité africaine. La philosophie consiste à se donner des objets que l’on trouve autour de nous et à produire à partir d’eux une réflexion. Dans son article, mon collègue montre que l’humain est au centre des systèmes de numération dans les langues africaines».

Réconcilier l'Afrique

Souleymane Bachir Diagne a enseigné vingt ans durant à l’université Cheikh Anta Diop. Quand il y est arrivé jeune professeur au début des années 80, le débat était encore vif sur l’imposture que représenterait une dite «philosophie africaine», dénoncée notamment par le philosophe béninois Paulin Hountondji. «Je partageais alors ce point de vue mais avec le recul, j’en suis revenu», dit-il. «La philosophie africaine, celle de la force vitale, est la meilleure théorie pour penser l’esthétique africaine. Le travail de Senghor le montre bien.» Là encore, le temps a fait son office. Confronté à ces problématiques, le philosophe a été amené a revisiter des textes, et notamment ceux de Senghor, dont il a cherché à révéler le vrai projet, l’intention profonde (Léopold Sédar Senghor, l’art africain comme philosophie, Rive neuve, 2007). «Je me suis intéressé à lui au bon moment, il était parti du pouvoir, on pouvait accéder à sa pensée en s’étant dégagé de l’idéologie. En 1996, l’université a fêté son 90e anniversaire, et ce moment a marqué la réconciliation de l’intelligentsia avec la pensée senghorienne, la plupart des participants ont dit comment ils s’y étaient d’abord opposés et ce qu’ils y avaient trouvé depuis.» Dans l’enseignement de la philosophie à Dakar, un autre tournant est pris dans ces années 80 à l’université Cheik Antha Diop, à la suite de la révolution iranienne. «Dans notre pays majoritairement musulman, nous ne pouvions pas laisser passer sans réaction la première apparition d’un Islam politique. Avec mes collègues du département de philosophie, nous nous devions de rappeler ce qu’était la philosophie en Islam, une pensée libre et éclairée.» Souleymane Bachir Diagne inaugure cet enseignement, non comme spécialiste universitaire, mais par spécificité familiale, puisqu’il a reçu de son père une éducation à un islam lettré. De ce nouvel engagement viendront de nouveaux écrits, Islam et société ouverte, la fidélité et le mouvement dans la pensée de Muhammad Iqbal (Maisonneuve et Larose, 2001). L’œuvre se constituant chemin faisant…

Si l’on observe la palette philosophique, on remarquera en prenant connaissance de ce numéro de Critique que certains domaines sont plus riches que d’autres en Afrique. «Leur étude se "colore", explique le philosophe, en fonction des réalités spécifiques au continent.» Ainsi de la question de la démocratie avec ce que nous en dit la palabre démocratique, ou encore de la place de la philosophie politique dans les socialismes africains. Il faut y lire le récit de Paulin Hountondji sur le colloque auquel participa Jacques Derrida, en présence du président du Bénin de l’époque, Mathieu Kérékou, pour mesurer ce que furent les rapports entre philosophie et politique sur le continent. Dans sa propre contribution, Souleymane Bachir Diagne pose une question majeure autour de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, en la comparant à la célèbre charte du Mandé :  «C’est la question de l’individu et du collectif qui sont ici posées, et toute cette discussion philosophique sous-jacente n’a pas été abordée dans la rédaction de la Charte africaine. Voilà un enjeu très pratique de philosophie africaine: est-elle plutôt communautariste ou plutôt individualiste?»

Philosopher en V.O.

La question de la langue, présente dans d’autres secteurs que celui de la philosophie, s’y pose avec la même acuité. Quand il parle de langues africaines, Souleymane Bachir Diagne ajoute l’adjectif «endogènes», considérant que le français, l’espagnol, l’anglais et le portugais sont devenues des langues africaines. Comment faire en sorte que ces langues africaines deviennent celles de l’enseignement et de la recherche en philosophie ? «Nous devons produire nous-mêmes des textes en langues africaines, répond le philosophe, et un de mes anciens élèves américain travaille en ce sens à une anthologie de textes de philosophes africains auxquels il a demandé d’écrire des articles dans leur propre langue. Des locuteurs de cette langue sont ensuite chargés de les traduire en anglais.» Au chapitre des langues, une autre question se pose: celle de la traduction même du problème philosophique posé. «Parfois, il change de nature, subit des variations dans des langues qui ne sont pas des langues indo-européennes… Si l’on prend le problème de l’être, est-il équivalent sur le plan universel dans une langue où le mot «être» ne peut pas être un substantif?» L’immense tâche de la traduction (sur laquelle a travaillé la philosophe Barbara Cassin dans son Dictionnaire des Intraduisibles) est au cœur de la question. Et celle de la transcription avec elle. Souleymane Bachir Diagne travaille d’ailleurs à un livre sur ce thème.

«On peut considérer que les langues africaines sont transcrites pour la plupart, avec l’adoption de l’alphabet latin, il reste maintenant à produire massivement dans ces langues. Par exemple, traduire L’Éthique de Spinoza en sérère! Car si les langues sont devenues philosophiques, c’est par la traduction: ce fut le cas pour le latin et l’arabe traduisant la philosophie grecque. C’est ce qui attend les langues africaines, quoique traduction et commentaires aient déjà été faits à partir de l’arabe, les manuscrits de Tombouctou en témoignent: la philosophie grecque est entrée par l’islamisation». La philosophie africaine demeure une exception aux yeux du philosophe par le fait même que son corpus est, et reste majoritairement, oral. Une question comme celle que pose Paulin Hountondji sur la capacité d’une tradition orale de se faire critique d’elle-même alors que la mémoire est attachée à rapporter les choses telles quelles, donne corps à cette «exception africaine». La transcription de La Charte du Mandé (transcrite par Youssouf Tata Cissé) et du Serment des Chasseurs continue de soulever des polémiques, sur lesquelles le philosophe s’est exprimé dans Philosophie magazine avant de le faire plus en détail ici.

Où sont les philosophes africains aujourd’hui?

Souleymane Bachir Diagne, lui, a quitté Dakar pour s’installer complètement aux États-Unis en 2002. Mais il garde des liens étroits avec l’université sénégalaise à travers des séminaires, des directions de thèse pour «continuer à apporter ma pierre à la formation», dit-il. Il appartient surtout, comme la plupart des philosophes africains, au Codesria, le Conseil pour le développement de la recherche en sciences sociales en Afrique, qui s’ouvre depuis quelques années aux Humanités. «Je dis toujours quand on parle de l’exode des cerveaux qu’il est possible que les universités en perdent, mais que le Codesria lui n’a jamais perdu de cerveaux africains!» C’est à la demande de ce réseau actif qu’il écrit actuellement un Précis de philosophie africaine, où il revisite de manière personnelle les grandes questions. Reste que la plupart des philosophes africains sont aujourd’hui domiciliés aux États-Unis, comme le montre The Oxford Encyclopedia of African Thought. La philosophie africaine est de ce fait enseignée sur ces campus. Mais les professeurs passent parfois plus de temps sur le continent africain, tel Mahmood Mamdani, un collègue de Diagne qui enseigne aussi en Ouganda. Souleymane Bachir, lui, opère un retour en France, heureux de «rapatrier par le biais de ce numéro spécial de Critique, les questions de philosophie africaines telles qu’elles se posent à l’heure actuelle». Le philosophe est d’ailleurs de plus en plus présent à Paris. Intervenant régulier à l’université populaire du Quai Branly depuis plusieurs années, il a reçu fin 2010 le prix Édouard Glissant, comme une évidence, tant les rapprochements qu’il établit entre les pensées de Bergson, Senghor et Mohamed Iqbal sont dans la lignée du philosophe du Tout-Monde. Cet ouvrage, Bergson postcolonial, (CNRS éditions) est né de sa série de conférences au Collège de France. Il sera visiting professor à la Sorbonne en décembre et janvier, et viendra entretemps en novembre chercher le prix Dagnan-Bouveret que lui décerne l’Académie des Sciences Morales et politiques. «Je vis plus pleinement mon triangle identitaire, parce je me sens aussi profondément parisien que sénégalais et maintenant américain ». A Columbia, Souleymane Bachir Diagne s’apprête à donner un cours sur l’existentialisme.

«Et oui, je reviens à Sartre!»

Valérie Marin La Meslée

 

Souleymane Diamanka, slameur, peul et bordelais


Dans ses textes poétiques, le slameur franco-sénégalais porte haut sa double culture pour en faire un chant universel.

D'abord la voix, grave et profonde. Souleymane Diamanka, sur la scène du festival Africajarc fin juillet 2011, tient le public en haleine avec ses slams poétiques. Ses textes, en français et en pulaar, sa langue maternelle, rebondissent comme des balles dans un palais tapissé de rimes, tout comme les balles de ce jongleur qui a suivi l'école du cirque avant de se consacrer à l'écriture. Souleymane Diamanka chante sa double culture peule et française. L'artiste slame ses origines peules en commençant par décliner son origine: fils de Boubacar Diamanka et de Djeneba et c'est déjà tout un poème. Son vrai nom est d'ailleurs Duadja Djeneba, «le vœu exaucé de sa mère» en peul. Cette dernière a donné naissance à son fils en 1974, alors que le père, tailleur au Sénégal, était déjà parti en clandestin pour la France où il deviendra ouvrier chez Ford. A l'âge de deux ans, Souleymane, sa mère et ses deux grandes sœurs rejoignent le père, à Bordeaux, Cité des Aubiers.

Tu parleras pulaar, mon fils

A la maison, les enfants sont priés de ne parler que le pulaar. Le français, c'est pour l'école et la vie extérieure. Les parents en profiteront: «nous avons été des professeurs de français pour eux. Mon père faisait mes devoirs en apprenant en même temps que moi.» Chez les Diamanka on apprend les uns des autres et pas les uns contre les autres. Cela ne va pas sans douleur :  «Au début l'interdit était fort. Ne pas parler français à la maison, ce n'était pas évident, confie l'artiste. Mais plutôt que de voir se creuser le fossé entre les parents qui ne parlent pas le français et les enfants qui ne parlent plus la langue maternelle, nous avons tous beaucoup mieux assumé la double culture de cette façon ». Peul avant d'être Bordelais, le jeune garçon parle de cette première appartenance comme d'une main qui l'a caressé depuis la naissance. Il dit avoir été bercé par des contes qui ont formé jusqu'à son subconscient :  «Etre peul, c'est un code de conduite, un comportement, une éducation, des préceptes, des bénédictions qui vous conditionnent. On se reconnaît entre nous quel que soit le lieu où l'on se rencontre, nous ne sommes jamais seuls ». Les mots de sa mère sont pleins de cette poésie qu'il apprendra comme un genre à l'école. Et les phrases de son père, de véritables récits qui l'initient à l'art de raconter. La langue est faite de rimes qu'il va utiliser dans son travail artistique.

En peul, «Cet arbre» se dit «ki lekki»,

«Cette femme», «o debbo».

Tout est rime.

Entre palindromes et holorimes

«Le fait d'avoir une langue maternelle autre que le français donne des facilités. On entend toujours autre chose et cela est toujours d'une grande richesse. Si un Français dit "Atchoum", un Peul entend "Accu um", autrement dit: "laisse-le!"», explique Souleymane, que l'on suit, captivé, dans cette gymnastique linguistique créative dont il fait son miel. Dans les poèmes qu'il écrit dès l'enfance, dans les chansons qu'il compose, toutes les figures de style entrent dans la danse, tel cet holorime: «la peau hésitante/ la poésie tente ». Au festival Africajarc, dans le sud-ouest de la France, il a chanté une nouvelle fois avec son ami polonais slameur John Banzaï avec lequel il a écrit J'écris en français dans une langue étrangère (ed. Complicités), chacun apportant le son de sa langue maternelle aux compositions. De la musique peule, Souleymane utilise aussi les sons du ngoni (violon) en se nourrissant d'une culture que son père transmet à ses enfants sur des cassettes enregistrées depuis leur enfance. Parce qu'il travaille toute la journée et ne les voit pas assez, l'ouvrier a communiqué par ce biais avec ses enfants. Et la pratique s'intensifie quand la fille aînée de Boubakar Diamanka écrit son mémoire sur les Peuls. Elle commence à enregistrer le témoignage de son père, et d'autres, dans la Cité des Aubiers où elle a grandi, et ailleurs. Quand il vivra à Paris, hébergé par sa sœur, Souleymane découvre alors ces cassettes dont le contenu le fascine. «Cette casséthothèque de baaba (papa) raconte tout du village, et de notre culture. On y apprend le nom des saisons et ceux des animaux. C'est un véritable bouquin que mon père nous a laissé, et que je compte bien numériser. J'utilise ce patrimoine dans mon travail ».C'est ainsi qu'est né L'hiver peul, son premier CD, sorti en 2007, où se retrouvent des textes écrits sur une longue période de quinze ans, et où il invite le griot Sana Seydi. Avant de faire le pari de l'écriture, le jeune homme avait répondu au défi de son père qui manie les proverbes peuls comme une philosophie en action de la vie. L'un d'entre eux disait : «Tout ce qu'un homme a fait, un autre peut le faire, la différence c'est "munyal" une notion qui réunit le pardon et la patience ». Fort de ce défi, Souleymane décide d'aller vers ce qui est le plus éloigné de ses capacités: l'adresse, le cirque. Il se forme à cette école, mais l'abandonne au bout de quelques temps, car les mots le rattrapent. Son premier groupe de rap, Djangu Gandhal (qui signifie en quête de connaissance), lui vaut en 1991 un certain succès, notamment les premières parties de NTM, et d'écrire des textes pour Les Nubians, un duo de chanteuses franco-camerounaises. La version américaine du film Les visiteurs utilise dans la bande son, l'un de ses titres, gros pactole de droits d'auteurs qui aide dans les moments difficiles... Un autre proverbe peul, transmis par le père dit: «Dieu aide les gens qui sont bons.»

l’Hiver peul de Souleymane Diamanka par afriktv

La magie des proverbes

«Mon père a cette force des proverbes avec lui, à la fois naïfs, simples, mais d'une grande vérité. Il m'a légué cette force qui m'a permis d'avoir confiance en moi. Je suis monté à Paris, un jour, en misant tout sur l'écriture ».  Au moment où la confiance menace de le quitter, Souleymane essaie un «attentat poétique», cette manière de s'adresser à quelqu'un en lui déclamant un poème par surprise, avant de filer. Il rencontre par hasard l'acteur et scénariste français Jean-Pierre Bacri dans le quartier de la Bastille à Paris, un de ces hommes vers lesquels il avait envie d'aller. Ce dernier, sensible à ce qu'il vient d'entendre, lui donne dans la main de quoi faciliter les semaines qui viennent... Ce geste est salvateur: Diamanka s'installe à l'hôtel, met ses textes sur Myspace. Un producteur les découvre. Bingo! Une grande maison de disques, Universal, le signera. Sortie de L'hiver peul. La confiance a porté ses fruits.

Depuis, le poète tourne un peu partout dans le monde, rêve de retourner aux Etats-Unis où son concert devant la communauté peule de Brooklyn fut un grand moment de partage. Entretemps, il vit d'ateliers d'écriture, de tournages au cinéma, voix off et petits rôles dans Case départ de Fabrice Eboué, ou encore Sabres de Cédric Ibo. Son parcours sous le signe de l'ouverture a été jalonné de rencontres importantes, comme celle de Grand Corps Malade, qui intervient sur son CD, ou encore celle du poète Yvon Le Men, et du festival Etonnants Voyageurs qui l'a régulièrement invité.  «Je suis passé du rap au slam, et je fais la différence entre ce que j'écris pour la musique et les vrais auteurs que je connais. Eux écrivent avec une autre musicalité, celle de la littérature. Cet océan où j'ai envie de me jeter, moi qui suis pour l'instant dans la piscine.»

Retranscrire l'oralité

Dans un documentaire d'Emmanuelle Vial, dont il est l'un des personnages principaux, le slameur raconte qu'il n'a jamais écrit ses textes, mais les a toujours mémorisés. Jusqu'au moment où il a fallu retranscrire de mémoire les textes de son album pour les protéger! Les enfants d'Hampaté Bâ qui sera édité en DVD chez l'Harmattan à l'automne 2011 et dont il est un des principaux personnages, raconte bien ce parcours de l'oralité dans une famille où la bibliothèque se résumait à un dictionnaire et à l'encyclopédie Tout l'Univers. Et si Diamanka père continue de transmettre ce qu'il a à dire à ses enfants sur des cassettes (en attendant de passer au dictaphone numérique), qu'il s'agisse de culture ou de résolution de conflits familiaux, Souleymane, lui, projette d'écrire la biographie de son père de sa naissance jusqu'à son arrivée à la Cité des Aubiers. Et bien d'autres choses encore: un recueil de poèmes et une tragédie inspirée de Shakespeare, mais avec ses mots: Othello du guetto, tragédie greco-urbaine. Sans oublier l'inattendu auquel il reste toujours réceptif. A Cajarc, dans le sud-ouest de la France, où nous l'avons rencontré, il a pris langue avec des Peuls de passage, engrangé un projet avec un dessinateur de BD qui a envie de mettre une de ses chansons en images, et promis à Isabelle Gremillon de faire une lecture d'un livre pour enfants en peul, Kulle Dalle, paru aux éditions Timtimol, que cette dernière diffuse par sa structure nommée l'Oiseau Indigo. Diamanka père a toujours dit à ses enfants: «Oublie ce que tu es, deviens ce que je suis, et ensuite, rajoute ce que tu es par-dessus ce que je suis. Là, j'aurai réussi mon éducation, tu seras plus que moi.». «Mon père est un aventurier venu en France en clandestin, avec cette foi qui ne l'a jamais quitté, j'avance dans la vie comme lui», confie Souleymane, ce jongleur de mots et d'origines.

 

La suite Office bientôt accessible sur Ipad ?


C'est la promesse d'OnLive Desktop.


Par Victor de Sepausy


A en croire la société OnLive Desktop, la suite Office sera bientôt accessible sur Ipad. En effet, cette entreprise développe actuellement une application gratuite qui devrait permettre aux utilisateurs d'Ipad d'utiliser Office sur leur tablette.  Concurrencé de tous côtés par des offres logicielles devenues pléthoriques, Microsoft ne voit pas d'un très bon œil cette opération qui se passe de son avis. Au contraire, la société OnLive Desktop compte bien se faire un bon coup de pub autour de cette initiative inédite jusque-là.


Un Nobel de littérature pour Rowling ?


Ah, la belle chose que de récompenser une auteure mondialement adorée

Par Nicolas Gary

 

 

 

 

Les révélations faites sur l'Académie Nobel et l'année 1961 ont attiré l'attention du Huffington Post, qui s'interroge à son tour. Si en cette fameuse année, Tolkien comptait parmi les potentiels candidats, il n'aura finalement pas été retenu. Et l'histoire littéraire montre que, peut-être, les jurés auront manqué de flair. Dans leur recherche de l'excellence littéraire, ces jurés tentent de prolonger de qu'Alfred Nobel avait légué dans son testament : une idée de la plus haute qualité du moment. C'est ainsi que Tomas Tranströmer se retrouvait lauréat pour 2011, avec la polémique qui accompagnait la nomination d'un auteur suédois. Difficile de trancher, sur la qualité, et plus encore, sur ce que peut être « la direction idéale » que doit donner le jury du Nobel de littérature. Quoi de plus compliqué, après tout, que de faire l'unanimité sur des choix qui relèvent en somme du subjectif ? Et que penser de l'idée que le lauréat doit avoir produit l'oeuvre la plus remarquable ? De là la question de nos confrères : qu'a produit JK Rowling depuis toutes ces années, sinon un retour à la lecture pour des millions de personnes, suscité un renouveau pour le livre, les siens, en l'occurrence ? Certes, elle n'a pas stylistiquement révolutionné le monde des lettres, ni inventé un genre, mais en somme, Harry Potter est entré en résonnance avec l'esprit de tous ses lecteurs, devenant un phénomène mondial. Alors, 2012, ou 2013, ou dans les années à venir, un Noble pour Rowling ?


POLITIQUE


Les dinosaures africains s’accrochent au baobab


Un après le départ de Ben Ali le 14 janvier, les dinosaures africains, ces dirigeants au pouvoir depuis plus d’un quart de siècle, ont résisté à toutes les tempêtes de 2011 et sont toujours là. Mais que leur réserve l’année 2012?

En Afrique subsaharienne,  les révolutions du monde arabe ont secoué les cocotiers mais n’ont pas déraciné les baobabs. Mais rappelons que le nom de baobab vient de l’arabe « bu hlowdotibab » qui signifie « fruit aux nombreuses graines ». Et il n’est pas exclu qu’en 2012 les graines des révolutions arabes trouvent dans l’Afrique au sud du Sahara un terreau fertile…Deux dirigeants se disputent en Afrique le titre peu envié de chef d’Etat en exercice depuis le plus longtemps au pouvoir: Teodoro Obiang Nguema (Guinée équatoriale) et Eduardo Dos Santos (Angola). Depuis août 1979 pour le premier, septembre 1979 pour le second. Il faut quasiment ouvrir un livre d’histoire pour savoir ce qu’il s’est passé cette année… Le monde vivait alors en pleine guerre froide,  le président américain Jimmy Carter était au pouvoir à Washington et surveillait du coin de l’œil le Soviétique Leonid Brejnev  à Moscou.

En Iran, la république islamique est proclamée. Le deuxième choc pétrolier plonge l’Occident dans une longue crise économique. Le président français Valery Giscard d’Estaing se prend les pieds dans l’affaire des diamants de Bokassa, le fantasque dirigeant centrafricain renversé la même année. Mais en attendant que l’Histoire dise son dernier mot, faisons un petit tour chez les derniers « dinosaurus africanus »:

Teodoro Obiang Nguema  (Guinée-équatoriale)

Assis sur une montagne de pétrodollars, le dirigeant de la petite Guinée équatoriale n’a pas vu son pouvoir contesté à l’intérieur du pays en 2011. Il est même devenu président de l’Union africaine, au grand dam des organisations de défense des droits de l’Homme, très critiques de son bilan en la matière. Arrivé au pouvoir grâce à un coup d’Etat qui a renversé son oncle, il a été élu en 1989, puis réélu en 1996, 2002 et 2009 (avec plus de 95% des voix) lors de scrutins toujours contestés. A 69 ans, il dirige toujours d’une main de fer cette ancienne colonie espagnole de moins d’un million d’habitants. En novembre, un référendum constitutionnel a été approuvé avec un score soviétique (97,7%) qui constitue un bon indicateur de la vie démocratique dans le pays. L’opposition compte un seul député au Parlement, Placido Mico. Les autres opposants sont en exil. La liberté de la presse est des plus restreintes mais les compagnies pétrolières font les yeux doux au troisième producteur d’or noir en Afrique subsaharienne. Le régime s’est lancé dans une ambitieuse politique de grands travaux et les groupes étrangers de BTP se frottent les mains. Business as usual.

Jose Dos Santos (Angola)

Les choses commencent à bouger en Angola. Bien sûr, ce n’est pas encore le grand vent qui a déraciné Ben Ali, Moubarak et Kadhafi. Mais la brise angolaise a ébouriffé le tout puissant José Dos Santos qui, depuis le mort du chef rebelle Jonas Savimbi, est quasiment sans adversaire de taille. Mais la rue gronde. Toute l’année 2011, des jeunes activistes ont défilé à Lunda pour demander plus de liberté et aussi un partage équitable du « gâteau pétrolier ».  Le pays devrait bientôt dépasser le Nigeria comme premier producteur africain d’or noir, les multinationales découvrent régulièrement de nouveaux gisements off-shore. Mais l’immense partie de la population reste d’une pauvreté scandaleuse. La société civile s’organise en contre-pouvoir, notamment autour du journaliste William Tonet, éditeur de l’hebdomadaire Folha 8. Le président Dos Santos a senti qu’il fallait lâcher du lest. Plusieurs fois repoussées, des élections générales (présidentielle et législatives) doivent finalement se tenir fin 2012. L’homme fort de Luanda devrait, à 70 ans, être candidat à sa succession.

Robert Mugabe (Zimbabwe)

« Bob » a réussi à se faire oublier en 2011, à quasiment disparaître des radars de l’actualité internationale. Mais il est toujours là. Robert Mugabe est arrivé au pouvoir en 1980, la même année que son homologue américain Ronald Reagan, décédé en 2004. On le dit malade, atteint d’un cancer de la prostate. Mais « Bob » s’accroche et épuise chaque jour un peu plus son opposant, devenu Premier ministre, Morgan Tsvangirai, qui a pourtant relevé l’économie d’un pays ruiné par une redistribution anarchique des terres au profit de la majorité noire. La cohabitation entre les deux hommes dure depuis deux ans et se passe de plus en plus mal. Des élections devraient avoir lieu cette année. Mais « Bob » estime que prendre sa retraite serait un « acte de lâcheté ». Les élections de 2008 avaient dégénéré en violences meurtrières, le pays était au bord de la guerre civile. Mais le président Mugabe n’en a cure. Mugabe répète qu’il vivra jusqu’à 100 ans et sera président jusqu’à sa mort. Il peut déjà compter sur le soutien de la puissante ANC (Congrès national africain) du voisin sud-africain, qui lui a promis de travailler à des stratégies électorales pour remporter la victoire. L’ANC,  dont la longue lutte contre l’apartheid est tout à son honneur,  n’est pas pressé de voir partir son « frère » Mugabe.

Paul Biya (Cameroun)

Le président Paul Biya est un homme discret. Il ne fait pas parler de lui à l’extérieur des frontières de son pays, n’est pas un leader d’opinion au sein de l’Union africaine. Il ferait presque oublier qu’il est arrivé au pouvoir en novembre 1982, soit un an et demi après l’élection historique de François Mitterrand en France. Le chef de l’Etat camerounais peut se targuer d’avoir survécu à son homologue français et surtout à son fameux « discours de la Baule » sur la démocratisation en Afrique. Et à 78 ans, il vient de se faire réélire en octobre avec plus de 77% des voix pour un nouveau mandat de sept ans. L’opposition a crié à la fraude. Mais Biya  a conservé son humour. « L’heure est à l’action », a-t-il lancé sans sourciller lors de son discours d’ouverture. Les 20 millions de Camerounais n’ont besoin de personne pour tirer le bilan de son long règne: pauvreté endémique (une personne sur quatre survit avec un euro par jour, un sur trois n’a ni eau potable, ni électricité), corruption quasiment plus élevée que le Mont Kilimandjaro et croissance économique atone. Et pourtant le Cameroun , avec son cacao, son pétrole, ses diamants et une population dynamique aurait pu être le pays le plus riche d’Afrique centrale. Les opportunités gâchées laissent toujours un gout amer dans la bouche.

Yoweri Museveni  (Ouganda)

Le président ougandais ferme cette marche de dinosaures africains, qui sont au pouvoir depuis plus de 25 ans. Et il s’est démené pendant l’année 2011 pour ne pas rejoindre ses homologues de Tunisie, d’Egypte et de Libye. Le printemps arabe a bien failli trouver dans l’Ouganda sa première terre d’accueil au sud du Sahara. Dès le mois d’avril, les premières manifestations contre le président et ex-chef rebelle Museveni ont eu lieu, avant d’être violemment réprimées. Bilan lourd : une dizaine de morts. Au pouvoir depuis 1986, le chef de l’Etat peut se targuer d’une forte croissance économique même si beaucoup de choses restent à faire pour en faire profiter tous les Ougandais. Mais il a la main de plus en plus lourde face à toute contestation et Amnesty International dénonce un régime de plus en plus répressif. Pour ne pas gâcher un bilan économique quelque peu flatteur, Museveni  ne devrait pas rater sa sortie et préparer sa succession.

Et Blaise Compaoré ?

Enfin pour fermer la marche des cinq dinosaures africains, une mention spéciale à un dirigeant hors concours mais qui a senti le vent du boulet en 2011, le Burkinabè Blaise Compaoré, contesté dans la rue comme dans les casernes. Au pouvoir depuis un coup d’Etat au cours duquel le capitaine Sankara a été tué, il entrera le 15 octobre 2012 dans le club des dinosaures africains…

Adrien Hart

 

Youssou Ndour peut-il devenir président du Sénégal?


Le célèbre chanteur sénégalais a annoncé le 2 janvier sa candidature à la présidentielle de février 2012. Peut-il succéder à Abdoulaye Wade? Youssou Ndour au Forum mondial de l'Economie Responsable le 20 novembre 2009 à Lille, en France. AFP/Denis Charlet

Cette fois, Youssou Ndour ne s’en est pas sorti avec une nouvelle pirouette. De celles dont est coutumier le chanteur de mbalax. Il a vraiment plongé dans le bain de la politique. Après des mois de tergiversations, Youssou Ndour a enfin annoncé sa candidature à la présidentielle de février 2012 au Sénégal. «C’était devenu un secret de polichinelle. A Dakar, tout le monde savait qu’il allait se présenter», estime Hassan, un étudiant sénégalais. Pourtant, nombre de ses compatriotes ne voulaient pas y croire. «Youssou Ndour commet une grave erreur. Que va-t-il faire dans cette galère. Il a arrêté ses études à l’école primaire. Avec un pareil C.V. quelle image va-t-il donner du Sénégal? Les Libériens n’ont pas voulu du footballeur Weah comme président pourquoi vondrions-nous d’un chanteur à la tête de l’Etat», s’exclame Khadiatou, l’une de ses fans qui préfère de très loin le voir se consacrer à son premier métier: la musique.

Un handicap de poids

Combien de Dakarois se disaient, «Youssou en parle, mais il n’osera pas franchir le pas, il a trop à perdre»? Pourtant sa décision ne surprend pas vraiment. A chaque fois que j’ai eu l’opportunité de l’interviewer, il a toujours laissé entendre qu’il n’hésiterait pas à se présenter un jour «si le pays avait besoin de lui». Ces derniers mois, il a donné l’impression de préparer le terrain. L'enfant de la Médina (quartier populaire de Dakar) a d’abord créé un parti politique «Fekke ma ci bolé» (Je suis là, donc, j'en fais partie, en wolof). Et il s’est inquiété d’une possible dérive monarchique du régime. Youssou Ndour a fait savoir qu’il n’était pas favorable à une succession héréditaire: à un Karim Wade qui succéderait à son père. En outre, il a expliqué publiquement qu’à son avis la Constitution ne permettait pas au président Wade de se représenter à la présidentielle. Dès lors que celui-ci a déjà effectué deux mandats (il est arrivé au pouvoir en 2000). Reste que pour se présenter à cette élection, Youssou Ndour, 52 ans, a un handicap de poids, comme il l’a expliqué lui même dans sa déclaration de candidature le 2 janvier sur les médias qui lui appartiennent, à savoir la radio RFM et la chaine TFM. «Il est vrai que je n’ai pas fait d’études supérieures mais la présidence est une fonction et non un métier. A l’école du monde j’ai appris, j’ai beaucoup appris. J’ai appris de mes voyages. Je peux diriger ce pays. Je suis l’alternative à l’alternance. J’ai les moyens de mettre le Sénégal au travail.» Pourtant aux yeux de bien des compatriotes de Youssou ce handicap pourrait se révéler rédhibitoire. «Le Sénégal se considère comme la patrie des intellectuels africains. La capitale culture de l’Afrique francophone», explique Almami Ba, un enseignant de la capitale.

La magie du verbe

Le premier président du pays, Léopold Sedar Senghor qui a régné de 1960 à 1980 était agrégé de grammaire, condisciple de Georges Pompidou à l'Ecole Normale Supérieure. Et bien entendu l’un des poètes francophones les plus en vue. Le normalien était un adepte des discours en… latin. Langue peu usitée au Sénégal. Il a également fait interdire un film du grand cinéaste Ousmane Sembène: l’orthographe du titre en wolof n’étant pas à son goût. Abdoulaye Wade, au pouvoir depuis 2000, a accumulé de nombreux doctorats. Il aime à se présenter à tort ou à raison comme le plus diplômé des Africains. Quoi qu’il en soit personne ne lui conteste une certaine culture générale qui peut parfois irriter. Puisqu’il entreprend régulièrement d’asséner des cours à ses homologues chefs d’Etats. Ses cours d’économie notamment ne sont pas les plus appréciés. Le Sénégal est loin d’être l’économie la plus florissante du continent. Mais tous reconnaissent à Wade une parfaite maîtrise de l’art oratoire en français comme en wolof. Une qualité «mitterrandienne» appréciée dans un pays où la magie du verbe est considérée comme une qualité essentielle. «On n’acceptera jamais un président qui ne possède pas cette qualité. Cette magie du verbe», explique Abdou, un commerçant de la banlieue dakaroise.

La politique est un «sport violent»

La perplexité des Sénégalais vient aussi de leur connaissance de la politique dakaroise. Au Sénégal, la politique est un «sport violent» où il y a beaucoup de coups à prendre, au sens propre comme au figuré. Certes la politique est moins «agitée» du côté de Dakar qu’à Lagos ou Kinshasa. Mais il n’en reste pas moins que maître Babacar Seye, vice président du Conseil constitutionnel a été assassiné en 1993. Et que ses assassins présumés ont été amnistiés par le régime Wade. A Dakar, Talla Sylla, un opposant de Wade a pris en 2005 des coups de marteau sur la tête dans un célèbre restaurant de la place. Un maire socialiste, Barthélémy Dias, a répliqué à coups de revolver en décembre 2011 alors que des hommes de main du régime attaquaient sa permanence. L’un des nervis a été abattu lors de cet affrontement «politique». Après qu’il a critiqué le régime, Youssou Ndour a connu, selon ses médias, un avant goût des pressions qui seront exercées sur lui… un contrôle fiscal particulièrement salé. Youssou Ndour est un chanteur adulé par plusieurs générations de Sénégalais. Dans ses concerts au Thiossane, la boîte de nuit qu’il possède à Dakar, toutes les générations se cotoîent. A ses concerts, il n’est pas rare de croiser, une grand-mère, une mère et ses filles. Ses performances vocales font salle comble en Afrique, en Europe, au Japon et aux Etats-Unis.  Au Sénégal, il possède un studio d’enregistrement et un groupe de presse prospère. Son quotidien, L’Observateur est le plus lu du Sénégal. Sa radio, RFM est la plus écoutée. Et sa jeune télévision TFM connaît des débuts prometteurs.

Alors bien des Sénégalais se demandent que vient-t-il faire en politique?

 «En Afrique, la politique est souvent perçue comme un moyen facile de s’enrichir. Alors pourquoi un homme déjà riche irait se mettre dans une pareille galère», se demande Aïcha, une admiratrice de Youssou Ndour.

Un rêve américain

Dès lors son entrée en politique peut aussi susciter des sentiments ambivalents: admiration ou suspicion. «Vient-il en politique pour mieux négocier avec le régime. Obtenir une licence de téléphonie mobile ou de nouvelles autorisations pour son groupe médiatique» se demandent des Sénégalais qui n’ignorent rien des qualités d’hommes d’affaires de Youssou Ndour. D’autres le soupçonnent de vouloir régler ses comptes avec le régime. «Il a peu apprécié que Karim Wade, le fils du président, tente de prendre le contrôle de son quotidien. Il lui a dit que si Karim Wade voulait un titre, il n’avait qu’à en créer un» explique un Dakarois qui a travaillé pour le groupe médiatique du chanteur. Quoi qu’il en soit la candidature de Youssou Ndour va compliquer la tâche du président Wade. Celui-ci affirme qu’il peut être élu dès le premier tour de la présidentielle. Mais la multiplication des candidatures rend cette perspective de plus en plus improbable. Même les journalistes entrent dans la danse: Latif Coulibaly, le plus célèbre journaliste d’investigation, s’est lui aussi porté candidat. Comme le souligne vieux Savané, autre grande plume de Dakar, il semble qu’au Sénégal tout le monde veuille devenir président. Ce constat déroutant peut être considéré comme un signe de vitalité démocratique. Les Sénégalais aiment à se comparer aux Américains. Dakar n’est-elle pas la terre la plus à l’ouest de l’Afrique? En face de l’Amérique. Dakar est peut-être devenue la terre de tous les possibles? Le pays où Youssou Ndour, un enfant de la médina peut s’imaginer à la présidence. Mais attention, il y a Amérique et Amérique. Pour justifier sa volonté de succéder un jour à son père, le fils du président Karim Wade avait invoqué la «jurisprudence américaine». George Bush junior après George Bush senior. Une comparaison qui ne lui a guère porté chance. Quelques jours plus tard, il perdait les élections de la mairie de Dakar. Et ses ambitions présidentielles se voyaient renvoyées aux calendes grecques. Youssou Ndour c’est un autre goût d’Amérique, celui-ci des self made men. Mais sera-t-il au goût des Sénégalais? Trop tôt pour le dire. A Dakar, Youssou a encore tout à prouver au monde politique. Savoir chanter c’est une chose. Danser dans le marigot politique, c’est un art qu’il va devoir maîtriser au plus vite. Au rythme endiablé du mbalax. Meilleur moyen d’éviter les croches pattes en tous genres.

Pierre Cherruau

 

Les chanteurs au pouvoir!


Youssou Ndour est candidat à la présidentielle sénégalaise. Et si l’on confiait le continent à des chanteurs?

Mise à jour du 3 janvier 2012: le chanteur-vedette sénégalais Youssou Ndour, 52 ans, a annoncé le 2 janvier qu'il sera candidat à l'élection présidentielle de février, dans une déclaration diffusée par la radio et la télévision de son groupe, Futurs Médias (TFM) à Dakar.

"Depuis très longtemps", de nombreux Sénégalais "ont, par divers moyens, appelé ma candidature à la présidentielle de février prochain. J'ai écouté, j'ai entendu, je réponds favorablement à votre requête. (...) Je suis candidat", a déclaré M. Ndour, également président d'un mouvement citoyen créé en 2010 et baptisé "Fekke ma ci bollé" ("Je suis là, donc j'en fais partie" en langue nationale wolof).

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Un pas de plus pour Youssou Ndour sur la route de la présidence du Sénégal: son avocat Mbaye Jacques Ndiaye a retiré, lundi 12 décembre, un dossier de candidature pour son client. L’interprète de Birima,  leader du mouvement Fekkee ma ci boole et patron du groupe de presse Futurs-Médias a prévenu qu’il se rendrait disponible pour la campagne présidentielle à partir du premier janvier prochain. Le magazine américain Forbes considère d’ailleurs que Youssou Ndour est la deuxième personnalité africaine la plus influente, tous pays et toutes générations confondus. Se muera-t-il en lutteur dans l’arène sénégalaise?… L’opinion africaine juge encore incongrue l’idée de voir un chanteur accéder à une aussi haute fonction politique. Si l’on fait traditionnellement vibrer la corde vocale dans les concessions des chefs africains, c’est pour les louer, pas pour sous-louer leur fauteuil. Entre chantre et chanteur politisé, il y a un pas que le griotisme ne semble pas prêt à franchir.

Hors du continent, pourtant, les musiciens ont tenté le pari du pouvoir depuis bien des années.  L’artiste de bossa nova Gilberto Gil chantait des titres engagés bien avant de devenir ministre de la Culture du président brésilien Lula da Silva de 2003 à 2008. En Australie, le leader du groupe de rock Midnight Oil, Peter Garrett, fut élu député du Parti travailliste, avant d’obtenir, en 2007, le poste de ministre de l’Environnement. En Grèce, les chanteuses Melina Mercouri et Nana Mouskouri ont été respectivement ministre de la Culture et députée au Parlement européen. Quoi de plus normal? Nombre d’artistes engagés transmettent des messages politiques. Au Sénégal, les rappeurs ne sont-ils pas en première ligne du mouvement Y en a marre? Youssou Ndour, avant d’être candidat, n’hésite pas à évoquer des sujets plutôt prosaïques comme les délestages électriques dans Leundeum gui, adaptation de Ob-La-Di Ob-La-Da des Beatles. Il serait délectable d’avoir un chef de l’Etat africain qui chante enfin correctement l’hymne national. D’ailleurs, les présidents ne nous servent-ils pas des “rengaines” avec de sempiternels “couplets” qui annoncent toujours les mêmes “refrains”? Ne sont-il pas un peu maîtres… chanteurs lorsqu’ils conditionnent certaines de leurs promesses à des petits arrangements?

Son Excellence Monsieur le Président de la République démocratique du Congo Koffi Olomide

Imaginons alors que les plus belles voix du continent briguent leur présidence respective. On pourrait imaginer une belle chorale de mbalax, rumba, bicoutsi et coupé décalé au prochain sommet de chefs d’Etat de l’Union africaine. Répétition protocolaire… - Son Excellence Monsieur le Président de la République démocratique du Congo Koffi Olomide… En se faisant surnommer “Sarkozy”, Mopao a déjà libéré ses fantasmes présidentiels. Et le “Quartier latin” a, de tout temps, été un laboratoire politique. Les groupes de musique congolaise sont à ce point pléthoriques qu’il en suffirait d’un pour composer tout un gouvernement. Un conseil des ministres d’Extra Musica remplacerait avantageusement les clashs entre Kabila et Tshisekedi. Nul doute que les interprètes du titre Etat-Major seraient habilités à gérer la situation sécuritaire. Pour les questions d’immigration intempestives à l’est du pays, on pourrait confier la délivrance des visas à Papa Wemba. En 2003, il a eu l’occasion de méditer sur «l’aide au séjour irrégulier de clandestins sous couvert d’activités musicales»…

- Son Excellence Madame la Présidente de la République du Gabon Patience Dabany: qui mieux que cette ancienne première dame et actuelle “reine mère” connaît mieux les rouages du palais présidentiel? Elle qui chantait «Chéri ton disque est rayé» pourrait bien incarner une démocratie qui semble bégayer…

- Son Excellence Monsieur le Président du Burkina Faso Smockey. Le rappeur a déjà fait partie du collectif «Le gouvernement» et a interprété «Votez pour moi». Pour le reste, il y a, dans le showbiz burkinabè, tout ce qu’il faut, en matière de vrai-faux personnel politique: la Cour Suprême, Le Pouvoir, les Premières Dames et même la Censure …

- Son Excellence Monsieur le Président de la République algérienne démocratique et populaire Khaled : il pourrait fredonner « Aïcha, Aîcha, regarde-moi… » à Aïcha Kadhafi avant qu’elle ne quitte l’Algérie pour l’Afrique du sud…

- Son Excellence Monsieur le Président de la République camerounaise Manu Dibango. Ni vu, ni connu, on pourrait intervertir les deux “jumeaux” de 1933. Un septuagénaire pour un septuagénaire, mais avec le swing en plus…

- Au Togo, Mensha est déjà King…

- En Côte d’Ivoire, attention à la tentation sécessionniste. En élisant à la présidence le vieux père Alpha Blondy, on réveillerait la bagarre entre “blondistes” et “tikenistes”. Pour éviter une nouvelle partition du pays, autant confier le pouvoir à l’autoproclamé Président Omar Cavalli…

- Au Nigeria, les descendants toujours très politisés de Fela Anikulapo Kuti pourraient reprendre le flambeau du “black president”. Entre Femi Kuti et Seun Kuti, il y a l’embarras du choix.

- En Afrique du Sud, pour réduire la fracture entre les communautés, l’élection de Johnny Clegg offrirait à la population tout à la fois un dirigeant zoulou et un président blanc.

- Au Mali, le peuple pourrait choisir entre Amadou président et Mariam première dame ou l’inverse. Juste le temps de traduire la constitution en braille.

- En Guinée, Mory Kanté n’aurait qu’à transformer son «Yéké yéké» en slogan de campagne «Y a qu’à, y a qu’à»…

Ça promet un peu plus d’harmonie et quelques rappels à la fin des sommets de chefs d’Etat.

 

Les 10 animaux de la brousse politique française


Et si l’on voyait la campagne électorale française sous le prisme des contes africains? La faune des candidats est déjà en action. Bestiaire inédit de Damien Glez

C’est bien connu: pour devenir président, il faut être une “bête politique”. Pour comprendre la psychologie des bestioles avides de pouvoir, rien de tel qu’un conte africain. En attendant le scénario de la campagne officielle, voici déjà le casting animalier de dix personnalités qui pourraient faire ou défaire la campagne présidentielle française.

1 – Le lycaon (Nicolas Sarkozy): si l’on en croit les sondages qui le disent déjà battu, ce canidé serait en voie de disparition. Mais il ne faudrait pas sous-estimer ce mammifère carnivore que l’on surnomme le “loup peint”; “loup” en référence à son passé de jeune loup de la droite française; “peint” par allusion à son talent pour les déguisements idéologiques. Insaisissable, en effet, il sait prendre des allures de pachyderme socialiste quand il faut citer Jean Jaurès, de hyène quand il faut ratisser à l’extrême droite, de chien sauvage quand il faut mâter la racaille d'Argenteuil ou de Syrte. Il connaît les moindres recoins de la steppe politique gauloise et les moindres dédales des financements de campagne. Taris Neuilly-sur-Seine et Karachi, faudra-t-il rappeler Bourgi à la rescousse? La savane africaine n’est jamais totalement absente des campagnes électorales françaises…

2 – L’éléphant (François Hollande): Bien qu’il fut le cornac des pachydermes socialistes (P.S.) pendant plus de dix, on moquait sa silhouette d’hippopotame. Alors que les postes exécutifs nationaux lui semblaient défendus, le voilà, affûté, qui a doublé, dans la course à la présidence, le cousin de Washington que sa trompe folle a relayé au cirque médiatique. Ce nouvel éléphant candide et candidat fera-t-il mieux que l’antilope Royal dont il doit bien connaître les failles? L’Afrique, dont il n’a foulé, récemment, que la poussière tunisienne, attend de le découvrir. Dans sa politique africaine, que retiendrait le pachyderme de ses mentors? Le paternalisme donneur de leçons de Mitterrand ou la distance craintive de Jospin?

3 – Le zèbre (François Bayrou): cet équidé ne semble pas avoir choisi. Ni tout fait blanc ni tout à fait noir; tantôt blanc rayé de noir, tantôt noir rayé de blanc; ni cheval, ni mulet; ni de gauche, ni de droite. S’il ne connaît guère les contrées arides de l’Afrique, le zèbre centriste sait le goût des traversées du désert. S’il a failli créer la surprise en 2007, il lui faudra d’abord, en 2012, atomiser le pique-bœuf Hervé Morin et rassembler des semblants de troupes centristes. Qui bénéficiera de l’enivrant parfum africain de la gazelle sénégalaise (Rama Yade) en mal du zébu (Jean-Louis Borloo)?

4 – La hyène (Marine Le Pen): qui, en Afrique subsaharienne, ne connaît pas le rire glaçant de cet animal trapu à l’arrière-train plus bas que l'avant? Les candidats à l’immigration savent que sa puissance de morsure est la plus élevée chez les mammifères; et que, dans cette espèce, la femelle est encore plus grande et plus forte que le mâle. La hyène aime se nourrir, politiquement, de ce qui est déjà mort: elle se délecte des promesses périmés de ses adversaires, des idéologies du XXe siècle et des charognes des politiciens “tous pourris”. Elle se pourlèche déjà les babines, en appelant de ses vœux le décès clinique de l’euro. Mais attention, le proverbe africain dit que «quand tu te penches pour regarder les fesses de quelqu’un, sache que quelqu’un regarde les tiennes». Quand tu regardes une proie moribonde, sache que d’autres charognards tournoient au-dessus de ta tête. La hyène ne fera-t-elle qu’une bouchée du vautour (Carl Lang) que la présidentielle à également mis en appétit?

5 – Le rhinocéros (Jean-Luc Mélenchon): ce périssodactyle né en Afrique (au Maroc) est un rhino…féroce qui ne tarde jamais à charger, le front (de gauche) en avant. Il est muni d’une énorme corne destinée à ses adversaires politiques dont il ne serait pas fâché «qu'ils s'en aillent tous!»; et d’une cornette pour les sornettes des hommes de médias qui le chahutent quand il bahute. Une ruade pourrait suffire pour ses plus proches concurrents, les “Timon et Pumbaa” de ce conte cruel: le phacochère gauche du NPA (Philippe Poutou), et la frêle mangouste de Lutte ouvrière (Nathalie Arthaud).

6 – La chouette (Eva Joly) : les grands yeux cerclés de rouge de la chouette effraie le continent. Tout autant que son passé de juge d’instruction intimide une Afrique qui n’a pas encore réglé ses crises aiguës de corruption politique. Mais la parente du hibou, à qui certains dénient toute “francité”, a peu d’énergie (pas si renouvelable en campagne électorales) à consacrer aux pays étrangers, fussent-ils en voie de développement. Dans cette jungle politique impitoyable, la chouette se nourrira-t-elle de sa rivale centriste, la “chouette à joues blanches” (Corinne Lepage), candidate de CAP21? Elle avait bien terrassé le mâle de la chouette hulotte (Nicolas Hulot).

7 – Le lion de Belfort (Jean-Pierre Chevènement): même vieillissant, le vieux fauve garde sa majestueuse crinière blanche. Et son pouvoir de nuisance. Le lion n’est-il pas, traditionnellement, le roi des contes africains? La ville de ce lion a accueilli le mariage de Viviane et Abdoulaye Wade, mais le continent se souvient surtout que cet ancien ministre de l’Intérieur n’avait guère appliqué les promesses de régularisation massive des sans-papiers. Et la faune hexagonale verra moins en lui un faiseur de roi qu’un “gâteur de sauce” socialiste. Surtout cette année où les radicaux de la panthère noire (Christiane Taubira) se sont fondus dans les primaires des éléphants. Le lion devrait subir toutes sortes de pression de gauche et la concurrence souverainiste du varan eurosceptique (Nicolas Dupont-Aignan) du mouvement «Debout la République». Mais même debout, un reptile ne peut pas aller bien haut…

8 – Le guépard (Dominique de Villepin): s’il est le plus rapide au footing, ce majestueux animal ne devrait pas être le premier sur la ligne d’arrivée, en mai prochain. Classieux, semblant tout droit sorti d’un film de Visconti, il est un peu désuet. Si l’éléphant a connu des campagnes électorales sans poste exécutif national, le guépard a connu des fonctions gouvernementales sans être passé par la case élective. Les Africains gardent en mémoire le courage en bras de chemise dont il avait fait preuve à Abidjan et sa bravoure onusienne lors des préparatifs de la guerre d’Irak. Mais s’il eut du panache à l’étranger, le panache blanc qui décore son crâne ne fera pas de lui une grue couronnée sur les terres hexagonales.

9 – Le youyou (Christine Boutin): rien à voir avec les cris de joie poussés par les femmes de contrées musulmane. Ce perroquet youyou radote au nom du Parti chrétien démocrate. Mais pourra-t-il voler dans les plumes de ses adversaires? Il peine à rassembler les 500 signatures d’élus…

10 – Le bubale béninois (Patrick Lozès): un peu de franche africanité avec celui qui a le C.R.A.N. d’inviter à «ne pas voter blanc». Né en Afrique de l’Ouest, il doit composer avec les velléités exprimées par une aigrette garzette –aigre mais chouchoute des gazettes– d’Afrique centrale (Calixthe Beyala)…bien de ces bêtes politiques pourront-elles participer à la phase finale de ce safari? Les chasseurs, eux-mêmes (Frédéric Nihous), ne sont pas sûrs d’être de la partie. Mais si le casting reste à confirmer, le décor est déjà planté. Place aux rebondissements. La morale du conte sera pour le 6 mai 2012.

Damien Glez


SOCIETE


Pourquoi l’Afrique ne se développe pas


Le continent n'exploite pas ses nombreuses richesses et n'a pas su tirer les leçons des modèles sociopolitiques expérimentés à travers le monde. C’est une lapalissade de dire que l’Afrique est un continent riche, tant elle regorge de ressources naturelles. Même ci celles-ci ne sont pas inépuisables, l’Afrique est encore riche de ses terres en grande partie cultivables et de ses ressources humaines. Et pourtant, elle peine à se développer —c’est le moins que l’on puisse dire. Au lieu de tirer leçon des succès et des échecs des modèles de développement qui ont été expérimentés de par le monde, elle continue à s’engluer dans ses politiques stériles. Plusieurs facteurs essentiels sont la cause de cette situation.

La faillite des politiques

Depuis la fin de la colonisation, presque tous les pays africains ont été dirigés par une élite sans vision politique à moyen ou long terme. Cette élite, qui s’est substituée aux anciens colonisateurs, a été incapable d’ambition et s’est davantage préoccupée d’elle-même que des peuples dont elle prétend défendre les intérêts. Résultat: le système colonial a été purement et simplement perpétué sous une autre forme dans les domaines politique, économique et culturel au fil des années. A cela, il faut ajouter l’insécurité de l’environnement économique qui ne favorise pas les investissements, et le règne de l’informel. L’indépendance est donc devenue une véritable dépendance vis-à-vis des puissances étrangères, en particulier des anciennes puissances coloniales. Faute de réflexions endogènes ou prospectives et de volonté politique en vue d’amorcer un changement par une synergie d’actions, les politiques actuelles sont une navigation à vue. Les Etats sont gérés à la petite semaine par les dirigeants, juste le temps d’accomplir les hautes charges qui sont les leurs.

Le marché de consommateurs

Il n’y a pas meilleur marché de consommation que l’Afrique. C’est ce que nous appelons, avec un certain humour, dans nombre de pays africains les «receveurs universels». Comment peut-on se développer quand on consomme tout ce qui vient de l’extérieur sans distinction et qu’on ne produit rien, ou pas grand-chose? Le comble, c’est que beaucoup d’Africains ont le complexe suranné de la préférence étrangère. Même quand ce qui est produit localement est de bien meilleure qualité que ce qui est importé. L’extraversion est non seulement un phénomène économique, mais aussi culturel. Et cette tendance doit être inversée par la création et la recherche de qualité, afin que les produits africains puissent être concurrentiels à l’échelle internationale. L’Afrique ne doit pas être uniquement un marché de consommateurs —bien au contraire, elle a tout intérêt à se lancer dans la production tous azimuts. En effet, les Africains doivent encore prouver, comme qui dirait, qu’ils ne savent pas jouer que du banjo.

La négligence de l’agriculture

L’agriculture a toujours été reléguée au dernier rang des activités humaines en Afrique. Le paysan est considéré comme un citoyen de seconde zone. C’est le moins que rien. La plupart des Africains veulent être des commis de l’Etat. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, tous les pays africains font de l’agriculture la base de leur développement. Mais ils ne font rien pourtant pour développer cette agriculture. Et ce n’est qu’un euphémisme. Il faut bien le dire, depuis l’époque de la pierre, l’Afrique n’a remplacé l’outil agricole que par le fer. Rien de plus. Ce n’est pas avec la houe et la daba que l’Afrique peut se rendre autosuffisante alimentairement avant de parler de développer son agriculture à des fins de commercialisation ou de transformation. Comme les résultats d’investissements dans ce secteur ne s’obtiennent qu’à moyen ou long terme, cela intéresse peu les investisseurs étrangers et les Etats eux-mêmes. Pourtant, cela concerne la presque totalité de la population du continent. Avec une démographie galopante et un dérèglement climatique qui s’accentue d’année en année, les moyens agricoles traditionnels ne peuvent plus nourrir les nombreuses bouches du continent tant qu’ils n’évolueront pas. Et un homme qui a faim est un homme qui ne pense pas, et par conséquent ne se donne pas les moyens de son développement.

L’inadéquation du système éducatif

Plus de cinquante après les indépendances de la plupart des pays d’Afrique, le système éducatif ne s’est toujours pas adapté aux réalités du monde actuel et à l’évolution des sociétés africaines. L’enseignement élémentaire reste encore un luxe pour la majorité. Et l’enseignement supérieur ne forme en grande partie que des diplômés sans emploi, incapables d’entreprendre ou de s’insérer dans la vie active dès qu’ils quittent leur formation. Malheureusement, dans un tel contexte, l’enseignement technique et professionnel qui devrait être privilégié demeure le parent pauvre du système éducatif africain. C’est une des questions essentielles du développement de l’Afrique à laquelle il convient absolument d’apporter une solution adéquate.

L’instabilité sociopolitique

On peut compter sur les doigts d’une seule main les pays africains qui peuvent se targuer d’avoir connu une longue stabilité sociopolitique. Or celle-ci est une condition sine qua non du développement. L’Afrique souffre de la faiblesse de son organisation sociale et politique. Tant et si bien que la conjugaison des conflits internes et des appétits voraces externes que suscitent ses richesses ne sont pas pour la prémunir de crises plus ou moins graves. L’une des raisons à cette instabilité chronique et récurrente est la difficulté à s’approprier les principes de la démocratie. Qu’ils accèdent au pouvoir, au pire par un coup d’Etat, succession dynastique ou au mieux par des élections passablement démocratiques, les chefs d’Etat africains finissent la plupart du temps par succomber à la tentation de la dictature. Grâce à l’absence d’armées républicaines, à la corruption, à l’analphabétisme d’une grande partie des peuples, au clientélisme, au culte de la personnalité et tutti quanti. Toutes choses qui engendrent des conflits sociopolitiques. De manière inconsciente ou non, les peuples africains sont eux-mêmes des usines à dictateurs.

La corruption

La corruption est un véritable fléau en Afrique, qui touche particulièrement les élites. En l’absence d’initiatives individuelles ou collectives de production de richesses, l’Etat reste la seule vache à lait. La politique est ainsi le plus grand pourvoyeur d’emplois et le seul moyen de s’enrichir de façon licite ou illicite sans travailler. Cet état de fait inhibe toute initiative et transforme certains agents de l’Etat, mais surtout ceux qui sont au pouvoir ou proches, en de véritables sangsues. Les économies en sont du coup gangrénées. Si l’argent qui part en fumée au moyen de la corruption était effectivement investi en faveur des populations, l’Afrique aurait fait un grand bond en avant sur la voie du développement. Mais qui refuse de gagner de l’argent sans travailler? Ils ne sont pas légion, ces agents de l’Etat ou hommes politiques en Afrique. De nos jours, ils sont malheureusement comme des espèces humaines en voie de disparition. La bonne gouvernance n’est pas le fort des dirigeants africains. Bien au contraire, c’est ce qui leur permet de rester au pouvoir en organisant des élections truquées d’avance par l’achat de conscience non seulement des électeurs en majorité analphabètes, mais aussi de ceux qui organisent les élections. Quand ils ne sont pas purement et simplement des dignes représentants de groupements économiques et politiques étrangers qui font feu de tout bois à cet effet.

Marcus Boni Teiga


Profession: intellectuel africain


Tant qu’ils n’ont pas donné leur point de vue, vous ne savez rien de ce qu’il y a à savoir de l’Afrique et une fois qu’ils se sont exprimés, vous êtes encore plus ignorant qu’au lever du jour. Voici, ramassée en quelques lignes, une revue kaléidoscopique des caractères et des personnages qui parlent avec autorité au nom de l’Afrique ou à son sujet.

Descendants de griots, ils ont appris à écrire mais privilégient plus souvent la parole… Tout engagement vrai commence par l’écriture, eux ils ont en horreur «la page écrite»! De nos jours la parole n’alimente que le sensationnalisme, l’instant, la presse, Internet… Les intellectuels africains, lorsqu’ils parlent de l’Afrique sont des électrons libres sans contrepoids, ils se craignent au point de s’éviter soigneusement, mais ne se respectent pas assez pour se nourrir mutuellement de leurs lumières. Chacun d’eux est détenteur d’une somme «infalsifiable», c’est-à-dire insusceptible de négation, de rejet : l’Olympe même ne saurait héberger tous ces dieux africains.

Au Cameroun (charité bien ordonnée…), il n’y a pas une grande tradition d’intellectuels. Le Président de la république, par exemple, n’a fait qu’une école coloniale, où il a obtenu un diplôme de premier cycle. Ce qui est bien fruste quand on lit le curriculum studiorum d’Abdoulaye Wade du Sénégal, qui est sans doute l’un des présidents les plus diplômés de la planète. Fruste, mais déjà mieux que son prédécesseur, Ahmadou Ahidjo, télégraphiste breveté qui n’a pas fait d’études supérieures. Si l’on veut filer la comparaison et l’étendre par exemple à la deuxième personnalité de l’Etat du Cameroun, le président de l’Assemblée Nationale, on se heurte au certificat d’études primaires de celui qui en son temps ne fut qu’un modeste instituteur : le très honorable Cavayé Yeguié Djibril (lire le tèrè zonorable…). L’un de ses homologues sénégalais a le bonheur d’être le professeur Iba der Thiam, historien de haut vol, membre du comité scientifique de l’UNESCO chargé de rédiger l’Histoire générale de l’Afrique.

Qui sont-ils? Que font-ils? Que valent-ils?

Non. L’intellectuel n’est pas forcément l’universitaire ou le diplômé de troisième cycle. Mais il est évident que pour éclairer, il faut être éclairé, et de nos jours il est rarissime de trouver des autodidactes magnifiques. Quand on pense aux intellectuels africains, il faut donc d’abord regarder parmi la masse des écrivains, éditorialistes, et autres «hyperdiplômés». En dehors d’eux, il y a des sages, mais pas d’intellectuels. Le Cameroun dispose aussi d’intellectuels de grande envergue, d’historiens émérites… Achille Mbembe par exemple! Voilà un historien qui fait en permanence l’actualité, du moins la commente-t-il. Dans les antennes de RFI, il a affirmé récemment qu’il y a au Cameroun «une opposition imbécile». Il lui a manqué assez de lucidité pour reconnaître que c’est parce que cette opposition s’appuie sur des intellectuels limités qu’elle est si imbécile. Son attitude est symptomatique de la malédiction africaine. Il a été donné à l’Afrique le don de produire des génies culminants, mais la fée carabosse (la garce!) a fait en sorte que ceux-ci lui soient parfaitement improductifs. Comment peut-on être si intelligent mais aussi totalement inutile dans un continent qui a tant de besoin de ses intelligences? Les intellectuels ont-ils choisi de se cantonner dans des rôles de pirates de la politique à la recherche de trésors improbables, semant l’angoisse dans les esprits et s’étonnant, étonnamment, de récolter l’apathie?

Ils se spécialisent dans le «vocabulaire de l’insulte politique», la formule hautaine et sentencieuse, et transforment l’Afrique en mur des lamentations. Ils font toute leur carrière intellectuelle dans des postures d’observateurs engagés dans la critique courte et savante. Le fringant Mathias Eric Owona Nguini partage avec A. Mbembé de nombreuses vues. Notamment quand il faut jouer les Cassandre et promettre aux Camerounais une alternance par les armes. Ils ne disent pas précisément si c’est ce même peuple qu’ils déconsidèrent dans leurs analyses qui prendra ces armes. Quel peut être l’effet sur les jeunes qui les écoutent de ces noires prédictions? Je vous le donne en mille : fuir au plus loin, voyager comme eux ou mourir d’avoir essayé. Un peuple qui n’a pour seule expérience que la misère ne va raisonnablement pas se hâter d’emprunter le chemin le plus long pour arriver à Rome, la voie de la guerre, qui n’est pas la voix de Dieu.

Diagnostic sans nuances

Ils vont et viennent entre discours pessimistes qui sonnent creux et formules brillantes qui sont vaines. Parce que rares sont de toute manière ceux qui trouvent grâce à leurs yeux. Des éloges médiocres pour leur peuple qui manque de l’imagination et de la maturité nécessaires pour réussir une alternance pacifique, des critiques sévères pour les leaders politiques qui n’y comprennent rien et n’arrivent à rien, le mépris facile pour les dirigeants en place, solidairement et pleinement responsables du marasme. Ils ont posé un diagnostic sans nuances alors qu’ils sont eux-mêmes inaptes à organiser la communauté la plus urgente à constituer : la communauté intellectuelle. Ces penseurs abstraits, ces byzantins intellectuels ont fait vœu d’inactivité politique, au sens de politique politicienne, au sens de tremper ses mains dans le cambouis et dans le sang, ils font, si cela est possible, du dilettantisme intellectuel, se posent, par rapport à leur peuple devenu la risée de l’univers, en génies impuissants qui fonctionnent dans un mode satellitaire, «contre une partie de leur gré», s’il est permis d’ainsi torturer l’expression. Les Africains restés au champ d’honneur n’ont plus besoin qu’on leur fasse des leçons, ils veulent qu’on se joigne à eux, pour tenir des rôles restés vacants, délaissés par ceux qui croient que les leviers du développement et de l’alternance, c’est en France qu’il faut les trouver. Tous les grands génies de l’histoire ont souffert en leur temps. Eux, ils ne veulent pas souffrir, n’acceptent pas qu’il puisse exister de souffrance puisqu’ils ont immigré dans des pays où tous les grands combats ont été menés et toutes les révolutions ont eu lieu. Beaucoup de ces savants éphémères n’appartiennent à aucune société savante, ils ont écrit une fois pour toutes le chef d’œuvre de leur vie, une thèse de doctorat de 2000 pages et, 20 ans après, pas un seul livre! Leur distinction suprême a été leur parchemin, leurs fonctions officielles sont des médailles en chocolat... Ils se font appeler docteur dans des écoles maternelles et parfois acceptent même du professeur, alors qu’ils n’ont jamais obtenu d’agrégation. Et s’ils l’ont eue, c’est sans gloire qu’ils en sont venus à bout.

L’éternelle négritude

Les grands hommes rencontrent de grands événements, ils en prévoient les prolongements, en analysent les suites dans une imposante et cohérente unité, un «système» qui confine toujours à l’universel… Arjun Appadurai est un auteur classique de son vivant, Edgar Morin est cité comme s’il était mort, imaginez l’un d’eux, publiant une tribune dans Le Figaro, et signant au bas Pr Edgar Morin, Dr Arjun Appadurai… Tour à tour absolument comique et infiniment pathétique! Dans une certaine Afrique, les politiques font les événements et les intellectuels les commentent, incapables qu’ils sont d’ouvrir des débats sociaux; quand ils publient c’est souvent à compte d’auteur et sans daigner obtenir de code ISBN ou, dans le meilleur des cas, c’est de la littérature grise. Quand bien même ce sont des maisons d’édition respectables qui le font, elles ne daignent jamais reproduire l’expérience: soit que les œuvres produites se soient mal vendues, soit que les auteurs en question aient asséché leur source d’inspiration… Ils ignorent ce que leurs devanciers ont fait et raillent ce que leurs confrères produisent. Enfin, les intellectuels dont il est question veulent diviser la classe politique en socialistes et libéraux, dans des contextes préindustriels et des superstructures qui n’évoquent en rien les pays de naissance de ces idéologies!

Nos futurs Cheikh Anta Diop

Que leur devra la prochaine génération d’intellectuels? A qui devront nos futurs Cheikh Anta Diop d’exposer avec éclat et grâce? La mort même ne saurait être pour ces «pères absents» une promotion, attendu qu’il n’y aura plus rien pour témoigner de leurs sacrifices ni personne pour rendre justice à leur œuvre. Ceux qui les survivront ne les pleureront pas parce que la démocratie leur tombera du ciel, comme en Côte d’Ivoire. Et tous, à l’instar de la génération qui les aura précédés, professeront Senghor, Sankara, Mongo Béti, etc. Un vrai et grand intellectuel africain ne sera pas invité par un média uniquement pour des faits circonscrits à son continent comme un simple correspondant de presse. C’est une lumière qu’on verra s’irradier sur tous les sujets d’importance et dont on pourra présenter une publication majeure toutes les fois qu’une caméra de télévision se mettra en travers de son chemin. Car l’éclairage des projecteurs, ils ne le cherchent pas, ils l’attirent. Sans demander que leurs travaux soient admirés, ils savent qu’ils seront distingués… Un intellectuel c’est surtout un homme dont la parole est souvent redoutée, constamment attendue, partout présente, toujours précieuse. Le président français dit une énormité à Dakar? A quoi cela sert-il de lui répondre puisque Frantz Fanon avait déjà élevé le débat dans d’autres altitudes. Va-t-on réchauffer les combats de la négritude, continuer de s’adresser aux anciens maîtres quand c’est notre peuple qui écoute? Va-t-on prouver qu’on a une histoire, en écrivant comme l’avait voulu l’historienne Adama Ba Konaré, épouse du président Alpha Oumar Konaré, un livre d’histoire toutes les fois qu’un insensé se trompera? Ce serait comme vouloir démontrer qu’on est en essayant de prouver qu’on a été. En Côte d’Ivoire, Célestin Monga, Olympe Bhêly-Quenum, Tierno Monénembo, le sud-africain Aziz Pahad, Gaston Kelman, Fweley Diangitukwa, tous des intellectuels authentiques, ont voulu parler d’une seule voix pour crier au loup, le problème c’est qu’ils réagissaient en militants de base d’une cause passagère. Où étaient-ils avant que cela ne vire au pire? Pourquoi ont-ils aujourd’hui donné leur langue aux chars? La Force Licorne en maîtrisant Gbagbo et Simone les a carrément rendus atones, alors que les aberrations continuent en s’exacerbant. La terreur a été rééquilibrée, la vengeance a eu lieu, l’humiliation s’est passée, la danse funèbre des vainqueurs continue sur les ruines d’une CPI (Cour pénale internationale) illégitime et une CVR (Commission dialogue, vérité et réconciliation) illégale.

Et pourtant ils existent…

S’il fallait établir une cartographie de l’intelligentsia africaine, elle serait par trop clairsemée en Afrique centrale. Si l’on se fie pour cela à des indicateurs aussi simples que les publications régulières qui ne soient pas exclusivement des œuvres scientifiques, l’impact de leurs contributions au-delà du cercle de leur émission, leur diffusion, leur présence dans des répertoires comme JSTOR, Science Direct, etc. Un intellectuel, ça n’est pas un épicier, qui n’est connu que de la ménagère du quartier : il doit avoir des références constantes urbi et orbi, il doit être connu et reconnu. Il n’existe plus de génie méconnu, les artistes les plus mal aimés finissent toujours par trouver leur public. Wole Soyinka, le premier auteur noir lauréat prix Nobel de littérature, qui a des positions parfois déconcertantes, mais allant toujours dans le sens du progrès des peuples africains, l’égyptien Amr Khaled, l’universitaire ougandais Mahmood Mamdani, le philosophe ghanéen Kwamé Anthony Appiah, Dambisa Moyo qui, dans Dead Aid, affirmait, contrairement à Barack Obama, que l’Afrique avait besoin d’hommes et de femmes forts, sauf qu’elle exigeait d’eux qu’ils soient en plus bienveillants pour que le continent prospère… Tout n’est donc pas noir dans ce continent, puisqu’il y a d’incontestables lumières!

Eric Essono Tsimi

 

POURQUOI LES AFRICAINS ONT-IL HONTE DU CULTE DE LEURS ANCETRES ?

Jean-Paul Pougala


L’Afrique est le berceau de l’humanité. C’est-à-dire que les Africains sont les géniteurs de tous les 7 milliards d’hommes et de femmes qui peuplent la planète terre. Sur le plan scientifique, ceci est prouvé notamment par l’ADN. La conséquence de ce lien entre l’Afrique et ses enfants éparpillés partout dans le monde est l’exportation de la pratique religieuse africaine sur toute la planète. C’est en effet la seule véritable religion universelle du monde qui n’a eu besoin d’aucun pasteur, d’aucun missionnaire, d’aucun imam pour être présente ici ou là. C’est la seule religion qui s’est rependue sur tous les continents sans un seul mot, sans une phrase de prosélytisme ou de propagande à la recherche de convertis, sans un mort, sans la moindre violence ? La religion africaine est dès lors la mère de toutes les religions, non seulement parce qu’elle est la plus ancienne, mais aussi et surtout parce que c’est celle qui résiste le mieux au temps, à l’espace et à la virulence des nouvelles religions qui ont tout fait pour l’effacer. Mais pourquoi les Africains eux-mêmes donnent-ils la fâcheuse impression d’avoir honte des croyances de leurs ancêtres ?

A- LA FAUTE DES INTELLECTUELS AFRICAINS

Dans sa pièce de théâtre publiée en 1946 intitulée : Malatesta, Henry de Montherlant (1895-1972) a écrit : "Vivent mes ennemis ! Eux du moins, ne peuvent pas me trahir". Et Bernard Werber de renchérir disant : "Seuls vos vrais amis savent où vous frapper pour que ça fasse mal". Le peuple africain a été trahi par ses propres intellectuels. La religion africaine a été bradée pour un bout de pain mal garni par ses propres fils présumés éclairés, supposés la protéger. Alors que l’Afrique était encore sous occupation européenne, la plupart des intellectuels africains ont mis tous leur talent à aider à pérenniser sa mise sous tutelle. Le plus illustre d’entre eux s’appelait Léopold Sédar Senghor. Voici ce qu’il conseille en 1945 aux missionnaires catholiques pour dompter son peuple ; il cite son mythe, il cite la phrase d’une circulaire écrite un siècle plutôt (1847) par le prêtre Libermann à ses missionnaires envoyés en Afrique : "soyez nègres avec les nègres afin de les gagner à Jésus-Christ". Cette phrase des plus humiliantes et grotesques se passe de commentaire. Mais Senghor ne va pas s’arrêter en si bon chemin. Il va ajouter : " Le rôle du catholicisme est de dégager plus nettement la personne de la famille, Dieu des ancêtres ; (...) Par le Christ, Dieu fait chair, qui empêche ainsi le Catholicisme de tomber dans l’abstraction formaliste. M. Griaule me dira que je parle en croyant et il n’aura pas tort." Alléluia. En d’autres termes, pour Senghor, l’individualisme et l’égoïsme européens doivent remplacer la solidarité et la générosité africaine, doivent se substituer à la "famille africaine" qu’il juge comme une abstraction formaliste, c’est-à-dire une illusion, une utopie entretenue par la tradition, par le conformisme. Pour lui, un frère doit être un vrai frère biologique, un cousin doit être un vrai fils biologique de l’oncle direct ou de la tante et non cette "abstraction formaliste" africaine qu’il déteste.

Mais le plus grave c’est ce qui suit "dégager Dieu des Ancêtres" surtout lorsqu’on le met en relation avec la citation précédente de Libermann "être nègre avec les nègres". Senghor est un homme très intelligent. Il réussit là où les missionnaires avaient toujours échoué : en prônant de dégager le Dieu chrétien des ancêtres, son idée est de faire émerger cette figure monothéiste pour remplacer en tout et pour tout, la religion des africains par celle des Européens. Il sait très bien que pour les Africains, il n’y a pas de Dieu. Les ancêtres sont leurs divinités, sont leurs Dieux. et c’est à eux qu’ils vouent leur culte. Offrir un Dieu aux Africains c’est déchoir leurs ancêtres de leur position de divinité. C’est couper la relation fusionnelle qui lie un africain avec son mort ; C’est le tuer, puisqu’il cesse désormais d’être lui-même. Les Africains cessent d’être eux-mêmes sans savoir exactement ce qu’ils sont devenus. La seule chose certaine est qu’ils sont devenus dès lors très vulnérables parce qu’ils doivent attendre que le nouveau maître leur explique ce qu’ils sont, ce qu’ils seront. C’est ce rôle que d’aucuns qualifient de "traitre", d’autres de "bon nègre", d’autres encore de "suppôt colonial", ou même de "sous-préfet de la France", que la très grande majorité d’intellectuels africains a décidé d’adopter, vue la très forte récompense que Senghor a obtenu en son temps : Président de la République. L’épilogue de la crise ivoirienne en 2011 n’est pas là pour les démentir. Ce qui fait froid dans le dos c’est d’imaginer qu’à la même époque plusieurs intellectuels africains s’étaient retrouvés à Dakar au Sénégal pour étudier comme le Docteur Félix Moumié du Cameroun de 1945 à 1947 et très probablement communiquaient avec leur frère aîné Senghor (député du Sénégal à l’Assemblée Nationale Française) sur les voies et moyens pour obliger la France à reconnaître l’indépendance des pays africains. On connait la fin de l’histoire : assassinat de ces africains trop idéalistes peut-être trop naïfs de simplement rêver d’une Afrique libre. (Dr. Moumié meurt, empoisonné par la France à l’âge de 35 ans).

Les intellectuels qui sont ceux qui partout dessinent l’architecture et l’agencement des croyances religieuses en écrivant par exemple des livres saints devant servir de référence aux croyants, en Afrique, ont démissionné de leurs responsabilités. Ce sont eux les premiers qui se sont engouffrés dans les offres religieuses élaborées par leurs collègues des autres continents. Ces déserteurs d’un nouveau genre, souvent très instruits ont laissé derrière eux un champ de ruine à la merci des idées venues d’ailleurs, des croyances importées et qui se battent férocement pour avoir ce territoire abandonné, d’où les violences islamistes et chrétiennes de noël 2011 et les jours suivants au Nigeria.

B- RELIGION ET SOUVERAINETÉ : LE CAS DU JAPON

Peut-on être réellement indépendant en adoptant des religions imposées avec de la violence et accompagnée par de la soumission et l’esclavage ? Le Japon, a érigé la religion d’origine africaine du culte des morts, au rang de religion d’état en 1868, les prêtres shintoïstes payés par l’état, chaque habitant devant s’inscrire comme membre d’un sanctuaire non loin de son domicile. Tout ceci a limité fortement l’installation du christianisme au Japon. Au 5ème siècle de notre ère, les Japonais sont culturellement très complexés par rapport à leurs voisins Chinois qui ont une religion très forte et structurée : le Confucianisme depuis déjà plus de 8 siècles alors que les Japonais pratiquent encore la religion d’origine africaine non structurée. Chaque village japonais pratique le culte des morts, sans qu’il y ait une synergie entre eux, avec des rites très différents. Pour éviter que le peuple japonais se convertisse en masse dans cette nouvelle religion venue d’ailleurs, les intellectuels japonais se réunissent et posent très clairement la question : "peut-on se développer et devenir un pays fort et puissant en cédant sur l’essentiel, sur la spiritualité venue d’ailleurs ? peut-on se dire patriote et avoir honte des pratiques religieuses de ses propres ancêtres ? La réponse à ces deux questions est NON. Mais comment faire ? Le peuple a besoin de croire et est toujours plus naïvement séduit par l’offre toujours alléchante venue d’ailleurs. La réponse est toute trouvée : regrouper et harmoniser le culte des ancêtres des différents villages, pour ne plus laisser à chaque communauté de continuer seul et sans orientation dans une jungle religieuse où elles sont une proie trop facile pour les lucioles des croyances importées. C’est cette harmonisation qui prend le nom de Shintoïsme. Le mont Fuji est désigné et devient sur le plan national, le mont sacré de référence pour la nouvelle religion. Au 21ème siècle, les Japonais de Tokyo sont même allés plus loin dans leur pratique religieuse, en dédiant une chambre entière dans leurs maisons pour ceux qui en ont les moyens, au culte des ancêtres à qui on fait des offrandes, de la viande, de l’eau, du pain. Le Japonais dialogue au quotidien avec son mort, avec ses ancêtres. La conséquence est qu’il est en paix avec lui-même et avec les autres. Le pays est la troisième puissance du monde sans la grande violence, qu’on retrouve dans les pays occidentaux.

C- ET L’AFRIQUE ?

Le christianisme et l’Islam sont des religions introduites en Afrique avec la violence. La religion africaine a démontré d’être une religion de la paix, son fondement est l’harmonie entre les membres de la société. C’est une religion de dialogue et de pardon. C’est ce qui explique que malgré les torts causé par les Européens aux autochtones d’Amérique, aux Africains, aux autochtones d’Australie ou de Papouasie, aucun de ces peuples n’a jamais développé le moindre sentiment de vengeance et même pas de haine à long terme. La religion africaine ne professe pas l’éthique, elle est éthique et morale. Ses adeptes, convaincus qu’ils deviennent des divinités après la mort, prennent de la hauteur dans leurs comportements au quotidien. La jeunesse africaine doit se préparer à reprendre son destin en main, parce que leurs aînés ont lamentablement failli même là où on n’avait pas besoin de cerveau pour avancer : la religion.

Pour éviter les scénarios de terrorisme chrétien et musulman sur le sol africain, il existe une seule solution durable, à mon humble avis, l’Afrique doit débuter sa déconstruction des vérités venues d’ailleurs sans aucune prise sur son environnement, et cesser d’avoir honte de ses croyances ancestrales, se livrant de temps en temps en cachette à des pratiques grotesques qu’il croit être la religion africaine, mais qui au font, ne sont plus que la caricature de l’original. Les gouvernements doivent avoir le courage de mettre les spécialistes au travail pour reformuler en l’adaptant au contexte moderne notre propre religion.

D- LA RELIGION AFRICAIN EST-ELLE RÉTROGRADE ?

La religion est plutôt en avance par rapport aux religions monothéistes, telle l’islam et le christianisme parce qu’elle a réussi à exorciser complètement la peur de la mort. Le fait que les morts deviennent une divinité permet une sorte de régulation des débordements possibles, garantissant ainsi la sécurité et la sérénité de la communauté. Car chacun est porté à s’auto réguler et éviter la radicalisation dès lors qu’il sait que son père, sa mère, son grand-père etc. doit devenir très bientôt une divinité. Les bombes des chrétiens et des musulmans deviennent une inutilité et une probabilité nulle dès lors qu’on sait que celui qu’on fera passer de la vie à la mort deviendra une divinité capable de nous punir sur nos actions mauvaises, ou alors de nous protéger de tous les maux, que nous récitons et promettons dans nos recueillements de ne jamais les commettre. En d’autres termes, dans la religion africaine, le croyant ne peut pas demander la protection d’un mal qu’il a pu commettre, ce qui le décourage d’emblée d’y recourir comme raccourci pour résoudre ses problèmes. Ceci contraste avec l’Islam et le christianisme qui au contraire promettent à ceux qui commettent du mal aux autres une impunité totale, basée sur le pardon inconditionnel, il suffit de quelques prières et le mal est lavé. On peut donc recommencer son forfait.

La religion qui à priori est une question anodine et intime, est pourtant décisive pour l’affirmation des peuples. La Pape Jean-Paul II s’était battu afin que le christianisme soit inscrit dans le traité européen comme le fondement de l’identité culturel européenne. On ne peut que lui donner raison, puisqu’il rendait ainsi hommage aux croyances de ses ancêtres et le revendiquait. La vraie question était plutôt de savoir quelle place dans cette identité culturelle de l’Europe les Africains chrétiens y trouvaient-ils ? La honte qu’ont certains africains de leurs ancêtres a transformé ce qui reste de leurs croyances en folklore pour charlatans à la recherche de quelques âmes naïves à arnaquer avec des prétendues révélations tout aussi bidon sur l’avenir. Les Etats doivent reprendre la main en Afrique pour fixer la ligne rouge marquant la différence entre les effets bénéfiques de la mythologie religieuse de nos ancêtres et la course au fric qui envahit toutes les couches de la société africaine dite traditionnelle avec la prétendue sorcellerie dans toutes les sauces et les injustes accusations des ennemis choisis pour porter le chapeau sur tout malheur qui peut subvenir.

E- EN AFRIQUE COMME AU JAPON

Comme exprimé plus haut, le Shintoïsme Japonais est une des variantes de la religion africaine La différence entre le Japon et l’Afrique est que la bas, les intellectuels n’ont pas eu honte de leurs croyances. C’est un rapport, un dialogue direct avec son mort que rien ne peut remplacer. Le japonais prend sa sérénité de son mort à qui il voue un culte quotidien, avec qui il dialogue et se sent en paix d’abord avec lui-même et ensuite avec la société entière. c’est le même scénario que nous retrouvons dans la plupart des villages africains où la chambre des morts est remplacée par la foret sacrée, par l’arbre sacré en dessous duquel les sacrifices sont déposés, de l’huile de palme versée à même le sol ou de morceau de viande de chèvre que les fourmis en feront un vrai festin.

F- QUELLE RELIGION AFRICAINE AU 21ème SIÈCLE ?

Au moment où on assiste à la plus forte urbanisation de l’Afrique, avec des villages qui sont en passe de devenir des villes, les états africains devraient se concerter pour harmoniser l’offre religieuse africaine, avec la création dans toutes les villes africaines, d’une sorte de jardin botanique d’un genre nouveau, devant servir au recueillement et aux sacrifices que les croyants africains et les convertis d’autres continents pourront venir trouver un moment de paix en écoutant bruit des oiseaux ou tout simplement le ruissèlement de la rivière artificielle si importante dans les croyances africaines comme instrument de purification. Si au contraire rien n’est fait, le désarrois religieux des populations africaines continuera à créer cette espèce de no man’s land, la terre de personne, une sorte de supermarché des âmes où tous les chacals du monde viendront à la chasse de leurs proies pour alimenter d’abord leurs caisses et leurs gloires avec des conséquences souvent fâcheuses entre les prédateurs comme les événements tristes de Abuja au Nigeria le jour de noël et les jours suivants pour la vengeance. L’Afrique n’a rien à voir dans des batailles de conquête et de positionnement des religions importées. Sans la religion de nos ancêtres, le nomadisme spirituel dans lequel vivent les Africains depuis trop longtemps sera toujours un élément de déséquilibre sociétal et de déchéance culturelle. Plus l’état cède sa place aux religions importées qu’elle ne peut pas maîtriser et plus il descend en enfer pour la gestion courante de la vie de ses citoyens.

G- QUEL MODÈLE DE SOCIÉTÉ POUR UNE AFRIQUE BIENTÔT PROSPÈRE

L’Afrique deviendra dans les prochaines années une des principales puissances économiques du monde. La religion que nous adopterons formatera la société dans laquelle nous voulons vivre. Les deux principales religions importées ont des choses en commun, contraires à nos intérêts :

- le fatalisme : les africains qui ont subit le travail forcé ont tendance à associer au travail l’explication de punition, de soumission. Si une religion peut le consoler en attribuant toutes les causes à un dieu. Il n’en reste pas moins que notre priorité est de mettre les personnes au travail, c’est d’amener les jeunes à aimer le travail. C’est d’encourager les jeunes à créer le travail afin d’être maîtres de leurs destins. Pour l’Afrique, le fatalisme de ces deux religion est plutôt nocif.

- triomphe de l’individu sur la société, sur la communauté. La richesse la plus insolente du monde peut côtoyer la misère la plus criante sans gêner personne à New-York ou à Dubai. La pauvreté est même vantée comme une vertu. Ainsi, Dieu ne préfère-t-il pas les pauvres aux riches ? Dans tous les cas, ces deux religions ont besoin qu’il y ait des pauvres afin que le riche puisse avoir l’opportunité de laver sa conscience en donnant quelques miettes. Notre objectif en Afrique est de fuir la pauvreté à vitesse grand V.

- Manque de patriotisme : Les dettes de l’état japonais sont totalement absorbées par les entreprises japonaises qui dans le Shintoïsme, évite que ce soit quelqu’un en dehors du groupe à venir résoudre les problèmes financiers de leur état, au moment où en Occident, ce sont des individus qui spéculent sur le chute de leur gouvernement, qui parient sur leur déclin à eux tous. Le jour où ils ont compris qu’ils pouvaient gagner quelques dollars en plus en déplaçant les usines vers la Chine, ils se sont tous précipités à fermer les entreprises en Occident sans se préoccuper des dommages que cela pouvait créer à la société qui leur avait donné tant de chance et de fortune. Le plus ridicule est que mêmes les États s’y sont mis. On a ainsi vu l’État Français actionnaire dans une grande compagnie, délocaliser les parties administratives et comptables vers l’Inde en mettant au chômage des centaines de ménages de Français.

Est-ce le genre de modèle de développement que nous voulons pour l’Afrique ? Je ne pense pas. Nous devons revenir au culte de nos ancêtres afin de retrouver cette solidarité ancestrale qui a fait notre force et garanti l’équilibre de notre société même durant les dures périodes de l’oppression et de l’humiliation de l’occupation européenne. La prospérité du continent africain ne sera effective et stable que si elle impliquera tout le monde, comme tout un village. Arrêtons de singer des modèles de développement que nous ne maitrisons pas et surtout, des modèles que même celui qui nous l’a apporté ne le maitrise pas lui-même, vue la crise profonde dans laquelle lui-même se trouve, afin de réinventer notre propre modèle de développement humain en partant de nos villages, en commençant par faire de nos campagnes le premier cercle de production et de distribution de la richesse. Nos villes ne pourront que suivre la vague ainsi créée et maîtrisée. Si nous ne revenons pas à nos fondamentaux, le déséquilibre entre l’économie florissante et une poche de miséreux sera inévitable. L’individualisme et l’égoïsme des religions monothéistes dans lesquelles personne n’a de compte à rendre à personne d’autre qu’à Dieu ont fabriqué le Dieu Argent.

H- CONCLUSION

Les Africains qui vivent en Europe ont entendu au moins une fois cette phrase "tu n’es pas comme les autres, tu es plus intelligent" La plupart de ceux qui sont chrétiens ou musulmans réagissent comment ? Ils se sentent flattés. Ils se sentent élus et très souvent, ils en rajoutent. Par contre ceux qui pratiquent le culte des morts réagissent par l’indignation. Parce que ces autres jugés peu-intelligents c’est une partie de nous-mêmes, c’est nous mêmes qu’on insulte. Car selon nos croyances, nous ne sommes rien dans notre groupe, nous avons beau exceller dans le monde entier, mais tant que notre peuple est piétiné, c’est nous-mêmes qui sommes piétinés. Les prisons européennes sont pleines à craquer d’Africains qui ont commis un seul tort, celui dit de "l’immigration clandestine" et les autres africains qui sont en règle ou qui ont la nationalité dans ces pays sont convaincus que cela ne les regarde pas. Erreur. Nous devons à chaque fois faire un retour aux sources dans nos propres racines, dans nos propres traditions et croyances pour chercher à interpréter tout ce qui nous arrive. On comprendrait alors très vite que ces sans-papiers incarcérés sont une partie de nous-mêmes. Qui sommes-nous  ? Nous sommes ce qu’est notre famille. Nous sommes ce qu’est notre pays. Nous sommes ce qu’est notre continent. S’il est pauvre, c’est nous qui sommes pauvres. S’il est humilié, c’est nous tous qui le sommes. Lorsqu’on trahit la mémoire de ses ancêtres on peut tout trahir. Lorsqu’on trahit ses propres morts on ne peut reculer devant rien pour ses intérêts personnels. Ceux qui ont honte de nos ancêtres sont une indication de ceux sur qui nous ne pouvons baser l’espoir de la renaissance africaine. L’Afrique fera bientôt partie de ceux qui comptent dans le monde. Se présentera-t-il à ce rendez-vous en revendiquant fièrement son authenticité ou en singeant les autres ? Les langues africaines feront-elles partie de cette fierté ? Mais existera-t-il une Afrique digne sans sa religion ?


SPORT


Nouvelles du groupe : Deux joueurs pourront ne pas participer à la CAN

 

Selon une source concordante, 2 joueurs de l’équipe nationale du Burkina dont les noms n’ont pas été dévoilés pourront ne pas prendre part à la CAN. La raison proviendrait d’un problème administratif. Si cela s’avérait fondé, ces éléments pourront être remplacés par Robert Sankara et Adama Ni Plange, non retenus parmi les 23 de la liste définitive mais qui s’entraînent toujours avec l’équipe. A la seule condition de s’acquitter de la somme de 2 millions de F CFA par joueur. Affaire à suivre.


Pas d’inquiétude pour Alain Traoré

Blessé lors du dernier match amical contre les lions A’ du Cameroun, Alain Traoré souffre d’un mal à l’isco jambier (un muscle derrière la cuisse). Selon le kinésithérapeute, ce n’est qu’une petite lésion qui ne va pas empêcher le sociétaire de l’AJ Auxerre d’être en pleine possession de ses capacités avant le premier match des Etalons. Lors de la séance de dimanche, il a subi seul un entraînement spécifique.

Rassemblées par Y. OUEDRAOGO à Yaound

Sidwaya


4 Messages de forum

Comment une source peut-être concordante à elle seule ????????? Arrêtez s’il vous plaît ce journalisme du flou.

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Je ne crois pas que cela soit un problème ! le montant à s’acquitter pour les deux (2) joueurs ne vaut même pas un (1) Guiro !!

Répondre à ce message

ces deux joueurs sont Djarkardia KONE et Abdoul Razak TRAORE qui seraient de nationalité ivoirienne. S’il vous plait le Burkina va devenir ridicule sur le continent avec ces histoires de papiers. Pour ce qui est du joueur NII Plange Adama, il est d’origine ghanéenne. Vérifions qu’il remplit les exigences du Règlement d’application des Statuts de la FIFA.

Footfoot, le Burkina Faso ne se résume pas au football.Ya bien des événements plus importants que le foot qui rendent le Burkina sur la voix du ridicule.(Guiro, alternance démo, etc...).donc ce que vous dites est ridicule !
Penses-tu que même Robert Sankara n’a pas une nationalité Ivoirienne ? Ce sont les joueurs concernés eux même qui sont ridicules car ils sont allés tellement haut, qu’ils aspirent à descendre ! (tu comprends ce que je veux dire car Habib Bamogo...). Que dit tu de Ouedraogo qui a jouer pour les éléphanteaux il ya 2 ans ? C’est aussi les lois que les occidentaux nous imposent qui en sont responsables : binationalité, double nationalité, etc....

 

Bénin - Les Français ont toujours la cote dans le football africain

Déjà très représentée dans la football africain, la France est sur le point de voir un autre de ses entraîneurs débarquer sur le continent noir. En effet, Foot365 rapporte que Manuel Amoros a été choisi pour entraîner les Ecureuils, l’équipe nationale du Bénin. L’ancien international français, latéral droit de l’Olympique de Marseille, remplace Edmé Codjo qui avait pris ses fonctions en août dernier et qui n’est pas parvenu à qualifier la sélection pour la Coupe d’Afrique des Nations 2012 organisée par le Gabon et la Guinée équatoriale. «C'est le Français Manuel Amoros qui a été nommé comme sélectionneur des Ecureuils. Il est attendu vendredi à Cotonou pour la signature de son contrat», déclare un responsable du ministère des sports à l’AFP. «Il sera assisté de son compatriote Nicolas Philibert. Le contrat sera signé pour une durée de deux ans».

L’ancien Monégasque a déjà entraîné une équipe africaine. Entre juin 2010 et janvier 2011, il a supervisé la sélection comorienne. Et avant de devenir entraîneur, Manuel Amoros a mené une brillante carrière de footballeur. Le natif de Nîmes (dans le sud de la France) débute sa carrière en 1980 avec l’AS Monaco. Il y passe neuf années durant lesquelles il remporte deux championnats de France (1982, 1988) et une coupe de France (1985). Mais à c'est à Marseille qu’il connaît la consécration. Avec la formation olympienne il décroche trois titres consécutifs de champion de France (1990, 1991, 1992), et surtout une Ligue des champions en 1993, une première (et la dernière) pour un club français. En 2010, il est élu meilleur latéral droit de l’histoire du club.

Amoros était également un joueur-clé de l’équipe de France avec laquelle il compte 82 sélections pour 1 but inscrit. Le défenseur participe aux campagnes des années 80 menées par la légende Platini. En 1982, il est élu meilleur jeune joueur de la Coupe du monde, deux ans plus tard, il remporte l’Euro 84. En 1985, la France gagne également la coupe intercontinentale des nations, un match opposant le vainqueur de l’Euro au gagnant de la Copa America (la compétition ne s'est tenue qu'à deux reprises en 1985 et 1993). Le latéral droit participe aussi à la Coupe du monde 1986 et à l’Euro 1992. En Afrique, Manuel Amoros rejoint notamment Alain Giresse et Claude Leroy, respectivement sélectionneur du Mali et de la République démocratique du Congo (RDC). D'ici un mois, une Française devrait également arriver sur le sol africain, Elisabeth Loisel étant fortement pressentie pour reprendre l'équipe féminine du Nigeria.

Le clan Ayew, une dynastie de footballeurs

Chez les Ayew, on est footballeur professionnel de père en fils. L'ancien international ghanéen Abedi Pelé doit apprécier la réussite familiale. Ses deux derniers enfants, André et Jordan, font notamment beaucoup parler à Marseille.

Mise du 16 décembre: le joueur ghanéen de l’Olympique de Marseille André Ayew a été nommé joueur de football africain de l’année 2011 de la BBC. Il devance Yaya Touré, Gervinho, Samuel Eto’o et Seydou Keita.

Mise à jour du 7 novembre: La famille Ayew a joué a un rôle clé dans la victoire de l'OM sur Nice, le 6 novembre (2-0). Jordan a marqué le premier but (72e) et André a provoqué le penalty transformé par Loïc Rémy dans les arrêts de jeu.

D’ordinaire, se faire un nom est le premier objectif des jeunes talents du football. Mais parfois, certains grillent cette étape. Parce qu’ils sont «fils de», «frère de», ou «cousin de», la lumière est déjà sur eux. Et on les attend au tournant. Dès lors, le but est de se faire un prénom, de dépasser la célébrité de son aîné. Ce défi, relevé avec succès par quelques-uns, sclérose les carrières de beaucoup d’autres.

Chez les Ayew, on se range plutôt dans la première catégorie. Au jeu des 7 familles, les Ghanéens Kwame, Jordan et compagnie sont presque imbattables. Dans la lignée du patriarche Abedi, ils sont cinq à avoir chaussé les crampons du haut niveau, avec des fortunes diverses.

Abedi Pelé, l’illustre guide

Paradoxalement, l’initiateur de la dynastie Ayew est connu sous un autre patronyme. Abedi Pelé, de son vrai nom Abedi Ayew, est une figure du football africain. De Domé, son village natal dans le nord d’Accra (la capitale ghanéenne), à Marseille, le virevoltant milieu de terrain offensif a charmé les amateurs de beau jeu.

Né en 1962, le petit Abedi s’éveille au ballon rond dans la rue. Rapidement reconnu comme l’un des meilleurs potentiels nationaux, ce joueur de poche (1 m 73) au toucher de balle soyeux est âgé d’à peine 19 ans quand il est convoqué avec le Ghana pour la Coupe d’Afrique des nations (CAN) 1982, disputée en Côte d’Ivoire. Les Black Stars, surnom des joueurs ghanéens, remportent le trophée face à la Libye aux tirs au but. Le jeune homme, entré en cours de finale, écrit la première ligne d’un palmarès amené à en compter d’autres.

Abedi Ayew prend alors le nom d’Abedi Pelé en hommage au célèbre Brésilien et parce que son jeu rappelle celui du «joueur du XXe siècle». Sous ce nom, il s’inscrit dans la liste des premiers footballeurs africains connus en Europe, tels que le Camerounais Roger Milla ou les Algériens Mustapha Dahleb et Rabah Madjer.

Après le Qatar, la Suisse et le Bénin, Abedi Pelé rejoint la France en 1986. Une terre où il va connaître ses plus grands succès avec la machine Olympique de Marseille de Bernard Tapie. Sous le maillot des Ciel et Blanc, le Ghanéen glane trois fois le Ballon d’Or africain entre 1990 et 1992, ainsi que trois championnats de France. Mais surtout, en plus de ravir le Stade Vélodrome de ses dribbles chaloupés, il accède à la postérité en donnant à Basile Boli le but du sacre marseillais en finale de Ligue des champions 1993 contre l’AC Milan (1-0) à Munich.

Retraité depuis 2000, le meilleur buteur de l’histoire du Ghana (33 buts) a été cité, en 2004, dans la FIFA 100, une liste des 125 joueurs les plus exceptionnels et les plus talentueux de leur génération. Une liste composée à l’occasion du centenaire de la Fifa par un certain… Pelé. En 2007, Abedi Pelé a connu des heures difficiles: il fut accusé de corruption après que le club dont il est le président-fondateur, le FC Nania, a remporté un match sur le score de… 31-0!

Et depuis peu, Abedi Pelé observe avec attention l’émergence de ses fils Rahim, André et Jordan.

Kwame Ayew, le frère de l’ombre

Moins connu que son grand frère Abedi, Kwame Ayew n’en a pas moins eu une carrière plutôt honorable. Né en 1973, Kwame s’est illustré au poste d’attaquant. Après s’être essayé au championnat de France du côté de Metz, puis en Arabie saoudite et en Italie, il prend la direction du Portugal en 1995. Au sein de l’élite lusitanienne, ses talents de buteur se révèlent avec plus d’évidence, surtout lors de son passage à Boavista, club pour lequel il score 31 buts en deux saisons. Parallèlement, Kwame porte aussi le maillot de la sélection ghanéenne, avec parcimonie.

Son principal fait d’armes remonte à l’été 1992: il fait partie de l’équipe médaillée de bronze aux Jeux olympiques de Barcelone. Un titre dont lui peut se targuer, au contraire d’Abedi Pelé, trop âgé pour disputer ces olympiades! Jusqu’en 2000, Kwame marque 9 buts en 25 sélections pour son pays, dont certaines sous la coupe de son frangin devenu capitaine.

Par la suite, Kwame Ayew connaît une fin de carrière plus modeste, avec des escapades en Chine et en Turquie. Retiré des terrains depuis 2007, l’ancien attaquant s’est reconverti dans la religion. Il a fondé, en 2010, une église évangéliste au Ghana. Il est aussi un fervent militant des causes luttant contre la pauvreté. Abedi et Kwame ont un autre frère, Sola Ayew, également footballeur. Quasi inconnu du grand public, ce dernier a vu sa carrière se limiter aux frontières ghanéennes.

Rashim Ayew, l’aîné d’Abedi

Fils aîné d’Abedi Pelé, Ibrahim Ayew, plus connu sous le nom de Rashim Ayew, est le premier à perpétuer la tradition familiale. Après son père et ses oncles, il amorce la nouvelle génération des Ayew. Rashim est né en 1988 à Tamale, au nord du Ghana. Contrairement à ses frères André et Jordan, il est le seul natif du pays.

Milieu de terrain défensif, Rashim Ayew a été formé au sein du club de papa, le FC Nania, avec lequel il a aussi effectué ses débuts professionnels. Après une brève expérience du côté du club égyptien du Zamalek SC, il rallie l’Europe et la formation belge de Lierse SK en janvier 2011. Appelé en sélection dès 2009, il a pris part à la campagne des Black Stars durant la CAN 2010, qui a vu le Ghana échouer en finale devant l’Egypte. Présent en Afrique du Sud pour le Mondial 2010, Rashim Ayew n’en a cependant pas disputé une seconde. C’est des tribunes qu’il a assisté aux exploits de son frère André, étincelant avec le Ghana. Rashim, motivé par la réussite de ses frères en France, espère lui aussi se faire un prénom. Conscient que ses cadets ont accédé à un niveau supérieur au sien, le plus grand des trois entend bien lui aussi faire honneur au nom qu’il porte :  «Moi aussi, je me bats ici [en Belgique] pour porter haut notre nom de famille et pour que le Ghana reste au top. Notre père a mis la barre très haut, et il sera difficile pour nous de l’égaler. Mais il sera fier si nous en sommes capables. C’est un challenge pour chacun de nous», a-t-il déclaré récemment.

André Ayew, la pépite de l’OM

Il est la nouvelle coqueluche du Stade Vélodrome. André Ayew a, il est vrai, tout pour séduire l’exigeant public olympien: il est le fils d’une légende locale, il en a hérité le talent, et il a été formé à l’OM! Le deuxième des trois fils Ayew a vu le jour en 1989 à Seclin, dans le Nord, alors que son père évoluait à Lille.

Comme son paternel, André se tourne vers le football dès son plus jeune âge, au Ghana. L’histoire s’accélère quand il rejoint l’Hexagone pour intégrer, en 2004, le centre de formation de l’Olympique de Marseille, alors présidé par Pape Diouf, le dirigeant sénégalais. En août 2007, «Dédé» franchit un cap en faisant ses premiers pas avec l’équipe de l’OM et la sélection du Ghana, en dépit de son âge et de son inexpérience. Installé dans le groupe ghanéen de Claude Le Roy pour la CAN 2008, le milieu de terrain offensif, en quête de plus de temps de jeu, est prêté par l’OM en 2008. Une première année à Lorient, puis une seconde à Arles-Avignon en Ligue 2, jusqu’en mai  2010. Juste avant de chavirer dans un autre monde. Titulaire avec le Ghana lors de la Coupe du monde 2010, il brille sur les terres sud-africaines. Ses performances sont telles qu’il compte parmi les trois postulants au titre de Meilleur espoir de la compétition. Une récompense qui revient finalement à l’Allemand Thomas Muller, plébiscité devant Ayew et le Mexicain Giovani Dos Santos. Mais qu’importe, la machine est lancée. Ses récents progrès incitent Didier Deschamps, le coach marseillais, à l’incorporer dans son groupe. Et André Ayew se montre plus que digne de cette confiance, en réalisant une saison 2010-2011 époustouflante. D’entrée incontournable, il trouve le chemin des filets à onze reprises, martyrise les défenses adverses, et les supporters marseillais l’élisent Olympien de la saison. Et papa applaudit, bien sûr. Inévitablement, le nouveau joyau de la Canebière commence à attirer les regards des grands clubs. Le Bayern Munich et les Anglais d’Arsenal notamment suivent avec beaucoup d’intérêt André Ayew, lié contractuellement à l’OM jusqu’en 2014 avec une clause de départ de 13 millions d’euros. En attendant un éventuel transfert, Marseille toute entière chérit l’enfant prodige de son ancienne idole.

Jordan Ayew, le jeune qui pousse

Et dans cette famille en or, voici le petit dernier, Jordan. Pour quel autre club que l’Olympique de Marseille le troisième fils d’Abedi Pelé pouvait-il jouer? Né en 1991 dans la cité phocéenne, Jordan Ayew a suivi l’exemple de son frère André. D’abord plutôt attiré par la mécanique et l’automobile, l’adolescent attrape malgré tout le virus du football et garnit à son tour les rangs des équipes de jeunes de l’OM en 2005, alors qu’il n’a que 13 ans. Vivant mal le déracinement avec ses proches restés au Ghana, Jordan a la chance de pouvoir compter sur les conseils de son frère, dont il est très proche. C’est pourtant sans lui qu’il débute en Ligue 1 fin 2009 (André est alors prêté à Lorient). L’attaquant en devenir est même sacré champion de France 2010 avec Marseille. Un titre qu’il espère bien glaner désormais en compagnie de son aîné, avec lequel il vit. Depuis l’éclosion marseillaise d’André, Jordan est quelque peu passé au second plan dans les esprits. Moins décisif que son frère, l’international ghanéen (encore un!) conserve cependant une marge de progression évidente. Lui qu’on présentait, il y a quelques années, comme le plus doué des deux, a tout pour suivre les traces de son père et de son frère. Et perpétuer encore et encore la dynastie Ayew.

Nicolas Bamba

 

Amantle Montsho, la Botswanaise qui court plus vite que son ombre


En s’adjugeant la couronne mondiale du 400 mètres, Amantle Montsho a rapporté au Botswana la première médaille d’or de son histoire en athlétisme.

Les fans de suspense et de spectacle en ont eu pour leur argent lundi 29 août 2011 à Daegu (Corée du Sud), où se déroulent actuellement les 13e championnats du monde d’athlétisme. Il est un peu plus de 21h, et la finale du 400 mètres dames, intense à souhait, a livré son verdict. A l’arrachée, la championne du Botswana Amantle Montsho vient de s’offrir la médaille d’or devant l’Américaine Allyson Felix, tandis que la Russe Anastasiya Kapachinskaya se pare de bronze. Sans surprise, la course s’est réduite à un affrontement entre les deux favorites, Montsho et Felix. Sous la clameur du stade de Daegu, les deux athlètes se sont livré un duel titanesque, quasi insoutenable dans les derniers mètres. Et au moment de couper la ligne, Allyson Felix, triple championne du monde en individuel, doit rendre les armes, devancée d’un cheveu par Amantle Montsho (49’’56 contre 49’’59).

L’ascension progressive jusqu’au sacre

L’Américaine a certes battu son record personnel, mais sa déception est grande. Impériale sur 200 mètres à tous les Mondiaux depuis 2005, elle était à Daegu pour réaliser un doublé 200/400 inédit. C’était sans compter sur Amantle Montsho, l’étoile du Botswana, pays surtout réputé pour ses diamants. En «explosant» le record national, la nouvelle championne du monde entre dans l'histoire de l'athlétisme. Et c'est avec peine qu'elle retient des larmes de joie :  «Je suis tellement heureuse aujourd’hui. Je n’arrive toujours pas à y croire. Je voudrais remercier tous ceux qui m’ont soutenu et m’ont rendue plus forte. Je voudrais aussi remercier les concurrentes. Elles m’ont poussé à courir plus vite, en particulier Allyson Felix», a-t-elle déclaré à l'issue de la course.  Peu après que l’hymne botswanais a retenti dans le stade sud-coréen, la sprinteuse s’est présentée à la presse, rayonnante de bonheur. Quel chemin parcouru depuis son enfance à Mabudutsa, un village du nord du Botswana! La jeune fille, bien que plus rapide que tous ses camarades d’école, n’avait pas de destin tracé vers le toit du monde. Alors elle s’est battue pour l’atteindre. «Je ne suis pas née dans une famille de sportifs, mais grâce à mon courage et à mon travail, je suis arrivée où je suis aujourd’hui», a-t-elle confié. Pour atteindre ce niveau, Amantle Montsho a dû s'employer et faire des sacrifices. Comme le choix de quitter son pays natal en 2005, où elle ne pouvait bénéficier de conditions d’entraînement optimales. Direction le Sénégal et le Centre international d’athlétisme de Dakar (Ciad), structure d’élite pour les athlètes (africains notamment), loin des siens. Bien que rude, la séparation a porté ses fruits: la Botswanaise s’y est perfectionnée, sous l’œil de son coach ivoirien Anthony Koffi. En 2006, Amantle Montsho prenait la 2e place des championnats d’Afrique de 2006, derrière sa partenaire d’entraînement au Ciad Amy Mbacké Thiam, l’ancienne championne du monde adulée en Afrique. Un premier pas symbolique pour Montsho, appelée à reprendre le flambeau de son aînée.  Son potentiel se révèle: entre 2007 et 2010, la Botswanaise truste la première place de toutes les compétitions d’Afrique et signe des chronos de plus en plus encourageants. L'année 2010 confirme sa montée en puissance à plus grande échelle, quand elle se classe quatrième des championnats du monde en salle de Doha (Qatar). Finalement, la récompense à tous ses efforts est là. A Daegu, Amantle Montsho a su résister au retour acharné d’Allyson Felix pour offrir à son pays sa première médaille d’or en athlétisme. L'Afrique savoure aussi, elle qui attendait une nouvelle sprinteuse championne du monde depuis 2001 et la victoire à Edmonton (Canada) sur 400 mètres d’une certaine… Amy Mbacké Thiam.

La nouvelle star du Botswana

Quelle métamorphose pour Amantle Montsho depuis les olympiades d'Athènes en août 2004. A l’époque, elle était cette jeune femme de 21 ans, première représentante du Botswana en athlétisme aux JO. Elle avait quitté la compétition dans l’anonymat, sortie dès la première série. Quatre ans plus tard, elle se hissait en finale et terminait dernière des Jeux de Beijing. Autant dire que le rendez-vous est pris pour les JO de Londres, en 2012. Sa couronne mondiale lui confère d’office l’étiquette de prétendante à la plus haute marche du podium. A 28 ans, Amantle Montsho ne cache pas son ambition. «Je dois me préparer très sérieusement pour les JO, car chaque année, de nouvelles concurrentes émergent. Je dois bien me mettre ça en tête et repartir m’entraîner dur», assure-t-elle. Offrir au Botswana sa première médaille olympique lui assurerait un peu plus l’admiration de ses 1,8 million de compatriotes. Consciente de l’influence et de l’importance que peut avoir le sport dans les sociétés, Amantle Montsho veut être un modèle au sein de son pays : «Dorénavant, je vais être un exemple pour les jeunes athlètes du Botswana. Ils travailleront durs, maintenant qu’ils m’ont vu gagner une médaille d’or.» Le secrétaire général de l’Association botswanaise d’athlétisme, Legojane Kebaitse, loue le succès de la championne nationale et la lumière qu’elle jette sur la nation :  «Nous avons des diamants. Nous avons du bétail. Nous avions dit que nous voulions de l'or. Nous voulions trois médailles d'or et nous en avons une. Tous ceux qui souhaitent visiter l’Afrique peuvent maintenant voir qu’il y a de grands talents au Botswana.» Amantle Montsho en est assurément un. Un joyau africain qui n’a sûrement pas fini de briller sur les pistes d’athlétisme.

Nicolas Bamba


ECONOMIE


Crise économique: le AAA se raréfie sur la planète


Neuf pays de la zone euro sur dix-sept ont vu leur note dégradée par Standard and Poor's, vendredi 13 janvier 2012.

REUTERS/Francois Lenoir/Files


L’agence de notation Standard et Poor's a procédé à une dégradation en série de la dette souveraine des pays européens. La note d'excellence, le AAA, devient une rareté au niveau mondial : l’excellence en matière de finances publiques ne concerne plus que 14 Etats. La France et l'Autriche ont perdu leur note AAA, comme les Etats-Unis en août dernier et désormais le petit groupe des bons élèves - ceux qui obtiennent la note maximum - ne compte plus que 14 pays dans le monde.

Il s’agit de dix Etats européens, plus l'Australie, le Canada, Hong Kong et Singapour. En Europe, l'Allemagne, la Finlande, les Pays-Bas et le Royaume-Uni font partie de cette short-list. Après l'hécatombe que viennent de subir neuf pays membres de la zone euro sur dix-sept, seules la France et l'Autriche peuvent afficher la note immédiatement inférieure, AA+.

L'Espagne, la Slovénie et la Slovaquie n'ont plus qu'un seul A. L'Italie chute en catégorie B, à BBB+. Le Portugal devient une valeur spéculative avec BB seulement et Lisbonne est aussi la lanterne rouge des pays de la zone euro. A cela, il convient d'ajouter que, à l'exception de l'Allemagne et de la Slovaquie placées par Standard et Poor's sous perspective stable, tous les autres pays de la zone euro sont placés sous perspective négative par l'agence de notation qui se réserve ainsi la possibilité de les dégrader encore. reçu l’Oscar du meilleur film et de la meilleure réalisatrice en 2010 pour Les Démineurs («The Hurt Locker»), dispose de ses entrées au Pentagone. Elle avait déjà bénéficié à l’époque de son assistance pour le scénario des Démineurs. Aujourd’hui, le projet de son nouvel opus est en bonne voie. Des acteurs sont souvent cités pour faire partie de la distribution comme Idris Elba ou Guy Pearce. Dernier en date à révéler qu’il est bien en pourparlers avec les producteurs, Joel Edgerton. Le comédien australien âgé de 37 ans a partagé la vedette avec Tom Hardy dans Warrior, film d’arts martiaux à succès. Edgerton n’a encore rien dit du rôle qu’il pourrait jouer dans le film mais, détenteur d’une ceinture noire de karaté, celui du chef du commando des Navy Seal collerait plutôt bien à ses talents de sportif.   


A la Une de la presse française: le triple A perdu de la France

Par Norbert Navarro


L’actualité tient en une lettre ce samedi matin, 14 janvier, la première de l’alphabet, prononcée en trois exemplaires jusqu’à hier, en deux seulement depuis. Si je vous la chantais, cette revue de presse, vous diriez des vocalises. « A A A », puis « A A + ». Et ce ne serait plus du tout la même chanson. Car la dégradation d’un cran de la qualité de la « signature » de la France par l’agence de notation américaine Standard & Poor’s sonne comme une déflagration pour la presse française. « La France perd son AAA : la crise de l’euro s’aggrave », s’exclame Le Figaro en gros caractères noirs. « La France perd son triple A », écrit, cette fois-ci, en rouge, Le Parisien-Aujourd’hui en France.

Changement de ton, et de style, à la Une de Libération, avec ce surtitre imprimé en rouge : « La France dégradée », placé juste au dessus d’un patronyme qui barre, en noir et en gros caractères, toute la Une de Libé, celui du Président de la République, « S_RKOZY », patronyme auquel il manque, justement une lettre, la lettre A, tombée au plus bas de la Une et couchée sur le flanc, une patte en l’air, comme un animal foudroyé. La presse prend donc acte, non seulement de la dégradation de la note française, mais aussi de la notion de « perspective négative » qui lui est accolée comme du maintien par Standard & Poor’s du triple A de l’Allemagne. Libération n’hésite pas à y voir un « tremblement de terre », estimant qu’il s’agit d’un « camouflet pour le président de la République » (président écrit cette fois-ci avec un « p » minuscule, tandis que la République conserve, elle, son « R » majuscule à la Une du journal). L’Allemagne préservée par l’inflexible agence de notation et, dans le même temps, la France ainsi « sanctionnée », c’est « une double peine pour Sarkozy », martèle Libération. A 100 jours du premier tour de la présidentielle, il s’agit du « pire des scenarios » pour Nicolas Sarkozy enchérit le quotidien. Car en perdant son triple A, la France « s’éloigne du modèle allemand, tant vanté, et se rapproche un peu plus de ce Club Med, moqué, des pays mal notés », étant rappelé qu’en l’occurrence, le « Club Med » est cette expression méprisante qui désigne les pays du sud de l’Europe communautaire en proie au marasme économique comme à la crise sociale).

 

Triple A : A.. A.. A.. hallali politique


C’était inévitable, à l’approche de la présidentielle, les commentaires politiques fusent déjà dans la presse française. Et La Voix du Nord le résume. « Dans la mare politique, ce pavé, lancé par Standard and Poor's, ne cessera pas de provoquer des remous jusqu'à la présidentielle ». C’est « un coup dur pour l’Elysée », reconnaît Le Parisien-Aujourd’hui en France. « Les conséquences immédiates de la dégradation de notre note vont être beaucoup plus politiques qu'économiques, confirme La République du Centre. Nicolas Sarkozy, le Président du triple A devient inévitablement le Président de la dégradation de la France », estime le quotidien. « Dans la course présidentielle, cela revient à concourir avec du plomb dans les poches », formule Le Journal de la Haute-Marne. « Une catastrophe, rehausse Le Midi libre. A 100 jours de la présidentielle, l'annonce de la dégradation de la note de la France est un véritable coup de massue pour le chef de l'État ». Le Figaro en convient, mais il complète l’analyse. Cette « dégradation change (…) la nature de la campagne présidentielle en France, souligne-t-il. Les socialistes ont beau jubiler, ils sont concernés au premier chef. Contrairement à ce qu'ils affirment, il n'existe pas d'alternative à la politique suivie par le gouvernement (…) Cela exclut de vendre du rêve aux électeurs et exige, au contraire, d’engager des réformes structurelles trop longtemps repoussées (…) Si tous les candidats s’en persuadaient, Standard & Poor’s aurait au moins servi à quelque chose », soupire Le Figaro.

Triple A : avis de tempête

Reste les effets concrets de cet événement sur l’Etat, les entreprises et les particuliers. Et la presse française semble tâtonner sur ce point ce matin. Il faut dire que ces conséquences sont encore difficilement prévisibles. Et même si la manchette du journal Le Parisien-Aujourd’hui en France promet à ses lecteurs de leur expliquer « ce que va changer cette dégradation », le contenu du journal est surtout marqué par l’emploi du verbe « risquer ». Ainsi, écrit Le Parisien, « Paris risque – en théorie – de devoir emprunter plus cher (…) la perte du triple A risque d’entrainer l’attentisme sur les embauches et l’investissement (…) les prêts accordés par les banques, qui pourraient elles-mêmes être dégradées risquent de connaître un nouveau ralentissement (…) la décision de Standard & Poor’s risque de compliquer les efforts de la zone euro ». Comme le prédit Le Figaro, « sur les marchés, la semaine prochaine risque d’être agitée ». Et cette prévision-là, elle, est tout sauf..risquée.

 

HISTOIRE


Ki-Zerbo, pilier de l'histoire africaine


Cinq ans après la mort du célèbre historien burkinabè, l'écrivain Emmanuel Dongala lui rend hommage.

Je me souviens encore de cette émission «Apostrophes» où pour la première fois Bernard Pivot invitait un parterre d'écrivains africains et pas des moindres. Le programme touchant à sa fin, le présentateur, de façon un peu facétieuse, a demandé à Joseph Ki-Zerbo qui évidemment était du nombre, si sans la colonisation, ce dernier serait aujourd'hui historien. «Historien?», a repris Ki-Zerbo, «Non, petit-fils d'historien probablement!». Voilà tout Ki-Zerbo, l'un des intellectuels africains le plus mésestimé sinon sous-estimé du XXe siècle. Et pourtant, sa contribution à l'élaboration d'un discours africain autonome, «endogène», pour reprendre le mot de ce premier agrégé africain d'histoire à la Sorbonne, a été aussi importante que celle de ses pairs sénégalais plus célèbres comme Léopold Sédar Senghor ou Cheick Anta Diop.

Se réapproprier l'histoire africaine

Pour lui, tout commence et finit par l'Histoire, car ce n’est que par une révision déchirante sur le plan historique que l'Afrique pourra développer une vision nouvelle du monde, «une nouvelle cosmogonie qui soit porteuse de bien de services et de valeurs». Pourquoi une telle révision, une telle rupture? Parce que trop longtemps l’idéologie dominante, européenne essentiellement, a fait croire que l’itinéraire historique de l’Afrique ne commençait qu’avec son contact avec l’Occident  (voir Hegel) et que l’essentiel de cette histoire se résumait à «l’épopée» coloniale du XIXe siècle et aux dernières décennies du XXe siècle où le continent fut décolonisé et mal décolonisé. Pour rompre avec cette vision réductrice de l’histoire africaine et permettre aux Africains «d’avoir un petit contrôle sur leur passé», Ki-Zerbo a commencé son gigantesque travail de pionnier en puisant aussi bien dans l’archéologie que dans les traditions orales. La première somme de ce travail est son ouvrage aujourd’hui devenu un classique, Histoire de l'Afrique Noire: D'hier à demain (1978). Plus tard, il co-dirigera deux ouvrages de la monumentale Histoire de l'Afrique, parrainée par l'UNESCO. Dans ces nombreux articles et ouvrages, Ki-Zerbo n'a cessé d'affiner sa réflexion. Il n'a cessé de clamer haut et fort que pour l'Afrique, développer une pensée endogène était une question de survie; sans cette pensée qui permettrait aux Africains de répondre aux questions «qui sommes-nous, d’où venons-nous?», l’Afrique deviendra sous peu victime d’un «clonage culturel» et qui dit clonage culturel, dit fin de la civilisation. Cette pensée endogène (et son corollaire de développement endogène) ne voulait pas dire s'emmurer et se camper dans le passé; l’on pense notamment au brumeux concept d' «authenticité» élaboré au Zaïre par Mobutu. Mais elle signifiait une pensée «poreuse à tous les souffles du monde» comme dirait le poète Aimé Césaire, et cependant puisant dans ses propres profondeurs tel un arbre qui se nourrit des vents extérieurs mais reste solidement enraciné dans sa terre. Ce n'est qu'alors, qu'une réflexion originale sur l’avenir de l'Afrique pourrait se faire, hors des grilles de lecture dominantes. Ainsi pourraient être repensés l'Etat, le développement, le système éducatif, l’importance des langues africaines dans l'éducation, la place essentielle des femmes et d'autres problèmes fondamentaux. Car il ne faut pas oublier que l'Afrique a été vidée de sa substance et que ce qu'on lui a apporté jusque-là contient beaucoup de vide.

Une pensée à mettre en action

Se réapproprier la totalité de son histoire, considérer les traditions orales comme sources valables d’éléments historiques, élaborer une pensée endogène et j’en passe, toutes ces idées originales à l’époque de leur conception sont aujourd’hui si bien intégrées dans la problématique et le paradigme des recherches et travaux actuels sur l'Afrique qu'elles ressemblent à des lieux communs tant elles semblent aller de soi. On oublie qu’à leur origine se trouve un certain Ki-Zerbo. Mais pour cet historien qui connaissait si bien l’Afrique pré-coloniale, perdre la paternité de ses idées et les voir tomber dans le domaine public ne pouvait être qu’être un objet de satisfaction, tout comme dans l’ancienne Afrique, il n’y avait pas de copyright sur les créations intellectuelles. En 1997, il reçut le Prix Nobel Alternatif pour ses recherches sur les modèles originaux de développement. Ki Zerbo n'a pas été qu'un intellectuel enfermé dans sa tour d'ivoire, il a été un homme d'action jusqu'au bout. Pour lui, la pensée ne pouvait être séparée de l'action et réciproquement. En 1958, jeune homme, il fit campagne pour le «non» au referendum organisé par De Gaulle, c'est-à-dire pour une indépendance immédiate des colonies africaines de la France. En 2003, octogénaire, il battait encore le pavé pour réclamer la lumière sur la mort de son compatriote journaliste Norbert Zongo.

Bien sûr, je ne veux en rien faire l’impasse sur le politicien burkinabè, celui qui avait été éliminé dès le premier tour de l'élection présidentielle en 1978. Mais franchement, entre un Ki-Zerbo président de la République du Burkina Faso et un Ki-Zerbo qui nous laisse en héritage ses travaux et son Histoire de l’Afrique Noire, je préfère de loin le dernier. À l'exception de Senghor peut-être, les intellectuels africains authentiques n'ont jamais réussi dans la politique politicienne et c'est tant mieux pour nous. Leur farouche indépendance, leur rigueur, font qu'ils ne se soumettent pas facilement . Il était donc prévisible que même un homme comme le Burkinabè Thomas Sankara, que par ailleurs Ki-Zerbo qualifie de «patriote sincère et désintéressé, un idéaliste volontariste», se défiât de lui et tout comme César, le fit juger et condamner par un tribunal dit «populaire». Le résultat fut l'incendie de sa bibliothèque de plus de 11.000 ouvrages, une sentence cruelle pour un intellectuel, historien de surcroît. C’est cela, le prix de la liberté intellectuelle. Il disait souvent, «nan lara, an sara»: «si nous nous couchons, nous sommes morts». Le lundi 4 décembre 2006, il ne s'est pas couché, il n'est pas mort, il a tout simplement rejoint l'Histoire. Mon plus grand regret c'est de ne pas avoir eu la chance de rencontrer, avant son départ, cet homme qui se situe d’emblée parmi les plus grands historiens et théoriciens que l’Afrique noire ait donné au monde.

Emmanuel Dongala est écrivain et professeur. Son dernier roman, Photo de groupe au bord du fleuve (Actes Sud, 2010) vient d’obtenir le Prix Kourouma 2011.


Peut-on qualifier l’esclavage de génocide ?

Généralités...

Les arguments invoqués pour prétendre que l’esclavage n’était pas un génocide, lorsque nous prenons le temps de les analyser, nous découvrons qu’ils sont en réalité largement évasifs, tandis que les chiffres démontrant le contraire sont eux, cinglant.

1- Les plantations n’étaient pas des camps de concentration : est-ce une affirmation fondée ?

Dans leurs ouvrages, nombreux sont les idéologues occidentaux qui affirment que les plantations de cannes à sucre de l’époque esclavagiste, ne peuvent être comparées à des "camps de concentration", tout simplement parce que la politique de natalité y était encouragée contrairement aux camps allemands où la mort était la seule issue. On reconnait là, la patte des membres du fan Club d’Eric Zemmour ! D’autre part, vu que les propriétaires avaient besoin de leur main d’œuvre servile pour assurer leur cadence de production, ils avaient l’habitude de prendre soin de leur esclaves, tant sur le plan de la nourriture que des soins. Cependant, que constatons-nous ? En y regardant de près, chiffres à l’appui, certains prennent leurs rêves pour la réalité.

2- Les plantations étaient bel et bien des camps de concentration !

Les données relatives aux plantations de la Guadeloupe révélées par l’enquêteur Lasserre, montrent qu’en 1671, il y avait sur 1513 couples possibles, 0, 71 enfants et plus d’un siècle après en 1790, on en était encore à 0,80 enfant par couple possible.

Pour la Martinique, Gabriel Debien montre qu’en 1763, il y avait 0,57 % de femme âgées de plus de 17 ans ayant un enfant de moins de 6 ans.

Pour Saint Domingue, le même auteur révèle que de 1741 à 1772, sur une plantation de 120 esclaves, il n’y a eu que 2 enfants par an. Après, même avec 50 esclaves de plus, le nombre était resté le même.

Sur une autre plantation de 150 esclaves, on a noté 6 naissances en 1787, 5 en 1789 et un seul en 1790. Ainsi, on le voit bien, les colons français n’ont jamais encouragé la natalité pour éviter de réduire leur profit et les seules plantations où la natalité a été quelque peu prise en considération sont celles des.... pères Jésuites, dominicains ou autres venus soit-disant évangéliser les Nègres. Ces données sur la natalité ont été encore soulignées le Marquis de Fénelon en Guadeloupe et en Martinique. Il constata aussi que c’était le seul avantage que ces plantations "religieuses" accordaient à leurs esclaves. On est très loin du catéchiste !

Ainsi, le taux de fécondité des femmes a été particulièrement mis à mal, en raison des conditions de vie inhumaine, sur les plantations. Selon l’étude de G. Debien, peu de femmes parvenaient à être fécondes et les colons préféraient acheter en permanence de nouveau captifs plutôt que d’encourager la création de familles. Enfin, la dure réalité est que les quelques femmes enceintes l’étaient souvent des colons eux-mêmes, car le viol des femmes esclaves était l’un des traits marquant de la plantation.

3- L’esclavage des Noirs est donc aussi un Génocide !

C’est le point le plus discuté du débat car par «  Génocide » on sous-entend une "extinction raciale" immédiate et massive. Or, la véritable question est la suivante : Quelle est légitimement la durée d’extinction en dessous de laquelle on ne reconnaît pas l’aspect génocidaire d’un Crime contre l’humanité ayant fait plus de 200 millions de victimes [1] ? 5 minutes ? 50 minutes ? 5 ans ? 50 ans ? En réalité, il n’y a aucune durée, seule compte l’issue finale.

Par exemple, si on tient compte des données chiffrées relatives à l’espérance de vie que l’enquêteur Gabriel Debien nous a dévoilé à propos des plantations françaises de St Domingue (Haïti), on découvre ceci :

o Sur la plantation Cottineau, 58 % des esclaves achetés en 1773 étaient décédés en 1774,

o Sur la plantation Constand, 51 % des esclaves achetés en 1764 étaient mort en 1767,

o Sur la plantation Grandhomme, 5O % des esclaves achetés en 1764 étaient décédés en 1768.

o Sur la caféière Guiton, on a 32 % de morts entre 1767 et 1768.

On constate alors que pour les plantations de :

o Cannes à sucre, en l’espace de 2 à 8 ans, 100 % des esclaves achetés à un moment x, avaient déjà rendu l’âme,

o Café, en l’espace de 3 à 4 ans, 100 % des esclaves achetés à un moment x, avaient rendu l’âme.

N’a-t-on pas ici, la preuve formelle qu’il s’agit bien d’un génocide calculé combinant les aspects suivants : o Kidnapping d’enfants appartenant à un groupe ethnique, o Altérations physiques et mentales portés à un groupe ethnique précis, o Atteinte à la personne humaine, o Altération de la fécondité féminine naturelle et des naissances, o Meurtre programmé d’individus utilisés comme « bêtes de somme ».

5- En conclusion...

En Mai 2006, le prof. Steven Han proclamait dans le Monde Diplomatique, pour masquer l’aspect génocidaire des plantations sucrières, que : « Les plantations de cannes à sucre n’étaient pas des abattoirs : elles fonctionnaient selon un système de travail fondé sur l’exploitation et l’oppression, auquel les esclaves s’adaptaient et contre lequel ils luttaient tout à la fois ». Mais en disant cela il se contredisait lui-même, car préalablement il avait consigné sur la même page, dans un passage relatif à l’économie sucrière, que : «  L’économie sucrière réalisait alors des bénéfices considérables et les planteurs estimaient moins coûteux de faire travailler leurs esclaves jusqu’à l’épuisement et d’en racheter pour remplacer ceux qui succombaient que d’encourager leur reproduction naturelle ».

Donc Echec et mat aux idéologues !

Vie, Santé, Force & Unité !!!


ACTUALITES


MAITRE GUY HERVE KAM A PROPOS DE L’AFFAIRE GUIRO : "Le président du Faso est engagé dans tout sauf dans la lutte contre la corruption"Faso est engagé dans tout sauf dans la lutte contre la corruption"

 

Guy Hervé Kam est avocat à la cour. Se prononçant sur l’affaire Ousmane Guiro, il explicite les chefs d’accusations qui pèsent sur ce dernier, évoque quelques directions dans lesquelles le dossier pourrait évoluer et fait une appréciation de la volonté politique de lutter contre la corruption au Burkina.

"Le Pays" : Maître Kam, en tant qu’avocat, quelle a été votre première réaction à l’arrestation de Ousmane Guiro ?

Maître Guy Hervé Kam : J’ai eu une réaction à deux niveaux. En tant que citoyen du pays des Hommes intègres, c’est une grande honte que j’ai ressentie de voir que des compatriotes avaient deux milliards de F CFA dont ils n’avaient pas besoin. Ma réaction en tant que juriste, c’est de penser à la suite judiciaire que cette affaire peut avoir, compte tenu de la complexité du domaine dans lequel l’on se trouve et de l’état de notre justice. Au début de l’affaire, on parlait de concussion et de détournement de deniers publics. Aujourd’hui, on parle de présomptions graves de corruption, de blanchiment de capitaux, d’enrichissement illicite. Que désignent ces termes et pourquoi ces chefs d’accusation ont évolué ?

Le détournement de deniers publics est une infraction qui vise une catégorie de fonctionnaires à savoir ceux qui sont dépositaires de deniers ou de biens publics. Si ces fonctionnaires détournent ou dissipent ces deniers ou biens publics, ils sont passibles de détournement de deniers publics. Comme elle, la concussion est une infraction particulière qui ne s’applique pas à tous les fonctionnaires mais à ceux qui peuvent par leurs fonctions, être amenés à percevoir des droits ou des taxes pour le compte de l’Etat, notamment les douaniers ou les fonctionnaires des impôts. Si un agent de cette catégorie perçoit du contribuable une somme indue, il est alors passible de concussion. On ne peut poursuivre quelqu’un pour concussion qu’en faisant la preuve que l’agent a perçu plus sur des droits qu’il ne devait percevoir ou des droits qu’il ne devait pas percevoir. Cette preuve est difficile à établir au tout début de la procédure. Pour ce qui concerne le détournement de deniers publics, il faut que les enquêtes permettent de savoir si l’intéressé avait des deniers publics à sa disposition, qu’il les a affectés à une autre destination ou qu’il les a tout simplement dissipés, pour pouvoir l’établir. A voir la manière par laquelle la procédure a commencé, en tout cas d’après les informations dont nous disposons, ce n’est pas une enquête administrative qui a permis de savoir que l’intéressé, en tant que directeur général des douanes, a fait des malversations. Il s’est agi plutôt de dépenses somptuaires de la part de jeunes qui ont conduit à découvrir de l’argent et de remonter à l’intéressé. A partir de ce moment, il est, à ce stade, prématuré de dire que cet argent provient d’une perception irrégulière des droits de douanes ou détournement des deniers publics que monsieur Guiro avait à sa disposition et dont il aurait abusé.

C’est donc tout à fait compréhensible qu’à ce stade de la procédure, les inculpations aient changé vers des inculpations plus simples à établir. Quand on parle de corruption par exemple, c’est une infraction qui consiste pour un fonctionnaire à demander ou à accepter des dons ou présents ou l’argent pour accomplir ou refuser d’accomplir un acte de sa fonction. Dans le cas présent, on peut se dire que les revenus normaux d’aucun agent de la fonction publique burkinabè ne peuvent lui permettre d’avoir deux milliards de F CFA. Et donc, si vous avez deux milliards, vous avez probablement sollicité ou accepté des dons pour accomplir ou refuser d’accomplir les actes de votre fonction. C’est plus facile, à ce stade, de présumer que les sommes proviennent de faits de corruption et l’information judiciaire visera à les établir ou à infirmer cette présomption. S’agissant de l’enrichissement illicite, c’est encore plus difficile car cela suppose qu’un agent s’est enrichi en se servant des biens de l’Etat. Cela voudrait dire que les deux milliards de F CFA proviendraient des caisses de l’Etat ou de l’utilisation d’autres biens de l’Etat pour se les procurer. Cela me paraît déjà plus compliqué que la corruption, mais ces deux infractions sont bien envisageables au stade actuel de la procédure. Le blanchiment de capitaux lui, est une infraction qui, bien qu’envisageable, suppose beaucoup d’autres recherches à mener car il suppose que l’argent trouvé a une origine délictuelle ou criminelle. Si l’on établit l’origine frauduleuse de ces deux milliards de F CFA, il sera alors aisé d’établir le blanchiment. Sauf que s’agissant probablement de la même personne, il y a de fortes chances que les éléments du blanchiment soient eux-mêmes des éléments constitutifs de la première infraction. Dans ce cas, le juge utilisera une seule qualification et alors on ne pourra pas retenir en même temps le blanchiment et l’enrichissement illicite, mais une seule de ces infractions.

Le bruit court que les deux milliards de F CFA pourraient être le fruit de certains cadeaux ou avantages liés au poste de directeur général qu’occupait Ousmane Guiro. Est-ce que cela pourrait être un moyen de défense ?

Avec tout le respect que je dois à mes confrères qui auront la charge de la défense de Ousmane Guiro, j’espère que cela ne sera pas utilisé pour la défense parce qu’il y a des avantages liés à une profession. Il semble que les douaniers ont ce que l’on appelle les fonds communs qui sont en réalité des ristournes que l’Etat leur donne sur la base de leur activité. Mais ce sont des avantages légaux dont l’origine peut être prouvée. Par contre, tout autre avantage serait indu. En tant que directeur général des douanes, si l’on reçoit des cadeaux pour accomplir ou refuser d’accomplir un acte de sa profession, comme accélérer une procédure, lever une pénalité, etc., c’est de la corruption. Car ce n’est pas en changeant le terme de cadeau en don ou vice-versa, que l’on passera d’infraction à acte légal. Dans ce genre de cas, l’infraction pourrait être retenue sauf s’il n’y a pas de volonté de le faire. Il y a des éléments pour distinguer un cadeau d’un acte de corruption. Le premier élément, c’est qu’un cadeau n’est jamais discret. On ne se cache pas pour faire un cadeau. A partir de ce moment, l’argent reçu en cadeau ne doit pas être caché non plus. Le second élément, c’est que le cadeau n’est pas interessé. Pourquoi deux milliards de F CFA en cadeau à Ousmane Guiro et non à vous et moi ? Si l’on fait un cadeau au DG des douanes, c’est qu’en raison de ses fonctions, il a le pouvoir d’accorder ou de réfuser des facilités dont on veut profiter. Cela signifie que les dons qu’il reçoit sont intéressés, contrairement aux cadeaux qui sont désintéressés.

Quels pourraient être les moyens de défense de Ousmane Guiro et dans quel sens la procédure pourrait évoluer ?

Ousmane Guiro et ses conseils seront maîtres de leur défense. Ce que je peux dire par contre, c’est que le juge d’instruction qui est actuellement en charge du dossier, a les outils nécessaires pour édifier le peuple burkinabè sur les tenants et les aboutissants de cette affaire. La tâche ne sera pas facile d’établir les faits compte tenu de la faiblesse de notre législation. Cela ne signifie pas que celle-ci ne permet pas de punir. Mais si l’on applique la loi actuelle dans une interprétation favorable à la lutte contre la corruption, cela peut constituer un précédent intéressant. Ce que nous pouvons craindre, c’est que le droit ne soit pas interprété comme il se doit, tout simplement par manque de volonté politique pour réprimer vraiment la corruption.

Justement, à votre avis, cette volonté de combattre la corruption existe-t-elle au Burkina ?

De manière catégorique, je dis non pour la simple raison qu’on est en train de se tromper gravement sur ce qui se passe. Le Premier ministre a affirmé que le gouvernement serait désormais impitoyable avec les agents corrompus, si des preuves existent contre eux. A analyser ces propos, on a l’impression que pour qu’il y ait des preuves, un agent de la fonction publique devrait avoir des cantines d’argent chez lui. On peut aller plus loin en pensant qu’au lieu d’avoir deux milliards de F CFA dans des cantines, si Ousmane Guiro avait 10 villas de 200 millions de F CFA à Ouagadougou, on aurait considéré qu’il n’y a pas de preuves. Car, aujourd’hui, il y a des fonctionnaires d’un niveau plus bas que celui de Ousmane Guiro qui ont de tels biens à Ouagadougou. Cela n’est pas considéré comme une preuve et pour moi, c’est un manque de volonté politique. Lorsqu’on observe la scène burkinabè, on se rend compte que le président du Faso est le premier supporter des Etalons, le premier engagé dans tout sauf dans la lutte contre la corruption. Cela aussi traduit un manque de volonté politique. Je voudrais qu’à partir de cet élément, le président du Faso dise clairement que la récréation est terminée et qu’il fera de la lutte contre la corruption une priorité de ce mandat. Il pourrait, par exemple, instruire, par son ministre de la Justice, tous les procureurs généraux, prês les deux cours d’appel du Burkina de faire de 2012 une année mains propres. A partir de ce moment, la volonté politique sera clairement affichée et je vous assure qu’on découvrira beaucoup de choses.

A vous écouter, vous semblez pessimiste. Pensez-vous que l’affaire Guiro ne sera qu’un feu de paille ?

Il ne s’agit pas de dire que le cas Guiro sera un feu de paille. Toutes les études en matière de lutte contre la corruption le prouvent : lorsque celle-ci atteint le stade systémique, c’est-à-dire qu’elle n’est plus un fait individuel d’un agent isolé mais un comportement généralisé, la sanction d’un seul agent, même convaincu de corruption, ne suffit plus, parce que ce dernier n’est qu’un maillon d’une chaîne. Si on l’enlève de la chaîne, le système le remplace immédiatement et la corruption continue. Au Burkina, il y a bien longtemps que la corruption a atteint le stade systémique. Il faudrait alors pour la combattre une politique globale de lutte.

Quelles mesures le gouvernement pourrait-il prendre pour limiter les possibilités de corruption au niveau de certains fonctionnaires ?

Une mesure importante dans la lutte contre la corruption serait de réduire le pouvoir discrétionnaire que certains agents ont dans les prises de décisions en matière de deniers publics. Par exemple, les douaniers et les agents des impôts ont le droit de transiger sur les amendes infligées sur les droits à percevoir. Il faudrait faire en sorte qu’une telle décision soit prise à un niveau où un seul agent ne peut pas marchander son pouvoir de transaction. Ensuite, il faut donner un sens à l’obligation de déclaration des biens qui pèse sur certains agents en rendant publiques leurs déclarations, à commencer bien sûr par le chef de l’Etat en personne. Enfin, il faut que la justice se réveille et qu’elle arrête de faire croire au peuple qu’elle n’a pas les moyens légaux pour lutter contre la corruption. Avec les textes que nous avons, je vous assure qu’une justice indépendante et courageuse peut faire beaucoup de choses dans le sens de la lutte contre la corruption.

Le Pays


A la Une : l’affaire Kieffer

 

Par Norbert Navarro


Annoncés initialement pour mardi ou mercredi de cette semaine qui s’achève, c’est finalement hier qu’ont été connus les résultats du test ADN pratiqué sur le squelette exhumé dans l’ouest de la Côte d’Ivoire. Ce n’est pas celui de Guy-André Kieffer, journaliste franco-canadien disparu à Abidjan en 2004. « L’expertise ADN est négative », titre sobrement le quotidien gouvernemental Fraternité Matin. Même concision du journal Le Patriote. « Le squelette exhumé en Côte d’Ivoire n’est pas celui de Kieffer », énonce le quotidien proche du président Alassane Ouattara, qui se contente, ce matin, comme plusieurs de ses confrères, de reproduire une dépêche d’agence, ce qui explique la référence superfétatoire à la « Côte d’ivoire » dans son titre. La presse ivoirienne indépendante est un peu plus diserte. Ainsi, pour Soir Info, « cette annonce déçoit l’entourage de Guy-André Kieffer qui avait pensé que cette dépouille (…) était bien celle du journaliste ». Le journal L’Inter, lui, s’enhardit à formuler qu’avec ce squelette exhumé, le juge d’instruction français Ramaël a « ramassé de faux os ». « Ramaël a encore échoué », enchérit, en Une, L’Intelligent d’Abidjan. Affaire Kieffer : le mystère « Gorge profonde ». Mais les commentaires les plus virulents, c’est dans Le Nouveau Courrier qu’on peut les lire ce matin. A la veille de la découverte de ce squelette, le journal, en effet, avait publié les dires d’un mystérieux témoin anonyme se prétendant issu des ex-rebelles ivoiriens et s’accusant d’avoir participé à l’enlèvement et au meurtre de Guy-André Kieffer. Baptisé « Gorge profonde » par le journal, cet homme refait surface ce matin dans Le Nouveau Courrier pour accuser le juge français qu’il prétend avoir rencontré à Abidjan. « Ramaël ne joue pas franc-jeu », accuse-t-il dans les colonnes du quotidien. Pour Le Nouveau Courrier, en tout cas, cette affaire de squelette était un « pur montage médiatique (…) un contrefeu devant les révélations faites par "Gorge profonde" (…) dans le but d’accuser le pouvoir Gbagbo. (…) Il fallait donc détourner l’attention de l’opinion ivoirienne et française sur les investigations de notre journal », fustige Le Nouveau Courrier, qui dénonce les « méthodes étranges du juge Ramaël (…) ainsi que des confidences farfelues (…) des témoignages, contradictoires (…) dont le seul point commun est qu’ils accablaient des proches de Gbagbo et qui ont été présentés comme des avancées dans l’affaire. Avant d’être abandonnés ». Proche, comme Le Nouveau Courrier, de l’ex-président Laurent Gbagbo, le quotidien Notre Voie lance, lui, la polémique. « Que vont devenir nos confrères proches de Ouattara, martèle-t-il ? Où vont-ils cacher leurs visages, eux qui, sans avoir attendu les résultats du test d’ADN, comme nous l’enseigne notre métier, se sont engouffrés dans des commentaires puérils et désobligeants en soutenant que le squelette (…) était celui de Guy-André Kieffer ? »


Affaire Kieffer : non-dits


Justement, dans la presse proche de la nouvelle majorité ivoirienne, un journal, crânement, n’entend pas s’en laisser compter. Il s’agit de Nord Sud. « Tout est relancé, contrattaque, en effet, le quotidien proche du Premier ministre et ministre de la défense Guillaume Soro, (…) Ce qui venait conforter l’idée qu’il pourrait bien s’agir du journaliste, c’est le fait que l’endroit d’où les restes ont été exhumés est un fief de l’ancien régime de Laurent Gbagbo. Or, toutes les personnes suspectées d’être à la base de la séquestration de Guy-André Kieffer, sont liées au clan de M. Gbagbo. Les plus dithyrambiques parmi les analystes sont allés jusqu’à faire un lien entre le lieu où a été découvert le squelette et l’ancien ministre et cadre du Front populaire ivoirien (FPI), Paul Antoine Bohoun-Bouabré qui est curieusement décédé, mercredi dernier ». Et, sans le nommer, Nord Sud s’en prend ce matin à un de ses confrères. « Alors que tous attendaient avec impatience, les résultats du test d’Adn, un journal proche de l’ancien régime au pouvoir avait révélé que le squelette (…) ne pouvait pas être celui de Guy-André Kieffer (…) En tentant de démonter, avec promptitude, avant les résultats, la thèse de ceux qui soutenaient que ce sont bien les restes d’un Blanc qui ont été exhumés, les partisans de Laurent Gbagbo donnent les preuves qu’ils en savent plus qu’ils n’ont craché. Ils savent donc où se trouve le journaliste franco-canadien ». Enfin, dans la sous-région, il n’y a guère ce matin que Guinée Conakry Info qui commente cette affaire de squelette exhumé. « Un flop médiatico-juridique. Une montagne qui accouche d’une souris », lance le site internet guinéen, avant de conclure : « on peut imaginer que les Ivoiriens ne sont pas prêts d’accepter qu’une telle bévue puisse se répéter ».

Le franc CFA sera-t-il dévalué?

Partout en Afrique, la rumeur prend de l'ampleur. Le franc CFA serait dévalué au 1er janvier. Info ou intox?

Et voilà que l’on reparle encore de la dévaluation du franc CFA! Comme c’est souvent le cas ces derniers temps, ce sont les difficultés financières et économiques que rencontrent de nombreux pays de l’Union européenne (UE) qui relancent les rumeurs et enflamment le cyberespace africain à propos d’une dévaluation qui serait d’ores et déjà programmée pour le 1er janvier 2012. La question posée est de savoir si la parité fixe qui lie l’euro à la monnaie africaine (1 pour 655,957) se justifie dans une conjoncture économique marquée par un net ralentissement de l’activité en Europe et par de sérieux doutes sur l’avenir de la monnaie unique de ce continent.

La problématique est connue. Les partisans d’une dévaluation estiment qu’elle permettrait d’augmenter les exportations africaines à destination de l’Europe mais aussi de la zone dollar (en dévaluant le franc CFA, on lui permet d’être moins pénalisé par la vigueur, certes relative, de l’euro par rapport au billet vert étasunien). A l’inverse, ses adversaires estiment qu’une telle opération ne se justifie pas. Pour eux, la situation économique et financière des six pays de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) et des huit pays de l’Union économique et monétaire de l’Afrique de l’Ouest (UEMOA) - ces deux zones monétaires utilisant le franc CFA – n’ayant rien à voir avec celle de 1994, date de la dernière dévaluation de cette monnaie.

Propos contradictoires

C’est l’avis de l’économiste Abdourahmane Sarr, président du Centre d'Etudes pour le Financement du Développement Local (Cefdel) à Dakar. «Je ne pense pas qu’il soit nécessaire de dévaluer le franc CFA à ce stade surtout avec des réserves de change équivalentes à sept mois d'importations de biens et services pour l'UEMOA et presque 40 pour cent de la masse monétaire au sens large», explique-t-il à SlateAfrique. Pour autant, cet ancien représentant du Fonds monétaire international (FMI) au Togo et au Bénin précise tout de même que «cela ne veut pas dire que le franc CFA est à son niveau d’équilibre et qu’il n'est pas surévalué».

Lucas Abaga Nchama, gouverneur de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (BEAC) doute lui aussi de la pertinence d’une dévaluation. D’ailleurs, pour lui, il «n’y a pas lieu de penser qu’une dévaluation du franc CFA va avoir lieu». Tenus le 24 novembre à l’issue de la session extraordinaire du comité de politique monétaire (CPM) de la BEAC à son siège de Yaoundé au Cameroun, ces propos n’ont pas pour autant fait disparaître les rumeurs. Et ces dernières ont même été renforcées par Mabri Albert Toikeusse, ministre d’Etat ivoirien du Plan et du Développement, qui a affirmé, le 24 novembre dernier que «la dévaluation n’est pas une catastrophe» et qu’elle pourrait même «générer des milliards (de francs CFA) si elle est anticipée» tout en donnant «plus de valeur aux produits d’exportation entre les pays membres» de la zone CFA.

Modification du statut du franc CFA

De façon générale, Abdourahmane Sarr, est partisan d’une modification du statut actuel du franc CFA. «Je pense qu'il est temps de penser à faire évoluer le régime de change vers quelque chose de plus flexible ce qui pourrait se traduire en une perte de valeur par rapport à l’euro et ou le dollar» explique-t-il en précisant qu'il serait «possible d'obtenir les effets d'une dévaluation sans dévaluer le franc CFA lui-même». Une approche qui passerait par l’introduction de monnaies complémentaires au franc CFA et que, d’ailleurs, l’économiste préconise aussi dans le cas de la Grèce.

«Le Cefdel veut faire la promotion de monnaies complémentaires régionales au Sénégal et en Afrique de l'Ouest comme solutions à la problématique du financement du développement local et permettre aux communautés de base africaines de renaître», explique-t-il. Pour résumer, cette approche propose l’existence de monnaies complémentaires qui pourraient être utilisées, via une institution financière, par les populations «qui ne sont pas suffisamment bancarisées» et qui n’ont donc pas accès au crédit. Ce mécanisme «équivaudrait à une bancarisation sous une forme physique et pourrait stimuler les économies locales» tout en évitant de dévaluer la monnaie nationale.  

La fin d’un lien colonial entre l’Afrique et la France?

En attendant que les propositions d’Abdourahmane Sarr se généralisent, il est difficile de savoir si la dévaluation tant redoutée aura lieu ou non. Mais, comme c’est toujours le cas avec cette question qui revêt un caractère hautement émotionnel en Afrique, le débat sur le niveau de la parité fixe entre l’euro et la devise africaine a plutôt tendance à faire oublier l’essentiel. En effet, ce n’est pas un hasard si les rumeurs à propos d’une modification de cette parité se propagent au moment où l’on doute de plus en plus de la cohésion de la zone euro. A ce sujet, il faut savoir que le franc CFA bénéficie de la garantie de convertibilité du Trésor français. La question est donc simple : quel est l’avenir de cette garantie à l’heure où Paris et Berlin envisagent de nouvelles solutions institutionnelles pour faire face à la défiance des marchés vis-à-vis des besoins financiers (et donc d’endettement) de la presque totalité des pays européens? Quel que soit le mécanisme trouvé, la France réussira-t-elle (le voudra-t-elle) à maintenir cette garantie? L’Allemagne l’acceptera-t-elle? Si, d’aventure, ces deux pays européens arrivent à s’entendre sur une union budgétaire d’ici la fin janvier 2012, qui peut jurer que cela n’affectera pas le statut du CFA ou, du moins, sa valeur par rapport à l’euro?

Perpétuation d’un lien colonial

Du coup, la balle est dans le camp des dirigeants africains. Au lieu de les angoisser, cette incertitude pourrait s’avérer salvatrice. En effet, les pays d’Afrique centrale et de l’ouest pourraient enfin décider d’en finir avec cette garantie de convertibilité du Trésor français qui n’est rien d’autre que la perpétuation d’un lien colonial qui ne dit pas son nom. C’est bien de cela qu’ont conscience tous les Africains qui débattent actuellement de la valeur du franc CFA. Ainsi, la parité avec l’euro n’est rien d’autre que l’arbre qui cache le sujet crucial de l’indépendance monétaire d’une grande partie de l’Afrique subsaharienne.

Akram Belkaïd

 

Faut-il avoir peur d’une dévaluation du franc CFA?


Alors que l'Afrique bruisse de rumeurs sur une future «probable dévaluation», il est important de s’interroger, au-delà des doutes sur la véracité de l’information, sur les effets globaux, positifs et négatifs, que pourrait provoquer une telle mesure.

La rumeur d’une dévaluation du franc CFA, visiblement en provenance de Côte d’Ivoire, s’est propagée sur la toile africaine depuis quelques jours, suscitant de nombreuses inquiétudes et des atermoiements d’Africains de tous bords quant au devenir économique de la zone franc. Si de nombreuses raisons incitent à remettre en doute la véracité d'une telle information (une dévaluation ne s’annonce pas un mois et demi à l’avance même par les biais de fuites), il ne faut pas non plus en surestimer les conséquences. Depuis l'épisode de 1994 et la dévaluation du franc CFA, le spectre d'une nouvelle «dépréciation» de notre monnaie a souvent plané sur les citoyens de la zone franc comme une menace insurmontable. Tantôt vécue comme une forme d’humiliation, tantôt ressentie comme la consécration de notre vassalité vis-à-vis de la France et de l’Europe, la dévaluation constitue pour beaucoup le premier signal d’une récession économique à venir. Il est pourtant bon de nuancer cette position. Si la dévaluation d’une monnaie (on parle en réalité de «dépréciation» dans les systèmes de change flottants) était une maladie dont il faudrait se défaire comme la peste, il y a de fortes chances que le système monétaire international dans sa forme actuelle n'eut jamais existé. Il est d'ailleurs surprenant de voir certains intellectuels réclamer un système de changes flottants et s'inquiéter de manière quasi-épidermique d’une dévaluation pourtant inhérente à ce même système. La variabilité des taux de change monétaires est justement l'instrument qui permet soit de dévaluer soit de réévaluer sa monnaie en fonction de ses aspirations économiques pour conserver ou accroitre sa compétitivité. Et l'actualité économique nous le rappelle: cela fait quelques années que les Chinois font tout ce qu’ils peuvent pour que leur monnaie reste totalement sous-évaluée par rapport au dollar et ce pour doper leur commerce extérieur en dépit des incantations de Washington. Il n’y a donc aucune raison autre que purement idéologique qui justifierait qu'une parité fixe avec l'euro, élevée, figée et constante dans le temps soit le signe d’économies de la zone franc qui se portent bien. L'économiste togolais Kako Nubukpo ne s'y trompe d'ailleurs pas quand il affirme: «Les autorités monétaires de l'UEMOA (Union économique et monétaire ouest-africaine) semblent avoir largement opté pour une logique d'extraversion en développant un attachement viscéral a l'idée d'un franc CFA fort qui signifierait la bonne santé des économies ouest africaines et leur conformité a l'impératif de rigueur macroéconomique.» (L'improvisation économique en Afrique de l'ouest, Karthala, 2011). Maintenant, comme souvent en sciences économiques, il faut savoir apprécier si le remède de la «dépréciation» que l'on veut prescrire à un patient à un instant donné est moins dangereux dans ses effets que la maladie que l’on estime devoir soigner.

Vertus positives d’une «dépréciation» de la monnaie

D'un point de vue strictement théorique, la dévaluation du franc CFA peut être fondamentalement positive pour toute économie. Et elle a deux vertus fondamentales allant dans ce sens: elle rend les produits à l’exportation moins chers (en monnaie étrangère) et les produits à l’importation plus chers (en monnaie locale). Elle a donc vocation à renchérir nos exportations. De manière plus prosaïque, si un industriel français ne souhaitait investir chaque année que 10 euros de bananes sur la récolte du cultivateur de Penja, soit 6 559,57 francs CFA, alors en dévaluant le CFA de 50% et en supposant que le même industriel continue d’acheter pour le même montant d’euros de bananes, notre cultivateur camerounais doublerait son chiffre d’affaires à 13 119,14 francs CFA (20 euros). Cela supposant évidemment que le cultivateur en question ait la possibilité de produire le double de son stock. Le second effet positif d’une dévaluation est qu’elle rendrait les importations globalement plus chères. Par exemple, si l'on achetait des céréales telles que du riz par sac à 10 euros sur les marchés étrangers et que notre monnaie était dévaluée de 50%, il faudrait débourser non plus 6 559,57 francs CFA mais 13 119,14 FCFA pour acheter le même sac de riz. Cette augmentation des prix en monnaie locale aurait tendance à ralentir les importations et jouerait exactement le même rôle que pourrait jouer une mesure protectionniste comme une taxe à l’importation. Les produits importés devenant plus chers, les agents seraient incités à se tourner vers des ressources alternatives produites localement et/ou à développer eux mêmes une industrie permettant de produire les ressources devenues trop chères à importer. La vertu finale étant le développement d’une industrie locale et à terme, un renchérissement de l’emploi. Le troisième élément qui nous parait important, mais dont on ne parle pas souvent car il est actuel et lié à la crise de l’euro, c’est l’effet de stabilisation relatif des recettes d'exportations si l’Europe venait à moins échanger avec le Cameroun à cause de la crise économique qu'elle subit. Si les pays européens entrent en récession, il est possible que les termes de l’échange se dégradent, l'Union Européenne consentant à importer beaucoup moins de produits que les années précédentes. Une vertu de la dévaluation dans ce cas de figure serait alors de permettre aux industriels européens d’acheter les mêmes quantités de produits, pour un CFA dévalué de 50% disons, à moitié prix en monnaie étrangère (euros) tout en permettant aux exportateurs africains de conserver le même niveau de revenus en monnaie locale (CFA). Schématiquement, une baisse des importations en volumes de 50% de produits de la zone franc dans l’Union européenne n'entrainerait pas avec une dévaluation d'un même niveau (ou éventuellement une diversification de nos acheteurs) une perte nette sur les recettes de 50% pour nos exportateurs.

Effets négatifs pratiques d’une diminution de la parité

Concernant ensuite les inconvénients d'une dévaluation, ils sont de deux ordres: l'augmentation de la dette publique et l’inflation potentielle. La dévaluation ferait augmenter l’endettement extérieur (donc en monnaie étrangère) de notre pays. Les encours de notre dette extérieure s'élevant à près de 1131 milliards de francs CFA (1,7 milliard d'euros), cette partie de nos engagements financiers, représentant 65.3% de notre dette publique globale (Caisse Autonome d’amortissement, note de conjoncture de Juin 2011), passerait après une dévaluation de 50% du franc CFA à près du double, soit plus de 2262 milliards de francs CFA (3,4 milliards d'euros). A dynamique économique figée, schématiquement, il faudrait donc que les recettes d’exportations aient gonflé et les importations diminué de manière à générer un montant au moins égal à la dette extérieure actuelle pour parvenir à combler ce différentiel. D’un point de vue pratique, dévaluer notre monnaie (qui revient à «taxer» les importations) n’impliquerait pas non plus une diminution directe et systématique des importations en question: les agents ne réagissent pas mécaniquement à cette «désincitation» à importer. L’effet sur les prix des importations étant quasi immédiat quand l’effet sur les volumes exportés serait progressif, la balance commerciale devrait commencer par se dégrader. Et même à moyen terme, l’efficacité d’une telle incitation à ne pas importer dépendrait du caractère stratégique des produits qui rentrent dans notre pays en provenance de l’extérieur, s'ils sont de première nécessité ou pas, et de notre structure industrielle, si elle permet de procéder ou pas à la substitution à moyen terme des importations par une production locale. Pour le cas du Cameroun, il ne semble pas que ce soit le cas. Notre pays importe des denrées alimentaires qui comptaient pour 15% des dépenses d’importations en 2010. Aurait-il les moyens de se passer, par exemple, des importations de céréales telles que le riz ou le blé ou encore le poisson ? Il est fort probable que non. On aurait donc à faire face à une flambée des prix, donc à une baisse du pouvoir d’achat considérable, précisément au niveau des grands centres urbains qui sont les premiers consommateurs de ces denrées.

Dévaluation de 1994 et retour à la souveraineté monétaire

D’un point de vue purement conceptuel donc, la dévaluation a des effets négatifs et des vertus positives. Comme d’ailleurs souvent en économie: on ne peut avoir la rose sans les épines. Précisons néanmoins que pour la dévaluation de Janvier 1994, il n’est pas totalement établi qu’elle n’ait pas été positive contrairement à ce qu'on entend souvent ça et là. Les articles des économistes sur la question ont souvent apporté des réponses divergentes. Si on ne se fie, par exemple, qu'au document de travail Les effets à moyen terme de la dévaluation des francs CFA des économistes Denis Cogneau et Gérard Collange, la dévaluation de 1994 aura été plus ou moins une réussite en Côte d'ivoire et au Cameroun: «En matière budgétaire et financière, la réussite de la dévaluation du FCFA émerge très clairement, en comparaison d’une alternative d’ajustement réel, surtout les deux dernières années (1995 et 1996). Toujours en comparaison de l’ajustement réel, la dévaluation se révèle dans les deux pays [Cameroun et Côte d’ivoire, ndlr] une mesure sans ambiguïté expansionniste, comme l’avaient déjà constaté Collange et Plane (1994), Bourguignon, de Melo et Suwa-Eisenmann (1995) pour la Côte d’Ivoire, Cogneau, Herrera et Roubaud (1996) pour le Cameroun.» Cela étant, les causes fondatrices (chute drastique des recettes d'exportations et perte de compétitivité, déficit budgétaire important, incapacité de l'État à tenir ses engagements financiers à cause d'un endettement excessif) qui avaient conduit à la dévaluation de notre monnaie 1994, avec des effets diversement appréciés, ont totalement disparu: l’économie camerounaise est dans une dynamique de croissance durable et les problèmes qu’elle rencontre sont foncièrement liés à un déficit de bonne gouvernance qu’il faut rapidement combler. Et en dépit d'une balance commerciale légèrement déficitaire depuis quelques années, malgré les vertus théoriques que pourrait avoir à première vue une diminution de la parité du CFA vis-à-vis de l’euro, rien ne permet actuellement de justifier l'utilisation d'un remède aux effets secondaires aussi peu contrôlables sur la durée qu'une dévaluation dans une économie comme celle du Cameroun, relativement stable face aux chocs conjoncturels. Au final, la question de fond n'est pas tant celle de la dévaluation du franc CFA que celle des circuits de décision qui y conduisent et son pendant, l'arrimage du franc CFA à l'euro (donc sa non convertibilité). Plus fondamentalement encore, il serait légitime de se demander si nos banquiers centraux (la BCEAO,Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’ouest, et la BEAC, Banque des Etats de l’Afrique centrale) doivent continuer de laisser un outil de politique économique aussi important que la monnaie entre les mains de la BCE (Banque centrale Européenne) à Francfort en s'alignant religieusement sur l’unique objectif d'inflation à 2% de cette dernière. Ne devraient-ils pas, en toute logique, retrouver leur souveraineté en s’extrayant du carcan colonial que représente le CFA et en appliquant une politique monétaire en lien avec nos aspirations propres faisant de la stabilité des prix, de la lutte contre le chômage et de la quête de croissance leur principal crédo? La réponse à une telle question est entre les mains de nos politiques.

Yann Yange /Valérie Marin La Meslée


LITTERATURE, CULTURE TIC ET MEDIAS


Où sont passés les philosophes africains?


Rencontre avec le philosophe Souleymane Bachir Diagne qui, entre Dakar, Paris et New York, éclaire de son parcours les enjeux de sa discipline sur le continent.

Présence africaine, tel est le titre de la leçon inaugurale que le philosophe sénégalais Souleymane Bachir Diagne a donnée en cette rentrée aux étudiants parisiens de l’Institut de sciences politiques (Sciences-Po). Le professeur, qui enseigne à la prestigieuse Columbia University de New York, fut lui aussi étudiant à Paris dans les années 70.

Comment devient-on philosophe sur le continent africain?

A l’occasion de la parution du numéro de la revue Critique intitulé «Philosopher en Afrique», Souleymane Bachir Diagne revisite son parcours. Celui d’un élève brillant en sciences autant qu’en lettres, né à Dakar cinq ans avant les indépendances et que la philosophie viendra presque surprendre alors qu’il se destinait plutôt à une carrière d’ingénieur.

Philosophie des mathématiques

Le bachelier arrive en France avec deux lettres d’acceptation dans ses bagages: l’une de l’Institut des sciences appliquées de Lyon; l’autre du lycée Louis le Grand, l’accueillant en hypokhâgne. Souleymane Bachir Diagne hésite… et le hasard s’invite. Il faut dire que les Humanités l’attirent, à l’époque pour des raisons essentiellement politiques : «J’étais à gauche et je ne lisais que du Sartre. En gros… je voulais être un Sartre!» Dans ces années 70, à Dakar, les étudiants n’ont guère de référence en matière de philosophie africaine. D’ailleurs, tous ceux qui sont de gauche refusent jusqu’à cette notion spécifique, au nom d’un universalisme marxiste de rigueur. On ne s’étonnera pas de retrouver le jeune sénégalais à l’École normale supérieure, disciple autant qu’élève de Louis Althusser, qui disait que la philosophie était «la continuation de la lutte des classes dans la théorie». Mais l’agrégé de philosophie n’en a pas fini avec les mathématiques. Il reprend des études en la matière et consacre sa thèse à l’algèbre de la logique autour de l’œuvre du philosophe et mathématicien Georges Boole. (Ses deux premiers livres en sont d’ailleurs issus, dont Boole, l’oiseau de nuit en plein jour, Belin, 1989).

En 1982, il prend le chemin du retour au pays natal, non sans en avoir mûrement pesé l’enjeu. A Dakar, un désert l’attend dans le domaine qui est le sien. Qu’à cela ne tienne, Souleymane Bachir Diagne va créer son département à l’université Cheikh Anta Diop. «Je voulais profiter de mon expérience pour que l’enseignement de logique mathématique, qui est exigeant, soit enseigné à Dakar.» Dès 1986, il forme ses étudiants —qui jusqu’à ce jour le poursuivent. L’un d’entre eux, Yaovi Akapo, signe d’ailleurs l’un des articles de la revue Critique. Abdoulaye Elimane Kane, auteur d’une thèse sur les systèmes de numération, leur consacre le sien. Ce texte peut symboliser la relation que le philosophe entretient à la réalité africaine. La philosophie consiste à se donner des objets que l’on trouve autour de nous et à produire à partir d’eux une réflexion. Dans son article, mon collègue montre que l’humain est au centre des systèmes de numération dans les langues africaines».

Réconcilier l'Afrique

Souleymane Bachir Diagne a enseigné vingt ans durant à l’université Cheikh Anta Diop. Quand il y est arrivé jeune professeur au début des années 80, le débat était encore vif sur l’imposture que représenterait une dite «philosophie africaine», dénoncée notamment par le philosophe béninois Paulin Hountondji. «Je partageais alors ce point de vue mais avec le recul, j’en suis revenu», dit-il. «La philosophie africaine, celle de la force vitale, est la meilleure théorie pour penser l’esthétique africaine. Le travail de Senghor le montre bien.» Là encore, le temps a fait son office. Confronté à ces problématiques, le philosophe a été amené a revisiter des textes, et notamment ceux de Senghor, dont il a cherché à révéler le vrai projet, l’intention profonde (Léopold Sédar Senghor, l’art africain comme philosophie, Rive neuve, 2007). «Je me suis intéressé à lui au bon moment, il était parti du pouvoir, on pouvait accéder à sa pensée en s’étant dégagé de l’idéologie. En 1996, l’université a fêté son 90e anniversaire, et ce moment a marqué la réconciliation de l’intelligentsia avec la pensée senghorienne, la plupart des participants ont dit comment ils s’y étaient d’abord opposés et ce qu’ils y avaient trouvé depuis.» Dans l’enseignement de la philosophie à Dakar, un autre tournant est pris dans ces années 80 à l’université Cheik Antha Diop, à la suite de la révolution iranienne. «Dans notre pays majoritairement musulman, nous ne pouvions pas laisser passer sans réaction la première apparition d’un Islam politique. Avec mes collègues du département de philosophie, nous nous devions de rappeler ce qu’était la philosophie en Islam, une pensée libre et éclairée.» Souleymane Bachir Diagne inaugure cet enseignement, non comme spécialiste universitaire, mais par spécificité familiale, puisqu’il a reçu de son père une éducation à un islam lettré. De ce nouvel engagement viendront de nouveaux écrits, Islam et société ouverte, la fidélité et le mouvement dans la pensée de Muhammad Iqbal (Maisonneuve et Larose, 2001). L’œuvre se constituant chemin faisant…

Si l’on observe la palette philosophique, on remarquera en prenant connaissance de ce numéro de Critique que certains domaines sont plus riches que d’autres en Afrique. «Leur étude se "colore", explique le philosophe, en fonction des réalités spécifiques au continent.» Ainsi de la question de la démocratie avec ce que nous en dit la palabre démocratique, ou encore de la place de la philosophie politique dans les socialismes africains. Il faut y lire le récit de Paulin Hountondji sur le colloque auquel participa Jacques Derrida, en présence du président du Bénin de l’époque, Mathieu Kérékou, pour mesurer ce que furent les rapports entre philosophie et politique sur le continent. Dans sa propre contribution, Souleymane Bachir Diagne pose une question majeure autour de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, en la comparant à la célèbre charte du Mandé :  «C’est la question de l’individu et du collectif qui sont ici posées, et toute cette discussion philosophique sous-jacente n’a pas été abordée dans la rédaction de la Charte africaine. Voilà un enjeu très pratique de philosophie africaine: est-elle plutôt communautariste ou plutôt individualiste?»

Philosopher en V.O.

La question de la langue, présente dans d’autres secteurs que celui de la philosophie, s’y pose avec la même acuité. Quand il parle de langues africaines, Souleymane Bachir Diagne ajoute l’adjectif «endogènes», considérant que le français, l’espagnol, l’anglais et le portugais sont devenues des langues africaines. Comment faire en sorte que ces langues africaines deviennent celles de l’enseignement et de la recherche en philosophie ? «Nous devons produire nous-mêmes des textes en langues africaines, répond le philosophe, et un de mes anciens élèves américain travaille en ce sens à une anthologie de textes de philosophes africains auxquels il a demandé d’écrire des articles dans leur propre langue. Des locuteurs de cette langue sont ensuite chargés de les traduire en anglais.» Au chapitre des langues, une autre question se pose: celle de la traduction même du problème philosophique posé. «Parfois, il change de nature, subit des variations dans des langues qui ne sont pas des langues indo-européennes… Si l’on prend le problème de l’être, est-il équivalent sur le plan universel dans une langue où le mot «être» ne peut pas être un substantif?» L’immense tâche de la traduction (sur laquelle a travaillé la philosophe Barbara Cassin dans son Dictionnaire des Intraduisibles) est au cœur de la question. Et celle de la transcription avec elle. Souleymane Bachir Diagne travaille d’ailleurs à un livre sur ce thème.

«On peut considérer que les langues africaines sont transcrites pour la plupart, avec l’adoption de l’alphabet latin, il reste maintenant à produire massivement dans ces langues. Par exemple, traduire L’Éthique de Spinoza en sérère! Car si les langues sont devenues philosophiques, c’est par la traduction: ce fut le cas pour le latin et l’arabe traduisant la philosophie grecque. C’est ce qui attend les langues africaines, quoique traduction et commentaires aient déjà été faits à partir de l’arabe, les manuscrits de Tombouctou en témoignent: la philosophie grecque est entrée par l’islamisation». La philosophie africaine demeure une exception aux yeux du philosophe par le fait même que son corpus est, et reste majoritairement, oral. Une question comme celle que pose Paulin Hountondji sur la capacité d’une tradition orale de se faire critique d’elle-même alors que la mémoire est attachée à rapporter les choses telles quelles, donne corps à cette «exception africaine». La transcription de La Charte du Mandé (transcrite par Youssouf Tata Cissé) et du Serment des Chasseurs continue de soulever des polémiques, sur lesquelles le philosophe s’est exprimé dans Philosophie magazine avant de le faire plus en détail ici.

Où sont les philosophes africains aujourd’hui?

Souleymane Bachir Diagne, lui, a quitté Dakar pour s’installer complètement aux États-Unis en 2002. Mais il garde des liens étroits avec l’université sénégalaise à travers des séminaires, des directions de thèse pour «continuer à apporter ma pierre à la formation», dit-il. Il appartient surtout, comme la plupart des philosophes africains, au Codesria, le Conseil pour le développement de la recherche en sciences sociales en Afrique, qui s’ouvre depuis quelques années aux Humanités. «Je dis toujours quand on parle de l’exode des cerveaux qu’il est possible que les universités en perdent, mais que le Codesria lui n’a jamais perdu de cerveaux africains!» C’est à la demande de ce réseau actif qu’il écrit actuellement un Précis de philosophie africaine, où il revisite de manière personnelle les grandes questions. Reste que la plupart des philosophes africains sont aujourd’hui domiciliés aux États-Unis, comme le montre The Oxford Encyclopedia of African Thought. La philosophie africaine est de ce fait enseignée sur ces campus. Mais les professeurs passent parfois plus de temps sur le continent africain, tel Mahmood Mamdani, un collègue de Diagne qui enseigne aussi en Ouganda. Souleymane Bachir, lui, opère un retour en France, heureux de «rapatrier par le biais de ce numéro spécial de Critique, les questions de philosophie africaines telles qu’elles se posent à l’heure actuelle». Le philosophe est d’ailleurs de plus en plus présent à Paris. Intervenant régulier à l’université populaire du Quai Branly depuis plusieurs années, il a reçu fin 2010 le prix Édouard Glissant, comme une évidence, tant les rapprochements qu’il établit entre les pensées de Bergson, Senghor et Mohamed Iqbal sont dans la lignée du philosophe du Tout-Monde. Cet ouvrage, Bergson postcolonial, (CNRS éditions) est né de sa série de conférences au Collège de France. Il sera visiting professor à la Sorbonne en décembre et janvier, et viendra entretemps en novembre chercher le prix Dagnan-Bouveret que lui décerne l’Académie des Sciences Morales et politiques. «Je vis plus pleinement mon triangle identitaire, parce je me sens aussi profondément parisien que sénégalais et maintenant américain ». A Columbia, Souleymane Bachir Diagne s’apprête à donner un cours sur l’existentialisme.

«Et oui, je reviens à Sartre!»

Valérie Marin La Meslée

 

Souleymane Diamanka, slameur, peul et bordelais


Dans ses textes poétiques, le slameur franco-sénégalais porte haut sa double culture pour en faire un chant universel.

D'abord la voix, grave et profonde. Souleymane Diamanka, sur la scène du festival Africajarc fin juillet 2011, tient le public en haleine avec ses slams poétiques. Ses textes, en français et en pulaar, sa langue maternelle, rebondissent comme des balles dans un palais tapissé de rimes, tout comme les balles de ce jongleur qui a suivi l'école du cirque avant de se consacrer à l'écriture. Souleymane Diamanka chante sa double culture peule et française. L'artiste slame ses origines peules en commençant par décliner son origine: fils de Boubacar Diamanka et de Djeneba et c'est déjà tout un poème. Son vrai nom est d'ailleurs Duadja Djeneba, «le vœu exaucé de sa mère» en peul. Cette dernière a donné naissance à son fils en 1974, alors que le père, tailleur au Sénégal, était déjà parti en clandestin pour la France où il deviendra ouvrier chez Ford. A l'âge de deux ans, Souleymane, sa mère et ses deux grandes sœurs rejoignent le père, à Bordeaux, Cité des Aubiers.

Tu parleras pulaar, mon fils

A la maison, les enfants sont priés de ne parler que le pulaar. Le français, c'est pour l'école et la vie extérieure. Les parents en profiteront: «nous avons été des professeurs de français pour eux. Mon père faisait mes devoirs en apprenant en même temps que moi.» Chez les Diamanka on apprend les uns des autres et pas les uns contre les autres. Cela ne va pas sans douleur :  «Au début l'interdit était fort. Ne pas parler français à la maison, ce n'était pas évident, confie l'artiste. Mais plutôt que de voir se creuser le fossé entre les parents qui ne parlent pas le français et les enfants qui ne parlent plus la langue maternelle, nous avons tous beaucoup mieux assumé la double culture de cette façon ». Peul avant d'être Bordelais, le jeune garçon parle de cette première appartenance comme d'une main qui l'a caressé depuis la naissance. Il dit avoir été bercé par des contes qui ont formé jusqu'à son subconscient :  «Etre peul, c'est un code de conduite, un comportement, une éducation, des préceptes, des bénédictions qui vous conditionnent. On se reconnaît entre nous quel que soit le lieu où l'on se rencontre, nous ne sommes jamais seuls ». Les mots de sa mère sont pleins de cette poésie qu'il apprendra comme un genre à l'école. Et les phrases de son père, de véritables récits qui l'initient à l'art de raconter. La langue est faite de rimes qu'il va utiliser dans son travail artistique.

En peul, «Cet arbre» se dit «ki lekki»,

«Cette femme», «o debbo».

Tout est rime.

Entre palindromes et holorimes

«Le fait d'avoir une langue maternelle autre que le français donne des facilités. On entend toujours autre chose et cela est toujours d'une grande richesse. Si un Français dit "Atchoum", un Peul entend "Accu um", autrement dit: "laisse-le!"», explique Souleymane, que l'on suit, captivé, dans cette gymnastique linguistique créative dont il fait son miel. Dans les poèmes qu'il écrit dès l'enfance, dans les chansons qu'il compose, toutes les figures de style entrent dans la danse, tel cet holorime: «la peau hésitante/ la poésie tente ». Au festival Africajarc, dans le sud-ouest de la France, il a chanté une nouvelle fois avec son ami polonais slameur John Banzaï avec lequel il a écrit J'écris en français dans une langue étrangère (ed. Complicités), chacun apportant le son de sa langue maternelle aux compositions. De la musique peule, Souleymane utilise aussi les sons du ngoni (violon) en se nourrissant d'une culture que son père transmet à ses enfants sur des cassettes enregistrées depuis leur enfance. Parce qu'il travaille toute la journée et ne les voit pas assez, l'ouvrier a communiqué par ce biais avec ses enfants. Et la pratique s'intensifie quand la fille aînée de Boubakar Diamanka écrit son mémoire sur les Peuls. Elle commence à enregistrer le témoignage de son père, et d'autres, dans la Cité des Aubiers où elle a grandi, et ailleurs. Quand il vivra à Paris, hébergé par sa sœur, Souleymane découvre alors ces cassettes dont le contenu le fascine. «Cette casséthothèque de baaba (papa) raconte tout du village, et de notre culture. On y apprend le nom des saisons et ceux des animaux. C'est un véritable bouquin que mon père nous a laissé, et que je compte bien numériser. J'utilise ce patrimoine dans mon travail ».C'est ainsi qu'est né L'hiver peul, son premier CD, sorti en 2007, où se retrouvent des textes écrits sur une longue période de quinze ans, et où il invite le griot Sana Seydi. Avant de faire le pari de l'écriture, le jeune homme avait répondu au défi de son père qui manie les proverbes peuls comme une philosophie en action de la vie. L'un d'entre eux disait : «Tout ce qu'un homme a fait, un autre peut le faire, la différence c'est "munyal" une notion qui réunit le pardon et la patience ». Fort de ce défi, Souleymane décide d'aller vers ce qui est le plus éloigné de ses capacités: l'adresse, le cirque. Il se forme à cette école, mais l'abandonne au bout de quelques temps, car les mots le rattrapent. Son premier groupe de rap, Djangu Gandhal (qui signifie en quête de connaissance), lui vaut en 1991 un certain succès, notamment les premières parties de NTM, et d'écrire des textes pour Les Nubians, un duo de chanteuses franco-camerounaises. La version américaine du film Les visiteurs utilise dans la bande son, l'un de ses titres, gros pactole de droits d'auteurs qui aide dans les moments difficiles... Un autre proverbe peul, transmis par le père dit: «Dieu aide les gens qui sont bons.»

l’Hiver peul de Souleymane Diamanka par afriktv

La magie des proverbes

«Mon père a cette force des proverbes avec lui, à la fois naïfs, simples, mais d'une grande vérité. Il m'a légué cette force qui m'a permis d'avoir confiance en moi. Je suis monté à Paris, un jour, en misant tout sur l'écriture ».  Au moment où la confiance menace de le quitter, Souleymane essaie un «attentat poétique», cette manière de s'adresser à quelqu'un en lui déclamant un poème par surprise, avant de filer. Il rencontre par hasard l'acteur et scénariste français Jean-Pierre Bacri dans le quartier de la Bastille à Paris, un de ces hommes vers lesquels il avait envie d'aller. Ce dernier, sensible à ce qu'il vient d'entendre, lui donne dans la main de quoi faciliter les semaines qui viennent... Ce geste est salvateur: Diamanka s'installe à l'hôtel, met ses textes sur Myspace. Un producteur les découvre. Bingo! Une grande maison de disques, Universal, le signera. Sortie de L'hiver peul. La confiance a porté ses fruits.

Depuis, le poète tourne un peu partout dans le monde, rêve de retourner aux Etats-Unis où son concert devant la communauté peule de Brooklyn fut un grand moment de partage. Entretemps, il vit d'ateliers d'écriture, de tournages au cinéma, voix off et petits rôles dans Case départ de Fabrice Eboué, ou encore Sabres de Cédric Ibo. Son parcours sous le signe de l'ouverture a été jalonné de rencontres importantes, comme celle de Grand Corps Malade, qui intervient sur son CD, ou encore celle du poète Yvon Le Men, et du festival Etonnants Voyageurs qui l'a régulièrement invité.  «Je suis passé du rap au slam, et je fais la différence entre ce que j'écris pour la musique et les vrais auteurs que je connais. Eux écrivent avec une autre musicalité, celle de la littérature. Cet océan où j'ai envie de me jeter, moi qui suis pour l'instant dans la piscine.»

Retranscrire l'oralité

Dans un documentaire d'Emmanuelle Vial, dont il est l'un des personnages principaux, le slameur raconte qu'il n'a jamais écrit ses textes, mais les a toujours mémorisés. Jusqu'au moment où il a fallu retranscrire de mémoire les textes de son album pour les protéger! Les enfants d'Hampaté Bâ qui sera édité en DVD chez l'Harmattan à l'automne 2011 et dont il est un des principaux personnages, raconte bien ce parcours de l'oralité dans une famille où la bibliothèque se résumait à un dictionnaire et à l'encyclopédie Tout l'Univers. Et si Diamanka père continue de transmettre ce qu'il a à dire à ses enfants sur des cassettes (en attendant de passer au dictaphone numérique), qu'il s'agisse de culture ou de résolution de conflits familiaux, Souleymane, lui, projette d'écrire la biographie de son père de sa naissance jusqu'à son arrivée à la Cité des Aubiers. Et bien d'autres choses encore: un recueil de poèmes et une tragédie inspirée de Shakespeare, mais avec ses mots: Othello du guetto, tragédie greco-urbaine. Sans oublier l'inattendu auquel il reste toujours réceptif. A Cajarc, dans le sud-ouest de la France, où nous l'avons rencontré, il a pris langue avec des Peuls de passage, engrangé un projet avec un dessinateur de BD qui a envie de mettre une de ses chansons en images, et promis à Isabelle Gremillon de faire une lecture d'un livre pour enfants en peul, Kulle Dalle, paru aux éditions Timtimol, que cette dernière diffuse par sa structure nommée l'Oiseau Indigo. Diamanka père a toujours dit à ses enfants: «Oublie ce que tu es, deviens ce que je suis, et ensuite, rajoute ce que tu es par-dessus ce que je suis. Là, j'aurai réussi mon éducation, tu seras plus que moi.». «Mon père est un aventurier venu en France en clandestin, avec cette foi qui ne l'a jamais quitté, j'avance dans la vie comme lui», confie Souleymane, ce jongleur de mots et d'origines.


La suite Office bientôt accessible sur Ipad ?


C'est la promesse d'OnLive Desktop.

Par Victor de Sepausy


A en croire la société OnLive Desktop, la suite Office sera bientôt accessible sur Ipad. En effet, cette entreprise développe actuellement une application gratuite qui devrait permettre aux utilisateurs d'Ipad d'utiliser Office sur leur tablette.  Concurrencé de tous côtés par des offres logicielles devenues pléthoriques, Microsoft ne voit pas d'un très bon œil cette opération qui se passe de son avis. Au contraire, la société OnLive Desktop compte bien se faire un bon coup de pub autour de cette initiative inédite jusque-là.

 

Un Nobel de littérature pour Rowling ?

 

Ah, la belle chose que de récompenser une auteure mondialement adorée

Par Nicolas Gary

Les révélations faites sur l'Académie Nobel et l'année 1961 ont attiré l'attention du Huffington Post, qui s'interroge à son tour. Si en cette fameuse année, Tolkien comptait parmi les potentiels candidats, il n'aura finalement pas été retenu. Et l'histoire littéraire montre que, peut-être, les jurés auront manqué de flair. Dans leur recherche de l'excellence littéraire, ces jurés tentent de prolonger de qu'Alfred Nobel avait légué dans son testament : une idée de la plus haute qualité du moment. C'est ainsi que Tomas Tranströmer se retrouvait lauréat pour 2011, avec la polémique qui accompagnait la nomination d'un auteur suédois. Difficile de trancher, sur la qualité, et plus encore, sur ce que peut être « la direction idéale » que doit donner le jury du Nobel de littérature. Quoi de plus compliqué, après tout, que de faire l'unanimité sur des choix qui relèvent en somme du subjectif ? Et que penser de l'idée que le lauréat doit avoir produit l'oeuvre la plus remarquable ? De là la question de nos confrères : qu'a produit JK Rowling depuis toutes ces années, sinon un retour à la lecture pour des millions de personnes, suscité un renouveau pour le livre, les siens, en l'occurrence ? Certes, elle n'a pas stylistiquement révolutionné le monde des lettres, ni inventé un genre, mais en somme, Harry Potter est entré en résonnance avec l'esprit de tous ses lecteurs, devenant un phénomène mondial. Alors, 2012, ou 2013, ou dans les années à venir, un Noble pour Rowling ?

 


POLITIQUE


Les dinosaures africains s’accrochent au baobab


Un après le départ de Ben Ali le 14 janvier, les dinosaures africains, ces dirigeants au pouvoir depuis plus d’un quart de siècle, ont résisté à toutes les tempêtes de 2011 et sont toujours là. Mais que leur réserve l’année 2012?

En Afrique subsaharienne,  les révolutions du monde arabe ont secoué les cocotiers mais n’ont pas déraciné les baobabs. Mais rappelons que le nom de baobab vient de l’arabe « bu hlowdotibab » qui signifie « fruit aux nombreuses graines ». Et il n’est pas exclu qu’en 2012 les graines des révolutions arabes trouvent dans l’Afrique au sud du Sahara un terreau fertile…Deux dirigeants se disputent en Afrique le titre peu envié de chef d’Etat en exercice depuis le plus longtemps au pouvoir: Teodoro Obiang Nguema (Guinée équatoriale) et Eduardo Dos Santos (Angola). Depuis août 1979 pour le premier, septembre 1979 pour le second. Il faut quasiment ouvrir un livre d’histoire pour savoir ce qu’il s’est passé cette année… Le monde vivait alors en pleine guerre froide,  le président américain Jimmy Carter était au pouvoir à Washington et surveillait du coin de l’œil le Soviétique Leonid Brejnev  à Moscou.

En Iran, la république islamique est proclamée. Le deuxième choc pétrolier plonge l’Occident dans une longue crise économique. Le président français Valery Giscard d’Estaing se prend les pieds dans l’affaire des diamants de Bokassa, le fantasque dirigeant centrafricain renversé la même année. Mais en attendant que l’Histoire dise son dernier mot, faisons un petit tour chez les derniers « dinosaurus africanus »:

Teodoro Obiang Nguema  (Guinée-équatoriale)

Assis sur une montagne de pétrodollars, le dirigeant de la petite Guinée équatoriale n’a pas vu son pouvoir contesté à l’intérieur du pays en 2011. Il est même devenu président de l’Union africaine, au grand dam des organisations de défense des droits de l’Homme, très critiques de son bilan en la matière. Arrivé au pouvoir grâce à un coup d’Etat qui a renversé son oncle, il a été élu en 1989, puis réélu en 1996, 2002 et 2009 (avec plus de 95% des voix) lors de scrutins toujours contestés. A 69 ans, il dirige toujours d’une main de fer cette ancienne colonie espagnole de moins d’un million d’habitants. En novembre, un référendum constitutionnel a été approuvé avec un score soviétique (97,7%) qui constitue un bon indicateur de la vie démocratique dans le pays. L’opposition compte un seul député au Parlement, Placido Mico. Les autres opposants sont en exil. La liberté de la presse est des plus restreintes mais les compagnies pétrolières font les yeux doux au troisième producteur d’or noir en Afrique subsaharienne. Le régime s’est lancé dans une ambitieuse politique de grands travaux et les groupes étrangers de BTP se frottent les mains. Business as usual.

Jose Dos Santos (Angola)

Les choses commencent à bouger en Angola. Bien sûr, ce n’est pas encore le grand vent qui a déraciné Ben Ali, Moubarak et Kadhafi. Mais la brise angolaise a ébouriffé le tout puissant José Dos Santos qui, depuis le mort du chef rebelle Jonas Savimbi, est quasiment sans adversaire de taille. Mais la rue gronde. Toute l’année 2011, des jeunes activistes ont défilé à Lunda pour demander plus de liberté et aussi un partage équitable du « gâteau pétrolier ».  Le pays devrait bientôt dépasser le Nigeria comme premier producteur africain d’or noir, les multinationales découvrent régulièrement de nouveaux gisements off-shore. Mais l’immense partie de la population reste d’une pauvreté scandaleuse. La société civile s’organise en contre-pouvoir, notamment autour du journaliste William Tonet, éditeur de l’hebdomadaire Folha 8. Le président Dos Santos a senti qu’il fallait lâcher du lest. Plusieurs fois repoussées, des élections générales (présidentielle et législatives) doivent finalement se tenir fin 2012. L’homme fort de Luanda devrait, à 70 ans, être candidat à sa succession.

Robert Mugabe (Zimbabwe)

« Bob » a réussi à se faire oublier en 2011, à quasiment disparaître des radars de l’actualité internationale. Mais il est toujours là. Robert Mugabe est arrivé au pouvoir en 1980, la même année que son homologue américain Ronald Reagan, décédé en 2004. On le dit malade, atteint d’un cancer de la prostate. Mais « Bob » s’accroche et épuise chaque jour un peu plus son opposant, devenu Premier ministre, Morgan Tsvangirai, qui a pourtant relevé l’économie d’un pays ruiné par une redistribution anarchique des terres au profit de la majorité noire. La cohabitation entre les deux hommes dure depuis deux ans et se passe de plus en plus mal. Des élections devraient avoir lieu cette année. Mais « Bob » estime que prendre sa retraite serait un « acte de lâcheté ». Les élections de 2008 avaient dégénéré en violences meurtrières, le pays était au bord de la guerre civile. Mais le président Mugabe n’en a cure. Mugabe répète qu’il vivra jusqu’à 100 ans et sera président jusqu’à sa mort. Il peut déjà compter sur le soutien de la puissante ANC (Congrès national africain) du voisin sud-africain, qui lui a promis de travailler à des stratégies électorales pour remporter la victoire. L’ANC,  dont la longue lutte contre l’apartheid est tout à son honneur,  n’est pas pressé de voir partir son « frère » Mugabe.

Paul Biya (Cameroun)

Le président Paul Biya est un homme discret. Il ne fait pas parler de lui à l’extérieur des frontières de son pays, n’est pas un leader d’opinion au sein de l’Union africaine. Il ferait presque oublier qu’il est arrivé au pouvoir en novembre 1982, soit un an et demi après l’élection historique de François Mitterrand en France. Le chef de l’Etat camerounais peut se targuer d’avoir survécu à son homologue français et surtout à son fameux « discours de la Baule » sur la démocratisation en Afrique. Et à 78 ans, il vient de se faire réélire en octobre avec plus de 77% des voix pour un nouveau mandat de sept ans. L’opposition a crié à la fraude. Mais Biya  a conservé son humour. « L’heure est à l’action », a-t-il lancé sans sourciller lors de son discours d’ouverture. Les 20 millions de Camerounais n’ont besoin de personne pour tirer le bilan de son long règne: pauvreté endémique (une personne sur quatre survit avec un euro par jour, un sur trois n’a ni eau potable, ni électricité), corruption quasiment plus élevée que le Mont Kilimandjaro et croissance économique atone. Et pourtant le Cameroun , avec son cacao, son pétrole, ses diamants et une population dynamique aurait pu être le pays le plus riche d’Afrique centrale. Les opportunités gâchées laissent toujours un gout amer dans la bouche.

Yoweri Museveni  (Ouganda)

Le président ougandais ferme cette marche de dinosaures africains, qui sont au pouvoir depuis plus de 25 ans. Et il s’est démené pendant l’année 2011 pour ne pas rejoindre ses homologues de Tunisie, d’Egypte et de Libye. Le printemps arabe a bien failli trouver dans l’Ouganda sa première terre d’accueil au sud du Sahara. Dès le mois d’avril, les premières manifestations contre le président et ex-chef rebelle Museveni ont eu lieu, avant d’être violemment réprimées. Bilan lourd : une dizaine de morts. Au pouvoir depuis 1986, le chef de l’Etat peut se targuer d’une forte croissance économique même si beaucoup de choses restent à faire pour en faire profiter tous les Ougandais. Mais il a la main de plus en plus lourde face à toute contestation et Amnesty International dénonce un régime de plus en plus répressif. Pour ne pas gâcher un bilan économique quelque peu flatteur, Museveni  ne devrait pas rater sa sortie et préparer sa succession.

Et Blaise Compaoré ?

Enfin pour fermer la marche des cinq dinosaures africains, une mention spéciale à un dirigeant hors concours mais qui a senti le vent du boulet en 2011, le Burkinabè Blaise Compaoré, contesté dans la rue comme dans les casernes. Au pouvoir depuis un coup d’Etat au cours duquel le capitaine Sankara a été tué, il entrera le 15 octobre 2012 dans le club des dinosaures africains…

Adrien Hart

 

Youssou Ndour peut-il devenir président du Sénégal?


Le célèbre chanteur sénégalais a annoncé le 2 janvier sa candidature à la présidentielle de février 2012. Peut-il succéder à Abdoulaye Wade? Youssou Ndour au Forum mondial de l'Economie Responsable le 20 novembre 2009 à Lille, en France. AFP/Denis Charlet

Cette fois, Youssou Ndour ne s’en est pas sorti avec une nouvelle pirouette. De celles dont est coutumier le chanteur de mbalax. Il a vraiment plongé dans le bain de la politique. Après des mois de tergiversations, Youssou Ndour a enfin annoncé sa candidature à la présidentielle de février 2012 au Sénégal. «C’était devenu un secret de polichinelle. A Dakar, tout le monde savait qu’il allait se présenter», estime Hassan, un étudiant sénégalais. Pourtant, nombre de ses compatriotes ne voulaient pas y croire. «Youssou Ndour commet une grave erreur. Que va-t-il faire dans cette galère. Il a arrêté ses études à l’école primaire. Avec un pareil C.V. quelle image va-t-il donner du Sénégal? Les Libériens n’ont pas voulu du footballeur Weah comme président pourquoi vondrions-nous d’un chanteur à la tête de l’Etat», s’exclame Khadiatou, l’une de ses fans qui préfère de très loin le voir se consacrer à son premier métier: la musique.

Un handicap de poids

Combien de Dakarois se disaient, «Youssou en parle, mais il n’osera pas franchir le pas, il a trop à perdre»? Pourtant sa décision ne surprend pas vraiment. A chaque fois que j’ai eu l’opportunité de l’interviewer, il a toujours laissé entendre qu’il n’hésiterait pas à se présenter un jour «si le pays avait besoin de lui». Ces derniers mois, il a donné l’impression de préparer le terrain. L'enfant de la Médina (quartier populaire de Dakar) a d’abord créé un parti politique «Fekke ma ci bolé» (Je suis là, donc, j'en fais partie, en wolof). Et il s’est inquiété d’une possible dérive monarchique du régime. Youssou Ndour a fait savoir qu’il n’était pas favorable à une succession héréditaire: à un Karim Wade qui succéderait à son père. En outre, il a expliqué publiquement qu’à son avis la Constitution ne permettait pas au président Wade de se représenter à la présidentielle. Dès lors que celui-ci a déjà effectué deux mandats (il est arrivé au pouvoir en 2000). Reste que pour se présenter à cette élection, Youssou Ndour, 52 ans, a un handicap de poids, comme il l’a expliqué lui même dans sa déclaration de candidature le 2 janvier sur les médias qui lui appartiennent, à savoir la radio RFM et la chaine TFM. «Il est vrai que je n’ai pas fait d’études supérieures mais la présidence est une fonction et non un métier. A l’école du monde j’ai appris, j’ai beaucoup appris. J’ai appris de mes voyages. Je peux diriger ce pays. Je suis l’alternative à l’alternance. J’ai les moyens de mettre le Sénégal au travail.» Pourtant aux yeux de bien des compatriotes de Youssou ce handicap pourrait se révéler rédhibitoire. «Le Sénégal se considère comme la patrie des intellectuels africains. La capitale culture de l’Afrique francophone», explique Almami Ba, un enseignant de la capitale.

La magie du verbe

Le premier président du pays, Léopold Sedar Senghor qui a régné de 1960 à 1980 était agrégé de grammaire, condisciple de Georges Pompidou à l'Ecole Normale Supérieure. Et bien entendu l’un des poètes francophones les plus en vue. Le normalien était un adepte des discours en… latin. Langue peu usitée au Sénégal. Il a également fait interdire un film du grand cinéaste Ousmane Sembène: l’orthographe du titre en wolof n’étant pas à son goût. Abdoulaye Wade, au pouvoir depuis 2000, a accumulé de nombreux doctorats. Il aime à se présenter à tort ou à raison comme le plus diplômé des Africains. Quoi qu’il en soit personne ne lui conteste une certaine culture générale qui peut parfois irriter. Puisqu’il entreprend régulièrement d’asséner des cours à ses homologues chefs d’Etats. Ses cours d’économie notamment ne sont pas les plus appréciés. Le Sénégal est loin d’être l’économie la plus florissante du continent. Mais tous reconnaissent à Wade une parfaite maîtrise de l’art oratoire en français comme en wolof. Une qualité «mitterrandienne» appréciée dans un pays où la magie du verbe est considérée comme une qualité essentielle. «On n’acceptera jamais un président qui ne possède pas cette qualité. Cette magie du verbe», explique Abdou, un commerçant de la banlieue dakaroise.

La politique est un «sport violent»

La perplexité des Sénégalais vient aussi de leur connaissance de la politique dakaroise. Au Sénégal, la politique est un «sport violent» où il y a beaucoup de coups à prendre, au sens propre comme au figuré. Certes la politique est moins «agitée» du côté de Dakar qu’à Lagos ou Kinshasa. Mais il n’en reste pas moins que maître Babacar Seye, vice président du Conseil constitutionnel a été assassiné en 1993. Et que ses assassins présumés ont été amnistiés par le régime Wade. A Dakar, Talla Sylla, un opposant de Wade a pris en 2005 des coups de marteau sur la tête dans un célèbre restaurant de la place. Un maire socialiste, Barthélémy Dias, a répliqué à coups de revolver en décembre 2011 alors que des hommes de main du régime attaquaient sa permanence. L’un des nervis a été abattu lors de cet affrontement «politique». Après qu’il a critiqué le régime, Youssou Ndour a connu, selon ses médias, un avant goût des pressions qui seront exercées sur lui… un contrôle fiscal particulièrement salé. Youssou Ndour est un chanteur adulé par plusieurs générations de Sénégalais. Dans ses concerts au Thiossane, la boîte de nuit qu’il possède à Dakar, toutes les générations se cotoîent. A ses concerts, il n’est pas rare de croiser, une grand-mère, une mère et ses filles. Ses performances vocales font salle comble en Afrique, en Europe, au Japon et aux Etats-Unis.  Au Sénégal, il possède un studio d’enregistrement et un groupe de presse prospère. Son quotidien, L’Observateur est le plus lu du Sénégal. Sa radio, RFM est la plus écoutée. Et sa jeune télévision TFM connaît des débuts prometteurs.

Alors bien des Sénégalais se demandent que vient-t-il faire en politique?

 «En Afrique, la politique est souvent perçue comme un moyen facile de s’enrichir. Alors pourquoi un homme déjà riche irait se mettre dans une pareille galère», se demande Aïcha, une admiratrice de Youssou Ndour.

Un rêve américain

Dès lors son entrée en politique peut aussi susciter des sentiments ambivalents: admiration ou suspicion. «Vient-il en politique pour mieux négocier avec le régime. Obtenir une licence de téléphonie mobile ou de nouvelles autorisations pour son groupe médiatique» se demandent des Sénégalais qui n’ignorent rien des qualités d’hommes d’affaires de Youssou Ndour. D’autres le soupçonnent de vouloir régler ses comptes avec le régime. «Il a peu apprécié que Karim Wade, le fils du président, tente de prendre le contrôle de son quotidien. Il lui a dit que si Karim Wade voulait un titre, il n’avait qu’à en créer un» explique un Dakarois qui a travaillé pour le groupe médiatique du chanteur. Quoi qu’il en soit la candidature de Youssou Ndour va compliquer la tâche du président Wade. Celui-ci affirme qu’il peut être élu dès le premier tour de la présidentielle. Mais la multiplication des candidatures rend cette perspective de plus en plus improbable. Même les journalistes entrent dans la danse: Latif Coulibaly, le plus célèbre journaliste d’investigation, s’est lui aussi porté candidat. Comme le souligne vieux Savané, autre grande plume de Dakar, il semble qu’au Sénégal tout le monde veuille devenir président. Ce constat déroutant peut être considéré comme un signe de vitalité démocratique. Les Sénégalais aiment à se comparer aux Américains. Dakar n’est-elle pas la terre la plus à l’ouest de l’Afrique? En face de l’Amérique. Dakar est peut-être devenue la terre de tous les possibles? Le pays où Youssou Ndour, un enfant de la médina peut s’imaginer à la présidence. Mais attention, il y a Amérique et Amérique. Pour justifier sa volonté de succéder un jour à son père, le fils du président Karim Wade avait invoqué la «jurisprudence américaine». George Bush junior après George Bush senior. Une comparaison qui ne lui a guère porté chance. Quelques jours plus tard, il perdait les élections de la mairie de Dakar. Et ses ambitions présidentielles se voyaient renvoyées aux calendes grecques. Youssou Ndour c’est un autre goût d’Amérique, celui-ci des self made men. Mais sera-t-il au goût des Sénégalais? Trop tôt pour le dire. A Dakar, Youssou a encore tout à prouver au monde politique. Savoir chanter c’est une chose. Danser dans le marigot politique, c’est un art qu’il va devoir maîtriser au plus vite. Au rythme endiablé du mbalax. Meilleur moyen d’éviter les croches pattes en tous genres.

Pierre Cherruau

 

Les chanteurs au pouvoir!


Youssou Ndour est candidat à la présidentielle sénégalaise. Et si l’on confiait le continent à des chanteurs?

Mise à jour du 3 janvier 2012: le chanteur-vedette sénégalais Youssou Ndour, 52 ans, a annoncé le 2 janvier qu'il sera candidat à l'élection présidentielle de février, dans une déclaration diffusée par la radio et la télévision de son groupe, Futurs Médias (TFM) à Dakar.

"Depuis très longtemps", de nombreux Sénégalais "ont, par divers moyens, appelé ma candidature à la présidentielle de février prochain. J'ai écouté, j'ai entendu, je réponds favorablement à votre requête. (...) Je suis candidat", a déclaré M. Ndour, également président d'un mouvement citoyen créé en 2010 et baptisé "Fekke ma ci bollé" ("Je suis là, donc j'en fais partie" en langue nationale wolof).

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Un pas de plus pour Youssou Ndour sur la route de la présidence du Sénégal: son avocat Mbaye Jacques Ndiaye a retiré, lundi 12 décembre, un dossier de candidature pour son client. L’interprète de Birima,  leader du mouvement Fekkee ma ci boole et patron du groupe de presse Futurs-Médias a prévenu qu’il se rendrait disponible pour la campagne présidentielle à partir du premier janvier prochain. Le magazine américain Forbes considère d’ailleurs que Youssou Ndour est la deuxième personnalité africaine la plus influente, tous pays et toutes générations confondus. Se muera-t-il en lutteur dans l’arène sénégalaise?… L’opinion africaine juge encore incongrue l’idée de voir un chanteur accéder à une aussi haute fonction politique. Si l’on fait traditionnellement vibrer la corde vocale dans les concessions des chefs africains, c’est pour les louer, pas pour sous-louer leur fauteuil. Entre chantre et chanteur politisé, il y a un pas que le griotisme ne semble pas prêt à franchir.

Hors du continent, pourtant, les musiciens ont tenté le pari du pouvoir depuis bien des années.  L’artiste de bossa nova Gilberto Gil chantait des titres engagés bien avant de devenir ministre de la Culture du président brésilien Lula da Silva de 2003 à 2008. En Australie, le leader du groupe de rock Midnight Oil, Peter Garrett, fut élu député du Parti travailliste, avant d’obtenir, en 2007, le poste de ministre de l’Environnement. En Grèce, les chanteuses Melina Mercouri et Nana Mouskouri ont été respectivement ministre de la Culture et députée au Parlement européen. Quoi de plus normal? Nombre d’artistes engagés transmettent des messages politiques. Au Sénégal, les rappeurs ne sont-ils pas en première ligne du mouvement Y en a marre? Youssou Ndour, avant d’être candidat, n’hésite pas à évoquer des sujets plutôt prosaïques comme les délestages électriques dans Leundeum gui, adaptation de Ob-La-Di Ob-La-Da des Beatles. Il serait délectable d’avoir un chef de l’Etat africain qui chante enfin correctement l’hymne national. D’ailleurs, les présidents ne nous servent-ils pas des “rengaines” avec de sempiternels “couplets” qui annoncent toujours les mêmes “refrains”? Ne sont-il pas un peu maîtres… chanteurs lorsqu’ils conditionnent certaines de leurs promesses à des petits arrangements?

Son Excellence Monsieur le Président de la République démocratique du Congo Koffi Olomide

Imaginons alors que les plus belles voix du continent briguent leur présidence respective. On pourrait imaginer une belle chorale de mbalax, rumba, bicoutsi et coupé décalé au prochain sommet de chefs d’Etat de l’Union africaine. Répétition protocolaire… - Son Excellence Monsieur le Président de la République démocratique du Congo Koffi Olomide… En se faisant surnommer “Sarkozy”, Mopao a déjà libéré ses fantasmes présidentiels. Et le “Quartier latin” a, de tout temps, été un laboratoire politique. Les groupes de musique congolaise sont à ce point pléthoriques qu’il en suffirait d’un pour composer tout un gouvernement. Un conseil des ministres d’Extra Musica remplacerait avantageusement les clashs entre Kabila et Tshisekedi. Nul doute que les interprètes du titre Etat-Major seraient habilités à gérer la situation sécuritaire. Pour les questions d’immigration intempestives à l’est du pays, on pourrait confier la délivrance des visas à Papa Wemba. En 2003, il a eu l’occasion de méditer sur «l’aide au séjour irrégulier de clandestins sous couvert d’activités musicales»…

- Son Excellence Madame la Présidente de la République du Gabon Patience Dabany: qui mieux que cette ancienne première dame et actuelle “reine mère” connaît mieux les rouages du palais présidentiel? Elle qui chantait «Chéri ton disque est rayé» pourrait bien incarner une démocratie qui semble bégayer…

- Son Excellence Monsieur le Président du Burkina Faso Smockey. Le rappeur a déjà fait partie du collectif «Le gouvernement» et a interprété «Votez pour moi». Pour le reste, il y a, dans le showbiz burkinabè, tout ce qu’il faut, en matière de vrai-faux personnel politique: la Cour Suprême, Le Pouvoir, les Premières Dames et même la Censure …

- Son Excellence Monsieur le Président de la République algérienne démocratique et populaire Khaled : il pourrait fredonner « Aïcha, Aîcha, regarde-moi… » à Aïcha Kadhafi avant qu’elle ne quitte l’Algérie pour l’Afrique du sud…

- Son Excellence Monsieur le Président de la République camerounaise Manu Dibango. Ni vu, ni connu, on pourrait intervertir les deux “jumeaux” de 1933. Un septuagénaire pour un septuagénaire, mais avec le swing en plus…

- Au Togo, Mensha est déjà King…

- En Côte d’Ivoire, attention à la tentation sécessionniste. En élisant à la présidence le vieux père Alpha Blondy, on réveillerait la bagarre entre “blondistes” et “tikenistes”. Pour éviter une nouvelle partition du pays, autant confier le pouvoir à l’autoproclamé Président Omar Cavalli…

- Au Nigeria, les descendants toujours très politisés de Fela Anikulapo Kuti pourraient reprendre le flambeau du “black president”. Entre Femi Kuti et Seun Kuti, il y a l’embarras du choix.

- En Afrique du Sud, pour réduire la fracture entre les communautés, l’élection de Johnny Clegg offrirait à la population tout à la fois un dirigeant zoulou et un président blanc.

- Au Mali, le peuple pourrait choisir entre Amadou président et Mariam première dame ou l’inverse. Juste le temps de traduire la constitution en braille.

- En Guinée, Mory Kanté n’aurait qu’à transformer son «Yéké yéké» en slogan de campagne «Y a qu’à, y a qu’à»…

Ça promet un peu plus d’harmonie et quelques rappels à la fin des sommets de chefs d’Etat.

 

Les 10 animaux de la brousse politique française


Et si l’on voyait la campagne électorale française sous le prisme des contes africains? La faune des candidats est déjà en action. Bestiaire inédit de Damien Glez

C’est bien connu: pour devenir président, il faut être une “bête politique”. Pour comprendre la psychologie des bestioles avides de pouvoir, rien de tel qu’un conte africain. En attendant le scénario de la campagne officielle, voici déjà le casting animalier de dix personnalités qui pourraient faire ou défaire la campagne présidentielle française.

1 – Le lycaon (Nicolas Sarkozy): si l’on en croit les sondages qui le disent déjà battu, ce canidé serait en voie de disparition. Mais il ne faudrait pas sous-estimer ce mammifère carnivore que l’on surnomme le “loup peint”; “loup” en référence à son passé de jeune loup de la droite française; “peint” par allusion à son talent pour les déguisements idéologiques. Insaisissable, en effet, il sait prendre des allures de pachyderme socialiste quand il faut citer Jean Jaurès, de hyène quand il faut ratisser à l’extrême droite, de chien sauvage quand il faut mâter la racaille d'Argenteuil ou de Syrte. Il connaît les moindres recoins de la steppe politique gauloise et les moindres dédales des financements de campagne. Taris Neuilly-sur-Seine et Karachi, faudra-t-il rappeler Bourgi à la rescousse? La savane africaine n’est jamais totalement absente des campagnes électorales françaises…

2 – L’éléphant (François Hollande): Bien qu’il fut le cornac des pachydermes socialistes (P.S.) pendant plus de dix, on moquait sa silhouette d’hippopotame. Alors que les postes exécutifs nationaux lui semblaient défendus, le voilà, affûté, qui a doublé, dans la course à la présidence, le cousin de Washington que sa trompe folle a relayé au cirque médiatique. Ce nouvel éléphant candide et candidat fera-t-il mieux que l’antilope Royal dont il doit bien connaître les failles? L’Afrique, dont il n’a foulé, récemment, que la poussière tunisienne, attend de le découvrir. Dans sa politique africaine, que retiendrait le pachyderme de ses mentors? Le paternalisme donneur de leçons de Mitterrand ou la distance craintive de Jospin?

3 – Le zèbre (François Bayrou): cet équidé ne semble pas avoir choisi. Ni tout fait blanc ni tout à fait noir; tantôt blanc rayé de noir, tantôt noir rayé de blanc; ni cheval, ni mulet; ni de gauche, ni de droite. S’il ne connaît guère les contrées arides de l’Afrique, le zèbre centriste sait le goût des traversées du désert. S’il a failli créer la surprise en 2007, il lui faudra d’abord, en 2012, atomiser le pique-bœuf Hervé Morin et rassembler des semblants de troupes centristes. Qui bénéficiera de l’enivrant parfum africain de la gazelle sénégalaise (Rama Yade) en mal du zébu (Jean-Louis Borloo)?

4 – La hyène (Marine Le Pen): qui, en Afrique subsaharienne, ne connaît pas le rire glaçant de cet animal trapu à l’arrière-train plus bas que l'avant? Les candidats à l’immigration savent que sa puissance de morsure est la plus élevée chez les mammifères; et que, dans cette espèce, la femelle est encore plus grande et plus forte que le mâle. La hyène aime se nourrir, politiquement, de ce qui est déjà mort: elle se délecte des promesses périmés de ses adversaires, des idéologies du XXe siècle et des charognes des politiciens “tous pourris”. Elle se pourlèche déjà les babines, en appelant de ses vœux le décès clinique de l’euro. Mais attention, le proverbe africain dit que «quand tu te penches pour regarder les fesses de quelqu’un, sache que quelqu’un regarde les tiennes». Quand tu regardes une proie moribonde, sache que d’autres charognards tournoient au-dessus de ta tête. La hyène ne fera-t-elle qu’une bouchée du vautour (Carl Lang) que la présidentielle à également mis en appétit?

5 – Le rhinocéros (Jean-Luc Mélenchon): ce périssodactyle né en Afrique (au Maroc) est un rhino…féroce qui ne tarde jamais à charger, le front (de gauche) en avant. Il est muni d’une énorme corne destinée à ses adversaires politiques dont il ne serait pas fâché «qu'ils s'en aillent tous!»; et d’une cornette pour les sornettes des hommes de médias qui le chahutent quand il bahute. Une ruade pourrait suffire pour ses plus proches concurrents, les “Timon et Pumbaa” de ce conte cruel: le phacochère gauche du NPA (Philippe Poutou), et la frêle mangouste de Lutte ouvrière (Nathalie Arthaud).

6 – La chouette (Eva Joly) : les grands yeux cerclés de rouge de la chouette effraie le continent. Tout autant que son passé de juge d’instruction intimide une Afrique qui n’a pas encore réglé ses crises aiguës de corruption politique. Mais la parente du hibou, à qui certains dénient toute “francité”, a peu d’énergie (pas si renouvelable en campagne électorales) à consacrer aux pays étrangers, fussent-ils en voie de développement. Dans cette jungle politique impitoyable, la chouette se nourrira-t-elle de sa rivale centriste, la “chouette à joues blanches” (Corinne Lepage), candidate de CAP21? Elle avait bien terrassé le mâle de la chouette hulotte (Nicolas Hulot).

7 – Le lion de Belfort (Jean-Pierre Chevènement): même vieillissant, le vieux fauve garde sa majestueuse crinière blanche. Et son pouvoir de nuisance. Le lion n’est-il pas, traditionnellement, le roi des contes africains? La ville de ce lion a accueilli le mariage de Viviane et Abdoulaye Wade, mais le continent se souvient surtout que cet ancien ministre de l’Intérieur n’avait guère appliqué les promesses de régularisation massive des sans-papiers. Et la faune hexagonale verra moins en lui un faiseur de roi qu’un “gâteur de sauce” socialiste. Surtout cette année où les radicaux de la panthère noire (Christiane Taubira) se sont fondus dans les primaires des éléphants. Le lion devrait subir toutes sortes de pression de gauche et la concurrence souverainiste du varan eurosceptique (Nicolas Dupont-Aignan) du mouvement «Debout la République». Mais même debout, un reptile ne peut pas aller bien haut…

8 – Le guépard (Dominique de Villepin): s’il est le plus rapide au footing, ce majestueux animal ne devrait pas être le premier sur la ligne d’arrivée, en mai prochain. Classieux, semblant tout droit sorti d’un film de Visconti, il est un peu désuet. Si l’éléphant a connu des campagnes électorales sans poste exécutif national, le guépard a connu des fonctions gouvernementales sans être passé par la case élective. Les Africains gardent en mémoire le courage en bras de chemise dont il avait fait preuve à Abidjan et sa bravoure onusienne lors des préparatifs de la guerre d’Irak. Mais s’il eut du panache à l’étranger, le panache blanc qui décore son crâne ne fera pas de lui une grue couronnée sur les terres hexagonales.

9 – Le youyou (Christine Boutin): rien à voir avec les cris de joie poussés par les femmes de contrées musulmane. Ce perroquet youyou radote au nom du Parti chrétien démocrate. Mais pourra-t-il voler dans les plumes de ses adversaires? Il peine à rassembler les 500 signatures d’élus…

10 – Le bubale béninois (Patrick Lozès): un peu de franche africanité avec celui qui a le C.R.A.N. d’inviter à «ne pas voter blanc». Né en Afrique de l’Ouest, il doit composer avec les velléités exprimées par une aigrette garzette –aigre mais chouchoute des gazettes– d’Afrique centrale (Calixthe Beyala)…bien de ces bêtes politiques pourront-elles participer à la phase finale de ce safari? Les chasseurs, eux-mêmes (Frédéric Nihous), ne sont pas sûrs d’être de la partie. Mais si le casting reste à confirmer, le décor est déjà planté. Place aux rebondissements. La morale du conte sera pour le 6 mai 2012.

Damien Glez


SOCIETE


Pourquoi l’Afrique ne se développe pas


Le continent n'exploite pas ses nombreuses richesses et n'a pas su tirer les leçons des modèles sociopolitiques expérimentés à travers le monde. C’est une lapalissade de dire que l’Afrique est un continent riche, tant elle regorge de ressources naturelles. Même ci celles-ci ne sont pas inépuisables, l’Afrique est encore riche de ses terres en grande partie cultivables et de ses ressources humaines. Et pourtant, elle peine à se développer —c’est le moins que l’on puisse dire. Au lieu de tirer leçon des succès et des échecs des modèles de développement qui ont été expérimentés de par le monde, elle continue à s’engluer dans ses politiques stériles. Plusieurs facteurs essentiels sont la cause de cette situation.

La faillite des politiques

Depuis la fin de la colonisation, presque tous les pays africains ont été dirigés par une élite sans vision politique à moyen ou long terme. Cette élite, qui s’est substituée aux anciens colonisateurs, a été incapable d’ambition et s’est davantage préoccupée d’elle-même que des peuples dont elle prétend défendre les intérêts. Résultat: le système colonial a été purement et simplement perpétué sous une autre forme dans les domaines politique, économique et culturel au fil des années. A cela, il faut ajouter l’insécurité de l’environnement économique qui ne favorise pas les investissements, et le règne de l’informel. L’indépendance est donc devenue une véritable dépendance vis-à-vis des puissances étrangères, en particulier des anciennes puissances coloniales. Faute de réflexions endogènes ou prospectives et de volonté politique en vue d’amorcer un changement par une synergie d’actions, les politiques actuelles sont une navigation à vue. Les Etats sont gérés à la petite semaine par les dirigeants, juste le temps d’accomplir les hautes charges qui sont les leurs.

Le marché de consommateurs

Il n’y a pas meilleur marché de consommation que l’Afrique. C’est ce que nous appelons, avec un certain humour, dans nombre de pays africains les «receveurs universels». Comment peut-on se développer quand on consomme tout ce qui vient de l’extérieur sans distinction et qu’on ne produit rien, ou pas grand-chose? Le comble, c’est que beaucoup d’Africains ont le complexe suranné de la préférence étrangère. Même quand ce qui est produit localement est de bien meilleure qualité que ce qui est importé. L’extraversion est non seulement un phénomène économique, mais aussi culturel. Et cette tendance doit être inversée par la création et la recherche de qualité, afin que les produits africains puissent être concurrentiels à l’échelle internationale. L’Afrique ne doit pas être uniquement un marché de consommateurs —bien au contraire, elle a tout intérêt à se lancer dans la production tous azimuts. En effet, les Africains doivent encore prouver, comme qui dirait, qu’ils ne savent pas jouer que du banjo.

La négligence de l’agriculture

L’agriculture a toujours été reléguée au dernier rang des activités humaines en Afrique. Le paysan est considéré comme un citoyen de seconde zone. C’est le moins que rien. La plupart des Africains veulent être des commis de l’Etat. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, tous les pays africains font de l’agriculture la base de leur développement. Mais ils ne font rien pourtant pour développer cette agriculture. Et ce n’est qu’un euphémisme. Il faut bien le dire, depuis l’époque de la pierre, l’Afrique n’a remplacé l’outil agricole que par le fer. Rien de plus. Ce n’est pas avec la houe et la daba que l’Afrique peut se rendre autosuffisante alimentairement avant de parler de développer son agriculture à des fins de commercialisation ou de transformation. Comme les résultats d’investissements dans ce secteur ne s’obtiennent qu’à moyen ou long terme, cela intéresse peu les investisseurs étrangers et les Etats eux-mêmes. Pourtant, cela concerne la presque totalité de la population du continent. Avec une démographie galopante et un dérèglement climatique qui s’accentue d’année en année, les moyens agricoles traditionnels ne peuvent plus nourrir les nombreuses bouches du continent tant qu’ils n’évolueront pas. Et un homme qui a faim est un homme qui ne pense pas, et par conséquent ne se donne pas les moyens de son développement.

L’inadéquation du système éducatif

Plus de cinquante après les indépendances de la plupart des pays d’Afrique, le système éducatif ne s’est toujours pas adapté aux réalités du monde actuel et à l’évolution des sociétés africaines. L’enseignement élémentaire reste encore un luxe pour la majorité. Et l’enseignement supérieur ne forme en grande partie que des diplômés sans emploi, incapables d’entreprendre ou de s’insérer dans la vie active dès qu’ils quittent leur formation. Malheureusement, dans un tel contexte, l’enseignement technique et professionnel qui devrait être privilégié demeure le parent pauvre du système éducatif africain. C’est une des questions essentielles du développement de l’Afrique à laquelle il convient absolument d’apporter une solution adéquate.

L’instabilité sociopolitique

On peut compter sur les doigts d’une seule main les pays africains qui peuvent se targuer d’avoir connu une longue stabilité sociopolitique. Or celle-ci est une condition sine qua non du développement. L’Afrique souffre de la faiblesse de son organisation sociale et politique. Tant et si bien que la conjugaison des conflits internes et des appétits voraces externes que suscitent ses richesses ne sont pas pour la prémunir de crises plus ou moins graves. L’une des raisons à cette instabilité chronique et récurrente est la difficulté à s’approprier les principes de la démocratie. Qu’ils accèdent au pouvoir, au pire par un coup d’Etat, succession dynastique ou au mieux par des élections passablement démocratiques, les chefs d’Etat africains finissent la plupart du temps par succomber à la tentation de la dictature. Grâce à l’absence d’armées républicaines, à la corruption, à l’analphabétisme d’une grande partie des peuples, au clientélisme, au culte de la personnalité et tutti quanti. Toutes choses qui engendrent des conflits sociopolitiques. De manière inconsciente ou non, les peuples africains sont eux-mêmes des usines à dictateurs.

La corruption

La corruption est un véritable fléau en Afrique, qui touche particulièrement les élites. En l’absence d’initiatives individuelles ou collectives de production de richesses, l’Etat reste la seule vache à lait. La politique est ainsi le plus grand pourvoyeur d’emplois et le seul moyen de s’enrichir de façon licite ou illicite sans travailler. Cet état de fait inhibe toute initiative et transforme certains agents de l’Etat, mais surtout ceux qui sont au pouvoir ou proches, en de véritables sangsues. Les économies en sont du coup gangrénées. Si l’argent qui part en fumée au moyen de la corruption était effectivement investi en faveur des populations, l’Afrique aurait fait un grand bond en avant sur la voie du développement. Mais qui refuse de gagner de l’argent sans travailler? Ils ne sont pas légion, ces agents de l’Etat ou hommes politiques en Afrique. De nos jours, ils sont malheureusement comme des espèces humaines en voie de disparition. La bonne gouvernance n’est pas le fort des dirigeants africains. Bien au contraire, c’est ce qui leur permet de rester au pouvoir en organisant des élections truquées d’avance par l’achat de conscience non seulement des électeurs en majorité analphabètes, mais aussi de ceux qui organisent les élections. Quand ils ne sont pas purement et simplement des dignes représentants de groupements économiques et politiques étrangers qui font feu de tout bois à cet effet.

Marcus Boni Teiga


Profession: intellectuel africain


Tant qu’ils n’ont pas donné leur point de vue, vous ne savez rien de ce qu’il y a à savoir de l’Afrique et une fois qu’ils se sont exprimés, vous êtes encore plus ignorant qu’au lever du jour. Voici, ramassée en quelques lignes, une revue kaléidoscopique des caractères et des personnages qui parlent avec autorité au nom de l’Afrique ou à son sujet.

Descendants de griots, ils ont appris à écrire mais privilégient plus souvent la parole… Tout engagement vrai commence par l’écriture, eux ils ont en horreur «la page écrite»! De nos jours la parole n’alimente que le sensationnalisme, l’instant, la presse, Internet… Les intellectuels africains, lorsqu’ils parlent de l’Afrique sont des électrons libres sans contrepoids, ils se craignent au point de s’éviter soigneusement, mais ne se respectent pas assez pour se nourrir mutuellement de leurs lumières. Chacun d’eux est détenteur d’une somme «infalsifiable», c’est-à-dire insusceptible de négation, de rejet : l’Olympe même ne saurait héberger tous ces dieux africains.

Au Cameroun (charité bien ordonnée…), il n’y a pas une grande tradition d’intellectuels. Le Président de la république, par exemple, n’a fait qu’une école coloniale, où il a obtenu un diplôme de premier cycle. Ce qui est bien fruste quand on lit le curriculum studiorum d’Abdoulaye Wade du Sénégal, qui est sans doute l’un des présidents les plus diplômés de la planète. Fruste, mais déjà mieux que son prédécesseur, Ahmadou Ahidjo, télégraphiste breveté qui n’a pas fait d’études supérieures. Si l’on veut filer la comparaison et l’étendre par exemple à la deuxième personnalité de l’Etat du Cameroun, le président de l’Assemblée Nationale, on se heurte au certificat d’études primaires de celui qui en son temps ne fut qu’un modeste instituteur : le très honorable Cavayé Yeguié Djibril (lire le tèrè zonorable…). L’un de ses homologues sénégalais a le bonheur d’être le professeur Iba der Thiam, historien de haut vol, membre du comité scientifique de l’UNESCO chargé de rédiger l’Histoire générale de l’Afrique.

Qui sont-ils? Que font-ils? Que valent-ils?

Non. L’intellectuel n’est pas forcément l’universitaire ou le diplômé de troisième cycle. Mais il est évident que pour éclairer, il faut être éclairé, et de nos jours il est rarissime de trouver des autodidactes magnifiques. Quand on pense aux intellectuels africains, il faut donc d’abord regarder parmi la masse des écrivains, éditorialistes, et autres «hyperdiplômés». En dehors d’eux, il y a des sages, mais pas d’intellectuels. Le Cameroun dispose aussi d’intellectuels de grande envergue, d’historiens émérites… Achille Mbembe par exemple! Voilà un historien qui fait en permanence l’actualité, du moins la commente-t-il. Dans les antennes de RFI, il a affirmé récemment qu’il y a au Cameroun «une opposition imbécile». Il lui a manqué assez de lucidité pour reconnaître que c’est parce que cette opposition s’appuie sur des intellectuels limités qu’elle est si imbécile. Son attitude est symptomatique de la malédiction africaine. Il a été donné à l’Afrique le don de produire des génies culminants, mais la fée carabosse (la garce!) a fait en sorte que ceux-ci lui soient parfaitement improductifs. Comment peut-on être si intelligent mais aussi totalement inutile dans un continent qui a tant de besoin de ses intelligences? Les intellectuels ont-ils choisi de se cantonner dans des rôles de pirates de la politique à la recherche de trésors improbables, semant l’angoisse dans les esprits et s’étonnant, étonnamment, de récolter l’apathie?

Ils se spécialisent dans le «vocabulaire de l’insulte politique», la formule hautaine et sentencieuse, et transforment l’Afrique en mur des lamentations. Ils font toute leur carrière intellectuelle dans des postures d’observateurs engagés dans la critique courte et savante. Le fringant Mathias Eric Owona Nguini partage avec A. Mbembé de nombreuses vues. Notamment quand il faut jouer les Cassandre et promettre aux Camerounais une alternance par les armes. Ils ne disent pas précisément si c’est ce même peuple qu’ils déconsidèrent dans leurs analyses qui prendra ces armes. Quel peut être l’effet sur les jeunes qui les écoutent de ces noires prédictions? Je vous le donne en mille : fuir au plus loin, voyager comme eux ou mourir d’avoir essayé. Un peuple qui n’a pour seule expérience que la misère ne va raisonnablement pas se hâter d’emprunter le chemin le plus long pour arriver à Rome, la voie de la guerre, qui n’est pas la voix de Dieu.

Diagnostic sans nuances

Ils vont et viennent entre discours pessimistes qui sonnent creux et formules brillantes qui sont vaines. Parce que rares sont de toute manière ceux qui trouvent grâce à leurs yeux. Des éloges médiocres pour leur peuple qui manque de l’imagination et de la maturité nécessaires pour réussir une alternance pacifique, des critiques sévères pour les leaders politiques qui n’y comprennent rien et n’arrivent à rien, le mépris facile pour les dirigeants en place, solidairement et pleinement responsables du marasme. Ils ont posé un diagnostic sans nuances alors qu’ils sont eux-mêmes inaptes à organiser la communauté la plus urgente à constituer : la communauté intellectuelle. Ces penseurs abstraits, ces byzantins intellectuels ont fait vœu d’inactivité politique, au sens de politique politicienne, au sens de tremper ses mains dans le cambouis et dans le sang, ils font, si cela est possible, du dilettantisme intellectuel, se posent, par rapport à leur peuple devenu la risée de l’univers, en génies impuissants qui fonctionnent dans un mode satellitaire, «contre une partie de leur gré», s’il est permis d’ainsi torturer l’expression. Les Africains restés au champ d’honneur n’ont plus besoin qu’on leur fasse des leçons, ils veulent qu’on se joigne à eux, pour tenir des rôles restés vacants, délaissés par ceux qui croient que les leviers du développement et de l’alternance, c’est en France qu’il faut les trouver. Tous les grands génies de l’histoire ont souffert en leur temps. Eux, ils ne veulent pas souffrir, n’acceptent pas qu’il puisse exister de souffrance puisqu’ils ont immigré dans des pays où tous les grands combats ont été menés et toutes les révolutions ont eu lieu. Beaucoup de ces savants éphémères n’appartiennent à aucune société savante, ils ont écrit une fois pour toutes le chef d’œuvre de leur vie, une thèse de doctorat de 2000 pages et, 20 ans après, pas un seul livre! Leur distinction suprême a été leur parchemin, leurs fonctions officielles sont des médailles en chocolat... Ils se font appeler docteur dans des écoles maternelles et parfois acceptent même du professeur, alors qu’ils n’ont jamais obtenu d’agrégation. Et s’ils l’ont eue, c’est sans gloire qu’ils en sont venus à bout.

L’éternelle négritude

Les grands hommes rencontrent de grands événements, ils en prévoient les prolongements, en analysent les suites dans une imposante et cohérente unité, un «système» qui confine toujours à l’universel… Arjun Appadurai est un auteur classique de son vivant, Edgar Morin est cité comme s’il était mort, imaginez l’un d’eux, publiant une tribune dans Le Figaro, et signant au bas Pr Edgar Morin, Dr Arjun Appadurai… Tour à tour absolument comique et infiniment pathétique! Dans une certaine Afrique, les politiques font les événements et les intellectuels les commentent, incapables qu’ils sont d’ouvrir des débats sociaux; quand ils publient c’est souvent à compte d’auteur et sans daigner obtenir de code ISBN ou, dans le meilleur des cas, c’est de la littérature grise. Quand bien même ce sont des maisons d’édition respectables qui le font, elles ne daignent jamais reproduire l’expérience: soit que les œuvres produites se soient mal vendues, soit que les auteurs en question aient asséché leur source d’inspiration… Ils ignorent ce que leurs devanciers ont fait et raillent ce que leurs confrères produisent. Enfin, les intellectuels dont il est question veulent diviser la classe politique en socialistes et libéraux, dans des contextes préindustriels et des superstructures qui n’évoquent en rien les pays de naissance de ces idéologies!

Nos futurs Cheikh Anta Diop

Que leur devra la prochaine génération d’intellectuels? A qui devront nos futurs Cheikh Anta Diop d’exposer avec éclat et grâce? La mort même ne saurait être pour ces «pères absents» une promotion, attendu qu’il n’y aura plus rien pour témoigner de leurs sacrifices ni personne pour rendre justice à leur œuvre. Ceux qui les survivront ne les pleureront pas parce que la démocratie leur tombera du ciel, comme en Côte d’Ivoire. Et tous, à l’instar de la génération qui les aura précédés, professeront Senghor, Sankara, Mongo Béti, etc. Un vrai et grand intellectuel africain ne sera pas invité par un média uniquement pour des faits circonscrits à son continent comme un simple correspondant de presse. C’est une lumière qu’on verra s’irradier sur tous les sujets d’importance et dont on pourra présenter une publication majeure toutes les fois qu’une caméra de télévision se mettra en travers de son chemin. Car l’éclairage des projecteurs, ils ne le cherchent pas, ils l’attirent. Sans demander que leurs travaux soient admirés, ils savent qu’ils seront distingués… Un intellectuel c’est surtout un homme dont la parole est souvent redoutée, constamment attendue, partout présente, toujours précieuse. Le président français dit une énormité à Dakar? A quoi cela sert-il de lui répondre puisque Frantz Fanon avait déjà élevé le débat dans d’autres altitudes. Va-t-on réchauffer les combats de la négritude, continuer de s’adresser aux anciens maîtres quand c’est notre peuple qui écoute? Va-t-on prouver qu’on a une histoire, en écrivant comme l’avait voulu l’historienne Adama Ba Konaré, épouse du président Alpha Oumar Konaré, un livre d’histoire toutes les fois qu’un insensé se trompera? Ce serait comme vouloir démontrer qu’on est en essayant de prouver qu’on a été. En Côte d’Ivoire, Célestin Monga, Olympe Bhêly-Quenum, Tierno Monénembo, le sud-africain Aziz Pahad, Gaston Kelman, Fweley Diangitukwa, tous des intellectuels authentiques, ont voulu parler d’une seule voix pour crier au loup, le problème c’est qu’ils réagissaient en militants de base d’une cause passagère. Où étaient-ils avant que cela ne vire au pire? Pourquoi ont-ils aujourd’hui donné leur langue aux chars? La Force Licorne en maîtrisant Gbagbo et Simone les a carrément rendus atones, alors que les aberrations continuent en s’exacerbant. La terreur a été rééquilibrée, la vengeance a eu lieu, l’humiliation s’est passée, la danse funèbre des vainqueurs continue sur les ruines d’une CPI (Cour pénale internationale) illégitime et une CVR (Commission dialogue, vérité et réconciliation) illégale.

Et pourtant ils existent…

S’il fallait établir une cartographie de l’intelligentsia africaine, elle serait par trop clairsemée en Afrique centrale. Si l’on se fie pour cela à des indicateurs aussi simples que les publications régulières qui ne soient pas exclusivement des œuvres scientifiques, l’impact de leurs contributions au-delà du cercle de leur émission, leur diffusion, leur présence dans des répertoires comme JSTOR, Science Direct, etc. Un intellectuel, ça n’est pas un épicier, qui n’est connu que de la ménagère du quartier : il doit avoir des références constantes urbi et orbi, il doit être connu et reconnu. Il n’existe plus de génie méconnu, les artistes les plus mal aimés finissent toujours par trouver leur public. Wole Soyinka, le premier auteur noir lauréat prix Nobel de littérature, qui a des positions parfois déconcertantes, mais allant toujours dans le sens du progrès des peuples africains, l’égyptien Amr Khaled, l’universitaire ougandais Mahmood Mamdani, le philosophe ghanéen Kwamé Anthony Appiah, Dambisa Moyo qui, dans Dead Aid, affirmait, contrairement à Barack Obama, que l’Afrique avait besoin d’hommes et de femmes forts, sauf qu’elle exigeait d’eux qu’ils soient en plus bienveillants pour que le continent prospère… Tout n’est donc pas noir dans ce continent, puisqu’il y a d’incontestables lumières!

Eric Essono Tsimi

 

POURQUOI LES AFRICAINS ONT-IL HONTE DU CULTE DE LEURS ANCETRES ?

Jean-Paul Pougala


L’Afrique est le berceau de l’humanité. C’est-à-dire que les Africains sont les géniteurs de tous les 7 milliards d’hommes et de femmes qui peuplent la planète terre. Sur le plan scientifique, ceci est prouvé notamment par l’ADN. La conséquence de ce lien entre l’Afrique et ses enfants éparpillés partout dans le monde est l’exportation de la pratique religieuse africaine sur toute la planète. C’est en effet la seule véritable religion universelle du monde qui n’a eu besoin d’aucun pasteur, d’aucun missionnaire, d’aucun imam pour être présente ici ou là. C’est la seule religion qui s’est rependue sur tous les continents sans un seul mot, sans une phrase de prosélytisme ou de propagande à la recherche de convertis, sans un mort, sans la moindre violence ? La religion africaine est dès lors la mère de toutes les religions, non seulement parce qu’elle est la plus ancienne, mais aussi et surtout parce que c’est celle qui résiste le mieux au temps, à l’espace et à la virulence des nouvelles religions qui ont tout fait pour l’effacer. Mais pourquoi les Africains eux-mêmes donnent-ils la fâcheuse impression d’avoir honte des croyances de leurs ancêtres ?

A- LA FAUTE DES INTELLECTUELS AFRICAINS

Dans sa pièce de théâtre publiée en 1946 intitulée : Malatesta, Henry de Montherlant (1895-1972) a écrit : "Vivent mes ennemis ! Eux du moins, ne peuvent pas me trahir". Et Bernard Werber de renchérir disant : "Seuls vos vrais amis savent où vous frapper pour que ça fasse mal". Le peuple africain a été trahi par ses propres intellectuels. La religion africaine a été bradée pour un bout de pain mal garni par ses propres fils présumés éclairés, supposés la protéger. Alors que l’Afrique était encore sous occupation européenne, la plupart des intellectuels africains ont mis tous leur talent à aider à pérenniser sa mise sous tutelle. Le plus illustre d’entre eux s’appelait Léopold Sédar Senghor. Voici ce qu’il conseille en 1945 aux missionnaires catholiques pour dompter son peuple ; il cite son mythe, il cite la phrase d’une circulaire écrite un siècle plutôt (1847) par le prêtre Libermann à ses missionnaires envoyés en Afrique : "soyez nègres avec les nègres afin de les gagner à Jésus-Christ". Cette phrase des plus humiliantes et grotesques se passe de commentaire. Mais Senghor ne va pas s’arrêter en si bon chemin. Il va ajouter : " Le rôle du catholicisme est de dégager plus nettement la personne de la famille, Dieu des ancêtres ; (...) Par le Christ, Dieu fait chair, qui empêche ainsi le Catholicisme de tomber dans l’abstraction formaliste. M. Griaule me dira que je parle en croyant et il n’aura pas tort." Alléluia. En d’autres termes, pour Senghor, l’individualisme et l’égoïsme européens doivent remplacer la solidarité et la générosité africaine, doivent se substituer à la "famille africaine" qu’il juge comme une abstraction formaliste, c’est-à-dire une illusion, une utopie entretenue par la tradition, par le conformisme. Pour lui, un frère doit être un vrai frère biologique, un cousin doit être un vrai fils biologique de l’oncle direct ou de la tante et non cette "abstraction formaliste" africaine qu’il déteste.

Mais le plus grave c’est ce qui suit "dégager Dieu des Ancêtres" surtout lorsqu’on le met en relation avec la citation précédente de Libermann "être nègre avec les nègres". Senghor est un homme très intelligent. Il réussit là où les missionnaires avaient toujours échoué : en prônant de dégager le Dieu chrétien des ancêtres, son idée est de faire émerger cette figure monothéiste pour remplacer en tout et pour tout, la religion des africains par celle des Européens. Il sait très bien que pour les Africains, il n’y a pas de Dieu. Les ancêtres sont leurs divinités, sont leurs Dieux. et c’est à eux qu’ils vouent leur culte. Offrir un Dieu aux Africains c’est déchoir leurs ancêtres de leur position de divinité. C’est couper la relation fusionnelle qui lie un africain avec son mort ; C’est le tuer, puisqu’il cesse désormais d’être lui-même. Les Africains cessent d’être eux-mêmes sans savoir exactement ce qu’ils sont devenus. La seule chose certaine est qu’ils sont devenus dès lors très vulnérables parce qu’ils doivent attendre que le nouveau maître leur explique ce qu’ils sont, ce qu’ils seront. C’est ce rôle que d’aucuns qualifient de "traitre", d’autres de "bon nègre", d’autres encore de "suppôt colonial", ou même de "sous-préfet de la France", que la très grande majorité d’intellectuels africains a décidé d’adopter, vue la très forte récompense que Senghor a obtenu en son temps : Président de la République. L’épilogue de la crise ivoirienne en 2011 n’est pas là pour les démentir. Ce qui fait froid dans le dos c’est d’imaginer qu’à la même époque plusieurs intellectuels africains s’étaient retrouvés à Dakar au Sénégal pour étudier comme le Docteur Félix Moumié du Cameroun de 1945 à 1947 et très probablement communiquaient avec leur frère aîné Senghor (député du Sénégal à l’Assemblée Nationale Française) sur les voies et moyens pour obliger la France à reconnaître l’indépendance des pays africains. On connait la fin de l’histoire : assassinat de ces africains trop idéalistes peut-être trop naïfs de simplement rêver d’une Afrique libre. (Dr. Moumié meurt, empoisonné par la France à l’âge de 35 ans).

Les intellectuels qui sont ceux qui partout dessinent l’architecture et l’agencement des croyances religieuses en écrivant par exemple des livres saints devant servir de référence aux croyants, en Afrique, ont démissionné de leurs responsabilités. Ce sont eux les premiers qui se sont engouffrés dans les offres religieuses élaborées par leurs collègues des autres continents. Ces déserteurs d’un nouveau genre, souvent très instruits ont laissé derrière eux un champ de ruine à la merci des idées venues d’ailleurs, des croyances importées et qui se battent férocement pour avoir ce territoire abandonné, d’où les violences islamistes et chrétiennes de noël 2011 et les jours suivants au Nigeria.

B- RELIGION ET SOUVERAINETÉ : LE CAS DU JAPON

Peut-on être réellement indépendant en adoptant des religions imposées avec de la violence et accompagnée par de la soumission et l’esclavage ? Le Japon, a érigé la religion d’origine africaine du culte des morts, au rang de religion d’état en 1868, les prêtres shintoïstes payés par l’état, chaque habitant devant s’inscrire comme membre d’un sanctuaire non loin de son domicile. Tout ceci a limité fortement l’installation du christianisme au Japon. Au 5ème siècle de notre ère, les Japonais sont culturellement très complexés par rapport à leurs voisins Chinois qui ont une religion très forte et structurée : le Confucianisme depuis déjà plus de 8 siècles alors que les Japonais pratiquent encore la religion d’origine africaine non structurée. Chaque village japonais pratique le culte des morts, sans qu’il y ait une synergie entre eux, avec des rites très différents. Pour éviter que le peuple japonais se convertisse en masse dans cette nouvelle religion venue d’ailleurs, les intellectuels japonais se réunissent et posent très clairement la question : "peut-on se développer et devenir un pays fort et puissant en cédant sur l’essentiel, sur la spiritualité venue d’ailleurs ? peut-on se dire patriote et avoir honte des pratiques religieuses de ses propres ancêtres ? La réponse à ces deux questions est NON. Mais comment faire ? Le peuple a besoin de croire et est toujours plus naïvement séduit par l’offre toujours alléchante venue d’ailleurs. La réponse est toute trouvée : regrouper et harmoniser le culte des ancêtres des différents villages, pour ne plus laisser à chaque communauté de continuer seul et sans orientation dans une jungle religieuse où elles sont une proie trop facile pour les lucioles des croyances importées. C’est cette harmonisation qui prend le nom de Shintoïsme. Le mont Fuji est désigné et devient sur le plan national, le mont sacré de référence pour la nouvelle religion. Au 21ème siècle, les Japonais de Tokyo sont même allés plus loin dans leur pratique religieuse, en dédiant une chambre entière dans leurs maisons pour ceux qui en ont les moyens, au culte des ancêtres à qui on fait des offrandes, de la viande, de l’eau, du pain. Le Japonais dialogue au quotidien avec son mort, avec ses ancêtres. La conséquence est qu’il est en paix avec lui-même et avec les autres. Le pays est la troisième puissance du monde sans la grande violence, qu’on retrouve dans les pays occidentaux.

C- ET L’AFRIQUE ?

Le christianisme et l’Islam sont des religions introduites en Afrique avec la violence. La religion africaine a démontré d’être une religion de la paix, son fondement est l’harmonie entre les membres de la société. C’est une religion de dialogue et de pardon. C’est ce qui explique que malgré les torts causé par les Européens aux autochtones d’Amérique, aux Africains, aux autochtones d’Australie ou de Papouasie, aucun de ces peuples n’a jamais développé le moindre sentiment de vengeance et même pas de haine à long terme. La religion africaine ne professe pas l’éthique, elle est éthique et morale. Ses adeptes, convaincus qu’ils deviennent des divinités après la mort, prennent de la hauteur dans leurs comportements au quotidien. La jeunesse africaine doit se préparer à reprendre son destin en main, parce que leurs aînés ont lamentablement failli même là où on n’avait pas besoin de cerveau pour avancer : la religion.

Pour éviter les scénarios de terrorisme chrétien et musulman sur le sol africain, il existe une seule solution durable, à mon humble avis, l’Afrique doit débuter sa déconstruction des vérités venues d’ailleurs sans aucune prise sur son environnement, et cesser d’avoir honte de ses croyances ancestrales, se livrant de temps en temps en cachette à des pratiques grotesques qu’il croit être la religion africaine, mais qui au font, ne sont plus que la caricature de l’original. Les gouvernements doivent avoir le courage de mettre les spécialistes au travail pour reformuler en l’adaptant au contexte moderne notre propre religion.

D- LA RELIGION AFRICAIN EST-ELLE RÉTROGRADE ?

La religion est plutôt en avance par rapport aux religions monothéistes, telle l’islam et le christianisme parce qu’elle a réussi à exorciser complètement la peur de la mort. Le fait que les morts deviennent une divinité permet une sorte de régulation des débordements possibles, garantissant ainsi la sécurité et la sérénité de la communauté. Car chacun est porté à s’auto réguler et éviter la radicalisation dès lors qu’il sait que son père, sa mère, son grand-père etc. doit devenir très bientôt une divinité. Les bombes des chrétiens et des musulmans deviennent une inutilité et une probabilité nulle dès lors qu’on sait que celui qu’on fera passer de la vie à la mort deviendra une divinité capable de nous punir sur nos actions mauvaises, ou alors de nous protéger de tous les maux, que nous récitons et promettons dans nos recueillements de ne jamais les commettre. En d’autres termes, dans la religion africaine, le croyant ne peut pas demander la protection d’un mal qu’il a pu commettre, ce qui le décourage d’emblée d’y recourir comme raccourci pour résoudre ses problèmes. Ceci contraste avec l’Islam et le christianisme qui au contraire promettent à ceux qui commettent du mal aux autres une impunité totale, basée sur le pardon inconditionnel, il suffit de quelques prières et le mal est lavé. On peut donc recommencer son forfait.

La religion qui à priori est une question anodine et intime, est pourtant décisive pour l’affirmation des peuples. La Pape Jean-Paul II s’était battu afin que le christianisme soit inscrit dans le traité européen comme le fondement de l’identité culturel européenne. On ne peut que lui donner raison, puisqu’il rendait ainsi hommage aux croyances de ses ancêtres et le revendiquait. La vraie question était plutôt de savoir quelle place dans cette identité culturelle de l’Europe les Africains chrétiens y trouvaient-ils ? La honte qu’ont certains africains de leurs ancêtres a transformé ce qui reste de leurs croyances en folklore pour charlatans à la recherche de quelques âmes naïves à arnaquer avec des prétendues révélations tout aussi bidon sur l’avenir. Les Etats doivent reprendre la main en Afrique pour fixer la ligne rouge marquant la différence entre les effets bénéfiques de la mythologie religieuse de nos ancêtres et la course au fric qui envahit toutes les couches de la société africaine dite traditionnelle avec la prétendue sorcellerie dans toutes les sauces et les injustes accusations des ennemis choisis pour porter le chapeau sur tout malheur qui peut subvenir.

E- EN AFRIQUE COMME AU JAPON

Comme exprimé plus haut, le Shintoïsme Japonais est une des variantes de la religion africaine La différence entre le Japon et l’Afrique est que la bas, les intellectuels n’ont pas eu honte de leurs croyances. C’est un rapport, un dialogue direct avec son mort que rien ne peut remplacer. Le japonais prend sa sérénité de son mort à qui il voue un culte quotidien, avec qui il dialogue et se sent en paix d’abord avec lui-même et ensuite avec la société entière. c’est le même scénario que nous retrouvons dans la plupart des villages africains où la chambre des morts est remplacée par la foret sacrée, par l’arbre sacré en dessous duquel les sacrifices sont déposés, de l’huile de palme versée à même le sol ou de morceau de viande de chèvre que les fourmis en feront un vrai festin.

F- QUELLE RELIGION AFRICAINE AU 21ème SIÈCLE ?

Au moment où on assiste à la plus forte urbanisation de l’Afrique, avec des villages qui sont en passe de devenir des villes, les états africains devraient se concerter pour harmoniser l’offre religieuse africaine, avec la création dans toutes les villes africaines, d’une sorte de jardin botanique d’un genre nouveau, devant servir au recueillement et aux sacrifices que les croyants africains et les convertis d’autres continents pourront venir trouver un moment de paix en écoutant bruit des oiseaux ou tout simplement le ruissèlement de la rivière artificielle si importante dans les croyances africaines comme instrument de purification. Si au contraire rien n’est fait, le désarrois religieux des populations africaines continuera à créer cette espèce de no man’s land, la terre de personne, une sorte de supermarché des âmes où tous les chacals du monde viendront à la chasse de leurs proies pour alimenter d’abord leurs caisses et leurs gloires avec des conséquences souvent fâcheuses entre les prédateurs comme les événements tristes de Abuja au Nigeria le jour de noël et les jours suivants pour la vengeance. L’Afrique n’a rien à voir dans des batailles de conquête et de positionnement des religions importées. Sans la religion de nos ancêtres, le nomadisme spirituel dans lequel vivent les Africains depuis trop longtemps sera toujours un élément de déséquilibre sociétal et de déchéance culturelle. Plus l’état cède sa place aux religions importées qu’elle ne peut pas maîtriser et plus il descend en enfer pour la gestion courante de la vie de ses citoyens.

G- QUEL MODÈLE DE SOCIÉTÉ POUR UNE AFRIQUE BIENTÔT PROSPÈRE

L’Afrique deviendra dans les prochaines années une des principales puissances économiques du monde. La religion que nous adopterons formatera la société dans laquelle nous voulons vivre. Les deux principales religions importées ont des choses en commun, contraires à nos intérêts :

- le fatalisme : les africains qui ont subit le travail forcé ont tendance à associer au travail l’explication de punition, de soumission. Si une religion peut le consoler en attribuant toutes les causes à un dieu. Il n’en reste pas moins que notre priorité est de mettre les personnes au travail, c’est d’amener les jeunes à aimer le travail. C’est d’encourager les jeunes à créer le travail afin d’être maîtres de leurs destins. Pour l’Afrique, le fatalisme de ces deux religion est plutôt nocif.

- triomphe de l’individu sur la société, sur la communauté. La richesse la plus insolente du monde peut côtoyer la misère la plus criante sans gêner personne à New-York ou à Dubai. La pauvreté est même vantée comme une vertu. Ainsi, Dieu ne préfère-t-il pas les pauvres aux riches ? Dans tous les cas, ces deux religions ont besoin qu’il y ait des pauvres afin que le riche puisse avoir l’opportunité de laver sa conscience en donnant quelques miettes. Notre objectif en Afrique est de fuir la pauvreté à vitesse grand V.

- Manque de patriotisme : Les dettes de l’état japonais sont totalement absorbées par les entreprises japonaises qui dans le Shintoïsme, évite que ce soit quelqu’un en dehors du groupe à venir résoudre les problèmes financiers de leur état, au moment où en Occident, ce sont des individus qui spéculent sur le chute de leur gouvernement, qui parient sur leur déclin à eux tous. Le jour où ils ont compris qu’ils pouvaient gagner quelques dollars en plus en déplaçant les usines vers la Chine, ils se sont tous précipités à fermer les entreprises en Occident sans se préoccuper des dommages que cela pouvait créer à la société qui leur avait donné tant de chance et de fortune. Le plus ridicule est que mêmes les États s’y sont mis. On a ainsi vu l’État Français actionnaire dans une grande compagnie, délocaliser les parties administratives et comptables vers l’Inde en mettant au chômage des centaines de ménages de Français.

Est-ce le genre de modèle de développement que nous voulons pour l’Afrique ? Je ne pense pas. Nous devons revenir au culte de nos ancêtres afin de retrouver cette solidarité ancestrale qui a fait notre force et garanti l’équilibre de notre société même durant les dures périodes de l’oppression et de l’humiliation de l’occupation européenne. La prospérité du continent africain ne sera effective et stable que si elle impliquera tout le monde, comme tout un village. Arrêtons de singer des modèles de développement que nous ne maitrisons pas et surtout, des modèles que même celui qui nous l’a apporté ne le maitrise pas lui-même, vue la crise profonde dans laquelle lui-même se trouve, afin de réinventer notre propre modèle de développement humain en partant de nos villages, en commençant par faire de nos campagnes le premier cercle de production et de distribution de la richesse. Nos villes ne pourront que suivre la vague ainsi créée et maîtrisée. Si nous ne revenons pas à nos fondamentaux, le déséquilibre entre l’économie florissante et une poche de miséreux sera inévitable. L’individualisme et l’égoïsme des religions monothéistes dans lesquelles personne n’a de compte à rendre à personne d’autre qu’à Dieu ont fabriqué le Dieu Argent.

H- CONCLUSION

Les Africains qui vivent en Europe ont entendu au moins une fois cette phrase "tu n’es pas comme les autres, tu es plus intelligent" La plupart de ceux qui sont chrétiens ou musulmans réagissent comment ? Ils se sentent flattés. Ils se sentent élus et très souvent, ils en rajoutent. Par contre ceux qui pratiquent le culte des morts réagissent par l’indignation. Parce que ces autres jugés peu-intelligents c’est une partie de nous-mêmes, c’est nous mêmes qu’on insulte. Car selon nos croyances, nous ne sommes rien dans notre groupe, nous avons beau exceller dans le monde entier, mais tant que notre peuple est piétiné, c’est nous-mêmes qui sommes piétinés. Les prisons européennes sont pleines à craquer d’Africains qui ont commis un seul tort, celui dit de "l’immigration clandestine" et les autres africains qui sont en règle ou qui ont la nationalité dans ces pays sont convaincus que cela ne les regarde pas. Erreur. Nous devons à chaque fois faire un retour aux sources dans nos propres racines, dans nos propres traditions et croyances pour chercher à interpréter tout ce qui nous arrive. On comprendrait alors très vite que ces sans-papiers incarcérés sont une partie de nous-mêmes. Qui sommes-nous  ? Nous sommes ce qu’est notre famille. Nous sommes ce qu’est notre pays. Nous sommes ce qu’est notre continent. S’il est pauvre, c’est nous qui sommes pauvres. S’il est humilié, c’est nous tous qui le sommes. Lorsqu’on trahit la mémoire de ses ancêtres on peut tout trahir. Lorsqu’on trahit ses propres morts on ne peut reculer devant rien pour ses intérêts personnels. Ceux qui ont honte de nos ancêtres sont une indication de ceux sur qui nous ne pouvons baser l’espoir de la renaissance africaine. L’Afrique fera bientôt partie de ceux qui comptent dans le monde. Se présentera-t-il à ce rendez-vous en revendiquant fièrement son authenticité ou en singeant les autres ? Les langues africaines feront-elles partie de cette fierté ? Mais existera-t-il une Afrique digne sans sa religion ?


SPORT


Nouvelles du groupe : Deux joueurs pourront ne pas participer à la CAN

 

Selon une source concordante, 2 joueurs de l’équipe nationale du Burkina dont les noms n’ont pas été dévoilés pourront ne pas prendre part à la CAN. La raison proviendrait d’un problème administratif. Si cela s’avérait fondé, ces éléments pourront être remplacés par Robert Sankara et Adama Ni Plange, non retenus parmi les 23 de la liste définitive mais qui s’entraînent toujours avec l’équipe. A la seule condition de s’acquitter de la somme de 2 millions de F CFA par joueur. Affaire à suivre.


Pas d’inquiétude pour Alain Traoré

Blessé lors du dernier match amical contre les lions A’ du Cameroun, Alain Traoré souffre d’un mal à l’isco jambier (un muscle derrière la cuisse). Selon le kinésithérapeute, ce n’est qu’une petite lésion qui ne va pas empêcher le sociétaire de l’AJ Auxerre d’être en pleine possession de ses capacités avant le premier match des Etalons. Lors de la séance de dimanche, il a subi seul un entraînement spécifique.

Rassemblées par Y. OUEDRAOGO à Yaound

Sidwaya


4 Messages de forum

Comment une source peut-être concordante à elle seule ????????? Arrêtez s’il vous plaît ce journalisme du flou.

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Je ne crois pas que cela soit un problème ! le montant à s’acquitter pour les deux (2) joueurs ne vaut même pas un (1) Guiro !!

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ces deux joueurs sont Djarkardia KONE et Abdoul Razak TRAORE qui seraient de nationalité ivoirienne. S’il vous plait le Burkina va devenir ridicule sur le continent avec ces histoires de papiers. Pour ce qui est du joueur NII Plange Adama, il est d’origine ghanéenne. Vérifions qu’il remplit les exigences du Règlement d’application des Statuts de la FIFA.

Footfoot, le Burkina Faso ne se résume pas au football.Ya bien des événements plus importants que le foot qui rendent le Burkina sur la voix du ridicule.(Guiro, alternance démo, etc...).donc ce que vous dites est ridicule !
Penses-tu que même Robert Sankara n’a pas une nationalité Ivoirienne ? Ce sont les joueurs concernés eux même qui sont ridicules car ils sont allés tellement haut, qu’ils aspirent à descendre ! (tu comprends ce que je veux dire car Habib Bamogo...). Que dit tu de Ouedraogo qui a jouer pour les éléphanteaux il ya 2 ans ? C’est aussi les lois que les occidentaux nous imposent qui en sont responsables : binationalité, double nationalité, etc....

 

Bénin - Les Français ont toujours la cote dans le football africain


Déjà très représentée dans la football africain, la France est sur le point de voir un autre de ses entraîneurs débarquer sur le continent noir. En effet, Foot365 rapporte que Manuel Amoros a été choisi pour entraîner les Ecureuils, l’équipe nationale du Bénin. L’ancien international français, latéral droit de l’Olympique de Marseille, remplace Edmé Codjo qui avait pris ses fonctions en août dernier et qui n’est pas parvenu à qualifier la sélection pour la Coupe d’Afrique des Nations 2012 organisée par le Gabon et la Guinée équatoriale. «C'est le Français Manuel Amoros qui a été nommé comme sélectionneur des Ecureuils. Il est attendu vendredi à Cotonou pour la signature de son contrat», déclare un responsable du ministère des sports à l’AFP. «Il sera assisté de son compatriote Nicolas Philibert. Le contrat sera signé pour une durée de deux ans».

L’ancien Monégasque a déjà entraîné une équipe africaine. Entre juin 2010 et janvier 2011, il a supervisé la sélection comorienne. Et avant de devenir entraîneur, Manuel Amoros a mené une brillante carrière de footballeur. Le natif de Nîmes (dans le sud de la France) débute sa carrière en 1980 avec l’AS Monaco. Il y passe neuf années durant lesquelles il remporte deux championnats de France (1982, 1988) et une coupe de France (1985). Mais à c'est à Marseille qu’il connaît la consécration. Avec la formation olympienne il décroche trois titres consécutifs de champion de France (1990, 1991, 1992), et surtout une Ligue des champions en 1993, une première (et la dernière) pour un club français. En 2010, il est élu meilleur latéral droit de l’histoire du club.

Amoros était également un joueur-clé de l’équipe de France avec laquelle il compte 82 sélections pour 1 but inscrit. Le défenseur participe aux campagnes des années 80 menées par la légende Platini. En 1982, il est élu meilleur jeune joueur de la Coupe du monde, deux ans plus tard, il remporte l’Euro 84. En 1985, la France gagne également la coupe intercontinentale des nations, un match opposant le vainqueur de l’Euro au gagnant de la Copa America (la compétition ne s'est tenue qu'à deux reprises en 1985 et 1993). Le latéral droit participe aussi à la Coupe du monde 1986 et à l’Euro 1992. En Afrique, Manuel Amoros rejoint notamment Alain Giresse et Claude Leroy, respectivement sélectionneur du Mali et de la République démocratique du Congo (RDC). D'ici un mois, une Française devrait également arriver sur le sol africain, Elisabeth Loisel étant fortement pressentie pour reprendre l'équipe féminine du Nigeria.

Le clan Ayew, une dynastie de footballeurs

Chez les Ayew, on est footballeur professionnel de père en fils. L'ancien international ghanéen Abedi Pelé doit apprécier la réussite familiale. Ses deux derniers enfants, André et Jordan, font notamment beaucoup parler à Marseille.

Mise du 16 décembre: le joueur ghanéen de l’Olympique de Marseille André Ayew a été nommé joueur de football africain de l’année 2011 de la BBC. Il devance Yaya Touré, Gervinho, Samuel Eto’o et Seydou Keita.

Mise à jour du 7 novembre: La famille Ayew a joué a un rôle clé dans la victoire de l'OM sur Nice, le 6 novembre (2-0). Jordan a marqué le premier but (72e) et André a provoqué le penalty transformé par Loïc Rémy dans les arrêts de jeu.

D’ordinaire, se faire un nom est le premier objectif des jeunes talents du football. Mais parfois, certains grillent cette étape. Parce qu’ils sont «fils de», «frère de», ou «cousin de», la lumière est déjà sur eux. Et on les attend au tournant. Dès lors, le but est de se faire un prénom, de dépasser la célébrité de son aîné. Ce défi, relevé avec succès par quelques-uns, sclérose les carrières de beaucoup d’autres.

Chez les Ayew, on se range plutôt dans la première catégorie. Au jeu des 7 familles, les Ghanéens Kwame, Jordan et compagnie sont presque imbattables. Dans la lignée du patriarche Abedi, ils sont cinq à avoir chaussé les crampons du haut niveau, avec des fortunes diverses.

Abedi Pelé, l’illustre guide

Paradoxalement, l’initiateur de la dynastie Ayew est connu sous un autre patronyme. Abedi Pelé, de son vrai nom Abedi Ayew, est une figure du football africain. De Domé, son village natal dans le nord d’Accra (la capitale ghanéenne), à Marseille, le virevoltant milieu de terrain offensif a charmé les amateurs de beau jeu.

Né en 1962, le petit Abedi s’éveille au ballon rond dans la rue. Rapidement reconnu comme l’un des meilleurs potentiels nationaux, ce joueur de poche (1 m 73) au toucher de balle soyeux est âgé d’à peine 19 ans quand il est convoqué avec le Ghana pour la Coupe d’Afrique des nations (CAN) 1982, disputée en Côte d’Ivoire. Les Black Stars, surnom des joueurs ghanéens, remportent le trophée face à la Libye aux tirs au but. Le jeune homme, entré en cours de finale, écrit la première ligne d’un palmarès amené à en compter d’autres.

Abedi Ayew prend alors le nom d’Abedi Pelé en hommage au célèbre Brésilien et parce que son jeu rappelle celui du «joueur du XXe siècle». Sous ce nom, il s’inscrit dans la liste des premiers footballeurs africains connus en Europe, tels que le Camerounais Roger Milla ou les Algériens Mustapha Dahleb et Rabah Madjer.

Après le Qatar, la Suisse et le Bénin, Abedi Pelé rejoint la France en 1986. Une terre où il va connaître ses plus grands succès avec la machine Olympique de Marseille de Bernard Tapie. Sous le maillot des Ciel et Blanc, le Ghanéen glane trois fois le Ballon d’Or africain entre 1990 et 1992, ainsi que trois championnats de France. Mais surtout, en plus de ravir le Stade Vélodrome de ses dribbles chaloupés, il accède à la postérité en donnant à Basile Boli le but du sacre marseillais en finale de Ligue des champions 1993 contre l’AC Milan (1-0) à Munich.

Retraité depuis 2000, le meilleur buteur de l’histoire du Ghana (33 buts) a été cité, en 2004, dans la FIFA 100, une liste des 125 joueurs les plus exceptionnels et les plus talentueux de leur génération. Une liste composée à l’occasion du centenaire de la Fifa par un certain… Pelé. En 2007, Abedi Pelé a connu des heures difficiles: il fut accusé de corruption après que le club dont il est le président-fondateur, le FC Nania, a remporté un match sur le score de… 31-0!

Et depuis peu, Abedi Pelé observe avec attention l’émergence de ses fils Rahim, André et Jordan.

Kwame Ayew, le frère de l’ombre

Moins connu que son grand frère Abedi, Kwame Ayew n’en a pas moins eu une carrière plutôt honorable. Né en 1973, Kwame s’est illustré au poste d’attaquant. Après s’être essayé au championnat de France du côté de Metz, puis en Arabie saoudite et en Italie, il prend la direction du Portugal en 1995. Au sein de l’élite lusitanienne, ses talents de buteur se révèlent avec plus d’évidence, surtout lors de son passage à Boavista, club pour lequel il score 31 buts en deux saisons. Parallèlement, Kwame porte aussi le maillot de la sélection ghanéenne, avec parcimonie.

Son principal fait d’armes remonte à l’été 1992: il fait partie de l’équipe médaillée de bronze aux Jeux olympiques de Barcelone. Un titre dont lui peut se targuer, au contraire d’Abedi Pelé, trop âgé pour disputer ces olympiades! Jusqu’en 2000, Kwame marque 9 buts en 25 sélections pour son pays, dont certaines sous la coupe de son frangin devenu capitaine.

Par la suite, Kwame Ayew connaît une fin de carrière plus modeste, avec des escapades en Chine et en Turquie. Retiré des terrains depuis 2007, l’ancien attaquant s’est reconverti dans la religion. Il a fondé, en 2010, une église évangéliste au Ghana. Il est aussi un fervent militant des causes luttant contre la pauvreté. Abedi et Kwame ont un autre frère, Sola Ayew, également footballeur. Quasi inconnu du grand public, ce dernier a vu sa carrière se limiter aux frontières ghanéennes.

Rashim Ayew, l’aîné d’Abedi

Fils aîné d’Abedi Pelé, Ibrahim Ayew, plus connu sous le nom de Rashim Ayew, est le premier à perpétuer la tradition familiale. Après son père et ses oncles, il amorce la nouvelle génération des Ayew. Rashim est né en 1988 à Tamale, au nord du Ghana. Contrairement à ses frères André et Jordan, il est le seul natif du pays.

Milieu de terrain défensif, Rashim Ayew a été formé au sein du club de papa, le FC Nania, avec lequel il a aussi effectué ses débuts professionnels. Après une brève expérience du côté du club égyptien du Zamalek SC, il rallie l’Europe et la formation belge de Lierse SK en janvier 2011. Appelé en sélection dès 2009, il a pris part à la campagne des Black Stars durant la CAN 2010, qui a vu le Ghana échouer en finale devant l’Egypte. Présent en Afrique du Sud pour le Mondial 2010, Rashim Ayew n’en a cependant pas disputé une seconde. C’est des tribunes qu’il a assisté aux exploits de son frère André, étincelant avec le Ghana. Rashim, motivé par la réussite de ses frères en France, espère lui aussi se faire un prénom. Conscient que ses cadets ont accédé à un niveau supérieur au sien, le plus grand des trois entend bien lui aussi faire honneur au nom qu’il porte :  «Moi aussi, je me bats ici [en Belgique] pour porter haut notre nom de famille et pour que le Ghana reste au top. Notre père a mis la barre très haut, et il sera difficile pour nous de l’égaler. Mais il sera fier si nous en sommes capables. C’est un challenge pour chacun de nous», a-t-il déclaré récemment.

André Ayew, la pépite de l’OM

Il est la nouvelle coqueluche du Stade Vélodrome. André Ayew a, il est vrai, tout pour séduire l’exigeant public olympien: il est le fils d’une légende locale, il en a hérité le talent, et il a été formé à l’OM! Le deuxième des trois fils Ayew a vu le jour en 1989 à Seclin, dans le Nord, alors que son père évoluait à Lille.

Comme son paternel, André se tourne vers le football dès son plus jeune âge, au Ghana. L’histoire s’accélère quand il rejoint l’Hexagone pour intégrer, en 2004, le centre de formation de l’Olympique de Marseille, alors présidé par Pape Diouf, le dirigeant sénégalais. En août 2007, «Dédé» franchit un cap en faisant ses premiers pas avec l’équipe de l’OM et la sélection du Ghana, en dépit de son âge et de son inexpérience. Installé dans le groupe ghanéen de Claude Le Roy pour la CAN 2008, le milieu de terrain offensif, en quête de plus de temps de jeu, est prêté par l’OM en 2008. Une première année à Lorient, puis une seconde à Arles-Avignon en Ligue 2, jusqu’en mai  2010. Juste avant de chavirer dans un autre monde. Titulaire avec le Ghana lors de la Coupe du monde 2010, il brille sur les terres sud-africaines. Ses performances sont telles qu’il compte parmi les trois postulants au titre de Meilleur espoir de la compétition. Une récompense qui revient finalement à l’Allemand Thomas Muller, plébiscité devant Ayew et le Mexicain Giovani Dos Santos. Mais qu’importe, la machine est lancée. Ses récents progrès incitent Didier Deschamps, le coach marseillais, à l’incorporer dans son groupe. Et André Ayew se montre plus que digne de cette confiance, en réalisant une saison 2010-2011 époustouflante. D’entrée incontournable, il trouve le chemin des filets à onze reprises, martyrise les défenses adverses, et les supporters marseillais l’élisent Olympien de la saison. Et papa applaudit, bien sûr. Inévitablement, le nouveau joyau de la Canebière commence à attirer les regards des grands clubs. Le Bayern Munich et les Anglais d’Arsenal notamment suivent avec beaucoup d’intérêt André Ayew, lié contractuellement à l’OM jusqu’en 2014 avec une clause de départ de 13 millions d’euros. En attendant un éventuel transfert, Marseille toute entière chérit l’enfant prodige de son ancienne idole.

Jordan Ayew, le jeune qui pousse

Et dans cette famille en or, voici le petit dernier, Jordan. Pour quel autre club que l’Olympique de Marseille le troisième fils d’Abedi Pelé pouvait-il jouer? Né en 1991 dans la cité phocéenne, Jordan Ayew a suivi l’exemple de son frère André. D’abord plutôt attiré par la mécanique et l’automobile, l’adolescent attrape malgré tout le virus du football et garnit à son tour les rangs des équipes de jeunes de l’OM en 2005, alors qu’il n’a que 13 ans. Vivant mal le déracinement avec ses proches restés au Ghana, Jordan a la chance de pouvoir compter sur les conseils de son frère, dont il est très proche. C’est pourtant sans lui qu’il débute en Ligue 1 fin 2009 (André est alors prêté à Lorient). L’attaquant en devenir est même sacré champion de France 2010 avec Marseille. Un titre qu’il espère bien glaner désormais en compagnie de son aîné, avec lequel il vit. Depuis l’éclosion marseillaise d’André, Jordan est quelque peu passé au second plan dans les esprits. Moins décisif que son frère, l’international ghanéen (encore un!) conserve cependant une marge de progression évidente. Lui qu’on présentait, il y a quelques années, comme le plus doué des deux, a tout pour suivre les traces de son père et de son frère. Et perpétuer encore et encore la dynastie Ayew.

Nicolas Bamba

 

Amantle Montsho, la Botswanaise qui court plus vite que son ombre


En s’adjugeant la couronne mondiale du 400 mètres, Amantle Montsho a rapporté au Botswana la première médaille d’or de son histoire en athlétisme.

Les fans de suspense et de spectacle en ont eu pour leur argent lundi 29 août 2011 à Daegu (Corée du Sud), où se déroulent actuellement les 13e championnats du monde d’athlétisme. Il est un peu plus de 21h, et la finale du 400 mètres dames, intense à souhait, a livré son verdict. A l’arrachée, la championne du Botswana Amantle Montsho vient de s’offrir la médaille d’or devant l’Américaine Allyson Felix, tandis que la Russe Anastasiya Kapachinskaya se pare de bronze. Sans surprise, la course s’est réduite à un affrontement entre les deux favorites, Montsho et Felix. Sous la clameur du stade de Daegu, les deux athlètes se sont livré un duel titanesque, quasi insoutenable dans les derniers mètres. Et au moment de couper la ligne, Allyson Felix, triple championne du monde en individuel, doit rendre les armes, devancée d’un cheveu par Amantle Montsho (49’’56 contre 49’’59).

L’ascension progressive jusqu’au sacre

L’Américaine a certes battu son record personnel, mais sa déception est grande. Impériale sur 200 mètres à tous les Mondiaux depuis 2005, elle était à Daegu pour réaliser un doublé 200/400 inédit. C’était sans compter sur Amantle Montsho, l’étoile du Botswana, pays surtout réputé pour ses diamants. En «explosant» le record national, la nouvelle championne du monde entre dans l'histoire de l'athlétisme. Et c'est avec peine qu'elle retient des larmes de joie :  «Je suis tellement heureuse aujourd’hui. Je n’arrive toujours pas à y croire. Je voudrais remercier tous ceux qui m’ont soutenu et m’ont rendue plus forte. Je voudrais aussi remercier les concurrentes. Elles m’ont poussé à courir plus vite, en particulier Allyson Felix», a-t-elle déclaré à l'issue de la course.  Peu après que l’hymne botswanais a retenti dans le stade sud-coréen, la sprinteuse s’est présentée à la presse, rayonnante de bonheur. Quel chemin parcouru depuis son enfance à Mabudutsa, un village du nord du Botswana! La jeune fille, bien que plus rapide que tous ses camarades d’école, n’avait pas de destin tracé vers le toit du monde. Alors elle s’est battue pour l’atteindre. «Je ne suis pas née dans une famille de sportifs, mais grâce à mon courage et à mon travail, je suis arrivée où je suis aujourd’hui», a-t-elle confié. Pour atteindre ce niveau, Amantle Montsho a dû s'employer et faire des sacrifices. Comme le choix de quitter son pays natal en 2005, où elle ne pouvait bénéficier de conditions d’entraînement optimales. Direction le Sénégal et le Centre international d’athlétisme de Dakar (Ciad), structure d’élite pour les athlètes (africains notamment), loin des siens. Bien que rude, la séparation a porté ses fruits: la Botswanaise s’y est perfectionnée, sous l’œil de son coach ivoirien Anthony Koffi. En 2006, Amantle Montsho prenait la 2e place des championnats d’Afrique de 2006, derrière sa partenaire d’entraînement au Ciad Amy Mbacké Thiam, l’ancienne championne du monde adulée en Afrique. Un premier pas symbolique pour Montsho, appelée à reprendre le flambeau de son aînée.  Son potentiel se révèle: entre 2007 et 2010, la Botswanaise truste la première place de toutes les compétitions d’Afrique et signe des chronos de plus en plus encourageants. L'année 2010 confirme sa montée en puissance à plus grande échelle, quand elle se classe quatrième des championnats du monde en salle de Doha (Qatar). Finalement, la récompense à tous ses efforts est là. A Daegu, Amantle Montsho a su résister au retour acharné d’Allyson Felix pour offrir à son pays sa première médaille d’or en athlétisme. L'Afrique savoure aussi, elle qui attendait une nouvelle sprinteuse championne du monde depuis 2001 et la victoire à Edmonton (Canada) sur 400 mètres d’une certaine… Amy Mbacké Thiam.

La nouvelle star du Botswana

Quelle métamorphose pour Amantle Montsho depuis les olympiades d'Athènes en août 2004. A l’époque, elle était cette jeune femme de 21 ans, première représentante du Botswana en athlétisme aux JO. Elle avait quitté la compétition dans l’anonymat, sortie dès la première série. Quatre ans plus tard, elle se hissait en finale et terminait dernière des Jeux de Beijing. Autant dire que le rendez-vous est pris pour les JO de Londres, en 2012. Sa couronne mondiale lui confère d’office l’étiquette de prétendante à la plus haute marche du podium. A 28 ans, Amantle Montsho ne cache pas son ambition. «Je dois me préparer très sérieusement pour les JO, car chaque année, de nouvelles concurrentes émergent. Je dois bien me mettre ça en tête et repartir m’entraîner dur», assure-t-elle. Offrir au Botswana sa première médaille olympique lui assurerait un peu plus l’admiration de ses 1,8 million de compatriotes. Consciente de l’influence et de l’importance que peut avoir le sport dans les sociétés, Amantle Montsho veut être un modèle au sein de son pays : «Dorénavant, je vais être un exemple pour les jeunes athlètes du Botswana. Ils travailleront durs, maintenant qu’ils m’ont vu gagner une médaille d’or.» Le secrétaire général de l’Association botswanaise d’athlétisme, Legojane Kebaitse, loue le succès de la championne nationale et la lumière qu’elle jette sur la nation :  «Nous avons des diamants. Nous avons du bétail. Nous avions dit que nous voulions de l'or. Nous voulions trois médailles d'or et nous en avons une. Tous ceux qui souhaitent visiter l’Afrique peuvent maintenant voir qu’il y a de grands talents au Botswana.» Amantle Montsho en est assurément un. Un joyau africain qui n’a sûrement pas fini de briller sur les pistes d’athlétisme.

Nicolas Bamba


ECONOMIE


Crise économique: le AAA se raréfie sur la planète


Neuf pays de la zone euro sur dix-sept ont vu leur note dégradée par Standard and Poor's, vendredi 13 janvier 2012.

REUTERS/Francois Lenoir/Files


L’agence de notation Standard et Poor's a procédé à une dégradation en série de la dette souveraine des pays européens. La note d'excellence, le AAA, devient une rareté au niveau mondial : l’excellence en matière de finances publiques ne concerne plus que 14 Etats. La France et l'Autriche ont perdu leur note AAA, comme les Etats-Unis en août dernier et désormais le petit groupe des bons élèves - ceux qui obtiennent la note maximum - ne compte plus que 14 pays dans le monde.

Il s’agit de dix Etats européens, plus l'Australie, le Canada, Hong Kong et Singapour. En Europe, l'Allemagne, la Finlande, les Pays-Bas et le Royaume-Uni font partie de cette short-list. Après l'hécatombe que viennent de subir neuf pays membres de la zone euro sur dix-sept, seules la France et l'Autriche peuvent afficher la note immédiatement inférieure, AA+.

L'Espagne, la Slovénie et la Slovaquie n'ont plus qu'un seul A. L'Italie chute en catégorie B, à BBB+. Le Portugal devient une valeur spéculative avec BB seulement et Lisbonne est aussi la lanterne rouge des pays de la zone euro. A cela, il convient d'ajouter que, à l'exception de l'Allemagne et de la Slovaquie placées par Standard et Poor's sous perspective stable, tous les autres pays de la zone euro sont placés sous perspective négative par l'agence de notation qui se réserve ainsi la possibilité de les dégrader encore. reçu l’Oscar du meilleur film et de la meilleure réalisatrice en 2010 pour Les Démineurs («The Hurt Locker»), dispose de ses entrées au Pentagone. Elle avait déjà bénéficié à l’époque de son assistance pour le scénario des Démineurs. Aujourd’hui, le projet de son nouvel opus est en bonne voie. Des acteurs sont souvent cités pour faire partie de la distribution comme Idris Elba ou Guy Pearce. Dernier en date à révéler qu’il est bien en pourparlers avec les producteurs, Joel Edgerton. Le comédien australien âgé de 37 ans a partagé la vedette avec Tom Hardy dans Warrior, film d’arts martiaux à succès. Edgerton n’a encore rien dit du rôle qu’il pourrait jouer dans le film mais, détenteur d’une ceinture noire de karaté, celui du chef du commando des Navy Seal collerait plutôt bien à ses talents de sportif.   


A la Une de la presse française: le triple A perdu de la France


Par Norbert Navarro

L’actualité tient en une lettre ce samedi matin, 14 janvier, la première de l’alphabet, prononcée en trois exemplaires jusqu’à hier, en deux seulement depuis. Si je vous la chantais, cette revue de presse, vous diriez des vocalises. « A A A », puis « A A + ». Et ce ne serait plus du tout la même chanson. Car la dégradation d’un cran de la qualité de la « signature » de la France par l’agence de notation américaine Standard & Poor’s sonne comme une déflagration pour la presse française. « La France perd son AAA : la crise de l’euro s’aggrave », s’exclame Le Figaro en gros caractères noirs. « La France perd son triple A », écrit, cette fois-ci, en rouge, Le Parisien-Aujourd’hui en France.

Changement de ton, et de style, à la Une de Libération, avec ce surtitre imprimé en rouge : « La France dégradée », placé juste au dessus d’un patronyme qui barre, en noir et en gros caractères, toute la Une de Libé, celui du Président de la République, « S_RKOZY », patronyme auquel il manque, justement une lettre, la lettre A, tombée au plus bas de la Une et couchée sur le flanc, une patte en l’air, comme un animal foudroyé. La presse prend donc acte, non seulement de la dégradation de la note française, mais aussi de la notion de « perspective négative » qui lui est accolée comme du maintien par Standard & Poor’s du triple A de l’Allemagne. Libération n’hésite pas à y voir un « tremblement de terre », estimant qu’il s’agit d’un « camouflet pour le président de la République » (président écrit cette fois-ci avec un « p » minuscule, tandis que la République conserve, elle, son « R » majuscule à la Une du journal). L’Allemagne préservée par l’inflexible agence de notation et, dans le même temps, la France ainsi « sanctionnée », c’est « une double peine pour Sarkozy », martèle Libération. A 100 jours du premier tour de la présidentielle, il s’agit du « pire des scenarios » pour Nicolas Sarkozy enchérit le quotidien. Car en perdant son triple A, la France « s’éloigne du modèle allemand, tant vanté, et se rapproche un peu plus de ce Club Med, moqué, des pays mal notés », étant rappelé qu’en l’occurrence, le « Club Med » est cette expression méprisante qui désigne les pays du sud de l’Europe communautaire en proie au marasme économique comme à la crise sociale).

 

Triple A : A.. A.. A.. hallali politique


C’était inévitable, à l’approche de la présidentielle, les commentaires politiques fusent déjà dans la presse française. Et La Voix du Nord le résume. « Dans la mare politique, ce pavé, lancé par Standard and Poor's, ne cessera pas de provoquer des remous jusqu'à la présidentielle ». C’est « un coup dur pour l’Elysée », reconnaît Le Parisien-Aujourd’hui en France. « Les conséquences immédiates de la dégradation de notre note vont être beaucoup plus politiques qu'économiques, confirme La République du Centre. Nicolas Sarkozy, le Président du triple A devient inévitablement le Président de la dégradation de la France », estime le quotidien. « Dans la course présidentielle, cela revient à concourir avec du plomb dans les poches », formule Le Journal de la Haute-Marne. « Une catastrophe, rehausse Le Midi libre. A 100 jours de la présidentielle, l'annonce de la dégradation de la note de la France est un véritable coup de massue pour le chef de l'État ». Le Figaro en convient, mais il complète l’analyse. Cette « dégradation change (…) la nature de la campagne présidentielle en France, souligne-t-il. Les socialistes ont beau jubiler, ils sont concernés au premier chef. Contrairement à ce qu'ils affirment, il n'existe pas d'alternative à la politique suivie par le gouvernement (…) Cela exclut de vendre du rêve aux électeurs et exige, au contraire, d’engager des réformes structurelles trop longtemps repoussées (…) Si tous les candidats s’en persuadaient, Standard & Poor’s aurait au moins servi à quelque chose », soupire Le Figaro.

Triple A : avis de tempête

Reste les effets concrets de cet événement sur l’Etat, les entreprises et les particuliers. Et la presse française semble tâtonner sur ce point ce matin. Il faut dire que ces conséquences sont encore difficilement prévisibles. Et même si la manchette du journal Le Parisien-Aujourd’hui en France promet à ses lecteurs de leur expliquer « ce que va changer cette dégradation », le contenu du journal est surtout marqué par l’emploi du verbe « risquer ». Ainsi, écrit Le Parisien, « Paris risque – en théorie – de devoir emprunter plus cher (…) la perte du triple A risque d’entrainer l’attentisme sur les embauches et l’investissement (…) les prêts accordés par les banques, qui pourraient elles-mêmes être dégradées risquent de connaître un nouveau ralentissement (…) la décision de Standard & Poor’s risque de compliquer les efforts de la zone euro ». Comme le prédit Le Figaro, « sur les marchés, la semaine prochaine risque d’être agitée ». Et cette prévision-là, elle, est tout sauf..risquée.

 

HISTOIRE

Ki-Zerbo, pilier de l'histoire africaine

Cinq ans après la mort du célèbre historien burkinabè, l'écrivain Emmanuel Dongala lui rend hommage.

Je me souviens encore de cette émission «Apostrophes» où pour la première fois Bernard Pivot invitait un parterre d'écrivains africains et pas des moindres. Le programme touchant à sa fin, le présentateur, de façon un peu facétieuse, a demandé à Joseph Ki-Zerbo qui évidemment était du nombre, si sans la colonisation, ce dernier serait aujourd'hui historien. «Historien?», a repris Ki-Zerbo, «Non, petit-fils d'historien probablement!». Voilà tout Ki-Zerbo, l'un des intellectuels africains le plus mésestimé sinon sous-estimé du XXe siècle. Et pourtant, sa contribution à l'élaboration d'un discours africain autonome, «endogène», pour reprendre le mot de ce premier agrégé africain d'histoire à la Sorbonne, a été aussi importante que celle de ses pairs sénégalais plus célèbres comme Léopold Sédar Senghor ou Cheick Anta Diop.

Se réapproprier l'histoire africaine

Pour lui, tout commence et finit par l'Histoire, car ce n’est que par une révision déchirante sur le plan historique que l'Afrique pourra développer une vision nouvelle du monde, «une nouvelle cosmogonie qui soit porteuse de bien de services et de valeurs». Pourquoi une telle révision, une telle rupture? Parce que trop longtemps l’idéologie dominante, européenne essentiellement, a fait croire que l’itinéraire historique de l’Afrique ne commençait qu’avec son contact avec l’Occident  (voir Hegel) et que l’essentiel de cette histoire se résumait à «l’épopée» coloniale du XIXe siècle et aux dernières décennies du XXe siècle où le continent fut décolonisé et mal décolonisé. Pour rompre avec cette vision réductrice de l’histoire africaine et permettre aux Africains «d’avoir un petit contrôle sur leur passé», Ki-Zerbo a commencé son gigantesque travail de pionnier en puisant aussi bien dans l’archéologie que dans les traditions orales. La première somme de ce travail est son ouvrage aujourd’hui devenu un classique, Histoire de l'Afrique Noire: D'hier à demain (1978). Plus tard, il co-dirigera deux ouvrages de la monumentale Histoire de l'Afrique, parrainée par l'UNESCO. Dans ces nombreux articles et ouvrages, Ki-Zerbo n'a cessé d'affiner sa réflexion. Il n'a cessé de clamer haut et fort que pour l'Afrique, développer une pensée endogène était une question de survie; sans cette pensée qui permettrait aux Africains de répondre aux questions «qui sommes-nous, d’où venons-nous?», l’Afrique deviendra sous peu victime d’un «clonage culturel» et qui dit clonage culturel, dit fin de la civilisation. Cette pensée endogène (et son corollaire de développement endogène) ne voulait pas dire s'emmurer et se camper dans le passé; l’on pense notamment au brumeux concept d' «authenticité» élaboré au Zaïre par Mobutu. Mais elle signifiait une pensée «poreuse à tous les souffles du monde» comme dirait le poète Aimé Césaire, et cependant puisant dans ses propres profondeurs tel un arbre qui se nourrit des vents extérieurs mais reste solidement enraciné dans sa terre. Ce n'est qu'alors, qu'une réflexion originale sur l’avenir de l'Afrique pourrait se faire, hors des grilles de lecture dominantes. Ainsi pourraient être repensés l'Etat, le développement, le système éducatif, l’importance des langues africaines dans l'éducation, la place essentielle des femmes et d'autres problèmes fondamentaux. Car il ne faut pas oublier que l'Afrique a été vidée de sa substance et que ce qu'on lui a apporté jusque-là contient beaucoup de vide.

Une pensée à mettre en action

Se réapproprier la totalité de son histoire, considérer les traditions orales comme sources valables d’éléments historiques, élaborer une pensée endogène et j’en passe, toutes ces idées originales à l’époque de leur conception sont aujourd’hui si bien intégrées dans la problématique et le paradigme des recherches et travaux actuels sur l'Afrique qu'elles ressemblent à des lieux communs tant elles semblent aller de soi. On oublie qu’à leur origine se trouve un certain Ki-Zerbo. Mais pour cet historien qui connaissait si bien l’Afrique pré-coloniale, perdre la paternité de ses idées et les voir tomber dans le domaine public ne pouvait être qu’être un objet de satisfaction, tout comme dans l’ancienne Afrique, il n’y avait pas de copyright sur les créations intellectuelles. En 1997, il reçut le Prix Nobel Alternatif pour ses recherches sur les modèles originaux de développement. Ki Zerbo n'a pas été qu'un intellectuel enfermé dans sa tour d'ivoire, il a été un homme d'action jusqu'au bout. Pour lui, la pensée ne pouvait être séparée de l'action et réciproquement. En 1958, jeune homme, il fit campagne pour le «non» au referendum organisé par De Gaulle, c'est-à-dire pour une indépendance immédiate des colonies africaines de la France. En 2003, octogénaire, il battait encore le pavé pour réclamer la lumière sur la mort de son compatriote journaliste Norbert Zongo.

Bien sûr, je ne veux en rien faire l’impasse sur le politicien burkinabè, celui qui avait été éliminé dès le premier tour de l'élection présidentielle en 1978. Mais franchement, entre un Ki-Zerbo président de la République du Burkina Faso et un Ki-Zerbo qui nous laisse en héritage ses travaux et son Histoire de l’Afrique Noire, je préfère de loin le dernier. À l'exception de Senghor peut-être, les intellectuels africains authentiques n'ont jamais réussi dans la politique politicienne et c'est tant mieux pour nous. Leur farouche indépendance, leur rigueur, font qu'ils ne se soumettent pas facilement . Il était donc prévisible que même un homme comme le Burkinabè Thomas Sankara, que par ailleurs Ki-Zerbo qualifie de «patriote sincère et désintéressé, un idéaliste volontariste», se défiât de lui et tout comme César, le fit juger et condamner par un tribunal dit «populaire». Le résultat fut l'incendie de sa bibliothèque de plus de 11.000 ouvrages, une sentence cruelle pour un intellectuel, historien de surcroît. C’est cela, le prix de la liberté intellectuelle. Il disait souvent, «nan lara, an sara»: «si nous nous couchons, nous sommes morts». Le lundi 4 décembre 2006, il ne s'est pas couché, il n'est pas mort, il a tout simplement rejoint l'Histoire. Mon plus grand regret c'est de ne pas avoir eu la chance de rencontrer, avant son départ, cet homme qui se situe d’emblée parmi les plus grands historiens et théoriciens que l’Afrique noire ait donné au monde.

Emmanuel Dongala est écrivain et professeur. Son dernier roman, Photo de groupe au bord du fleuve (Actes Sud, 2010) vient d’obtenir le Prix Kourouma 2011.

Peut-on qualifier l’esclavage de génocide ?

Généralités...

Les arguments invoqués pour prétendre que l’esclavage n’était pas un génocide, lorsque nous prenons le temps de les analyser, nous découvrons qu’ils sont en réalité largement évasifs, tandis que les chiffres démontrant le contraire sont eux, cinglant.

1- Les plantations n’étaient pas des camps de concentration : est-ce une affirmation fondée ?

Dans leurs ouvrages, nombreux sont les idéologues occidentaux qui affirment que les plantations de cannes à sucre de l’époque esclavagiste, ne peuvent être comparées à des "camps de concentration", tout simplement parce que la politique de natalité y était encouragée contrairement aux camps allemands où la mort était la seule issue. On reconnait là, la patte des membres du fan Club d’Eric Zemmour ! D’autre part, vu que les propriétaires avaient besoin de leur main d’œuvre servile pour assurer leur cadence de production, ils avaient l’habitude de prendre soin de leur esclaves, tant sur le plan de la nourriture que des soins. Cependant, que constatons-nous ? En y regardant de près, chiffres à l’appui, certains prennent leurs rêves pour la réalité.

2- Les plantations étaient bel et bien des camps de concentration !

Les données relatives aux plantations de la Guadeloupe révélées par l’enquêteur Lasserre, montrent qu’en 1671, il y avait sur 1513 couples possibles, 0, 71 enfants et plus d’un siècle après en 1790, on en était encore à 0,80 enfant par couple possible.

Pour la Martinique, Gabriel Debien montre qu’en 1763, il y avait 0,57 % de femme âgées de plus de 17 ans ayant un enfant de moins de 6 ans.

Pour Saint Domingue, le même auteur révèle que de 1741 à 1772, sur une plantation de 120 esclaves, il n’y a eu que 2 enfants par an. Après, même avec 50 esclaves de plus, le nombre était resté le même.

Sur une autre plantation de 150 esclaves, on a noté 6 naissances en 1787, 5 en 1789 et un seul en 1790. Ainsi, on le voit bien, les colons français n’ont jamais encouragé la natalité pour éviter de réduire leur profit et les seules plantations où la natalité a été quelque peu prise en considération sont celles des.... pères Jésuites, dominicains ou autres venus soit-disant évangéliser les Nègres. Ces données sur la natalité ont été encore soulignées le Marquis de Fénelon en Guadeloupe et en Martinique. Il constata aussi que c’était le seul avantage que ces plantations "religieuses" accordaient à leurs esclaves. On est très loin du catéchiste !

Ainsi, le taux de fécondité des femmes a été particulièrement mis à mal, en raison des conditions de vie inhumaine, sur les plantations. Selon l’étude de G. Debien, peu de femmes parvenaient à être fécondes et les colons préféraient acheter en permanence de nouveau captifs plutôt que d’encourager la création de familles. Enfin, la dure réalité est que les quelques femmes enceintes l’étaient souvent des colons eux-mêmes, car le viol des femmes esclaves était l’un des traits marquant de la plantation.

3- L’esclavage des Noirs est donc aussi un Génocide !

C’est le point le plus discuté du débat car par «  Génocide » on sous-entend une "extinction raciale" immédiate et massive. Or, la véritable question est la suivante : Quelle est légitimement la durée d’extinction en dessous de laquelle on ne reconnaît pas l’aspect génocidaire d’un Crime contre l’humanité ayant fait plus de 200 millions de victimes [1] ? 5 minutes ? 50 minutes ? 5 ans ? 50 ans ? En réalité, il n’y a aucune durée, seule compte l’issue finale.

Par exemple, si on tient compte des données chiffrées relatives à l’espérance de vie que l’enquêteur Gabriel Debien nous a dévoilé à propos des plantations françaises de St Domingue (Haïti), on découvre ceci :

o Sur la plantation Cottineau, 58 % des esclaves achetés en 1773 étaient décédés en 1774,

o Sur la plantation Constand, 51 % des esclaves achetés en 1764 étaient mort en 1767,

o Sur la plantation Grandhomme, 5O % des esclaves achetés en 1764 étaient décédés en 1768.

o Sur la caféière Guiton, on a 32 % de morts entre 1767 et 1768.

On constate alors que pour les plantations de :

o Cannes à sucre, en l’espace de 2 à 8 ans, 100 % des esclaves achetés à un moment x, avaient déjà rendu l’âme,

o Café, en l’espace de 3 à 4 ans, 100 % des esclaves achetés à un moment x, avaient rendu l’âme.

N’a-t-on pas ici, la preuve formelle qu’il s’agit bien d’un génocide calculé combinant les aspects suivants : o Kidnapping d’enfants appartenant à un groupe ethnique, o Altérations physiques et mentales portés à un groupe ethnique précis, o Atteinte à la personne humaine, o Altération de la fécondité féminine naturelle et des naissances, o Meurtre programmé d’individus utilisés comme « bêtes de somme ».

5- En conclusion...

En Mai 2006, le prof. Steven Han proclamait dans le Monde Diplomatique, pour masquer l’aspect génocidaire des plantations sucrières, que : « Les plantations de cannes à sucre n’étaient pas des abattoirs : elles fonctionnaient selon un système de travail fondé sur l’exploitation et l’oppression, auquel les esclaves s’adaptaient et contre lequel ils luttaient tout à la fois ». Mais en disant cela il se contredisait lui-même, car préalablement il avait consigné sur la même page, dans un passage relatif à l’économie sucrière, que : «  L’économie sucrière réalisait alors des bénéfices considérables et les planteurs estimaient moins coûteux de faire travailler leurs esclaves jusqu’à l’épuisement et d’en racheter pour remplacer ceux qui succombaient que d’encourager leur reproduction naturelle ».

Donc Echec et mat aux idéologues !

Vie, Santé, Force & Unité !!!

ACTUALITES

MAITRE GUY HERVE KAM A PROPOS DE L’AFFAIRE GUIRO : "Le président du Faso est engagé dans tout sauf dans la lutte contre la corruption"Faso est engagé dans tout sauf dans la lutte contre la corruption"

 

Guy Hervé Kam est avocat à la cour. Se prononçant sur l’affaire Ousmane Guiro, il explicite les chefs d’accusations qui pèsent sur ce dernier, évoque quelques directions dans lesquelles le dossier pourrait évoluer et fait une appréciation de la volonté politique de lutter contre la corruption au Burkina.

"Le Pays" : Maître Kam, en tant qu’avocat, quelle a été votre première réaction à l’arrestation de Ousmane Guiro ?

Maître Guy Hervé Kam : J’ai eu une réaction à deux niveaux. En tant que citoyen du pays des Hommes intègres, c’est une grande honte que j’ai ressentie de voir que des compatriotes avaient deux milliards de F CFA dont ils n’avaient pas besoin. Ma réaction en tant que juriste, c’est de penser à la suite judiciaire que cette affaire peut avoir, compte tenu de la complexité du domaine dans lequel l’on se trouve et de l’état de notre justice. Au début de l’affaire, on parlait de concussion et de détournement de deniers publics. Aujourd’hui, on parle de présomptions graves de corruption, de blanchiment de capitaux, d’enrichissement illicite. Que désignent ces termes et pourquoi ces chefs d’accusation ont évolué ?

Le détournement de deniers publics est une infraction qui vise une catégorie de fonctionnaires à savoir ceux qui sont dépositaires de deniers ou de biens publics. Si ces fonctionnaires détournent ou dissipent ces deniers ou biens publics, ils sont passibles de détournement de deniers publics. Comme elle, la concussion est une infraction particulière qui ne s’applique pas à tous les fonctionnaires mais à ceux qui peuvent par leurs fonctions, être amenés à percevoir des droits ou des taxes pour le compte de l’Etat, notamment les douaniers ou les fonctionnaires des impôts. Si un agent de cette catégorie perçoit du contribuable une somme indue, il est alors passible de concussion. On ne peut poursuivre quelqu’un pour concussion qu’en faisant la preuve que l’agent a perçu plus sur des droits qu’il ne devait percevoir ou des droits qu’il ne devait pas percevoir. Cette preuve est difficile à établir au tout début de la procédure. Pour ce qui concerne le détournement de deniers publics, il faut que les enquêtes permettent de savoir si l’intéressé avait des deniers publics à sa disposition, qu’il les a affectés à une autre destination ou qu’il les a tout simplement dissipés, pour pouvoir l’établir. A voir la manière par laquelle la procédure a commencé, en tout cas d’après les informations dont nous disposons, ce n’est pas une enquête administrative qui a permis de savoir que l’intéressé, en tant que directeur général des douanes, a fait des malversations. Il s’est agi plutôt de dépenses somptuaires de la part de jeunes qui ont conduit à découvrir de l’argent et de remonter à l’intéressé. A partir de ce moment, il est, à ce stade, prématuré de dire que cet argent provient d’une perception irrégulière des droits de douanes ou détournement des deniers publics que monsieur Guiro avait à sa disposition et dont il aurait abusé.

C’est donc tout à fait compréhensible qu’à ce stade de la procédure, les inculpations aient changé vers des inculpations plus simples à établir. Quand on parle de corruption par exemple, c’est une infraction qui consiste pour un fonctionnaire à demander ou à accepter des dons ou présents ou l’argent pour accomplir ou refuser d’accomplir un acte de sa fonction. Dans le cas présent, on peut se dire que les revenus normaux d’aucun agent de la fonction publique burkinabè ne peuvent lui permettre d’avoir deux milliards de F CFA. Et donc, si vous avez deux milliards, vous avez probablement sollicité ou accepté des dons pour accomplir ou refuser d’accomplir les actes de votre fonction. C’est plus facile, à ce stade, de présumer que les sommes proviennent de faits de corruption et l’information judiciaire visera à les établir ou à infirmer cette présomption. S’agissant de l’enrichissement illicite, c’est encore plus difficile car cela suppose qu’un agent s’est enrichi en se servant des biens de l’Etat. Cela voudrait dire que les deux milliards de F CFA proviendraient des caisses de l’Etat ou de l’utilisation d’autres biens de l’Etat pour se les procurer. Cela me paraît déjà plus compliqué que la corruption, mais ces deux infractions sont bien envisageables au stade actuel de la procédure. Le blanchiment de capitaux lui, est une infraction qui, bien qu’envisageable, suppose beaucoup d’autres recherches à mener car il suppose que l’argent trouvé a une origine délictuelle ou criminelle. Si l’on établit l’origine frauduleuse de ces deux milliards de F CFA, il sera alors aisé d’établir le blanchiment. Sauf que s’agissant probablement de la même personne, il y a de fortes chances que les éléments du blanchiment soient eux-mêmes des éléments constitutifs de la première infraction. Dans ce cas, le juge utilisera une seule qualification et alors on ne pourra pas retenir en même temps le blanchiment et l’enrichissement illicite, mais une seule de ces infractions.

Le bruit court que les deux milliards de F CFA pourraient être le fruit de certains cadeaux ou avantages liés au poste de directeur général qu’occupait Ousmane Guiro. Est-ce que cela pourrait être un moyen de défense ?

Avec tout le respect que je dois à mes confrères qui auront la charge de la défense de Ousmane Guiro, j’espère que cela ne sera pas utilisé pour la défense parce qu’il y a des avantages liés à une profession. Il semble que les douaniers ont ce que l’on appelle les fonds communs qui sont en réalité des ristournes que l’Etat leur donne sur la base de leur activité. Mais ce sont des avantages légaux dont l’origine peut être prouvée. Par contre, tout autre avantage serait indu. En tant que directeur général des douanes, si l’on reçoit des cadeaux pour accomplir ou refuser d’accomplir un acte de sa profession, comme accélérer une procédure, lever une pénalité, etc., c’est de la corruption. Car ce n’est pas en changeant le terme de cadeau en don ou vice-versa, que l’on passera d’infraction à acte légal. Dans ce genre de cas, l’infraction pourrait être retenue sauf s’il n’y a pas de volonté de le faire. Il y a des éléments pour distinguer un cadeau d’un acte de corruption. Le premier élément, c’est qu’un cadeau n’est jamais discret. On ne se cache pas pour faire un cadeau. A partir de ce moment, l’argent reçu en cadeau ne doit pas être caché non plus. Le second élément, c’est que le cadeau n’est pas interessé. Pourquoi deux milliards de F CFA en cadeau à Ousmane Guiro et non à vous et moi ? Si l’on fait un cadeau au DG des douanes, c’est qu’en raison de ses fonctions, il a le pouvoir d’accorder ou de réfuser des facilités dont on veut profiter. Cela signifie que les dons qu’il reçoit sont intéressés, contrairement aux cadeaux qui sont désintéressés.

Quels pourraient être les moyens de défense de Ousmane Guiro et dans quel sens la procédure pourrait évoluer ?

Ousmane Guiro et ses conseils seront maîtres de leur défense. Ce que je peux dire par contre, c’est que le juge d’instruction qui est actuellement en charge du dossier, a les outils nécessaires pour édifier le peuple burkinabè sur les tenants et les aboutissants de cette affaire. La tâche ne sera pas facile d’établir les faits compte tenu de la faiblesse de notre législation. Cela ne signifie pas que celle-ci ne permet pas de punir. Mais si l’on applique la loi actuelle dans une interprétation favorable à la lutte contre la corruption, cela peut constituer un précédent intéressant. Ce que nous pouvons craindre, c’est que le droit ne soit pas interprété comme il se doit, tout simplement par manque de volonté politique pour réprimer vraiment la corruption.

Justement, à votre avis, cette volonté de combattre la corruption existe-t-elle au Burkina ?

De manière catégorique, je dis non pour la simple raison qu’on est en train de se tromper gravement sur ce qui se passe. Le Premier ministre a affirmé que le gouvernement serait désormais impitoyable avec les agents corrompus, si des preuves existent contre eux. A analyser ces propos, on a l’impression que pour qu’il y ait des preuves, un agent de la fonction publique devrait avoir des cantines d’argent chez lui. On peut aller plus loin en pensant qu’au lieu d’avoir deux milliards de F CFA dans des cantines, si Ousmane Guiro avait 10 villas de 200 millions de F CFA à Ouagadougou, on aurait considéré qu’il n’y a pas de preuves. Car, aujourd’hui, il y a des fonctionnaires d’un niveau plus bas que celui de Ousmane Guiro qui ont de tels biens à Ouagadougou. Cela n’est pas considéré comme une preuve et pour moi, c’est un manque de volonté politique. Lorsqu’on observe la scène burkinabè, on se rend compte que le président du Faso est le premier supporter des Etalons, le premier engagé dans tout sauf dans la lutte contre la corruption. Cela aussi traduit un manque de volonté politique. Je voudrais qu’à partir de cet élément, le président du Faso dise clairement que la récréation est terminée et qu’il fera de la lutte contre la corruption une priorité de ce mandat. Il pourrait, par exemple, instruire, par son ministre de la Justice, tous les procureurs généraux, prês les deux cours d’appel du Burkina de faire de 2012 une année mains propres. A partir de ce moment, la volonté politique sera clairement affichée et je vous assure qu’on découvrira beaucoup de choses.

A vous écouter, vous semblez pessimiste. Pensez-vous que l’affaire Guiro ne sera qu’un feu de paille ?

Il ne s’agit pas de dire que le cas Guiro sera un feu de paille. Toutes les études en matière de lutte contre la corruption le prouvent : lorsque celle-ci atteint le stade systémique, c’est-à-dire qu’elle n’est plus un fait individuel d’un agent isolé mais un comportement généralisé, la sanction d’un seul agent, même convaincu de corruption, ne suffit plus, parce que ce dernier n’est qu’un maillon d’une chaîne. Si on l’enlève de la chaîne, le système le remplace immédiatement et la corruption continue. Au Burkina, il y a bien longtemps que la corruption a atteint le stade systémique. Il faudrait alors pour la combattre une politique globale de lutte.

Quelles mesures le gouvernement pourrait-il prendre pour limiter les possibilités de corruption au niveau de certains fonctionnaires ?

Une mesure importante dans la lutte contre la corruption serait de réduire le pouvoir discrétionnaire que certains agents ont dans les prises de décisions en matière de deniers publics. Par exemple, les douaniers et les agents des impôts ont le droit de transiger sur les amendes infligées sur les droits à percevoir. Il faudrait faire en sorte qu’une telle décision soit prise à un niveau où un seul agent ne peut pas marchander son pouvoir de transaction. Ensuite, il faut donner un sens à l’obligation de déclaration des biens qui pèse sur certains agents en rendant publiques leurs déclarations, à commencer bien sûr par le chef de l’Etat en personne. Enfin, il faut que la justice se réveille et qu’elle arrête de faire croire au peuple qu’elle n’a pas les moyens légaux pour lutter contre la corruption. Avec les textes que nous avons, je vous assure qu’une justice indépendante et courageuse peut faire beaucoup de choses dans le sens de la lutte contre la corruption.

Le Pays


A la Une : l’affaire Kieffer

 

Par Norbert Navarro

Annoncés initialement pour mardi ou mercredi de cette semaine qui s’achève, c’est finalement hier qu’ont été connus les résultats du test ADN pratiqué sur le squelette exhumé dans l’ouest de la Côte d’Ivoire. Ce n’est pas celui de Guy-André Kieffer, journaliste franco-canadien disparu à Abidjan en 2004. « L’expertise ADN est négative », titre sobrement le quotidien gouvernemental Fraternité Matin. Même concision du journal Le Patriote. « Le squelette exhumé en Côte d’Ivoire n’est pas celui de Kieffer », énonce le quotidien proche du président Alassane Ouattara, qui se contente, ce matin, comme plusieurs de ses confrères, de reproduire une dépêche d’agence, ce qui explique la référence superfétatoire à la « Côte d’ivoire » dans son titre. La presse ivoirienne indépendante est un peu plus diserte. Ainsi, pour Soir Info, « cette annonce déçoit l’entourage de Guy-André Kieffer qui avait pensé que cette dépouille (…) était bien celle du journaliste ». Le journal L’Inter, lui, s’enhardit à formuler qu’avec ce squelette exhumé, le juge d’instruction français Ramaël a « ramassé de faux os ». « Ramaël a encore échoué », enchérit, en Une, L’Intelligent d’Abidjan. Affaire Kieffer : le mystère « Gorge profonde ». Mais les commentaires les plus virulents, c’est dans Le Nouveau Courrier qu’on peut les lire ce matin. A la veille de la découverte de ce squelette, le journal, en effet, avait publié les dires d’un mystérieux témoin anonyme se prétendant issu des ex-rebelles ivoiriens et s’accusant d’avoir participé à l’enlèvement et au meurtre de Guy-André Kieffer. Baptisé « Gorge profonde » par le journal, cet homme refait surface ce matin dans Le Nouveau Courrier pour accuser le juge français qu’il prétend avoir rencontré à Abidjan. « Ramaël ne joue pas franc-jeu », accuse-t-il dans les colonnes du quotidien. Pour Le Nouveau Courrier, en tout cas, cette affaire de squelette était un « pur montage médiatique (…) un contrefeu devant les révélations faites par "Gorge profonde" (…) dans le but d’accuser le pouvoir Gbagbo. (…) Il fallait donc détourner l’attention de l’opinion ivoirienne et française sur les investigations de notre journal », fustige Le Nouveau Courrier, qui dénonce les « méthodes étranges du juge Ramaël (…) ainsi que des confidences farfelues (…) des témoignages, contradictoires (…) dont le seul point commun est qu’ils accablaient des proches de Gbagbo et qui ont été présentés comme des avancées dans l’affaire. Avant d’être abandonnés ». Proche, comme Le Nouveau Courrier, de l’ex-président Laurent Gbagbo, le quotidien Notre Voie lance, lui, la polémique. « Que vont devenir nos confrères proches de Ouattara, martèle-t-il ? Où vont-ils cacher leurs visages, eux qui, sans avoir attendu les résultats du test d’ADN, comme nous l’enseigne notre métier, se sont engouffrés dans des commentaires puérils et désobligeants en soutenant que le squelette (…) était celui de Guy-André Kieffer ? »

Affaire Kieffer : non-dits

Justement, dans la presse proche de la nouvelle majorité ivoirienne, un journal, crânement, n’entend pas s’en laisser compter. Il s’agit de Nord Sud. « Tout est relancé, contrattaque, en effet, le quotidien proche du Premier ministre et ministre de la défense Guillaume Soro, (…) Ce qui venait conforter l’idée qu’il pourrait bien s’agir du journaliste, c’est le fait que l’endroit d’où les restes ont été exhumés est un fief de l’ancien régime de Laurent Gbagbo. Or, toutes les personnes suspectées d’être à la base de la séquestration de Guy-André Kieffer, sont liées au clan de M. Gbagbo. Les plus dithyrambiques parmi les analystes sont allés jusqu’à faire un lien entre le lieu où a été découvert le squelette et l’ancien ministre et cadre du Front populaire ivoirien (FPI), Paul Antoine Bohoun-Bouabré qui est curieusement décédé, mercredi dernier ». Et, sans le nommer, Nord Sud s’en prend ce matin à un de ses confrères. « Alors que tous attendaient avec impatience, les résultats du test d’Adn, un journal proche de l’ancien régime au pouvoir avait révélé que le squelette (…) ne pouvait pas être celui de Guy-André Kieffer (…) En tentant de démonter, avec promptitude, avant les résultats, la thèse de ceux qui soutenaient que ce sont bien les restes d’un Blanc qui ont été exhumés, les partisans de Laurent Gbagbo donnent les preuves qu’ils en savent plus qu’ils n’ont craché. Ils savent donc où se trouve le journaliste franco-canadien ». Enfin, dans la sous-région, il n’y a guère ce matin que Guinée Conakry Info qui commente cette affaire de squelette exhumé. « Un flop médiatico-juridique. Une montagne qui accouche d’une souris », lance le site internet guinéen, avant de conclure : « on peut imaginer que les Ivoiriens ne sont pas prêts d’accepter qu’une telle bévue puisse se répéter ».

Le franc CFA sera-t-il dévalué?

Partout en Afrique, la rumeur prend de l'ampleur. Le franc CFA serait dévalué au 1er janvier. Info ou intox?

Et voilà que l’on reparle encore de la dévaluation du franc CFA! Comme c’est souvent le cas ces derniers temps, ce sont les difficultés financières et économiques que rencontrent de nombreux pays de l’Union européenne (UE) qui relancent les rumeurs et enflamment le cyberespace africain à propos d’une dévaluation qui serait d’ores et déjà programmée pour le 1er janvier 2012. La question posée est de savoir si la parité fixe qui lie l’euro à la monnaie africaine (1 pour 655,957) se justifie dans une conjoncture économique marquée par un net ralentissement de l’activité en Europe et par de sérieux doutes sur l’avenir de la monnaie unique de ce continent.

La problématique est connue. Les partisans d’une dévaluation estiment qu’elle permettrait d’augmenter les exportations africaines à destination de l’Europe mais aussi de la zone dollar (en dévaluant le franc CFA, on lui permet d’être moins pénalisé par la vigueur, certes relative, de l’euro par rapport au billet vert étasunien). A l’inverse, ses adversaires estiment qu’une telle opération ne se justifie pas. Pour eux, la situation économique et financière des six pays de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) et des huit pays de l’Union économique et monétaire de l’Afrique de l’Ouest (UEMOA) - ces deux zones monétaires utilisant le franc CFA – n’ayant rien à voir avec celle de 1994, date de la dernière dévaluation de cette monnaie.

Propos contradictoires

C’est l’avis de l’économiste Abdourahmane Sarr, président du Centre d'Etudes pour le Financement du Développement Local (Cefdel) à Dakar. «Je ne pense pas qu’il soit nécessaire de dévaluer le franc CFA à ce stade surtout avec des réserves de change équivalentes à sept mois d'importations de biens et services pour l'UEMOA et presque 40 pour cent de la masse monétaire au sens large», explique-t-il à SlateAfrique. Pour autant, cet ancien représentant du Fonds monétaire international (FMI) au Togo et au Bénin précise tout de même que «cela ne veut pas dire que le franc CFA est à son niveau d’équilibre et qu’il n'est pas surévalué».

Lucas Abaga Nchama, gouverneur de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (BEAC) doute lui aussi de la pertinence d’une dévaluation. D’ailleurs, pour lui, il «n’y a pas lieu de penser qu’une dévaluation du franc CFA va avoir lieu». Tenus le 24 novembre à l’issue de la session extraordinaire du comité de politique monétaire (CPM) de la BEAC à son siège de Yaoundé au Cameroun, ces propos n’ont pas pour autant fait disparaître les rumeurs. Et ces dernières ont même été renforcées par Mabri Albert Toikeusse, ministre d’Etat ivoirien du Plan et du Développement, qui a affirmé, le 24 novembre dernier que «la dévaluation n’est pas une catastrophe» et qu’elle pourrait même «générer des milliards (de francs CFA) si elle est anticipée» tout en donnant «plus de valeur aux produits d’exportation entre les pays membres» de la zone CFA.

Modification du statut du franc CFA

De façon générale, Abdourahmane Sarr, est partisan d’une modification du statut actuel du franc CFA. «Je pense qu'il est temps de penser à faire évoluer le régime de change vers quelque chose de plus flexible ce qui pourrait se traduire en une perte de valeur par rapport à l’euro et ou le dollar» explique-t-il en précisant qu'il serait «possible d'obtenir les effets d'une dévaluation sans dévaluer le franc CFA lui-même». Une approche qui passerait par l’introduction de monnaies complémentaires au franc CFA et que, d’ailleurs, l’économiste préconise aussi dans le cas de la Grèce.

«Le Cefdel veut faire la promotion de monnaies complémentaires régionales au Sénégal et en Afrique de l'Ouest comme solutions à la problématique du financement du développement local et permettre aux communautés de base africaines de renaître», explique-t-il. Pour résumer, cette approche propose l’existence de monnaies complémentaires qui pourraient être utilisées, via une institution financière, par les populations «qui ne sont pas suffisamment bancarisées» et qui n’ont donc pas accès au crédit. Ce mécanisme «équivaudrait à une bancarisation sous une forme physique et pourrait stimuler les économies locales» tout en évitant de dévaluer la monnaie nationale.  

La fin d’un lien colonial entre l’Afrique et la France?

En attendant que les propositions d’Abdourahmane Sarr se généralisent, il est difficile de savoir si la dévaluation tant redoutée aura lieu ou non. Mais, comme c’est toujours le cas avec cette question qui revêt un caractère hautement émotionnel en Afrique, le débat sur le niveau de la parité fixe entre l’euro et la devise africaine a plutôt tendance à faire oublier l’essentiel. En effet, ce n’est pas un hasard si les rumeurs à propos d’une modification de cette parité se propagent au moment où l’on doute de plus en plus de la cohésion de la zone euro. A ce sujet, il faut savoir que le franc CFA bénéficie de la garantie de convertibilité du Trésor français. La question est donc simple : quel est l’avenir de cette garantie à l’heure où Paris et Berlin envisagent de nouvelles solutions institutionnelles pour faire face à la défiance des marchés vis-à-vis des besoins financiers (et donc d’endettement) de la presque totalité des pays européens? Quel que soit le mécanisme trouvé, la France réussira-t-elle (le voudra-t-elle) à maintenir cette garantie? L’Allemagne l’acceptera-t-elle? Si, d’aventure, ces deux pays européens arrivent à s’entendre sur une union budgétaire d’ici la fin janvier 2012, qui peut jurer que cela n’affectera pas le statut du CFA ou, du moins, sa valeur par rapport à l’euro?

Perpétuation d’un lien colonial

Du coup, la balle est dans le camp des dirigeants africains. Au lieu de les angoisser, cette incertitude pourrait s’avérer salvatrice. En effet, les pays d’Afrique centrale et de l’ouest pourraient enfin décider d’en finir avec cette garantie de convertibilité du Trésor français qui n’est rien d’autre que la perpétuation d’un lien colonial qui ne dit pas son nom. C’est bien de cela qu’ont conscience tous les Africains qui débattent actuellement de la valeur du franc CFA. Ainsi, la parité avec l’euro n’est rien d’autre que l’arbre qui cache le sujet crucial de l’indépendance monétaire d’une grande partie de l’Afrique subsaharienne.

Akram Belkaïd

 

Faut-il avoir peur d’une dévaluation du franc CFA?

Alors que l'Afrique bruisse de rumeurs sur une future «probable dévaluation», il est important de s’interroger, au-delà des doutes sur la véracité de l’information, sur les effets globaux, positifs et négatifs, que pourrait provoquer une telle mesure.

La rumeur d’une dévaluation du franc CFA, visiblement en provenance de Côte d’Ivoire, s’est propagée sur la toile africaine depuis quelques jours, suscitant de nombreuses inquiétudes et des atermoiements d’Africains de tous bords quant au devenir économique de la zone franc. Si de nombreuses raisons incitent à remettre en doute la véracité d'une telle information (une dévaluation ne s’annonce pas un mois et demi à l’avance même par les biais de fuites), il ne faut pas non plus en surestimer les conséquences. Depuis l'épisode de 1994 et la dévaluation du franc CFA, le spectre d'une nouvelle «dépréciation» de notre monnaie a souvent plané sur les citoyens de la zone franc comme une menace insurmontable. Tantôt vécue comme une forme d’humiliation, tantôt ressentie comme la consécration de notre vassalité vis-à-vis de la France et de l’Europe, la dévaluation constitue pour beaucoup le premier signal d’une récession économique à venir. Il est pourtant bon de nuancer cette position. Si la dévaluation d’une monnaie (on parle en réalité de «dépréciation» dans les systèmes de change flottants) était une maladie dont il faudrait se défaire comme la peste, il y a de fortes chances que le système monétaire international dans sa forme actuelle n'eut jamais existé. Il est d'ailleurs surprenant de voir certains intellectuels réclamer un système de changes flottants et s'inquiéter de manière quasi-épidermique d’une dévaluation pourtant inhérente à ce même système. La variabilité des taux de change monétaires est justement l'instrument qui permet soit de dévaluer soit de réévaluer sa monnaie en fonction de ses aspirations économiques pour conserver ou accroitre sa compétitivité. Et l'actualité économique nous le rappelle: cela fait quelques années que les Chinois font tout ce qu’ils peuvent pour que leur monnaie reste totalement sous-évaluée par rapport au dollar et ce pour doper leur commerce extérieur en dépit des incantations de Washington. Il n’y a donc aucune raison autre que purement idéologique qui justifierait qu'une parité fixe avec l'euro, élevée, figée et constante dans le temps soit le signe d’économies de la zone franc qui se portent bien. L'économiste togolais Kako Nubukpo ne s'y trompe d'ailleurs pas quand il affirme: «Les autorités monétaires de l'UEMOA (Union économique et monétaire ouest-africaine) semblent avoir largement opté pour une logique d'extraversion en développant un attachement viscéral a l'idée d'un franc CFA fort qui signifierait la bonne santé des économies ouest africaines et leur conformité a l'impératif de rigueur macroéconomique.» (L'improvisation économique en Afrique de l'ouest, Karthala, 2011). Maintenant, comme souvent en sciences économiques, il faut savoir apprécier si le remède de la «dépréciation» que l'on veut prescrire à un patient à un instant donné est moins dangereux dans ses effets que la maladie que l’on estime devoir soigner.

Vertus positives d’une «dépréciation» de la monnaie

D'un point de vue strictement théorique, la dévaluation du franc CFA peut être fondamentalement positive pour toute économie. Et elle a deux vertus fondamentales allant dans ce sens: elle rend les produits à l’exportation moins chers (en monnaie étrangère) et les produits à l’importation plus chers (en monnaie locale). Elle a donc vocation à renchérir nos exportations. De manière plus prosaïque, si un industriel français ne souhaitait investir chaque année que 10 euros de bananes sur la récolte du cultivateur de Penja, soit 6 559,57 francs CFA, alors en dévaluant le CFA de 50% et en supposant que le même industriel continue d’acheter pour le même montant d’euros de bananes, notre cultivateur camerounais doublerait son chiffre d’affaires à 13 119,14 francs CFA (20 euros). Cela supposant évidemment que le cultivateur en question ait la possibilité de produire le double de son stock. Le second effet positif d’une dévaluation est qu’elle rendrait les importations globalement plus chères. Par exemple, si l'on achetait des céréales telles que du riz par sac à 10 euros sur les marchés étrangers et que notre monnaie était dévaluée de 50%, il faudrait débourser non plus 6 559,57 francs CFA mais 13 119,14 FCFA pour acheter le même sac de riz. Cette augmentation des prix en monnaie locale aurait tendance à ralentir les importations et jouerait exactement le même rôle que pourrait jouer une mesure protectionniste comme une taxe à l’importation. Les produits importés devenant plus chers, les agents seraient incités à se tourner vers des ressources alternatives produites localement et/ou à développer eux mêmes une industrie permettant de produire les ressources devenues trop chères à importer. La vertu finale étant le développement d’une industrie locale et à terme, un renchérissement de l’emploi. Le troisième élément qui nous parait important, mais dont on ne parle pas souvent car il est actuel et lié à la crise de l’euro, c’est l’effet de stabilisation relatif des recettes d'exportations si l’Europe venait à moins échanger avec le Cameroun à cause de la crise économique qu'elle subit. Si les pays européens entrent en récession, il est possible que les termes de l’échange se dégradent, l'Union Européenne consentant à importer beaucoup moins de produits que les années précédentes. Une vertu de la dévaluation dans ce cas de figure serait alors de permettre aux industriels européens d’acheter les mêmes quantités de produits, pour un CFA dévalué de 50% disons, à moitié prix en monnaie étrangère (euros) tout en permettant aux exportateurs africains de conserver le même niveau de revenus en monnaie locale (CFA). Schématiquement, une baisse des importations en volumes de 50% de produits de la zone franc dans l’Union européenne n'entrainerait pas avec une dévaluation d'un même niveau (ou éventuellement une diversification de nos acheteurs) une perte nette sur les recettes de 50% pour nos exportateurs.

Effets négatifs pratiques d’une diminution de la parité

Concernant ensuite les inconvénients d'une dévaluation, ils sont de deux ordres: l'augmentation de la dette publique et l’inflation potentielle. La dévaluation ferait augmenter l’endettement extérieur (donc en monnaie étrangère) de notre pays. Les encours de notre dette extérieure s'élevant à près de 1131 milliards de francs CFA (1,7 milliard d'euros), cette partie de nos engagements financiers, représentant 65.3% de notre dette publique globale (Caisse Autonome d’amortissement, note de conjoncture de Juin 2011), passerait après une dévaluation de 50% du franc CFA à près du double, soit plus de 2262 milliards de francs CFA (3,4 milliards d'euros). A dynamique économique figée, schématiquement, il faudrait donc que les recettes d’exportations aient gonflé et les importations diminué de manière à générer un montant au moins égal à la dette extérieure actuelle pour parvenir à combler ce différentiel. D’un point de vue pratique, dévaluer notre monnaie (qui revient à «taxer» les importations) n’impliquerait pas non plus une diminution directe et systématique des importations en question: les agents ne réagissent pas mécaniquement à cette «désincitation» à importer. L’effet sur les prix des importations étant quasi immédiat quand l’effet sur les volumes exportés serait progressif, la balance commerciale devrait commencer par se dégrader. Et même à moyen terme, l’efficacité d’une telle incitation à ne pas importer dépendrait du caractère stratégique des produits qui rentrent dans notre pays en provenance de l’extérieur, s'ils sont de première nécessité ou pas, et de notre structure industrielle, si elle permet de procéder ou pas à la substitution à moyen terme des importations par une production locale. Pour le cas du Cameroun, il ne semble pas que ce soit le cas. Notre pays importe des denrées alimentaires qui comptaient pour 15% des dépenses d’importations en 2010. Aurait-il les moyens de se passer, par exemple, des importations de céréales telles que le riz ou le blé ou encore le poisson ? Il est fort probable que non. On aurait donc à faire face à une flambée des prix, donc à une baisse du pouvoir d’achat considérable, précisément au niveau des grands centres urbains qui sont les premiers consommateurs de ces denrées.

Dévaluation de 1994 et retour à la souveraineté monétaire

D’un point de vue purement conceptuel donc, la dévaluation a des effets négatifs et des vertus positives. Comme d’ailleurs souvent en économie: on ne peut avoir la rose sans les épines. Précisons néanmoins que pour la dévaluation de Janvier 1994, il n’est pas totalement établi qu’elle n’ait pas été positive contrairement à ce qu'on entend souvent ça et là. Les articles des économistes sur la question ont souvent apporté des réponses divergentes. Si on ne se fie, par exemple, qu'au document de travail Les effets à moyen terme de la dévaluation des francs CFA des économistes Denis Cogneau et Gérard Collange, la dévaluation de 1994 aura été plus ou moins une réussite en Côte d'ivoire et au Cameroun: «En matière budgétaire et financière, la réussite de la dévaluation du FCFA émerge très clairement, en comparaison d’une alternative d’ajustement réel, surtout les deux dernières années (1995 et 1996). Toujours en comparaison de l’ajustement réel, la dévaluation se révèle dans les deux pays [Cameroun et Côte d’ivoire, ndlr] une mesure sans ambiguïté expansionniste, comme l’avaient déjà constaté Collange et Plane (1994), Bourguignon, de Melo et Suwa-Eisenmann (1995) pour la Côte d’Ivoire, Cogneau, Herrera et Roubaud (1996) pour le Cameroun.» Cela étant, les causes fondatrices (chute drastique des recettes d'exportations et perte de compétitivité, déficit budgétaire important, incapacité de l'État à tenir ses engagements financiers à cause d'un endettement excessif) qui avaient conduit à la dévaluation de notre monnaie 1994, avec des effets diversement appréciés, ont totalement disparu: l’économie camerounaise est dans une dynamique de croissance durable et les problèmes qu’elle rencontre sont foncièrement liés à un déficit de bonne gouvernance qu’il faut rapidement combler. Et en dépit d'une balance commerciale légèrement déficitaire depuis quelques années, malgré les vertus théoriques que pourrait avoir à première vue une diminution de la parité du CFA vis-à-vis de l’euro, rien ne permet actuellement de justifier l'utilisation d'un remède aux effets secondaires aussi peu contrôlables sur la durée qu'une dévaluation dans une économie comme celle du Cameroun, relativement stable face aux chocs conjoncturels. Au final, la question de fond n'est pas tant celle de la dévaluation du franc CFA que celle des circuits de décision qui y conduisent et son pendant, l'arrimage du franc CFA à l'euro (donc sa non convertibilité). Plus fondamentalement encore, il serait légitime de se demander si nos banquiers centraux (la BCEAO,Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’ouest, et la BEAC, Banque des Etats de l’Afrique centrale) doivent continuer de laisser un outil de politique économique aussi important que la monnaie entre les mains de la BCE (Banque centrale Européenne) à Francfort en s'alignant religieusement sur l’unique objectif d'inflation à 2% de cette dernière. Ne devraient-ils pas, en toute logique, retrouver leur souveraineté en s’extrayant du carcan colonial que représente le CFA et en appliquant une politique monétaire en lien avec nos aspirations propres faisant de la stabilité des prix, de la lutte contre le chômage et de la quête de croissance leur principal crédo? La réponse à une telle question est entre les mains de nos politiques.

Yann Yange /Valérie Marin La Meslée


LITTERATURE, CULTURE TIC ET MEDIAS


Où sont passés les philosophes africains?

Rencontre avec le philosophe Souleymane Bachir Diagne qui, entre Dakar, Paris et New York, éclaire de son parcours les enjeux de sa discipline sur le continent.

Présence africaine, tel est le titre de la leçon inaugurale que le philosophe sénégalais Souleymane Bachir Diagne a donnée en cette rentrée aux étudiants parisiens de l’Institut de sciences politiques (Sciences-Po). Le professeur, qui enseigne à la prestigieuse Columbia University de New York, fut lui aussi étudiant à Paris dans les années 70.

Comment devient-on philosophe sur le continent africain?

A l’occasion de la parution du numéro de la revue Critique intitulé «Philosopher en Afrique», Souleymane Bachir Diagne revisite son parcours. Celui d’un élève brillant en sciences autant qu’en lettres, né à Dakar cinq ans avant les indépendances et que la philosophie viendra presque surprendre alors qu’il se destinait plutôt à une carrière d’ingénieur.

Philosophie des mathématiques

Le bachelier arrive en France avec deux lettres d’acceptation dans ses bagages: l’une de l’Institut des sciences appliquées de Lyon; l’autre du lycée Louis le Grand, l’accueillant en hypokhâgne. Souleymane Bachir Diagne hésite… et le hasard s’invite. Il faut dire que les Humanités l’attirent, à l’époque pour des raisons essentiellement politiques : «J’étais à gauche et je ne lisais que du Sartre. En gros… je voulais être un Sartre!» Dans ces années 70, à Dakar, les étudiants n’ont guère de référence en matière de philosophie africaine. D’ailleurs, tous ceux qui sont de gauche refusent jusqu’à cette notion spécifique, au nom d’un universalisme marxiste de rigueur. On ne s’étonnera pas de retrouver le jeune sénégalais à l’École normale supérieure, disciple autant qu’élève de Louis Althusser, qui disait que la philosophie était «la continuation de la lutte des classes dans la théorie». Mais l’agrégé de philosophie n’en a pas fini avec les mathématiques. Il reprend des études en la matière et consacre sa thèse à l’algèbre de la logique autour de l’œuvre du philosophe et mathématicien Georges Boole. (Ses deux premiers livres en sont d’ailleurs issus, dont Boole, l’oiseau de nuit en plein jour, Belin, 1989).

En 1982, il prend le chemin du retour au pays natal, non sans en avoir mûrement pesé l’enjeu. A Dakar, un désert l’attend dans le domaine qui est le sien. Qu’à cela ne tienne, Souleymane Bachir Diagne va créer son département à l’université Cheikh Anta Diop. «Je voulais profiter de mon expérience pour que l’enseignement de logique mathématique, qui est exigeant, soit enseigné à Dakar.» Dès 1986, il forme ses étudiants —qui jusqu’à ce jour le poursuivent. L’un d’entre eux, Yaovi Akapo, signe d’ailleurs l’un des articles de la revue Critique. Abdoulaye Elimane Kane, auteur d’une thèse sur les systèmes de numération, leur consacre le sien. Ce texte peut symboliser la relation que le philosophe entretient à la réalité africaine. La philosophie consiste à se donner des objets que l’on trouve autour de nous et à produire à partir d’eux une réflexion. Dans son article, mon collègue montre que l’humain est au centre des systèmes de numération dans les langues africaines».

Réconcilier l'Afrique

Souleymane Bachir Diagne a enseigné vingt ans durant à l’université Cheikh Anta Diop. Quand il y est arrivé jeune professeur au début des années 80, le débat était encore vif sur l’imposture que représenterait une dite «philosophie africaine», dénoncée notamment par le philosophe béninois Paulin Hountondji. «Je partageais alors ce point de vue mais avec le recul, j’en suis revenu», dit-il. «La philosophie africaine, celle de la force vitale, est la meilleure théorie pour penser l’esthétique africaine. Le travail de Senghor le montre bien.» Là encore, le temps a fait son office. Confronté à ces problématiques, le philosophe a été amené a revisiter des textes, et notamment ceux de Senghor, dont il a cherché à révéler le vrai projet, l’intention profonde (Léopold Sédar Senghor, l’art africain comme philosophie, Rive neuve, 2007). «Je me suis intéressé à lui au bon moment, il était parti du pouvoir, on pouvait accéder à sa pensée en s’étant dégagé de l’idéologie. En 1996, l’université a fêté son 90e anniversaire, et ce moment a marqué la réconciliation de l’intelligentsia avec la pensée senghorienne, la plupart des participants ont dit comment ils s’y étaient d’abord opposés et ce qu’ils y avaient trouvé depuis.» Dans l’enseignement de la philosophie à Dakar, un autre tournant est pris dans ces années 80 à l’université Cheik Antha Diop, à la suite de la révolution iranienne. «Dans notre pays majoritairement musulman, nous ne pouvions pas laisser passer sans réaction la première apparition d’un Islam politique. Avec mes collègues du département de philosophie, nous nous devions de rappeler ce qu’était la philosophie en Islam, une pensée libre et éclairée.» Souleymane Bachir Diagne inaugure cet enseignement, non comme spécialiste universitaire, mais par spécificité familiale, puisqu’il a reçu de son père une éducation à un islam lettré. De ce nouvel engagement viendront de nouveaux écrits, Islam et société ouverte, la fidélité et le mouvement dans la pensée de Muhammad Iqbal (Maisonneuve et Larose, 2001). L’œuvre se constituant chemin faisant…

Si l’on observe la palette philosophique, on remarquera en prenant connaissance de ce numéro de Critique que certains domaines sont plus riches que d’autres en Afrique. «Leur étude se "colore", explique le philosophe, en fonction des réalités spécifiques au continent.» Ainsi de la question de la démocratie avec ce que nous en dit la palabre démocratique, ou encore de la place de la philosophie politique dans les socialismes africains. Il faut y lire le récit de Paulin Hountondji sur le colloque auquel participa Jacques Derrida, en présence du président du Bénin de l’époque, Mathieu Kérékou, pour mesurer ce que furent les rapports entre philosophie et politique sur le continent. Dans sa propre contribution, Souleymane Bachir Diagne pose une question majeure autour de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, en la comparant à la célèbre charte du Mandé :  «C’est la question de l’individu et du collectif qui sont ici posées, et toute cette discussion philosophique sous-jacente n’a pas été abordée dans la rédaction de la Charte africaine. Voilà un enjeu très pratique de philosophie africaine: est-elle plutôt communautariste ou plutôt individualiste?»

Philosopher en V.O.

La question de la langue, présente dans d’autres secteurs que celui de la philosophie, s’y pose avec la même acuité. Quand il parle de langues africaines, Souleymane Bachir Diagne ajoute l’adjectif «endogènes», considérant que le français, l’espagnol, l’anglais et le portugais sont devenues des langues africaines. Comment faire en sorte que ces langues africaines deviennent celles de l’enseignement et de la recherche en philosophie ? «Nous devons produire nous-mêmes des textes en langues africaines, répond le philosophe, et un de mes anciens élèves américain travaille en ce sens à une anthologie de textes de philosophes africains auxquels il a demandé d’écrire des articles dans leur propre langue. Des locuteurs de cette langue sont ensuite chargés de les traduire en anglais.» Au chapitre des langues, une autre question se pose: celle de la traduction même du problème philosophique posé. «Parfois, il change de nature, subit des variations dans des langues qui ne sont pas des langues indo-européennes… Si l’on prend le problème de l’être, est-il équivalent sur le plan universel dans une langue où le mot «être» ne peut pas être un substantif?» L’immense tâche de la traduction (sur laquelle a travaillé la philosophe Barbara Cassin dans son Dictionnaire des Intraduisibles) est au cœur de la question. Et celle de la transcription avec elle. Souleymane Bachir Diagne travaille d’ailleurs à un livre sur ce thème.

«On peut considérer que les langues africaines sont transcrites pour la plupart, avec l’adoption de l’alphabet latin, il reste maintenant à produire massivement dans ces langues. Par exemple, traduire L’Éthique de Spinoza en sérère! Car si les langues sont devenues philosophiques, c’est par la traduction: ce fut le cas pour le latin et l’arabe traduisant la philosophie grecque. C’est ce qui attend les langues africaines, quoique traduction et commentaires aient déjà été faits à partir de l’arabe, les manuscrits de Tombouctou en témoignent: la philosophie grecque est entrée par l’islamisation». La philosophie africaine demeure une exception aux yeux du philosophe par le fait même que son corpus est, et reste majoritairement, oral. Une question comme celle que pose Paulin Hountondji sur la capacité d’une tradition orale de se faire critique d’elle-même alors que la mémoire est attachée à rapporter les choses telles quelles, donne corps à cette «exception africaine». La transcription de La Charte du Mandé (transcrite par Youssouf Tata Cissé) et du Serment des Chasseurs continue de soulever des polémiques, sur lesquelles le philosophe s’est exprimé dans Philosophie magazine avant de le faire plus en détail ici.

Où sont les philosophes africains aujourd’hui?

Souleymane Bachir Diagne, lui, a quitté Dakar pour s’installer complètement aux États-Unis en 2002. Mais il garde des liens étroits avec l’université sénégalaise à travers des séminaires, des directions de thèse pour «continuer à apporter ma pierre à la formation», dit-il. Il appartient surtout, comme la plupart des philosophes africains, au Codesria, le Conseil pour le développement de la recherche en sciences sociales en Afrique, qui s’ouvre depuis quelques années aux Humanités. «Je dis toujours quand on parle de l’exode des cerveaux qu’il est possible que les universités en perdent, mais que le Codesria lui n’a jamais perdu de cerveaux africains!» C’est à la demande de ce réseau actif qu’il écrit actuellement un Précis de philosophie africaine, où il revisite de manière personnelle les grandes questions. Reste que la plupart des philosophes africains sont aujourd’hui domiciliés aux États-Unis, comme le montre The Oxford Encyclopedia of African Thought. La philosophie africaine est de ce fait enseignée sur ces campus. Mais les professeurs passent parfois plus de temps sur le continent africain, tel Mahmood Mamdani, un collègue de Diagne qui enseigne aussi en Ouganda. Souleymane Bachir, lui, opère un retour en France, heureux de «rapatrier par le biais de ce numéro spécial de Critique, les questions de philosophie africaines telles qu’elles se posent à l’heure actuelle». Le philosophe est d’ailleurs de plus en plus présent à Paris. Intervenant régulier à l’université populaire du Quai Branly depuis plusieurs années, il a reçu fin 2010 le prix Édouard Glissant, comme une évidence, tant les rapprochements qu’il établit entre les pensées de Bergson, Senghor et Mohamed Iqbal sont dans la lignée du philosophe du Tout-Monde. Cet ouvrage, Bergson postcolonial, (CNRS éditions) est né de sa série de conférences au Collège de France. Il sera visiting professor à la Sorbonne en décembre et janvier, et viendra entretemps en novembre chercher le prix Dagnan-Bouveret que lui décerne l’Académie des Sciences Morales et politiques. «Je vis plus pleinement mon triangle identitaire, parce je me sens aussi profondément parisien que sénégalais et maintenant américain ». A Columbia, Souleymane Bachir Diagne s’apprête à donner un cours sur l’existentialisme.

«Et oui, je reviens à Sartre!»

Valérie Marin La Meslée

 

Souleymane Diamanka, slameur, peul et bordelais


Dans ses textes poétiques, le slameur franco-sénégalais porte haut sa double culture pour en faire un chant universel.

D'abord la voix, grave et profonde. Souleymane Diamanka, sur la scène du festival Africajarc fin juillet 2011, tient le public en haleine avec ses slams poétiques. Ses textes, en français et en pulaar, sa langue maternelle, rebondissent comme des balles dans un palais tapissé de rimes, tout comme les balles de ce jongleur qui a suivi l'école du cirque avant de se consacrer à l'écriture. Souleymane Diamanka chante sa double culture peule et française. L'artiste slame ses origines peules en commençant par décliner son origine: fils de Boubacar Diamanka et de Djeneba et c'est déjà tout un poème. Son vrai nom est d'ailleurs Duadja Djeneba, «le vœu exaucé de sa mère» en peul. Cette dernière a donné naissance à son fils en 1974, alors que le père, tailleur au Sénégal, était déjà parti en clandestin pour la France où il deviendra ouvrier chez Ford. A l'âge de deux ans, Souleymane, sa mère et ses deux grandes sœurs rejoignent le père, à Bordeaux, Cité des Aubiers.

Tu parleras pulaar, mon fils

A la maison, les enfants sont priés de ne parler que le pulaar. Le français, c'est pour l'école et la vie extérieure. Les parents en profiteront: «nous avons été des professeurs de français pour eux. Mon père faisait mes devoirs en apprenant en même temps que moi.» Chez les Diamanka on apprend les uns des autres et pas les uns contre les autres. Cela ne va pas sans douleur :  «Au début l'interdit était fort. Ne pas parler français à la maison, ce n'était pas évident, confie l'artiste. Mais plutôt que de voir se creuser le fossé entre les parents qui ne parlent pas le français et les enfants qui ne parlent plus la langue maternelle, nous avons tous beaucoup mieux assumé la double culture de cette façon ». Peul avant d'être Bordelais, le jeune garçon parle de cette première appartenance comme d'une main qui l'a caressé depuis la naissance. Il dit avoir été bercé par des contes qui ont formé jusqu'à son subconscient :  «Etre peul, c'est un code de conduite, un comportement, une éducation, des préceptes, des bénédictions qui vous conditionnent. On se reconnaît entre nous quel que soit le lieu où l'on se rencontre, nous ne sommes jamais seuls ». Les mots de sa mère sont pleins de cette poésie qu'il apprendra comme un genre à l'école. Et les phrases de son père, de véritables récits qui l'initient à l'art de raconter. La langue est faite de rimes qu'il va utiliser dans son travail artistique.

En peul, «Cet arbre» se dit «ki lekki»,

«Cette femme», «o debbo».

Tout est rime.

Entre palindromes et holorimes

«Le fait d'avoir une langue maternelle autre que le français donne des facilités. On entend toujours autre chose et cela est toujours d'une grande richesse. Si un Français dit "Atchoum", un Peul entend "Accu um", autrement dit: "laisse-le!"», explique Souleymane, que l'on suit, captivé, dans cette gymnastique linguistique créative dont il fait son miel. Dans les poèmes qu'il écrit dès l'enfance, dans les chansons qu'il compose, toutes les figures de style entrent dans la danse, tel cet holorime: «la peau hésitante/ la poésie tente ». Au festival Africajarc, dans le sud-ouest de la France, il a chanté une nouvelle fois avec son ami polonais slameur John Banzaï avec lequel il a écrit J'écris en français dans une langue étrangère (ed. Complicités), chacun apportant le son de sa langue maternelle aux compositions. De la musique peule, Souleymane utilise aussi les sons du ngoni (violon) en se nourrissant d'une culture que son père transmet à ses enfants sur des cassettes enregistrées depuis leur enfance. Parce qu'il travaille toute la journée et ne les voit pas assez, l'ouvrier a communiqué par ce biais avec ses enfants. Et la pratique s'intensifie quand la fille aînée de Boubakar Diamanka écrit son mémoire sur les Peuls. Elle commence à enregistrer le témoignage de son père, et d'autres, dans la Cité des Aubiers où elle a grandi, et ailleurs. Quand il vivra à Paris, hébergé par sa sœur, Souleymane découvre alors ces cassettes dont le contenu le fascine. «Cette casséthothèque de baaba (papa) raconte tout du village, et de notre culture. On y apprend le nom des saisons et ceux des animaux. C'est un véritable bouquin que mon père nous a laissé, et que je compte bien numériser. J'utilise ce patrimoine dans mon travail ».C'est ainsi qu'est né L'hiver peul, son premier CD, sorti en 2007, où se retrouvent des textes écrits sur une longue période de quinze ans, et où il invite le griot Sana Seydi. Avant de faire le pari de l'écriture, le jeune homme avait répondu au défi de son père qui manie les proverbes peuls comme une philosophie en action de la vie. L'un d'entre eux disait : «Tout ce qu'un homme a fait, un autre peut le faire, la différence c'est "munyal" une notion qui réunit le pardon et la patience ». Fort de ce défi, Souleymane décide d'aller vers ce qui est le plus éloigné de ses capacités: l'adresse, le cirque. Il se forme à cette école, mais l'abandonne au bout de quelques temps, car les mots le rattrapent. Son premier groupe de rap, Djangu Gandhal (qui signifie en quête de connaissance), lui vaut en 1991 un certain succès, notamment les premières parties de NTM, et d'écrire des textes pour Les Nubians, un duo de chanteuses franco-camerounaises. La version américaine du film Les visiteurs utilise dans la bande son, l'un de ses titres, gros pactole de droits d'auteurs qui aide dans les moments difficiles... Un autre proverbe peul, transmis par le père dit: «Dieu aide les gens qui sont bons.»

l’Hiver peul de Souleymane Diamanka par afriktv

La magie des proverbes

«Mon père a cette force des proverbes avec lui, à la fois naïfs, simples, mais d'une grande vérité. Il m'a légué cette force qui m'a permis d'avoir confiance en moi. Je suis monté à Paris, un jour, en misant tout sur l'écriture ».  Au moment où la confiance menace de le quitter, Souleymane essaie un «attentat poétique», cette manière de s'adresser à quelqu'un en lui déclamant un poème par surprise, avant de filer. Il rencontre par hasard l'acteur et scénariste français Jean-Pierre Bacri dans le quartier de la Bastille à Paris, un de ces hommes vers lesquels il avait envie d'aller. Ce dernier, sensible à ce qu'il vient d'entendre, lui donne dans la main de quoi faciliter les semaines qui viennent... Ce geste est salvateur: Diamanka s'installe à l'hôtel, met ses textes sur Myspace. Un producteur les découvre. Bingo! Une grande maison de disques, Universal, le signera. Sortie de L'hiver peul. La confiance a porté ses fruits.

Depuis, le poète tourne un peu partout dans le monde, rêve de retourner aux Etats-Unis où son concert devant la communauté peule de Brooklyn fut un grand moment de partage. Entretemps, il vit d'ateliers d'écriture, de tournages au cinéma, voix off et petits rôles dans Case départ de Fabrice Eboué, ou encore Sabres de Cédric Ibo. Son parcours sous le signe de l'ouverture a été jalonné de rencontres importantes, comme celle de Grand Corps Malade, qui intervient sur son CD, ou encore celle du poète Yvon Le Men, et du festival Etonnants Voyageurs qui l'a régulièrement invité.  «Je suis passé du rap au slam, et je fais la différence entre ce que j'écris pour la musique et les vrais auteurs que je connais. Eux écrivent avec une autre musicalité, celle de la littérature. Cet océan où j'ai envie de me jeter, moi qui suis pour l'instant dans la piscine.»

Retranscrire l'oralité

Dans un documentaire d'Emmanuelle Vial, dont il est l'un des personnages principaux, le slameur raconte qu'il n'a jamais écrit ses textes, mais les a toujours mémorisés. Jusqu'au moment où il a fallu retranscrire de mémoire les textes de son album pour les protéger! Les enfants d'Hampaté Bâ qui sera édité en DVD chez l'Harmattan à l'automne 2011 et dont il est un des principaux personnages, raconte bien ce parcours de l'oralité dans une famille où la bibliothèque se résumait à un dictionnaire et à l'encyclopédie Tout l'Univers. Et si Diamanka père continue de transmettre ce qu'il a à dire à ses enfants sur des cassettes (en attendant de passer au dictaphone numérique), qu'il s'agisse de culture ou de résolution de conflits familiaux, Souleymane, lui, projette d'écrire la biographie de son père de sa naissance jusqu'à son arrivée à la Cité des Aubiers. Et bien d'autres choses encore: un recueil de poèmes et une tragédie inspirée de Shakespeare, mais avec ses mots: Othello du guetto, tragédie greco-urbaine. Sans oublier l'inattendu auquel il reste toujours réceptif. A Cajarc, dans le sud-ouest de la France, où nous l'avons rencontré, il a pris langue avec des Peuls de passage, engrangé un projet avec un dessinateur de BD qui a envie de mettre une de ses chansons en images, et promis à Isabelle Gremillon de faire une lecture d'un livre pour enfants en peul, Kulle Dalle, paru aux éditions Timtimol, que cette dernière diffuse par sa structure nommée l'Oiseau Indigo. Diamanka père a toujours dit à ses enfants: «Oublie ce que tu es, deviens ce que je suis, et ensuite, rajoute ce que tu es par-dessus ce que je suis. Là, j'aurai réussi mon éducation, tu seras plus que moi.». «Mon père est un aventurier venu en France en clandestin, avec cette foi qui ne l'a jamais quitté, j'avance dans la vie comme lui», confie Souleymane, ce jongleur de mots et d'origines.


La suite Office bientôt accessible sur Ipad ?

C'est la promesse d'OnLive Desktop.

Par Victor de Sepausy


A en croire la société OnLive Desktop, la suite Office sera bientôt accessible sur Ipad. En effet, cette entreprise développe actuellement une application gratuite qui devrait permettre aux utilisateurs d'Ipad d'utiliser Office sur leur tablette.  Concurrencé de tous côtés par des offres logicielles devenues pléthoriques, Microsoft ne voit pas d'un très bon œil cette opération qui se passe de son avis. Au contraire, la société OnLive Desktop compte bien se faire un bon coup de pub autour de cette initiative inédite jusque-là.

Un Nobel de littérature pour Rowling ?

Ah, la belle chose que de récompenser une auteure mondialement adorée

Par Nicolas Gary

Les révélations faites sur l'Académie Nobel et l'année 1961 ont attiré l'attention du Huffington Post, qui s'interroge à son tour. Si en cette fameuse année, Tolkien comptait parmi les potentiels candidats, il n'aura finalement pas été retenu. Et l'histoire littéraire montre que, peut-être, les jurés auront manqué de flair. Dans leur recherche de l'excellence littéraire, ces jurés tentent de prolonger de qu'Alfred Nobel avait légué dans son testament : une idée de la plus haute qualité du moment. C'est ainsi que Tomas Tranströmer se retrouvait lauréat pour 2011, avec la polémique qui accompagnait la nomination d'un auteur suédois. Difficile de trancher, sur la qualité, et plus encore, sur ce que peut être « la direction idéale » que doit donner le jury du Nobel de littérature. Quoi de plus compliqué, après tout, que de faire l'unanimité sur des choix qui relèvent en somme du subjectif ? Et que penser de l'idée que le lauréat doit avoir produit l'oeuvre la plus remarquable ? De là la question de nos confrères : qu'a produit JK Rowling depuis toutes ces années, sinon un retour à la lecture pour des millions de personnes, suscité un renouveau pour le livre, les siens, en l'occurrence ? Certes, elle n'a pas stylistiquement révolutionné le monde des lettres, ni inventé un genre, mais en somme, Harry Potter est entré en résonnance avec l'esprit de tous ses lecteurs, devenant un phénomène mondial. Alors, 2012, ou 2013, ou dans les années à venir, un Noble pour Rowling ?

 

 

 



21/01/2012
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